Chapitre 6 : Modifiée
Un bruit assourdissant me réveille. J'ouvre les yeux. Ma chambre me paraît différente. Plus colorée. Le tintement se fait insistant. Une sonnerie de téléphone ! Oui, le mien. Je me lève et regarde aux alentours. Il est dans mon manteau. Je marche, tangente. Je décroche sans regarder qui m'appelle.
- Allo ? dis-je d'une voix endormie.
- Tu n'est toujours pas réveillée à cette heure ?
Une voix d'homme, je me demande qui ça peut bien être. Je ne réponds pas.
-Si j'avais su, je ne t'aurais pas embaucher, me répond-il en riant.
Adriel. Bien sûr.
- Comment vous avez eu mon numéro ?
- Dans les papiers d'administration.
Je ne me souviens plus de ce que j'ai rempli, alors que c'était hier. J'ai un mal de tête oppressant.
- Tu vas être en retard au lycée, je me trompe ?
Je me tourne vers ma porte et regarde l'horloge à côté d'elle. Huit heures. Je commence dans dix minutes.
- Effectivement, et vous vous n'y allez pas ? je demande, curieuse.
Avant qu'il ne réponde, je coince le téléphone sous mon oreille et marche vers mon placard.
- Non, ça fait maintenant un an que j'ai fini mes études.
- Mais vous avez quel âge ?
- Alors ça je ne le dirai pas, secret confidentiel.
- Vous êtes sérieux ? Vous paraissez jeune.
- J'ai sauté une classe au collège. J'étais assez bon élève.
- Apparemment.
Je choisis les premiers vêtements qui me viennent sous la main, c'est à dire un jean clair, des baskets basses blanches et un top fleuri sans manches. Je regarde le temps par la fenêtre. C'est nuageux. J'ajoute une veste en jean à ma tenue.
Je pose le téléphone à côté de moi sur le bureau en m'assurant que le haut parleur est mis.
Je m'attelle à une tâche que je fais souvent. Je prends mes longs cheveux blonds et les ramène sur mon épaule. Je commence à faire une tresse en épi de blé.
- Au fait, au départ, je t'appellais juste pour te dire que tu commençais ce soir à dix-huit heures.
- À dix-huit heures, aussi tard !
- Eh bien oui ma petite, je ne sais pas si tu as pu le remarquer mais nous avons beaucoup de clients le soir.
Adriel est bizarre. Il n'est pas comme hier, il paraît plus détendu. Tant mieux, il est plus agréable comme ça.
- Dix-huit heures, ça marche. Maintenant à moi de vous dire quelque chose.
- Ah oui ? Quoi donc ? me demande t-il, curieux.
- Est ce je peux te parler comme ça ?
- Comment ça ?
- Te tutoyer. Tu n'es pas vraiment mon supérieur donc nous pouvons être amis et nous tutoyer.
- Tu veux être mon amie ? me répond-t-il, taquin.
- Pourquoi pas ? Autant travailler dans de bonnes conditions, non ?
- Tu as raison. Par contre tu vas vraiment être en retard.
J'attache ma tresse avec un élastique et regarde l'heure. Huit heures sept.
- Bon d'accord je te laisse. À ce soir.
- À ce soir, n'arrive pas en retard.
Je raccroche, mets mes affaires de la journée dans mon sac, je mets ma doudoune noire et mets mon sac sur mon épaule.
Je descends les escaliers mais une fois arrivée au milieu des marches, je suis prise de vertige. Mon mal de crâne s'accentue. Je me masse les tempes en descendant. Je respire doucement et sors de chez moi.
Pourquoi est-ce j'ai aussi mal ? Ces derniers jours ont été un calvaire. J'aurai du manger mais j'ai envie de vomir.
Je monte dans ma voiture et je jette un dernier coup d'oeil à l'heure. Huit heures neuf. Pourquoi je suis si douée pour être en retard ?
Je soupire et j'accélère.
Arrivée au lycée à huit heures quinze, il n'y a plus personne dans la cour.
Je passe au secrétariat chercher un billet de retard. La petite vieille de l'accueil me tend le papier en soupirant.
Tu m'étonnes, ça fait depuis la sixième que je suis là, elle m'a toujours connue avec au moins cinq minutes de retard.
Je regarde mon emploi du temps. J'ai français en première heure avec mon professeur principal, génial.
Je vais dans le couloir de français. Je m'arrête devant la porte. Il est encore là, le parfum.
Ça faisait longtemps ! Je soupire et toque. J'ouvre la porte sans attendre qu'on m'autorise à entrer.
- Tiens, voilà mademoiselle Deland !Vous avez un billet de retard, j'espère !
Je lui tends mon billet en regardant sa longue robe orange vif. Elle me pique tellement les yeux que des larmes brouillent légèrement ma vue. Elle regarde le papier que je lui ai donné et se penche vers moi.
- Ne commencez pas l'année avec des billets de retard. Pas cette fois.
J'arrivais tout le temps en retard l'année dernière.
Je hoche la tête et me tourne vers la classe pour me choisir une place. Les couleurs se font moins insistantes, c'est étrange.
Je balaie la pièce du regard mais je m'arrête sur un visage en particulier. C'est le type bizarre avec ses yeux marrons foncés.
C'est pas possible, il me suit partout où quoi ?
Évidemment il ne reste qu'une place, à côté de lui.
Je m'approche de la place lorsque Mme.Jyot reprend la parole :
- Donc je continue, un nouvel élève est arrivé en ville. Je vous présente Hakan. Il a décidé de venir habiter à Laruns car il a pensé que...
Je n'écoute plus la suite. Je me suis perdue dans son regard. Je me ressaisis et m'assois à côté de lui, au fond de la classe. Son regard est si indéchirable. Je le regarde du coin de l'oeil. Il m'observe, sa joue sur sa main. Je pensais qu'il allait arrêter, mais au bout de deux minutes dans cette même position, je craque.
- Quoi ? dis-je en me retournant vers lui.
- Rien, me répond-t-il.
Ses yeux me transpercent sur place. Il me regarde si intensément que je crois que vais détourner les yeux. Mais non, je reste calme à le regarder.
- Pourquoi tes yeux sont aussi bizarres ? je lui demande.
Son regard n'est plus si intense, j'y lis de la surprise mais il la cache rapidement.
- De quoi tu parles ?
- Tu le sais très bien.
Il se détourne de moi et regarde devant lui. Je fais de même.
L'heure passe très lentement. Ainsi que toute la matinée.
La sonnerie a mis fin à ma dernière heure de cours de la matinée.
Je sors de la salle quand je remarque Hakan qui est au bout du couloir. Il est tourné vers moi et me regarde.
Je le regarde dans les yeux.
Après dix secondes, il les lâche et me souris. Un sourire si éclatant que je ne vois que lui. Tout parait flou aux alentours.
Des pas me font sortir de ma rêverie et je découvre Nina derrière moi, toute souriante.
Je me détourne d'elle et regarde dans la direction d'Hakan. Il n'est plus là. Une pointe de regret me transperce, mais disparaît aussi vite qu'elle est venue.
- Alors, qui est ce beau brun qui t'a souri ? me demande-t-elle en souriant.
Je la détaille. Ses cheveux noirs sont éparpillés sur ses épaules. Sa peau est mate avec quelques imperfections. Ses yeux verts foncés sont interrogateurs.
- Un nouveau. Allez, viens je dois te parler.
On a passé tout le midi à parler de nous et à se réconcilier.
À ma première heure de cours de l'après-midi, le professeur d'histoire est en retard.
Je décide de suivre ce parfum qui m'accompagne depuis hier et qui est aujourd'hui cent fois plus fort. Il m'enivre.
Je vérifie quand même si il ne vient pas de mon manteau ou ma carte. Si toujours mais pas aussi fort.
En le suivant, j'arrive exactement devant la salle de mon professeur d'histoire. Elle est tout au fond du couloir.
Je sais même pas pourquoi je suis ce parfum, peut-être parce qu'il sent terriblement bon, ou parce que je suis curieuse, je veux savoir d'où il vient. Je me rends compte que ce n'est pas que de la curiosité, mon instinct me pousse à y aller, littéralement, mes jambes avancent toutes seules. Je me reconcentre sur la salle à plusieurs mètres.
Le couloir est plongé dans le noir, super.
Je cherche l'interrupteur mais je ne le trouve pas. Sinon j'ai juste à marcher tout droit, je peux le faire sans lumière.
Je commence à marcher au milieu du couloir lorsque quelque chose se prend dans mes pieds. Je trébuche et je suis sûre que je vais finir la tête encastrée dans le sol, comme à chaque fois que je tombe, mais non, qu'elle que chose me retient et me remets sur mes pieds délicatement.
Je lève la tête pour voir mon sauveur mais je ne vois rien, il fait toujours noir. Je plisse mes paupières, sûre d'avoir vu un mouvement dans le l'obscurité.
Lorsque d'un coup, je vois deux yeux rouges comme sortis de l'ombre se jeter sur moi. Je me retrouve par terre avec une masse inconnue au dessus de mon corps. Je veux crier sauf je ne peux pas, je suis happée dans ses abysses rouges. Mon coude me fait souffrir, j'ai du tomber sur un livre dans mon sac. Je crois que je saigne.
Mais qu'est ce qui m'arrive ?
Puis, mon ventre s'illumine, surtout deux points au dessus de lui. Une lumière blanche émanent d'eux. Il y a juste assez de clarté pour que je puisse voir que ces deux points sont deux grosses pattes noires. Je lève les yeux de mon ventre pour apercevoir ses points rouges. Quelque chose a changé. Il sont cernés de lignes blanches.
Ne pouvant toujours pas hurler, je ferme les yeux et me concentre sur cette voix qui résonne dans ma tête, que je connais maintenant : il est trop tard à présent, mais ne t'inquiète pas, tu n'avais aucune chance d'échapper à ton destin.
Les deux pattes s'enlèvent mais je n'ai plus de force pour voir où elle vont. Je sens mon énergie qui s'amenuise.
La lumière revient, éblouissante. J'entends des cris dans le lointain, si étouffés que je suis incapable de dire combien il y en a.
Je vois mon professeur d'histoire s'agenouiller près de moi. Il se penche et referme sa main sur une chose à quelques centimètres de mon bras. Un classeur entrouvert, mon sang tombant goutte par goutte sur la page de garde, pour s'étaler sur le carrelage jaune criard.
Je me sens partir. Il y a deux grandes spirales noires qui dansent devant mes yeux. Plus elle bougent, moins je vois.
Avant de m'enfoncer dans le royaume des rêves et des cauchemars, ma dernière pensée va aux yeux rouges. Je les ai déjà vu. Ils étaient dans une partie de moi que je pensais enfouie, que je garde pour moi seule. Un endroit qui ne peut pas être réel.
Dans un cauchemar.
Dans mon cauchemar.
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Merci d'avoir lu mon chapitre ! :)
Vous pouvez me dire ce que vous en pensez dans les commentaires, ça me ferait super plaisir ! :D
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