Chapitre 6.

LA RUPTURE officielle m'avait étonnament libérée. J'avais pleuré un bon coup, certes, mais je me sentais mieux. Nous avions enfin mis des termes. Violents, il fallait le reconnaître, mais j'avais l'impression de savoir enfin où j'allais. J'acceptais les sorties bar avec Rochelle, à défaut de m'intégrer durant mes cours. J'avais tenté quelques approches en quémandant un feu mais je me sentais timide, gênée, gauche, presque.

Alors je restais silencieuse. Je sympathisais avec Maxence qui me prêtait ses livres préférés quand je l'informais de mon envie de reprendre la littérature. La pile de littérature gothique s'entassait sur la chaise qui me servait de table de chevet. J'avais laissé Rochelle m'embrasser une fois. Elle avait rigolé, trop bu, décrété qu'il ne fallait plus qu'Augustin soit mon dernier baiser. J'agrandissais mon alphabet des gens que j'avais embrassé avec un R plutôt difficile à trouver, alors ça m'allait.

Je me découvrais un appétit pour les soirées dansantes. J'aimais trop boire pour avoir l'esprit clair, sentir les basses vibrer contre mon coeur, lever les bras bêtement sur de la mauvaise pop. J'aimais m'acheter des petits hauts frôlant l'indécence aux yeux de ma mère, j'aimais déposer des paillettes aux coins de mes yeux, j'aimais sentir le regard des gens posé sur moi, j'aimais me préparer, j'aimais boire la bière la moins chère des bars dansants et dandiner des épaules. J'aimais aller au fumoir et parler avec Maxence, rentrer à trois heures du matin comme si le temps n'existait pas, j'aimais danser comme si je n'existais pas.

C'était une de ces soirées-là. Après quelques mauvaises bières à l'appartement, Rochelle, Charles, Clémentine, Maxence, Hyacinthe et moi étions sorti.e.s. J'avais apprêté un nouveau rouge à lèvres, reçu des compliments de cette bande dans laquelle je me sentais intégrée - même si j'avais toujours un problème avec Clémentine. Je me sentais belle.

C'était une de ces soirées-là. J'avais ma pinte de bière à la main, je laissais la musique me porter, j'accompagnais Maxence au fumoir et elle me paya ma clope. Je me sentais heureuse, pas seulement parce que l'alcool, mais parce que je me sentais bien. Elle avait glissé des barettes dans ses mèches brunes, dégageant son visage. Elle portait un haut résille par dessous un tee-shirt d'anime et je la trouvais déséspérement stylée.

"Alors, ça fait quoi de vieillir ? demandais-je."

Nous célébrions son anniversaire le lendemain, mais elle avait tenu à sortir, pour marquer le coup.

"J'sais pas, ça fait phaser. Ca fait vieux, vingt ans, tu trouves pas ? Et pourtant j'ai l'impression d'être encore une gamine.

- Ouais, je vois ce que tu veux dire. T'as accompli quoi, cette année, alors ?"

Ma soeur avait cette habitude là. Faire un bilan de l'année, de ce qu'elle avait accompli. Ca lui permettait d'appréhender le futur avec fierté, de voir d'où elle venait. Si ça lui donnait la force de se lever le matin, qui étais-je pour juger ? Personnellement, je préférais ne pas dresser de bilan. Je ne faisais pas grand chose, à part ruiner ma vie.

"Pas grand chose, analysa Maxence. J'suis partie à Prague, cet été, c'était joli. J'ai appris d'autres chansons à la guitare.

- Tu joues de la guitare, toi ? T'es un vrai cliché."

La brune ne put s'empêcher de rire.

"J'ai pécho mon ex comme ça. Je jouais de la guitare, tranquille, dans un parc, et elle est venue toute émoustillée, pour me demander de lui apprendre. J'ai trouvé ça tellement fou que j'ai dit oui.

- Vous êtes restées ensembles combien de temps ?

- Un an et demi, à peu près. On s'est séparées quand j'ai emménagé. Elle supportait pas bien la distance."

Maxence ne parlait pas souvent de son ex. Je me demandais si elle était passée à autre chose ou si les souvenirs étaient toujours douloureux.

"Depuis, je joue plus vraiment dans les parcs. Mais j'étais un vrai cliché, à l'époque. La petite frange, les mèches violettes, les docs et les chaussettes hautes...

- T'as des photos ?

- Pleins, mais je préfère crever que de te les montrer.

- Tu loupes mes photos dossiers personnelles, alors.

- Oh non, Estie, pitié, pas du chantage, je vais craquer devant une bouille pareille, moi!"

Je réalisais alors que Charles avait raison. Je plaisais à Maxence. Je l'avais toujours su, à moitié, c'était toujours un peu délicat, de savoir quand une fille draguait où si elle avait juste une conception étonnante de l'amitié. Mais je réalisais ça alors, dans un fumoir, que la brune n'avait pas tant parlé à Charles, qu'elle s'inquiétait dès que mon visage se chiffonnait, qu'elle me complimentait sur mes vêtements, qu'elle me prêtait ses livres, qu'elle me portait particulièrement attention. Qu'elle me glissait des petits coups d'oeils quand je parlais, quand je ne parlais pas.

"Ok, ok, pas de chantage, alors ! capitulais-je, levant les mains dans les airs."

La jeune fille me sourit. Je sentis mon coeur s'accélérer. Je ne savais, là encore, pas tant si elle me plaisait. J'étais juste flattée de lui plaire.

Clémentine arriva alors, se colla à Maxence et commença à se rouler une clope.

"Alors, la vieille, tu passes une bonne soirée ?

- C'est toi la plus vieille du groupe ? demandais-je alors, curieuse.

- Non, c'est Lila ! se défendit Maxence. La meuf de Hyacinthe. Il est où celui là, d'ailleurs ?

- Dans les cuisines du bar, en train de te faire un gâteau d'anniversaire, quelle question, railla Clémentine."

Je ne pouvais pas m'empêcher de ne pas l'aimer. Même si elle semblait drôle, cultivée, intéressante, elle me dérangeait. Dans sa manière de me materner, peut-être. Elle me prenait de haut, comme si j'étais une petite soeur dénichée par miracle.

"Mais du coup, Estie, m'informa Clémentine, c'est genre, Rochelle et moi, les plus jeunes. On est nées le même jour ! C'est fou, quand même, non ? Ensuite, c'est Hyacinthe, ensuite Maxence, puis Lila, mais elle compte pas vraiment, on la voit jamais. Elle est sur Paris, 'scusez nous."

J'étais gênée qu'elle m'appelle Estie. Nous ne parlions pas tant et ça restait assez cordial. Certes, elle m'avait relevée de mon balcon des lamentations la nuit où Augustin m'avait appelée, elle m'avait démaquillée proprement en m'écoutant pleurer, elle m'avait écoutée dire que c'était mon premier amour et que j'avais un trou béant dans le coeur. Elle m'avait dit que ça ne durait qu'un temps, que le vide était temporaire et que j'allais vivre tellement de choses chouettes que je ne sentirais plus le trou énorme dans ma poitrine.

Mais j'étais bourrée, ça ne comptait pas.

Et je ne savais pas si j'étais à l'aise avec mon surnom dans sa bouche.

"Ah ouais, vous êtes jumelles ? Ca m'aurait pas étonnée.

- Deux p'tits diables, commenta Maxence en un grognement."

Clémentine sourit. Elle avait relevé ses cheveux en deux petits chignons au sommet de son crâne, elle avait un maquillage audacieux, elle n'avait pas peur du regard des gens. Peut-être que c'était ça, qui me dérangeait. Sa manière qu'elle avait, de s'en foutre de tout. Sa négligence crâne.

Je repartis danser. J'avais toujours été étonnée, que Charles aime ça. Mais depuis qu'il m'avait confié qu'il dansait seul pour aller mieux, je n'en étais pas tant surprise. Je n'aurais pas pensé qu'il ose danser en lieu public. Même s'il ne dansait pas vraiment. Une fois, je lui avais fait part de mon étonnement, il m'avait répondu "c'est un super lieu pour pécho". Il n'avait pas ramené de filles, pas à ce que je sache. Il s'était plutôt calmé sur sa réputation, et à part Clémentine il ne m'avait parlé d'aucune autre fille.

"J'crois que Maxence veut me pécho, lui confiais-je.

- Ah bon ? Tu crois ? T'as déjà pensé à devenir détective ?"

J'avais envie de lui flanquer un coup de coude mais me ravisais.

"Bah alors, t'attends quoi ? Qu'est-ce que tu fais à me parler ?"

J'haussais les épaules.

"Bah, ça fait flipper, non ? Être avec quelqu'un d'autre ? Et, bah, j'sais pas... j'ai jamais pécho de meufs, moi, je sais pas comment on fait.

- Tu sais, Estie, du cul ça reste du cul. Tu demandes le consentement, tu fais comme tu le sens et tu demandes à l'autre de te guider, c'est pas bien sorcier, tu sais.

- Mais, je sais pas, une fille, ça fait peur ? Si je ruinais tout ?"

Charles haussa les épaules à son tour, désabusé par mes crises existentielles. J'avais peur des filles, parce que je n'avais jamais su leur parler, parce que ça m'intimidait, parce qu'il y avait quelque chose de mystique, peut-être. Je m'étais construite sous le regard des hommes, je voulais leur attention, comme si ça me donnait plus de valeur. J'étais habituée à plaire maladroitement aux hommes. Mais les femmes, c'était différent de tout ça.

Quand je m'étais rendu compte que j'étais bisexuelle, ça n'avait pas changé grand chose à ma vie, dans l'instant ; j'étais en couple avec Augustin et je ne comptais pas changer ça. Je m'éduquais plus à cette culture queer qui n'était plus que celle de mes proches mais aussi la mienne. Je n'avais pas fait d'annonce officielle à mes parents, ne cherchant pas une énième dispute futile avec mon père. Ils allaient encore m'accuser de faire mon intéressante, de copier Domitille.

Mais là, c'était autre chose : je plaisais, et ça me faisait peur. J'avais peur de tout. Mon père avait pris l'habitude de se moquer de moi, quand j'étais petite. "Estelle, de toute façon, t'as peur de ton ombre". Ces paroles résonnaient dans ma tête. Etait-ce ça ? Avais-je peur de mon ombre ? Je ne voulais pas qu'on se souvienne de moi comme ça. Qu'on m'assimile à une gamine effrayée qui n'a jamais rien osé.

Je voulais croquer la vie à pleines dents mais j'avais peur de les casser. C'était ironique, cette dualité, d'avoir peur de ne plus avoir peur.

Je m'avançais au bar, y trouvant Hyacinthe. Celui-ci regardait l'heure sur son téléphone en attendant qu'on prenne sa commande.

"Estie ! sourit-il. Tu passes une bonne soirée ?

- Super, et toi ?"

Il me sourit. Nous n'avions pas grand chose à nous dire, mais je l'appréciais. Je ne savais pas trop en quoi, mais il avait une présence réconfortante et ne parlait pas trop fort. Un vent calme entre les ouragans Clémentine et Rochelle.

"De ouf ! J'vais pas tarder à rentrer, j'dois aller chercher ma meuf à la gare.

- A cette heure-là ?

- La vida loca, répondit-il."

Il commanda deux shots au barman.

"Ta meuf elle vient de Paris, c'est ça ?

- Comment tu sais ?

- Clémentine a balancé."

Le garçon me sourit. Il radiait la bienveillance.

"Ouais, elle vient de Paris. Elle fait une école de maquillage, ça se trouve pas partout.

- Je savais pas que ça existait, les écoles comme ça.

- On trouve de tout, c'est ça qui est fun. Mais bon, ça coûte super cher, quoi."

Il me tendit un des shots qu'il venait de payer.

"Tiens. Ca aide les peines de coeur, il paraît."

Je savais que c'était l'inverse. Que l'alcool m'arrosait les plaies ouvertes et que quand je buvais un peu trop, je pleurais sur les choses que je laissais cachées au fond de moi. Mes angoisses étaient arrosées d'essence et l'alcool y foutait feu, les faisait ressortir et je pleurais plus qu'autre chose.

Mais je ne retenais jamais la leçon et je priais pour que cette fois soit différente. Pour que l'alcool panse mes blessures et que je me réveille le lendemain sans mal de crâne ni peine de coeur.

"J'y vais après cette chanson, me prévint Hyancinthe. Tu pourras le dire aux filles ?"

La soirée ne s'arrêta pas bien longtemps après. Maxence voulait s'économiser pour son anniversaire et il était déjà assez tard. La brune dormait chez nous, ne voulant pas rentrer toute seule. Clémentine tenait le bras de Charles et je n'osais pas demander à mon ami de dormir avec lui. Alors je rentrais, pitoyablement.

"Vous pensez que Clémentine va tomber amoureuse de Charles ? demandais-je.

- Bichette, me taquina Rochelle. Ils sont plans cul, rien de plus. Elle te volera pas ton meilleur copain."

Maxence me répondit avec un sourire timide, gênée par ma question.

"J'sais pas. C'est juste qu'il a cette manie, il traîne avec des filles, et elles tombent amoureuses de lui.

- L'écoute pas, ton Don Juan, il se la pète pour que tu le trouves intéressant. Je t'assure que Clem tombera pas amoureuse."

Je ne savais pas comment on pouvait faire ça. Coucher avec quelqu'un, la même personne, pendant des semaines, sans développer quelque sentiment amoureux.

En rentrant, je me fis un thé. J'aimais ça, maintenant, il fallait croire. Je venais de lancer l'épisode d'une série et m'apprêtait à m'endormir paisiblement, lorsque que quelqu'un toqua à ma chambre.

"Eh, Estie ? T'as pas un tee-shirt de pyjama pour moi ? Rochelle a des lessives en retard."

Ce n'était qu'à moitié étonnant.

"Euh, ouais, j'dois avoir ça."

Sous ma masse de vêtements mal rangée, sans doute. J'avais sérieusement la flemme, mais j'avais peine pour Maxence. Alors je m'extirpais de mon cocon en quête d'un tee-shirt ridicule pour dormir.

"Ca va, t'as passé un bon pré-anniversaire ? demandais-je avec un sourire.

- De ouf. Mais c'était rien, par rapport à demain.

- Ah ouais ?"

La brune me sourit, effrontée.

"J'te spoile ?

- Va-y, j'en crève d'envie."

Je lui tendis un tee-shirt que je n'avais toujours pas rendu à Augustin. Je n'étais pas prête de le reporter, alors je préfèrais le voir s'épanouir dans le tas de vêtements de Rochelle.

"On va faire du karaoké.

- Pitié, je sais pas chanter.

- C'est ça qui est fun."

J'en doutais plutôt, mais Maxence affichait un petit sourire narquois, montrant qu'elle était fière de son coup.

"Je chanterais que si on fait un duo, toi et moi, affirmais-je, voulant faire s'effacer ce sourire suffisant.

- C'était déjà dans mes plans."

Et puis, le silence. Mais elle ne voulait pas partir. Elle regardait le tee-shirt qu'elle tenait. Un vieux tee shirt à rayures qu'il avait depuis que je l'avais connu, que j'aimais bien lui prendre quand j'allais dormir.

"Tu regardes quoi ? s'enquit la brune.

- Desperate Housewives, confiais-je. J'aime bien m'endormir devant.

- Oh, trop cool ! J'peux regarder avec toi ?"

Voyant que j'hésitais l'espace d'une seconde, elle ajouta :

"Rochelle dort et j'ai pas sommeil, mais si tu veux dormir...

- Non, pas de soucis..."

La brune se glissa avec moi sous les draps. J'en étais à la première saison, j'avais commencé au hasard, par ennui, deux semaines de ça. Je savais que c'était une série populaire que Domitille adorait, mais Augustin l'avait déjà vue avec sa mère et n'avait jamais exprimé l'envie de la revoir avec moi.

"Ah ouais, j'avais oublié que Bree était aussi chiante au début, commenta Maxence. C'est qui, ta préférée, toi ?

- Euh... Susan ?"

Pour l'instant, c'était elle qui me paraissait la plus attachante. Elle m'attendrissait, avec ses macaronis cramés et ses peines de coeur. Je m'y retrouvais un peu, à ne savoir s'y retrouver ni en amour ni aux fourneaux.

"Nan ! protesta la brune. Tu dis ça par contradiction, c'est pas possible ! La conne de Susan, vraiment ?

- C'est la première fois que je regarde, avouais-je."

Maxence me regarda avec des yeux ronds.

"Sérieux ? Oh, trop fun, faut trop que tu regardes tout ! On pourra regarder ensembles, si tu veux !"

Aux livres qu'elle me prêtait, la musique qu'elle me conseillait, s'ajoutait maintenant Desperate Housewives. Si j'y croyais.

Et puis, la nuit tomba, l'alcool s'estompa, la fatigue commença à nous cueillir. Je pensais que ça me ferait quelque chose, de la voir dans ce tee-shirt que j'avais connu sur un autre corps ; mais finalement, pas tant que ça. Etais-je un monstre ?

Pour des raisons ergonomiques, nous nous étions rapprochées. Je sentais la chaleur de sa peau, l'odeur de son shampoing qui se faufilait contre moi. Je ne m'intéressais plus trop à ce qu'il se passait sur mon ordinateur, mon coeur palpitait dans ma poitrine. Et si je m'étais fait des idées, et s'il n'y avait rien ? Alors je devais paraître bien bête. Mais cet instant me paraissait coupé du temps, irréel et pourtant, si terrifiant. Je ne parvenais pas à respirer comme je le voulais.

Lentement, tournée vers moi, je la sentis s'approcher. Je crus qu'elle allait m'embrasser, j'attendais, le coeur battant jusque dans mes tempes. Mais il n'y avait que ses cheveux qui ondulaient contre les miens, ses mèches qui se mêlaient aux miennes, sa peau qui me brûlait, son souffle qui s'écrasait contre ma bouche. Nous étions si proches et rien ne se passait. Je crus entendre son coeur battre en unisson au mien. Les secondes s'écoulaient et mon angoisse escaladait.

Alors je rompis le silence en l'embrassant. Elle m'embrassa en retour.

Je me demandais si j'étais prête, je me demandais si je faisais le bon choix, pour elle, pour lui, pour moi, si j'avais oublié Augustin, si j'étais prête, si je ne devais pas arrêter de l'embrasser, parce qu'après tout, je sortais d'une relation, je ne voulais pas lui faire du mal, je ne voulais pas qu'elle s'attache à moi, je n'étais pas sûre de savoir, ni ce que je voulais, ni ce qui était mieux pour moi, et ces angoisses tournaient, tournaient, tournaient, étais-je vraiment prête, vraiment ?

Mais pour contrer mes angoisses, Maxence posa sa main contre ma joue. Je la sentis sourire contre mes lèvres.

Et mon coeur arrêta de tambouriner.

bon a connu vraimmmment mieux en terme d'assiduité #désolée #pardon

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