Chapitre 16
W E S L E Y
Une semaine s'était écoulé depuis notre arrivée à la grande ville. Une semaine et je n'avais toujours pas fini de visiter l'énorme palace de notre oncle. Chaque pièce me laissait sans voix. Je n'étais pas habitué à tant de grandeur. Les cheveux toujours mouillés, je me baladais avec une serviette sur la tête. Sacha et Mia jouaient à l'étage d'en dessous.
Je m'ennuyais à mourir. Je ressentais l'envie de revoir cette fille. Je m'inquiétais vraiment pour elle. Je ne parle évidemment pas de Diana, mais de cette dénommée Maëlyss. Je ne l'avais vu qu'une fois, et je sentais vraiment que ça ne me suffisait pas. Je voulais la connaître.
La sonnerie retentit. Je descendis ouvrir. Mais je ne m'attendais pas à voir ça...
- Bonjour! C'est pour le déménagement des meubles... Wes!!
Ils se tenaient devant moi avec une casquette sur la tête et une veste en jean bleue. Sam était choqué. Evan releva la tête pour voir si c'était vraiment moi. Il resta bouche bée. Je les laissai rentrer avec les meubles qu'ils devaient installer. Je me souvins alors des coupons qu'ils avaient obtenus, ces coupons à propos d'un travail à la grande ville. Si j'avais su qu'il s'agissait de cette adresse, j'aurais filé chez les Allison.
Ils firent parfaitement leur travail. Tout était installé comme le souhaitait Nathan. Ils avaient même enlevé les plastiques qui protégeaient les meubles. Une fois qu'ils eurent fini, ils se tournèrent vers moi.
- Explique! ordonna Sam, les larmes aux yeux.
- Il n'y a rien à expliquer. C'est le coup du destin...
- Le destin!!? répéta Evan presqu'en criant. Arrête de te foutre de nous!!
- Quand tu as refusé ce job de la grande ville... tu savais déjà que tu vivrais là-bas hein? poursuivit Sam en regardant le vide.
- Vous vous méprenez les gars! C'est trop long à...
- Prends pas la grosse tête Wes! On a tout notre temps! me coupa Evan.
Je n'aimais pas le ton qu'ils employaient pour me parler. Mon cœur s'alourdit brusquement.
- Je ne comprends pas. Pourquoi vous n'êtes pas heureux pour moi?
- Heureux pour un mec qui oublie son père qui crève à petit feu et qui oublie ses amis qui le cherchaient jusqu'à maintenant dans tous les recoins du bidonville!? demanda Sam sarcastiquement. Tu aurais dû nous prévenir.
- Je sais, mais les circonstances ont fait que c'était impossible.
- On te retient mec! répliqua Sam en retournant sa casquette. T'aurais dû attendre avant de partir. Au moins attendre que chacun d'entre nous puisse franchir la frontière à volonté.
- Mais t'avais cru qu'on vivait dans le monde des bisounours ou quoi!? m'écriai-je. N'importe lequel d'entre nous aurait pu saisir cette occasion. Je n'allais pas la laisser filer parce que mes pauvres amis sont coincés dans le bidonville! Chacun sa chance!
- Justement, c'est ça le problème! Tu te fous de savoir comment on va prendre cette nouvelle, rétorqua Sam en soupirant. À ta place, j'aurais réfléchi à trois fois avant de m'embarquer dedans!
- Je te promets que non. Vu comment cette nouvelle m'est descendue, personne n'aurait eu le temps d'y réfléchir soigneusement.
- Tu parles! s'énerva Evan.
- J'ai pensé à vous à de nombreuses reprises...
- Menteur! Pas une seule fois tu as pensé à nous! vociféra Evan. Sinon tu ne serais pas y aller.
Il m'avait énervé. Je sentis mon cœur se compresser. J'avais envie de leur faire regretter.
- Si tu fais référence à ta petite sœur, compte sur moi pour lui passer le bonjour de ta part, déclarai-je de façon odieuse.
《Peu importe ce que je dirai, ils s'en prendraient toujours à moi. Autant couper les liens tout de suite》, pensai-je.
- Tu es sérieux!? cria Sam. On s'était promis de ne plus remettre ça sur la table!!
- Pourquoi!? En ce moment même, c'est la jalousie qui l'anime comme cette fois où sa sœur a été envoyée à la grande ville. La chance passe encore à côté de toi, et tu n'arrives pas à le supporter!!!
La baffe sortit. Un filet de sang coula sur le coin de mes lèvres. Je souris en voyant Sam tenter de retenir son ami.
- Joli Evan, le félicitai-je en applaudissant. Moi qui te pensais calme, aurais-tu perdu ton sang-froid?
Il hurla de rage. Il voulait me massacrer. Je lui ris au nez.
- Oh Evan. Je suis désolé d'avoir piqué ton rêve, le provoquai-je. Je n'aurais pas de mal à la retrouver, cette fille. Tu ne penses pas?
- Ferme-la!!! hurla-t-il avec haine tout en se débattant.
- C'est ta jumelle en plus. Il me suffira de chercher Evan avec des cheveux longs!
- Tu es exaspérant Wes, soupira Sam après avoir maintenu Evan. J'espère vraiment que tu souffriras comme tu viens de le faire souffrir.
- Ah la jalousie!!
- J'espère que tu es content, Wesley, poursuivit Sam et tirant Evan vers la sortie. Ah et concernant ton père... Non, je sais que tu t'en fous!
Il s'en alla pour de bon. Evan me lança un regard de meurtrier avant de le rejoindre.
- Ça va? demanda Mia.
Elle était sur la dernière marche d'escaliers. Elle semblait avoir tout entendu. Sacha descendit à son tour pour voir. Le sourire fier que j'avais jusque là s'effaça instantanément pour faire place à des larmes.
- Non. Ça ne va pas du tout.
La sonnerie retentit. J'ouvris avec rage.
- Je croyais que..., hurlai-je. Maëlyss?
- Wouaw! Rappelle moi de ne jamais t'énerver.
Sacha courut à sa rencontre tandis que Mia avançait avec hésitation.
- Ça va les enfants!? Où est votre oncle? J'ai besoin de lui parler...
- À l'hôpital, lui répondis-je en cachant mon visage avec la serviette.
- Ça ne vous dérange pas si j'attends ici? proposa-t-elle en joignant ses mains.
- Non pas du tout!!! s'écria Sacha.
Elle entra et décida de rester avec les petits, jusqu'à ce qu'ils s'endorment à l'heure de la sieste.
- Tu es douée avec les enfants!
Elle sursauta puis sourit en regardant le vide.
- Je suis une enfant unique. J'ai toujours rêvé d'avoir des frères et sœurs, avoua-t-elle.
Je l'emmenai à la terrasse et nous nous assîmes sur un banc. Nous regardions le paysage jusqu'à ce qu'elle prenne la parole.
- Sinon, tu vas mieux?
Je me tournai vers elle et aperçus dans ses yeux bleus une lueur d'inquiétude.
- Oui ne t'inquiète pas!
- Je ne pensais pas te voir pleurer aussi vite...
- Euh... ferme la s'il te plaît, lui conseillai-je avec un sourire forcé.
Elle se mit à rire. Mais son rire sonnait faux. Ses yeux s'embuèrent de larmes, qu'elle ne put retenir.
- Moi aussi j'ai envie de pleurer, avoua-t-elle. Je ne sais pas où j'en suis et ça m'énerve!
- La même. En plus je viens de faire la plus grosse bêtise de ma vie.
Les larmes se mirent à tomber. Je ne m'obstinai pas à les retenir ni à les cacher.
- J'ai honte de ce que j'ai fait, poursuivis-je. Ma fierté a détruit une forte amitié.
Elle était restée muette lorsque je me confiais. Elle ne me regardait pas car je pleurais. Je ne pouvais que l'apprécier davantage. Je posai ma tête délicatement sur son épaule. Elle ne me repoussa pas, au contraire, elle m'invitait à me reposer sur elle. Je me sentais tellement bien que j'avais fini par m'endormir.
À mon réveil, j'étais sur mon lit, et j'avais appris que Maëlyss était déjà partie.
- Tu as vu tes amis à ce que je vois! déclara Nathan le sourire aux lèvres.
- Comment tu le sais?
- Je leur ai donné le coupon exprès.
- Et ça t'amuse de me voir dans cet état?
- Grandis un peu mon garçon. C'est pour t'ouvrir les yeux que je l'ai fait. Tu commences à devenir un élite à part entière, dans le sens où tu regardes les échecs de haut. Comme si tu oubliais que tu en étais un à l'origine...
- C'est faux! le coupai-je.
- À la fin, si tu as brisé ce lien qui vous unissait, c'est à cause de leur rang. Tu as réussi à passer dans la classe supérieure d'une certaine façon. Et la honte d'avoir appartenu à cette classe inférieure t'a poussé à te conduire de la sorte.
- Ce n'est pas le cas! niai-je.
- Tu auras beau dire le contraire, mais ce que je dis est vrai. La seule fois où tu as pensé à tes amis, nous étions encore dans le bidonville. Tu les as complètement oublié après avoir franchi la frontière.
Mon cœur battait de plus en plus vite. Je refusais d'admettre qu'il avait raison. Mais la vérité était là. Je ne voulais plus avoir de lien avec le bidonville, quitte à faire souffrir mes anciens amis.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top