Sibylle (Chapitre 31)
Dessin de ewilan53 ! N'hésitez pas à m'envoyer les vôtres si ça vous tente ! ;)
Sibylle dormait. Il faisait nuit et les autres ne lui avaient rien demandé en rentrant dans le dortoir et en la voyant déjà couchée.
Enfin, elle ne dormait pas vraiment... Les yeux grands ouverts, elle repensait à toute cette affreuse journée.
Tout tournait dans sa tête et elle ferma un instant les yeux, s'efforçant de ne plus y repenser sans y parvenir.
Le loup... Carlys et elle avaient réussi à remettre un peu en ordre le dortoir et le couloir mais cela n'était pas tout à fait suffisant. Le jeune homme avait promis de trouver quelque chose à dire au directeur et elle était sûre qu'il trouverait...
Non, ce qui lui faisait vraiment peur c'était de savoir qu'il connaissait maintenant les deux secrets qu'elle voulait cacher plus que tout au monde...
Elle se retourna sur sa mince couchette et étouffa un cri d'impuissance dans ses bras repliés. Elle murmura pour elle-même :
-Oh oncle Saedor... qu'est-ce que vous me manquez !
Elle ferma de nouveau les yeux, lassée, épuisée, et tenta de ne plus bouger pour ne pas réveiller la douleur de ses blessures couvertes pansées de manière rudimentaire, pénuries de guerre oblige, par un infirmier qui n'avait pas posé de question -ce n'était pas son rôle-.
La jeune fille commença alors enfin à s'endormir et ses rêves la ramenèrent au jour où tous les enfants d'Astra avaient gagné les souterrains...
***
-Oncle Saedor ! Vous ne pouvez pas faire ça !
Elle avait couru vers lui et il avait ouvert grand ses bras tandis qu'elle se jetait à son cou en pleurant. Mais Rodolphe l'avait ensuite calmement tirée en arrière et elle s'était détachée de l'homme qui était pour elle maintenant ses deux parents.
Son frère ne pouvait visiblement pas parler sous le coup de l'émotion et il fallut un long moment pour la jeune fille elle-même pour se ressaisir et dire :
-Les ordres retentissent dans tous les hauts-parleurs des villes, des villages, des maisons... c'est... c'est maintenant...
C'était tellement irréel. Sibylle releva un regard suppliant vers son oncle mais il se contenta de lui adresser un sourire triste et d'avancer la main pour lui caresser doucement la joue.
-Ma chérie, cela fait plus de deux ans que je prépare avec vous deux et le conseil le plan 439...
Ce fut Rodolphe qui se rebella alors et murmura d'une voix sourde :
-Rien qu'un plan de dernière extrémité... S'il n'y avait plus aucune autre chance.
Et il leva alors ses yeux plein de larmes lui aussi vers son oncle qui ne put un instant pas répondre mais se contenta d'incliner la tête.
Sybille recula de deux pas, se cogna au mur, et ce fut d'une voix qu'elle ne reconnut pas elle-même qu'elle demanda :
-Alors c'est vraiment fini ? Astra va perdre et comme pour Sagan...
Non, c'était trop dur à imaginer ! Elle voulut continuer mais ne put et son oncle Saedor les reprit dans ses bras tous les deux, les serrant contre lui.
-Rien n'est finit. Soyez forts pour eux d'accord ? Je vous aime... Vous êtes formidables tous les deux. Rodolphe, Sibylle... Vous êtes prêts, n'en doutez pas. Pas vrai petite nièce ?
La jeune fille releva des yeux graves vers lui. Alors seulement elle inclina lentement la tête. Saedor lança alors à un garde resté impassible près de la porte :
-Conduis-les aux souterrains, maintenant. Avec leur cousine.
Puis il se retourna vers eux et leur dit d'une voix faussement calme :
-Au revoir. Partez, partez maintenant !
Les deux adolescents obéirent sans savoir quoi répondre. Rien, malgré les deux années à imaginer cette possibilité, à assister à la construction des souterrains et à tout le reste ne les avaient préparés à cela.
Sibylle et Rodolphe atteignaient déjà la porte de la pièce pour rejoindre le garde lorsque ce fut le jeune homme qui craqua. Il se retourna brusquement et courut vers son oncle, deux larmes roulant sur ses joues :
-Non ! Tout le monde ne peut pas mourir ! Que les adultes descendent aussi, venez... je vous en prie !
Sibylle n'avait pas bougé, tétanisée par une tristesse qui s'emparait de chaque parcelle de son âme et le début d'une véritable terreur.
Mais oncle Saedor répondit en posant ses deux mains sur les épaules du futur empereur qu'il considérait comme son fils :
-Nous en avons parlé. Tu sais très bien que nous ne pouvons pas faire ça... Seuls les enfants ont une petite chance de les attendrir... Je donnerai l'exemple. Tu ne voudrais pas que je fasse autrement n'est-ce pas ?
Rodolphe resta immobile et silencieux un long moment avant d'enfin hocher la tête en détournant les yeux.
-Oui mon oncle.
-Regarde-moi bien maintenant. Tu sais qu'ils me laisseront probablement en vie ? Tant qu'ils ne te tiendront pas, je suis le chef d'Astra. Et s'ils gardent les enfants comme je le pense alors... par précaution ils me garderont aussi. Ne te fais pas prendre Rodolphe, et je resterais en vie. D'accord ?
Le garçon ne répondit rien. Il tourna les talons dans un lourd silence pour rejoindre Sibylle tandis que le garde posait sur lui un regard chargé de larmes. La jeune fille pour sa part devina que son oncle ne pensait pas vraiment rester en vie, c'était un trop mince espoir, comme le reste.
Il avait une chance infime. Peut-être autant qu'eux enfermés là-bas dans quelques heures dans les souterrains...
Personne n'ajouta un mot lorsqu'ils sortirent enfin de la pièce mais Sibylle, la gorge affreusement serrée, se retourna et leva la main, effectuant un léger geste d'au revoir auquel son oncle répondit d'un sourire crispé et triste.
Dans le couloir les attendait une autre garde avec Cyndie. La petite fille courut vers Sibylle qui se pencha vers elle pour la rassurer de quelques mots avant de se redresser et d'avancer à la suite des autres en lui prenant la main.
-Cousine, on va où ? On va où ?
Sybille avait de nouveau envie de se retourner pour courir vers son oncle mais elle contint ses nouvelles larmes et avança à la suite des gardes et de Rodolphe dont le regard brillait comme une flamme dans la nuit, animé d'une haine telle qu'il n'en avait ressentie qu'à la mort de ses parents...
-On ne s'en va pas tout à fait, Cyndie. On va quelque part où nous serons en sécurité, sous terre dans les souterrains...
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