Chapitre 7 - Réveil


Quand j'ouvris les yeux, j'étais dans ma chambre, chez moi. J'avais très mal à la tête ainsi qu'à mes oreilles. Les volets de la chambre n'étaient pas fermés. Je pouvais voir qu'il faisait nuit dehors. Comment étais-je revenue ? Je n'en avais aucune idée. J'étais allongée dans mon lit, les couettes bien disposées pour me réchauffer. La lampe de chevet diffusait une douce lumière orangée rouge qui donnait un aspect intimiste à la pièce.

Ma chambre n'avait rien de particulier. Les murs blancs étaient couverts d'images que j'aimais regarder, que ce soient des reproductions de peintures célèbres, de photographies reconnues, de mangas ou de mes propres œuvres ; on peinait à distinguer une couleur dominante dans ce fouillis artistique. Mon bureau était lui aussi en désordre, au fond de la chambre, près de la seconde fenêtre. Le bruit de la pluie sur les carreaux de la vitre me berçait.

Je regardais mon réveil et me rendit compte qu'il était déjà huit heures du soir. Que s'était-il passé depuis le matin ? Avais-je rêvé tout cela ? Sur ma table de chevet, une enveloppe avec une belle écriture. Mon nom était inscrit dessus. Je m'en saisis, la retournais et l'ouvrit en déchirant un peu le papier. Je peinais toujours à ouvrir ce type d'enveloppe sans en déchirer l'ouverture. Sur une feuille de format A5 un message était inscrit à l'encre bleue. Une écriture très soignée, très belle, qui me plaisait beaucoup.

« Lorsque tu te réveilleras tu auras sans doute beaucoup de questions. Tu auras tes réponses lorsque tu te seras remise. Je me suis permis de fouiller dans tes affaires et de contacter ton amie Tia. Elle t'expliquera tout. Prends soin de toi. Nous nous reverrons en temps voulu. A très bientôt... »

Bien entendu c'était signé par Aodren. Je devais trouver mon portable et appeler Tia pour savoir ce qu'il s'était passé. D'ailleurs je n'eus pas à le chercher longtemps : il était posé près de la lampe de chevet. En le saisissant, je remarquais que les traces bleues avaient disparu de mon poignet. A croire que j'avais rêvé. Mais il m'avait indiqué que j'aurai des réponses à mes questions par la suite. Pas maintenant. Je devais contacter Tia. Je composais son numéro en me demandant ce que j'allais bien pouvoir lui dire concernant la veille.

- Allo ? Enaya ? Tu es levée ?

- Allo, oui, je viens de me réveiller... Je... voulais savoir comment j'avais atterri chez moi...

Silence au bout du fil. Un soupir. Elle semblait peser ses mots.

- Écoute, j'ai eu un appel d'un homme qui m'a dit qu'tu t'sentais pas bien et qu'il devait t'ramener chez toi. Il m'a dit qu'tu t'évanouissais régulièrement et qu'il pense qu'tes en manque de repos et qu'tud'vrais voir un médecin. Il m'a dit qu't' avais très mal aux oreilles, et qu'tu devais sûrement faire une otite carabinée. On s'est donné RDV avec lui. J'étais avec Naël, qui m'a accompagnée. Ton ami était avec un gars bizarre. Ils parlent pas beaucoup, mais on a bien vu qu't'étais malade. Alors on t'a ramenée chez toi. J'ai pris tes clés dans ton sac. Il t'a portée jusqu' ton lit. Là il t'a mise sous les couettes. Ensuite il m'a dit qu'il fallait qu'j'appelle ta mère pour lui dire qu't'étais pas bien qu't' avais fait un malaise et qu'on t'avait raccompagnée à la maison, qu't'avais besoin d'voir un docteur... Bon chais j'me répète mais c'est comme ça qu'ça s'est passé. Le gars m'a dit d'bien dire qu'on était ensemble hier, qu'on avait veillé et qu'ça d'vait être à cause de notre soirée pyjama. Ils sont partis ensuite. Moi j'ai attendu ta maman avec Naël, et nous sommes partis quand tes parents se sont ramenés. Voilà !

- Je vois.... Je suis désolée de t'avoir causé des problèmes...

- T'inquiète ! Par contre, ch'sais pas qui c'est le gars et j'aimerais bien qu'tu m'expliques ce qu't'as fait hier....

Le moment fatidique arrivait. Je donnais les explications les plus vagues de ma vie. Je ne révélais pas certains détails, comme le fait étrange, mais accepté comme tel, de ses capacités télépathiques, ni les visions cauchemardesques. Par contre je tentais de faire un résumé de ma rencontre de la veille : je lui parlais de Matt qui ne me lâchait pas, que j'avais rencontré Aodren auparavant, que sur ce coup il m'avait sauvé de la déclaration d'amour de notre camarade de classe, que du coup je ne voulais pas rentrer, que je l'avais utilisée comme alibi pour pouvoir passer la soirée avec des amis et qu'on avait papoté, joué de la guitare...

Je savais que le mensonge n'était pas une chose à faire, mais je ne voulais pas qu'elle sache que Aodren, un homme bien plus âgé que moi, sortait avec moi et que j'avais été embrassée par cet homme.

- Je vois. En fait, tu as voulu éviter Matt alors... ?

- Ouais... Imagine, le matin, j'étais tranquille au petit déjeuner en train de faire ma tartine quand il a appelé... En plus, mon pote a pris le téléphone et l'a taquiné ! Tu sais ce qu'ils lui ont fait comme blague ? J'te jure la galère, il lui a dit que j'étais sa petite amie... Du coup Matt s'est énervé... Je sais pas comment je vais gérer le truc ! Genre, ils m'ont sorti que pour se débarrasser d'un mec collant faut lui faire comprendre que la place est prise... Je vais faire comment à la rentrée moi ?

Tia éclata de rire :

- 'Chsais pas comment tu t'débrouilles pour t'mettre dans ce type d'embrouilles toi ! J'vais réfléchir à un topo pour t'sortir d'ce pétrin et j'te dirai quoi faire... En attendant t'étais bouillante de fièvre ! Va voir un doc' et on verra nous après pour ta story ma belle...

- D'accord... Je t'avoue que j'avais été assez fatiguée, souviens-toi, j'avais déjà fait un malaise en classe. J'ai forcé et hier j'ai lâché la pression parce que c'est les vacances et paf ! Tu vois... Bref, je te contacte dès que j'ai des news ok ?

- Ok! Bises !

Je reposais mon téléphone sur ma table de chevet. Je m'asseyais au bord du lit pour mettre mes pantoufles. J'avais froid, je frissonnais, tout en transpirant. En effet, je devais être bien malade. Tandis que je me levais, je repensais à Aodren. Ce doux baiser échangé, quand il me tenait dans ses bras... J'avais envie de le voir. Je me trouvais niaise. Une soirée et je cédais comme ça à un homme ? Quel ridicule fille j'étais ! Je marchais pour aller aux toilettes. En sortant, je tombais sur ma mère.

- Ah,ma fille ! Tu te sens mieux? Tu nous as fait peur tu sais. Demain tu iras voir M.Lafarge. Je t'emmènerai. Laisse moi voir ce front...

Elle posa sa main sur mon front. Dans mon esprit me revint ce moment où il avait fait la même chose, le sourire aux lèvres, son air rassurant et réconfortant qui renforçait son charme me fit rougir rien que d'y penser.

- Tu vas prendre un médicament, tu es bouillante et rouge en plus. Tu n'as pas bonne mine . Tu as faim ?

Sa voix me paraissait déformée et sourde. Mon ouïe était altérée par la maladie.

- Un peu...

Cette journée se termina comme toutes ces journées banales. Ma mère avait cru Tia, elle ne posa donc aucune question. Mon père ne s'intéressa même pas à moi, il devait essayer de se remettre de sa soirée ; quand on vieillit on peine à faire la fête comme les jeunes...

Le lendemain j'étais allée voir le médecin. Une double otite dont une oreille avec un début de perforation du tympan complétée par une asthénie, le tout justifiait les malaises et le reste. Repos forcé. Je passais mon temps dans ma chambre, à dormir, à travailler mes cours ou à lire et à dessiner. Ma première semaine de vacances passa donc rapidement.

Cependant je ne cessais de penser à cette forme fantomatique. Elle ressemblait à une femme. J'entendais sa voix répéter en boucle sa menace. J'étais tellement contrariée par elle que je la dessinais tant bien que mal pour tenter de poser des traits sur ce cauchemar. La contrariété avait aussi pour effet de me couper l'appétit, ce qui conduisait mes parents à souvent se fâcher et à s'inquiéter inutilement pour moi.

D'un autre côté, je n'avais pas osé appeler Aodren. Je ne savais pas quoi lui dire. J'avais l'impression d'être une gamine et lui un adulte.

On se connaissait à peine que je m'accrochais déjà à lui ; il fallait donc le laisser venir à moi.

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