— Un Ravageur ?
— Un appareil de torture.
La franchise de l'homme tenant le petit appareil brillant déstabilisa Sibylle qui ne trouva pas ses mots à travers son esprit toujours enfiévré. L'autre ajouta, devant son manque de réaction :
— Si nous sommes francs c'est parce que nous souhaitons vous laisser un dernier choix. Vous pouvez encore...
Parler. Ça semblait si facile... Sibylle ferma les yeux, gagnée d'un terrible sentiment d'impuissance. Qu'allait lui faire l'appareil ? Mais elle secoua une nouvelle fois la tête, décidée à ne pas trahir son frère et le plan 439...
Alors l'un des hommes s'approcha d'elle et instinctivement elle voulut reculer mais se cogna au mur. Il la ceintura sans difficulté car elle était à bout de force et l'autre vint aider son camarade à la maintenir.
— Arrêtez ! Lâchez-moi !...
Elle tenta encore de se débattre, tandis que ses yeux suivaient du regard ne troisième garde, le plus jeune, qui appuyait sur quelques boutons électroniques pour régler l'appareil métallique.
Elle cria de nouveau :
— Non ! Ne faites pas ça, ne...
Pourquoi les suppliait-elle ? Ils étaient intouchables de toute façon... Mais c'était un réflexe humain, désespéré, auquel elle n'échappait pas.
Le plus jeune des gardes cessa alors de manipuler le petit appareil et le reprit dans sa main droite avant de commencer à s'avancer dans sa direction. Elle fut agitée d'un nouveau soubresaut, tentant d'échapper aux deux gardes qui la maintenait, mais n'y parvint pas.
Un instant l'idée de se transformer la prit avant qu'elle ne se rende compte que cela ne l'avancerait à rien. Son corps était dans une extrême faiblesse, que ce soit sous une forme ou l'autre...
Le garde s'avançait toujours. Il était juste devant elle. La jeune femme crut deviner dans son regard qu'il détestait ce qu'il allait faire et elle eut conscience que ses prunelles prenaient une teinte suppliante.
Elle voulait se battre, mais elle ne voulait plus souffrir. Le garde inspira pourtant un grand coup, avant de lever l'appareil au niveau de la nuque de Sibylle, la regarda, gardant sa main en l'air, avant de demander :
— Vous êtes sûre ? Vous ne voulez pas éviter une guerre civile ?
Pour la première fois une réelle hésitation s'empara d'elle. Le garde avait l'air sympathique, et il n'avait pas tort. C'était bien une guerre que voulaient les enfants d'Astra... Mais alors, plus forte que le plan, plus forte que son frère, ce fut la haine qui grandissait dans son cœur contre la reine qui lui faisait subir tout ceci qui emporta tout.
— Non, lâcha-t-elle dans un murmure rauque.
Etait-ce une étincelle d'admiration dans le regard du jeune homme ? Ou un regret ? Elle n'eut pas le temps de plus y réfléchir qu'il posa l'appareil de métal froid à même la chair nue de son cou.
Le Ravageur avait l'aspect d'une araignée, et Sibylle comprit immédiatement pourquoi.
Un hurlement tel qu'elle n'en avait jamais poussé même au moment où on la frappait le plus fort s'échappa de sa gorge et elle n'entendit même pas le jeune garde dire aux deux autres :
— Ecartez-vous...
Les "pattes" métalliques de l'appareil s'étaient en un instant profondément enfoncées dans la chair de la jeune femme et lorsqu'elle porta les mains à son cou, ce ne fut plus que pour y sentir une affreuse boule d'acier argenté de forme ovale, fixée à son corps de manière irrémédiable.
Une brûlure terrible commença à se répandre dans tout son corps, gagnant ses épaules d'abord, puis sa poitrine, son buste, se répandant dans ses bras, gagnant l'extrême bout de ses doigts...
C'était affreux, insoutenable, et pourtant en apparence il ne se passait rien.
Le corps de Sibylle ne se colorait même pas de rouge et aucune nouvelle marque n'apparaissait. Mais le poison se répandait à une vitesse terrifiante dans tout son organisme sous le regard désolé du garde et de ses deux aides.
Elle l'entendit dire à travers un voile pendant le faible instant où elle cessa de hurler pour retrouver un souffle d'air :
— Laissons là. D'ici une semaine elle devrait parler, demander qu'on le lui enlève.
La porte coulissa de nouveau, et Sibylle tomba à genoux sur le sol, les mains serrées autour de son cou.
— Non... Non ne me laissez pas ça...
Le garde qui le lui avait posé se retourna au moment de sortir, plongeant ses yeux noirs dans les siens, avant de lâcher dans un murmure :
— Je suis désolé. Mais si vous deviez choisir entre une personne et des milliers d'autres, que feriez-vous ? Nous ne pouvons pas nous permettre une guerre...
La porte se referma en coulissant. Après le léger déclic, Sibylle s'autorisa à se laisser complètement tomber au sol. Mais être allongée n'atténuait en rien la douleur, au contraire. Elle persistait, pire, elle la gagnait encore plus.
Le poison diffusé par le Ravageur profondément planté dans son cou sans aucun moyen pour l'enlever commençait maintenant à gagner le haut de ses cuisses.
— Ahhhh !
Oh, si seulement quelqu'un avait pu l'entendre et l'aider, faire que tout s'arrête ! Une semaine, il avait dit qu'elle parlerait dans une semaine ? Elle n'était pas certaine de tenir jusque là. Et en même temps, la douleur ne pouvait pas la tuer, ce qui était presque le plus affreux.
Souffrir, sans que jamais cela ne cesse...
Le poison atteignait ses genoux et elle les serra dans ses mains en se roulant par terre sans rien pouvoir faire d'autre. Ses yeux la piquaient, et les larmes qu'elle avait retenu si longtemps ruisselaient sur ses joues.
Et puis, il y avait autre chose. Bientôt, lorsque le poison atteignit à peu près le haut de ses chevilles et que son corps entier parut uniquement constitué de braises, elle ne résista plus.
Ses yeux changèrent de couleur, elle renversa la tête en arrière et ses griffes commencèrent à rayer les dalles de pierres. Un instant plus tard, ses vêtements volaient en éclat et il n'y avait plus dans la cellule qu'un loup famélique, maigre, au poil terne. Elle haletait, saisissant dans une part de son esprit surchauffé la dernière erreur qu'elle venait de connaître.
Ils l'observaient sûrement derrière les vitres sans teint. Une dernière pensée de ce qu'elle avait été autrefois la traversa alors. Elle aurait aimé voir leurs figures...
Puis, elle oublia tout pour commencer à courir comme une folle dans sa cellule, ses griffes rayant le sol et ses poils bleus électrique se fondant en une masse colorée à travers sa course.
La souffrance persistait, aussi forte, aussi destructrice que sous son autre forme. Et le boîtier, indestructible vraiment, brillait à travers les poils de la bête, fixée à son cou.
***
Quelque part de l'autre côté des vitres insonorisées, quelqu'un poussa un cri. Ils avaient affaire non seulement à la princesse d'Astra, mais aussi à une mutante...
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