Chapitre 13 : Nouvelle nature
- Hakan, qu'est ce que je suis ?
J'ai dû répéter cette phrase une deuxième fois, car il ne m'avait pas répondu.
Il lâche un long soupir et s'adresse à Maya :
- Je pense qu'il est temps de lui dire.
Il ajoute d'une voix grave :
- Ça va être long...
Il se rapproche de moi et me regarde droit dans les yeux.
- Je ne sais pas trop comment te le dire.
Il se passe un main dans les cheveux, nerveux.
Et c'est là, que la bombe explose.
- Tu es une sorte de lycanthrope.
L'information s'insinue lentement dans mes pensées, atteignant le cerveau avec difficulté.
- Un loup-garou ?! je m'exclame en posant mes mains sur mes joues chaudes.
Il intervient rapidement, en évitant ainsi de me laisser dans l'incertitude.
- Non, tu n'es pas un loup-garou, il y a des similitudes, mais ce n'est pas la même chose.
Je commence à perdre patience.
J'ai besoin de savoir ! Pourquoi met-il autant de temps à m'expliquer ?
- Je t'écoute ! dis-je d'une voix pressante.
Il se tourne vers Maya, en quête d'un soutien. Elle secoue la tête de gauche à droite, le laissant se débrouiller seul.
Il soupire une énième fois et me déclare doucement :
- Tu es un métamorphe.
Là, je suis perdue. Pour moi, un métamorphe est une personne qui peut changer de forme et de corps.
- C'est à dire ? m'exprimé-je d'une voix posée.
Il reprend la parole rapidement après ma question, comme si il l'avait anticipée.
- Tu es prête à m'écouter ? Et ne m'interromps pas, sinon tu ne vas rien comprendre.
Je hoche la tête et il commence son discours d'une voix claire.
- Les métamorphes, sont des personnes capables de changer leurs apparences physiques à volonté. Sauf que nous, nous pouvons changer notre apparence, mais qu'en un animal prédestiné.
Il me laisse quelques secondes pour assimiler ses informations, et je lui en suis reconnaissante.
Il continue sur sa lancée.
- Toutes les personnes qui habitent ici sont des métamorphes. Il y a plein de sorte d'animaux différents.
Je l'arrête d'un signe de la main et pose une question qui me turlupine depuis que je suis arrivée.
- Comme Sarah ?
Maya entre dans la conversation, en se rasseyant derrière son bureau.
- Sarah ? La chouette ?
Hakan répond d'abord à Maya, puis à moi.
- Oui, et oui Sarah est une chouette.
Avant qu'il ne reprenne son récit, je lui repose une question, qui n'a aucun rapport, mais je dois savoir.
- Comment pouvons-nous tous tenir dans ce rocher ?
Il lâche un soupir d'exaspération.
- Je t'ai demandé de ne pas m'interrompre ! râle-t-il.
Je roule des yeux et attends sa réponse.
- Une amie de Maya, une sorcière, a ensorcelé ce rocher, pour que nous puissions tous loger dedans et nous protéger.
Une sorcière ? Incroyable...
Je sais que j'aurai dû m'arrêter là, mais je ne peux pas, quelque chose cloche dans sa phrase.
- Nous protéger de quoi, Hakan ?
Il esquive ma question, en continuant son récit.
- Tu es donc un métamorphe loup.
- Un loup ! je m'exclame.
J'ai totalement oublié de quoi je lui parlais avant.
Il hoche la tête mais poursuit néanmoins.
- Un peu d'histoire maintenant : tu fais partie d'un peuple vivant à la frontière de l'Espagne : Les Elkatars. Tout a commencé, il y a des milliers d'années, où le premier métamorphe loup est apparu en Espagne. N'arrivant pas à se cacher, il s'est fait remarqué, et prit en chasse par des centaines de personnes. Il a finit par se réfugier tout en haut d'une montagne, là où personne ne pourrait le trouver. Bien des années plus tard, il a rencontré une femme, comme lui. Il se sont installés ensemble dans la montagne, et les années passants, de nouveaux métamorphes les ont rejoint. Voilà comment le peuple s'est formé.
Captivée par son histoire, je n'avais pas remarqué que Maya avait quitté la pièce.
- Pourquoi le peuple s'appelle "Les Elkatars" ?
Ma question le fait sourire.
- Parce que le premier métamorphe loup avait comme nom "Katars". Les personnes qui le pourchassaient ne savait pas comment il s'appelait, ils connaissaient juste son nom. C'était des espagnols, donc ils l'appelaient tout simplement "El Katars" qui signifie "Le Katars". Avec le temps, le nom est resté et a muté sous une forme rapprochée : Elkatars. Nous mettons "les" devant, car maintenant cela désigne un groupe de personnes.
- Incroyable...
Il rit devant mon air ébahi et m'entraîne à l'extérieur de la pièce.
- Et Maya, qu'est-elle ?
- Tu poses beaucoup trop de questions, dit-il d'une voix pressante.
Alors là, c'est le pompon.
- Quoi ? Tu te moques de moi ? m'exclamé-je. Mets toi à ma place deux secondes, tout est nouveau pour moi, et j'essaie de ne pas craquer toutes les deux minutes.
Il rit de nouveau, et nous nous approchons de l'échelle en métal que j'ai monté tout à l'heure.
Nous la descendons en silence, lorsque je vois Maya, en grande discussion avec Sarah.
Nous nous dirigeons vers elles, mais je remarque une grande tâche bleue qui attire mon attention, à l'opposé de l'entrée. Je me précipite vers cette étendue bleue, qui a l'air de n'attendre que moi.
Hakan m'appelle mais je l'ignore.
Alors que je m'approche, je remarque que c'est une grande mare, une eau claire venant lécher paresseusement les contours de pierre.
Je me penche pour regarder à l'intérieur de cette grande cuvette.
Des poissons de toutes les couleurs nagent frénétiquement d'un bout à l'autre de la mare, des nénuphars flottant doucement à la surface de l'eau.
J'ai toujours adoré les points d'eau comme celui-ci, je trouve que ça détend énormément.
C'est en relevant la tête, que je remarque que quelque chose me fixe.
Je lâche un cri de surprise quand je remarque un héron blanc, prostré dans l'ombre de la parois.
Il tourne légèrement la tête vers moi, me détaillant de ses petits yeux.
Je recule doucement.
Il m'a fait peur ! Je pensais que j'étais seule avec mes poissons.
Ses yeux laissent transparaître une émotion, mais impossible de dire quoi.
Lorsque, d'un coup il déploie ses grandes ailes blanches, et pousse un cri rauque et sonore.
Sans savoir pourquoi, je me sens basculer vers l'arrière, et je me laisse tomber.
Mes jambes ne tiennent plus, je suis fatiguée de tout ça. Cette prise de conscience me fait redescendre sur Terre, et je prends enfin une réaction normale par rapport à ce qui m'arrive.
Depuis que je suis arrivée ici, je fais comme si rien ne m'atteignait, alors que c'est tout le contraire.
Je ne sais même pas pourquoi je me retrouve parmi eux, pourquoi je reste, pourquoi je prends tout ça à la légère. Je n'en peux plus de tout ça.
Toutes les émotions possibles et inimaginables me submergent, la peur, l'appréhension, la colère, tout y passe.
Et je me laisse tomber, sans pouvoir me relever, aussi bien physiquement que mentalement.
- Eh, ça va ?
Je rouvre mes yeux embués de larmes.
Je suis encore sur mes jambes. On me retient par les épaules. Je ne suis donc pas tombée. Physiquement du moins.
Je me retourne et je vois Hakan me tenant, inquiet.
Lorsqu'il voit mes larmes couler le long de mes joues, son visage se décompose.
- Je t'avais dit que j'allais craquer, lancé-je les joues trempées.
Je me redresse en voyant qu'il ne m'a toujours pas lâché.
Il continue de me soutenir jusqu'à Maya.
- Que se passe-t-il ? demande cette dernière, une fois que nous l'ayons rejoint.
- Tu es sûre que ça va ? me demande Sarah.
Elle reprend d'une voix douce :
- Viens, je t'emmène dans ta chambre.
Ma chambre ? Quelle chambre ?
Je n'ai pas la force de répondre, et je sens qu'on m'entraîne vers une des cavités.
Je veux rentrer chez moi. Je ne veux pas être un métamorphe. Je n'ai rien demandé, je ne veux rien.
Je ne comprends pas pourquoi je ne me suis pas écroulée avant. Je suis au milieu d'inconnus, le seul qui m'est un minimum familier, je le connais depuis à peine trois jours.
En arrivant ici, une quiétude s'était emparée de moi, voilà pourquoi je suis restée calme. C'est la seule explication qui me vient à l'esprit. Je suis totalement paumée, et une sorte de méfiance s'empare de moi. C'est vrai que je ne connais pas ces gens, je décide donc de ne compter que sur moi-même. Je ne fais confiance à personne.
Je ne vais pas pleurer, je dois me calmer.
Je me répète cette dernière phrase comme un mantra, le temps que Sarah m'installe dans mon lit.
- Tu sais, je suis là si tu as besoin de parler, dit-elle d'un ton compatissant.
Elle aussi, je la connais à peine. Cette constatation me redonne envie de pleurnicher.
- Ne t'inquiète pas, reprend-elle d'une voix douce, j'étais comme toi en arrivant ici.
Surprise, je me redresse sur mon lit, et m'assois. Je sèche mes larmes, et lui demande d'une voix rauque :
- Raconte-moi ton histoire.
Elle s'assoit sur le lit, cherchant ces mots.
Je remarque que nous sommes plus que toutes les deux, ce qui me soulage énormément. Je déteste quand les gens me vois me lamenter sur mon sort.
- Je suis arrivée ici, totalement perdue.
Je n'ai jamais connu mes parents, je vivais dans un orphelinat jusqu'à mes dix-huit ans. À ma majorité, il m'a fallut me débrouiller pour vivre, mais je n'ai pas trouvé de travail. J'ai passé près d'un mois dans la rue, jusqu'à ce que mon Attrapeur me trouve, m'avoue-t-elle en baissant la tête.
Je l'encourage à continuer d'un mouvement de tête. Elle arrive à me faire oublier mes problèmes, et ça, c'est fort.
- Il m'a trouvée dans une rue sale et délabrée, et j'ai dû faire comme toi, trouver ma feuille. Mais ça, on te l'expliquera plus tard. Enfin bref, la mienne est une feuille d'érable, alors imagine le temps qu'il m'a fallut pour la trouver, ajoute-t-elle dans un éclat de rire.
Je lui souris. Peut-être pourrai-je lui faire confiance ? Quand je me serai habituée. Je ferai des efforts.
- Donc, je suis arrivée exactement comme toi. Quand on m'a dit que j'étais une chouette, mon monde s'est effondrée. Pourtant, c'est la meilleure chose qui me soit arrivée. Elle m'a sauvée la vie.
Ses paroles me touchent bien plus que je ne voudrai l'admettre, et me font reconsidérer la situation.
Effectivement, si je reste ici, je pourrai vivre pleinement avec mes semblables, alors que si je pars, je porterai un énorme fardeau sur mes épaules.
Je décide de rester au moins quelques jours pour voir ce qui m'attend.
En parlant de ça, j'aurai dû aller au salon de toilettage aujourd'hui, et être rentrée chez moi ce soir.
- Sarah, pourrais-tu me dire l'heure, s'il te plait ?
Elle se penche vers une montre qui traine sur la table de chevet, et me la met au poignet.
Je lui lance un regard interrogateur, et me répond en souriant.
- C'est la tienne maintenant. Tout le monde en a une, pour les leçons, ajoute-elle en me voyant perdue.
Elle poursuit :
- On t'expliquera tout demain, ou ce soir si tu te sens prête pour la Veillée. Au fait, il est six heures.
Elle laisse échapper un hoquet de stupeur en disant l'heure.
- Déjà six heures ! Il faut que j'aille dormir, je fais la Veillée, moi !
Elle se dirige vers l'autre partie de la chambre, vers un deuxième lit. La pièce est très vaste, je dirai environ soixante mètres carré. Un papier peint au ton violet claire donne un air accueillant à la chambre. À côté de chaque lit, une table de chevet avec un tiroir, et en face de chacun, une armoire. J'aperçois de son côté, près de son armoire, une porte supplémentaire, ce qui me laisse deviner qu'il y a une deuxième pièce, sûrement la salle de bain.
La porte d'entrée est en diagonale à nos lits, donnant un espace supplémentaire à la chambre.
Sarah, qui vient à peine de s'allonger, m'informe d'une voix déjà endormie :
- Au fait, on partage la chambre, si jamais tu n'avais pas compris.
- J'avais compris.
Elle rit doucement et s'endort quelques minutes après.
N'arrivant pas dormir, alors que l'heure d'avant, j'étais crevée, je laisse mes pensées divaguer.
J'espère vraiment que je ne fais pas d'erreur en restant ici.
J'ai beau chercher désespérément des réponses, j'en viens toujours à la même conclusion : rester pour apprendre ce que je suis, et exploiter mes capacités au maximum.
Je m'endors finalement sur une prière : quoique qu'il se passe à la Veillée, j'espère que ce ne sera rien de grave, parce que j'ai vraiment, vraiment un mauvais pressentiment.
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Merci d'avoir lu ce nouveau chapitre ! 😄
J'espère qu'il vous a plu, n'hésitez pas à commenter ! ❤
Vous savez désormais ce qu'elle est, et pourquoi j'ai donné ce titre à mon livre ! Rien n'est laissé au hasard ! 😉
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