Chapitre soixante-cinq
SEKHIR
Je vis Kezar s'éclipser et Renfri s'arrêta dans son geste. Elle reposa le fruit qu'elle mangeait et me regarda, inquiète. Je pris une profonde inspiration et levai mes deux mains en signe de paix.
— Je pense qu'il réfléchit, admis-je.
— Mais c'est lui, Sekhir, souffla Renfri. Je le sais maintenant. Et toi aussi, tu as vu ce qu'il est.
— Tout comme j'ai vu ce que tu as fait aujourd'hui et que je ne sais toujours pas quoi en penser, murmurai-je.
Elle baissa son visage vers ses mains et regarda ses paumes. Comme si elles lui étaient étrangères. Je les recouvris des miennes et la poussai à me regarder.
— Tu n'aurais jamais dû te retrouver là-bas, chuchotai-je. Et pourtant, tu as sauvé ce pays et ce peuple. Et je ne sais pas si cela m'inquiète ou...
— Tu savais que j'en étais capable ?
Je déglutis et me redressai. Renfri se mordit la lèvre. Pour ma défense, je savais beaucoup de choses sur elle. Mais pas dans les détails, et encore moins ces capacités. Beaucoup d'éléments me manquaient pour comprendre le but global de la quête dans laquelle Renfri se lançait. Je savais juste que je devais l'y aider. Et que Kezar aurait dû ressentir le même besoin.
Car il était un Echo.
Et qu'il devait avancer autant que Renfri.
Il était arrivé sur notre route pour une raison et je ne comprenais toujours pas pourquoi il doutait.
— Comment te sens-tu ? soufflai-je.
— Tu éludes ma question, rétorqua Renfri.
Je poussai un long soupir.
— J'ai besoin de savoir comment tu te sens pour pouvoir te dire certaines choses. Moi-même il me manque des informations, alors je ne peux que te donner mes idées et mes pensées à propos de tout ça. Tu comprends ? Et je ne veux pas que cela t'influence d'une quelconque façon.
Renfri soupira et repoussa ses cheveux qui tombaient sur son front dans un geste d'agacement non dissimulé. Je glissai mon pouce sur sa joue et elle me jeta un coup d'œil inquiet.
— Tu as vécu tellement d'épreuves quand j'étais endormi, soufflai-je. Je ne sais rien de tout ça. Et j'aimerais savoir tout. J'aurais dû te protéger.
— Kezar l'a fait quand tu ne pouvais le faire, tenta-t-elle de me rassurer.
Je fis la moue et pointai son poignet du doigt, là où il y avait une marque de la famille de Kezar. Elles étaient présentes sur tous ses Keneyfs. Renfri la cacha d'une main et rougit.
— C'était une diversion, murmura-t-elle. Nous n'avions pas le choix. Il l'a fait pour me protéger. Je t'assure.
— Je ne sais pas quoi en penser. Tout comme les marques de fouet que je vois dépasser de ton dos.
— Sakhi m'a soigné. Il ne reste pas grand-chose.
Je me redressai pour glisser dans son dos. Je dus pousser quelques coussins pour y arriver. Elle me laissa dénouer la ceinture de son haut pour qu'il soit plus lâche et le tint sur ses seins. Je tirai doucement pour voir les différentes marques du fouet. On en avait utilisé un pour détacher de la chair et pas juste pour punir.
— Ergo était...
— Ergo est mort, grondai-je. Il ne te fera plus de mal.
— Mais si lui a utilisé la malveillance de cette faille pour faire ça, qu'est-ce qui arriverait à quelqu'un d'autre qui rencontrait une source de pouvoir comme celle-ci ?
Je remis son haut sur ses épaules et l'aidai à nouer de nouveau la ceinture sans trop serrer. Renfri paraissait vraiment inquiète du sort de quelqu'un dont nous n'avions aucune connaissance.
— Ce n'est pas notre premier problème, admis-je avec une grimace.
— Ah bon ? s'exclama Renfri. Ergo aurait pu attaquer Losar !
Je me fermai brusquement à cette mention. Je revoyais Maesuka. Je revoyais le Roi. Je revoyais le sang.
Et les larmes de Renfri.
Je déglutis.
— Nous devons trouver les Échos, soufflai-je. C'est tout ce qui importe. Ça et de te garder en vie.
— Sekhir...
Je m'écartai de la main de Renfri pour me lever.
— Nous sommes restés trop longtemps ici, annonçai-je. Il nous faut partir. Et il nous fait emmener Kezar avec nous. Il faut que je réussisse à le convaincre de te suivre. De nous suivre. Sinon, tout sera vain et nous...
— Attends, reste avec moi, tenta la Princesse.
— Repose-toi, ordonnai-je. Nous partirons dans les prochains jours. Je sais que tu as rencontré des personnes formidables ici, mais il va falloir leur dire adieu, Ren. Nous ne pouvons les mettre plus en danger.
Je sortis de la chambre sans un bruit de plus et tentai de trouver Kezar. Il se trouvait dans les cuisines. Le visage un peu pâle. Il tenait un papier dans sa main.
— Que se passe-t-il ? m'inquiétai-je.
Il agita le papier et se frotta les cheveux.
— La Reine Dragnir est en chemin, m'annonça-t-il. Elle aurait entendu des rumeurs sur sa sœur et donc viendrait elle-même à Gylf pour vérifier cette hypothèse.
Je déglutis et mon sang ne fit qu'un tour.
Nous devions partir avant l'arrivée de Maesuka.
Nous devions lui échapper.
Elle ne devait pas nous retrouver.
Elle me tuerait. J'en étais convaincu à présent. Peu importe ce que cela ferait à Renfri ni le nombre d'années qu'elle mettrait à effacer mon souvenir de la tête de sa sœur.
Je me glissai en face de Kezar et posai mes mains à plat sur la table en bois.
— Pourquoi ne viens-tu pas avec nous ? Tu sais ce que tu es maintenant, murmurai-je. Tu dois aider Renfri à trouver les autres Échos.
— Aurais-tu quitté toute ta famille pour une quête si floue ? cracha Kezar. Au moment où Renfri est arrivée ici, j'ai su qu'elle représentait quelque chose pour moi. J'ai senti une attirance pour elle, bien plus qu'avec n'importe quelle autre personne ici. Tu te rends compte de ce que ça fait ? De voir une inconnue comme plus importante que les membres de sa propre famille ?
Je ne détournai pas le regard. Si Kezar devait comprendre l'importance de ses paroles, alors il le ferait en parlant de tout ça. Je pouvais être les oreilles dont il avait besoin.
— J'ai failli tout abandonner quand mes parents sont morts, souffla Kezar. J'ai failli tout laisser de côté, partir et ne jamais revenir. Sakhi entre les mains d'Ergo. Kuda perdu et sans repère. Je ne pouvais rien faire. Je ne pouvais pas ramener Sakhi. Je ne pouvais ramener mes parents à la vie. Alors, je me suis battu et j'ai trouvé toutes les combines possibles pour ne plus perdre ceux que j'aimais.
— Tu as tué Ergo, soufflai-je. Il ne peut plus faire de mal à ta famille. Elle sera en sécurité ici.
— Ce n'est pas aussi simple, rétorqua Kezar. Je ne peux pas les abandonner, Sekhir. Ils ne m'ont jamais abandonné.
Je grognai.
— Kuda est très à même de prendre ta relève. Et Notali semble être une souveraine décente. Elle pourra l'aider à prospérer. Tout comme ta sœur. Parfois, nous sommes appelés à répondre à un destin plus grand que nous. Plus grand que tout ce qu'on a pu imaginer dans sa vie.
Kezar ricana avant de secouer la tête, désabusé.
— Renfri t'a trouvé pour une raison, soufflai-je. Tu es destiné à plus que ça, Kezar. Tu dois t'en rendre compte et prendre les décisions qui s'imposent. Renfri l'a fait. Elle a tout quitté et maintenant, elle sait ce qu'elle doit trouver.
— Vraiment ? gronda Kezar. Je ne crois pas non. Elle m'a trouvé par chance.
Ce fut à mon tour de ricaner.
— Tu es bête et borné ou quoi ? grommelai-je.
Je pointai Baba du doigt qui venait d'entrer dans la cuisine. Il haussa un sourcil, curieux.
— Cette personne n'est pas une chance, remarquai-je. Cette personne a très bien senti que Renfri était une Dragnir.
— Baba, murmura Kezar.
Ce dernier déposa son panier à côté de la table et s'assit aux côtés du jeune homme. Il soupira et posa sa main sur son épaule.
— La Foudre a raison, chuchota-t-il. La Princesse Dragnir a besoin de toi pour trouver les autres. Elle n'a pas choisi cette mission, tout comme toi. Mais c'est son devoir à présent. Tout comme La Foudre a donné sa vie pour protéger celle de la Princesse.
— Tu ne m'as jamais dit que j'étais un dragon, murmura Kezar. Mes parents sont-ils vraiment les miens ?
Baba eut une expression chagrinée.
— Bien sûr que ce sont tes parents, Kezar. Et ils le resteront. Mais il y a plus que la famille dans ce monde. Il y a plus que le sable, le désert et la Guilde. Tu dois écouter la Foudre. Tu es destiné à plus. Et si mon devoir était de protéger jusqu'à ce que tu trouves ta destinée, alors je peux m'occuper de Kuda. Comme je l'ai promis à tes parents.
Kezar déglutit avant de se presser contre le torse de Baba.
— Vous devez apprendre encore beaucoup de choses sur les Échos, murmura le vieil homme. Vous trouverez les informations au gré de vos voyages. Renfri doit rester prudente à qui elle donne sa confiance. Des épreuves vous attendent, mais si vous avez réussi à défaire le Haut-Maître, alors j'ai confiance pour la suite. Sakhi et Kuda seront bien traités ici, Kezar. Et ils comprendront que tu as une quête à réaliser. Il faut que tu trouves les autres comme toi et que vous réfléchissiez ensemble à l'avenir de ce continent et du peuple disparu.
Kezar me demanda de retourner voir Renfri. Ensemble, nous lui annonçâmes l'arrivée imminente de sa sœur et cela sembla grandement la perturber. Je restai très évasif sur les renseignements que Kezar avait reçus. Je ne voulais pas remuer le couteau dans la plaie.
Kezar, assit en tailleur devant Renfri, semblait incertain sur ce qu'il devait dire.
— Je sais que je dois venir avec vous, murmura-t-il, inquiet.
— Si j'en savais plus, souffla Renfri, je ne te demanderais pas un aussi gros sacrifice. Mais je le sens, Kezar, je sais qu'il faut que tu viennes avec nous. Et que tu en découvres plus sur toi.
Il lui sourit avec tendresse et ils échangèrent un long regard.
Kezar était-il amoureux de Renfri ? Avait-il des sentiments pour elle, comme il avait essayé de me le faire comprendre ?
Renfri tenait déjà beaucoup à lui. Je le sentais.
Tout comme je sentais à quel point il était important pour moi que Kezar vienne.
Et je ne comprenais pas encore très bien pourquoi.
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Ça sent la fin hein ? 😎😎
Je ferais une grosse passe sur vos commentaires à la fin. Promis je ne vous oublie pas. Juste beaucoup de choses dans notre vie qui me permettent pas de prendre tout le temps que j'aimerais sur Wattpad. Mais on lit tous vos commentaires et on rigole avec vous. ❤️❤️
Plein de bisous 💋
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