Sibylle (Chapitre 26)
Carlys parut à la fois soulagé et encore plus inquiet. Il posa son arme, s'agenouilla de nouveau près de la jeune fille et tenta de la soulever. Il grimaça sous son poids et lâcha en la reposant à terre :
-Je crois que je serais plus utile en appelant de l'aide... Et il faut que je les avertisse pour ce monstre...
Sibylle parvint alors seulement à relever sa main et emprisonna le poignet du jeune homme entre ses doigts. Elle secoua la tête et murmura avec désespoir :
-Non... Non...!
Carlys dévisagea la blessée quelques secondes sans comprendre. Il sentit alors quelque chose le piquer dans sa chair et détacha la main de la princesse de son poignet pour l'observer quelques secondes. Il étouffa alors un cri d'incrédulité qui dut pourtant se lire sur ses lèvres.
-Du verre ! Des éclats de verre !
Sybille savait que sa vie n'était pas mise en danger par ses blessures. En revanche, tout dépendait maintenant de Carlys... En sachant qu'elle avait tellement peur que son corps menaçait de lui échapper de nouveau à tout moment.
Elle grimaça et voulut répondre mais elle fut alors secouée d'un long spasme. Elle réussit à ne pas bouger mais sentit un picotement désagréable se propager dans ses veines.
Pour sa part Carlys ne savait qu'une chose : il devait aller chercher des secours, et trouver l'animal. Mais des milliers de questions commençaient à fuser dans son esprit.
Où était passé ce fichu loup ? Que faisait Sibylle au milieu de la journée dans ce dortoir ? Pourquoi était-elle couverte d'éclat de verre ? Et cette trace de... de balle sur son côté droit !
C'était... Il n'arrivait pas à comprendre et son esprit s'embrouillait. Il répéta comme à travers un rêve :
-Des secours... Prévenir...
La peur qui traversa Sibylle comme une décharge, de nouveau violente, ne put être contenue par sa volonté. Alors, sous les yeux horrifiés et incrédules de Carlys, tout son corps lui échappa.
La jeune fille se transforma de nouveau, faisant exploser ses vêtements et le museau réapparut de même que la fourrure bleue et noire tachée de sang...
Mais les blessures guériraient vite grâce à son métabolisme... Si Carlys la laissait vivre jusque là. Dans un réflexe le jeune homme s'était redressé et tenait maintenant de nouveau son arme à la main. Mais il ne la pointait pas sur elle, se contentant de la regarder avec des yeux ronds.
-Ton... Tu... Tu as emprunté un livre sur les mutations à la bibliothèque et...
Sous sa forme humaine et pas aussi mal en point, Sibylle n'aurait même pas pris le temps de lui demander comment il savait ça alors qu'elle avait tout fait pour lui cacher le titre de l'écran qu'elle avait pris.
Elle grogna seulement, comme le fauve qu'elle était, mais Carlys ne recula pas. Il se contenta de lui lancer sans bouger :
-N'essaie pas de me faire peur. Je sais très bien que tu es toujours là Sib... Tu était parfaitement consciente dans le bureau du directeur...
Le loup cessa de gronder et recula d'un pas malhabile, titubant. Sibylle n'avait pas eu complètement le contrôle de la situation justement... Mais Carlys la dévisageait toujours, et elle envisagea même un instant de bondir en avant sur sa main pour lui arracher son arme.
Mais elle n'en avait pas la force et elle préférait ne pas lui donner l'impression d'attaquer...
Le jeune homme tentait de comprendre. S'il avait parlé d'un ton si désinvolte c'était pour cacher sa peur, son incrédulité et sa répulsion.
C'était impossible ! Totalement impossible ! La bête puissante tout à l'heure dans le bureau qui avait attaqué... C'était Sibylle ?
Le loup redressa alors son regard vers lui, nerveux, grondant de nouveau, et il vit les yeux lumineux s'attarder sur son arme. Elle avait peur, comprit-il.
Et brusquement il se demanda ce qu'il allait faire. Tirer ? Mais il repassa alors dans son esprit tout ce qui venait de se passer. Un effroyable malentendu, comprit-il.
S'il n'avait pas croisé dans le couloir le loup, jamais Sibylle n'aurait eu à attaquer le directeur pour rester en vie puis à s'échapper en fonçant à travers la porte.
Alors il ouvrit lentement un à un ses doigts, et l'arme tomba au sol dans un bruit métallique. Il lâcha d'un ton de nouveau blasé :
-C'est fou ce que je suis quelqu'un d'ordinaire dis donc... Incroyable. Oh ça va, ne me regarde pas avec ces yeux de lapin effrayé...
Sibylle lui lança un regard noir qu'il comprit très bien puisque son sourire s'agrandit sur ses lèvres.
-Tiens le petit loup est susceptible...
Nouveau grondement de la part de l'animal tandis que Carlys poursuivait :
-... Oui je sais laisse-moi deviner : tu n'aimes pas non plus ce surnom, n'est-ce pas ?
Si Sibylle avait été sous sa forme humaine, elle aurait hésité entre le rire et les larmes. Carlys dut le comprendre car il laissa pour une fois tomber son petit sourire pour se pencher près de la louve blessée et lâcher :
-Agite seulement la tête de droite à gauche ou de bas en haut pour me répondre, ok ?
Sibylle s'efforça de signifier son accord en inclinant brièvement le museau.
-Tu peux te retransformer ?
Elle hésita un instant, chercha au fond d'elle-même, puis finit par incliner la tête.
-Parfait. Et je suppose qu'en super princesse tu as absolument besoin d'avoir l'air correct pas vrai ?
Sybille gronda au mot "princesse" mais hocha ensuite la tête, tout en dévoilant ses crocs. Carlys se releva alors, fit des yeux le tour de la pièce en soupirant puis observa :
-Un vrai carnage ici avec le sang partout et les vêtements déchirés... parce que je suis sûr qu'en plus tu vas vouloir que je garde ton petit secret... Génial, enfin bref.
Il se dirigea alors de son pas nonchalant vers des casiers dans le mur et passa son poignet sous l'un des détecteurs. Tous les casiers s'ouvrirent aussitôt et Sibylle en conclut qu'il avait dû réussir à se faire implanter un passe-partout, même si pour le moment c'était le cadet de ses soucis. Qu'est-ce qu'elle était fatiguée... Pour que ses blessures guérissent il allait falloir qu'elle dorme au moins deux jours entiers...
Mais Carlys lui balançait déjà dans le museau de nouveaux vêtements puis, une fois la tenue volée entièrement devant elle, il haussa les épaules et observa :
-Ne dis pas merci hein surtout...
Devant le grondement qu'il obtint en réponse, il retrouva son petit sourire avant de se diriger vers la porte.
-Je vais dans le couloir. Dépêche-toi si tu veux qu'on ait après le temps de s'occuper des traces dans le couloir et la chambre... C'est voyant des traînées de sang et des marques de pattes de loup.
Il parut alors se rappeler de ses blessures, détail qui était passé au second plan quand il avait commencé à intégrer l'effrayante nouvelle, et il demanda :
-Tes blessures... en tant que mutante, elles vont guérir facilement ?
La louve hocha la tête et le jeune homme parut soulagé, avant qu'il ne quitte effectivement la pièce. Sybille parvint ensuite à se retransformer, et enfila lentement les vêtements qu'il lui avait donné en étouffant à chaque fois un nouveau gémissement. Ce qu'elles pouvaient faire mal ces blessures !
Et sa peur ne l'avait pas complètement quittée. Qu'allait vraiment faire Carlys ?
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