Chapitre 12 - Quand le sang coulera
Le soldat blessé fut immédiatement pris en charge lorsque l'escorte arriva au checkpoint, tandis qu'une dizaine de soldats venaient pour prendre la relève. « Emmenez-les tous en cellule, et envoyez-moi notre cible principale dans mon bureau. » Le commandant donna une dernière directive, avant de se diriger vers le bâtiment.
En attendant, les combattants se répartirent pour encadrer les prisonniers, pour les emmener dans leur geôle. Akuro était emmené vers le bâtiment principal, tandis que les autres étaient guidés vers un passage menant aux prisons, situé sous terre. Les deux déviants furent installés dans une même cellule, tandis que Tana et Iroc étaient dans des cellules séparées. La jeune insurgée se posa sur le lit de fortune à disposition, attendant qu'elle soit appelée. Le commandant des Rangers, lui, faisaient les cent pas dans sa cellule, surveiller par deux sentinelles. Il se demandait comment la NDA avait pu remonter jusqu'à eux. Il se demanda quelques instants si la déviante de l'Insurrection n'était pas derrière ce coup. Mais il se rappela qu'elle avait aussi été capturée, et qu'elle était prête à se battre à ses côtés. Il décida de finalement se poser sur le sommier, attendant que son tour vienne, pour avoir des explications.
Pendant ce temps, Akuro était amené par deux soldats, qui le tenaient fermement.
- Pas besoin d'être si brutale... Il soupira, lorsqu'enfin, ils arrivèrent devant la porte du bureau. L'un des soldats toqua.
- Faites le entrer. Coroks s'était installé, avec quelques documents sur Akuro, mais surtout de nombreuses où retranscrire leur échange.
- Alors je vous rencontre enfin, commandant... Le déviant posa un regard plein de haine sur l'homme qui se tient face à lui, quand les soldats le firent entrer dans le bureau.
- Enchanté, Akuro. Vous pouvez nous laisser, messieurs. Il congédia les deux soldats, qui étaient légèrement inquiets de laisser un tel être avec le commandant, mais ils savaient aussi les capacités en combat de leur supérieur.
- Allez, qui nous a balancer ? Je sais très bien que quelqu'un à vendu la mèche. Vous n'auriez jamais pu prévoir une telle expédition comme ça. Lorsqu'ils furent seuls, l'assassin fusilla du regard Coroks, cherchant à le déstabiliser.
- Tu as une grande confiance en toi, tu sais... T'attaquer à un général, ce n'est pas rien. Si le déviant voulait jouer à ce jeu, le commandant de la NDA était prêt à y entrer dedans à pieds joints.
- Alors la NDA savait déjà qui était l'assassin ? Eh, c'est pas mal pour une organisation de vieux tueurs... Il répliqua, souriant d'une façon malsaine.
- Nous sommes vite remontés à toi, et à celui qui ta embauché. Nous ne pensions pas attraper autant de personnes d'un coup. Coroks sourit légèrement en voyant Akuro devenir rouge de rage.
- Alors c'est ce foutu commandant qui nous a vendus ?! Ou c'est l'autre gamine de merde ? Le jeune homme se tenait assis, mais ses yeux reflétaient une haine inégalable, similaire à celle d'Artémis lorsque Coroks l'a revu, pour la première fois.
- Nous avons nos informateurs, ce n'est pas la question. Dit moi en plus sur les deux personnes qui t'accompagnait. Le commandant restait d'un calme sans pareil, complètement stoïque à la rage incontrôlable du déviant.
- Qu'est-ce que tu veux de plus ?! Que je les balance ?! Tu rêves, sale ordure ! L'assassin n'hésita pas à cracher au visage de celui qui lui fait face.
- Je pourrais t'éliminer dès maintenant si je le voulais. Ou te faire croupir éternellement dans nos prisons. File-moi ce que je veux et je tâcherais d'être plus clément avec toi. Coroks restait de marbre en façade, mais sa masse était toujours à portée, et il se préparait à l'attraper.
- Alors vas-y ! Bute-moi qu'on en finisse, enfoiré ! Akuro se leva d'un bond, pour se jeter sur le commandant.
Ce dernier attrapa rapidement son arme, donnant un puissant coup dans le torse du déviant, qui fut projeté dans le mur du bureau. L'impact, sourd, résonna légèrement dans la pièce, et attira les deux soldats qui attendaient devant.
- Commandant ! Tout va bien ?! Le premier soldat à entrer s'enquit de l'état de son supérieur, tandis que le second observait le déviant à terre.
- Pour moi oui. Celui-là n'a eu que ce qu'il mérite. Ramener le en cellule et faites venir le commandant des Rangers. Le colosse se réinstalla sur sa chaise, posant la masse à côté.
Les deux soldats, choqués par l'action, prirent rapidement le déviant, qui était à peine conscient, pour le ramener dans sa cellule.
En bas, dans la prison, Tana et Iroc eurent la possibilité de le voir passer. Il avait du sang qui coulait d'une plaie à la tête, mais il semblait encore en vie. Si la jeune déviante n'était pas si surprise, le commandant des Rangers dût réprimer un haut-le-cœur, avant que les soldats ne viennent le chercher, afin de l'amener au bureau de Coroks. Tana les observa faire, avant de voir qu'un soldat venait prendre la relève de la sentinelle en place.
- Pas de problème le temps de ton poste ? Demanda le plus âgé, qui prenait la relève.
- Non, hormis les nouveaux prisonniers, rien de plus. Et toi, là-haut ? Le cadet savait que son camarade était en poste au checkpoint juste avant.
- Ça s'agite. Les Rangers viennent juste d'apprendre que leur commandant est ici. Leur général est d'humeur massacrante, et le nôtre ne veut rien entendre venant d'eux. Tana écoutait la conservation avec attrait, et comprenait que les choses commençaient à mal tourner.
- Tout ça ne me dit rien qui vaille... Le commandant est au courant ?
- Pas encore... Si tu as le temps, va le prévenir. Je m'occupe d'ici. L'aîné salua son collègue, qui ne se fit pas prier pour remonter en courant, partant en direction du bâtiment principal.
Pendant ce temps, Coroks finissait de rédiger son premier rapport, quand le commandant Iroc entra dans son bureau, accompagné par les deux soldats qui font le voyage entre les geôles et l'antre du colosse.
- Commandant Iroc, j'ose espérer que vous serez plus coopératif que votre sous-fifre. Le commandant de la NDA ne mâchait pas ses mots cette fois-ci, alors que son interlocuteur s'installait, laissant les combattants sortir du bureau.
- Vous l'avez salement amoché de ce que j'ai vu... Le Ranger avait la voix légèrement tremblante, encore choqué de l'état d'Akuro.
- Je n'ai fait que me défendre, voyez vous. Par contre... Se trouver avec un assassin dans le marché noir, combattre un sergent de la NDA, vous trouvez ça comment, en tant que commandant des Rangers ? Coroks posa un regard noir sur celui qui se tenait en face, incapable de répondre quelque chose.
- Commandant ! On a un problème ! Avant qu'il n'ait pu répondre, un soldat ouvrit la porte du bureau, sans même prendre le temps de s'annoncer.
- Quoi encore ? Je suis en plein interrogatoire...
- Les Rangers sont en mouvement, ils ont appris pour leur commandant ! Le jeune combattant reprenait son souffle en annonçant la nouvelle, alors qu'une autre forme se dessinait derrière lui.
- On ne vous a jamais appris qu'on toque avant d'entrer ? Laisser le commandant Coroks finir son interrogatoire, je me charge personnellement d'accueillir les Rangers. La voix, autoritaire, était connu de tous les combattants présents.
- Je vous remercie, général. Coroks fit un simple hochement de tête, pour remercier le chef de la NDA, qui referma la porte ensuite.
- Ils vont venir me chercher... et vous ne pourrez rien faire contre ça, vous le savez. L'opinion sera de notre côté... Iroc marmonnait dans sa barbe, alors que l'imposant colosse souriait.
- L'opinion ne sait pas le fin mot de l'histoire. Nous avons par contre des témoignages de votre implication dans l'incendie d'une maison et la mort de deux personnes à cause de ce dernier. Vous souhaitez rajouter quelque chose, ou votre général pourra le faire lui-même ? Les paroles firent grimacer l'intéressé, qui serra les poings.
- Vous n'avez que ça... vous pouvez juste me faire tomber, rien de plus...
- Pensez-vous que votre petit camarade du marché noir n'a rien dit ? Nous savons aussi son implication pour l'assassinat du général, et qui l'a embauché. Le commandant des Rangers leva un regard empli de désespoir vers son homologue de la NDA.
- Non... il ne peut pas avoir vendu ça... ! Il ne l'aurait jamais fait... ! Ses mains tremblaient de plus en plus, et sa voix se brisait petit à petit.
- Détrompez-vous... Il me faut simplement votre confirmation, et nous pourrons boucler l'affaire. Évidemment, vous serez jugé pour vos actes, pas ceux de votre supérieur. Coroks venait de préparer le terrain pour donner le coup de grâce à la tyrannie du nouveau général des Rangers.
- Harax n'a rien à voir dans cette foutue affaire ! C'est ce déviant l'assassin !
- Et c'est le général Harax qui a expressément demandé que l'ancien général Hamon soit assassiné, n'est-ce pas ? Le silence qui suivit la question du commandant était sans équivoque.
- Je crois que nous n'avons plus rien à nous dire. Votre silence est une réponse tout à fait adéquate à la situation. Le commandant éleva la voix pour être entendue par les soldats à l'extérieur. Ramener le en cellule et remonter moi la gamine.
Les soldats entrèrent dans le bureau, venant récupérer le prisonnier, le tenant chacun par un bras. Ce dernier, avant de quitter le bureau, n'eut qu'un dernier murmure. « J'aurais dû m'occuper de votre cas moi-même, commandant Coroks... » Le colosse l'a très bien entendu, et n'hésita pas à le noter, pour ajouter le tout à un dossier prêt à faire imploser toute une institution.
Lorsque les soldats sortirent du bâtiment, ils purent apercevoir au loin quelques Rangers au checkpoint, arme à la main, alors que leur général s'entretenait avec celui de la NDA. Un détail les frappa quand même. Il y avait seulement une dizaine de soldats accompagnant leur supérieur. Soit ils voulaient seulement mettre un coup de pression à l'organisation rivale, soit il y a un sérieux problème de cohésion des troupes chez les Rangers. Dans tous les cas, les deux hommes ne firent pas plus attention que ça aux nombreuses paroles, parfois véhémentes, qui s'élevaient au loin, alors qu'ils redescendaient dans le souterrain.
Arrivés en bas, ils firent entrer le commandant des Rangers dans sa cellule, avant d'ouvrir celle de Tana. « C'est à toi. » Nul besoin de muscle ici, la jeune fille suivit les combattants qui l'encadraient de part et d'autre jusqu'au bureau de Coroks. Lorsqu'ils y arrivèrent, après avoir signalé leur présence, ils laissèrent la déviante entrer seule, comme l'avait expressément demander leur supérieur.
- Le plan a fonctionné ? Tana s'installa sur la chaise, baissant sa cape pour laisser sa tête bien visible.
- À la perfection. Nous avons tout ce que nous voulions, il ne manque plus qu'à faire éclater le tout au grand jour. Coroks était content de lui, visiblement.
- Quel est le plan, maintenant ? J'ai vu que les Rangers étaient en nombre à l'entrée, tout ça ne sent pas bon... L'insurgée était peu optimiste sur la suite des événements dans la cité.
- Ils sont là car nous avons leur commandant. Le général s'en occupe, ce qui nous laisse le champ libre. Je vais demander à des troupes disponibles d'installer une estrade improvisée sur la place centrale, pendant que je prépare le discours. Je veux que tu ailles chercher Riks et Artémis pendant ce temps. Dès que tout sera en place, nous donnerons le coup de grâce au général Harax. Le commandant de la NDA avait tout prévu, ou du moins, avait un plan bien en tête.
- Ça me va. J'aurais seulement besoin d'une escorte à l'aller et au retour, dans Lestall. Tana apposa sa seule condition supplémentaire au plan.
- Très bien. Suis-moi dans ce cas, nous allons commencer à avancer nos forces. Coroks se leva, suivit juste après par la déviante.
Tout deux quittèrent le bureau, et le commandant demanda aux soldats d'accompagner Tana jusqu'à la porte principale de la cité. Ces derniers obéirent, l'escortant dehors, tandis que Coroks sonnait le ralliement des troupes de la NDA devant le bâtiment principal. Le général n'en fit rien, vouant une aveugle confiance à son commandant pour ce combat qui s'annonçait rude. Lorsque les troupes furent réunies, le colosse prit la parole. « Messieurs, mesdames. J'ai besoin de toute l'aide disponible pour installer une estrade improvisée sur la place centrale. Je vais tenir un discours des plus importants dans peu de temps, et j'ai besoin que tout soit installé, ainsi qu'une majorité d'habitants de Lestall soient présent pour entendre ce que j'ai à dire. Assurez-vous que tout soit prêt dans une heure maximum. » Aussitôt les directives données, aussitôt les plusieurs dizaines de combattants de tout rang venu pour entendre les ordres du commandant se dispersèrent pour chercher des ressources, ou partir répandre la nouvelle dans la ville. Coroks n'avait plus qu'une heure devant lui, il remonta donc à son bureau, se préparant pour l'ultime phase du plan.
Pendant ce temps, au Sud de la cité, l'escorte arrivait aux portes, gérées à ce moment-là par la NDA. « Ordre du commandant, on doit laisser passer cette fille. Elle va revenir avec deux autres personnes qui devront aussi passer. » Le plus âgé des trois sentinelles présentes hocha simplement la tête en guise de réponse, laissant la jeune déviante quitter les pavés de pierre pour s'engager sur la route de terre qui descendait vers la mer. Elle traça à toute vitesse, rejoignant le plus vite la végétation menant à la seconde partie de la plage, où les exilés avaient élu domicile depuis quelque temps maintenant.
Lorsque Tana atteignit la plage, elle trouva Artémis en train de s'entraîner encore, alors que Riks faisait cuire un poisson pour le repas du soir. Elle s'approcha doucement, alors que le soleil déclinait au loin, elle vit que la jeune déviante face à elle avait encore changé. Elle avait plus d'assurance avec l'épée de l'ancien Ranger. Sa posture était bien meilleure, et son corps s'était taillé avec le temps. Elle ne ressemblait plus à la frêle adolescente qui l'a affronté sur la place centrale autrefois, mais bien à une future combattante. Cette dernière finit par remarquer la déviante de l'Insurrection, et lâcha immédiatement son épée pour foncer la rejoindre.
- Tana ! Elle lui sauta dessus, ce qui la fit chanceler, à deux doigts de perdre l'équilibre et de tomber dans le sable.
- Eh, tu sais que tu es devenu plus forte avec le temps toi ? Un peu plus et je tombais. Elle pouffa de rire, alors que la blondinette souriait du compliment.
- On dirait bien que tu as une rivale maintenant, Tana. Riks avait laissé quelques instants le poisson sur le feu, pour venir à la rencontre de la jeune fille.
- On dirait bien... Elle sourit, reposant Artémis au sol, avant de prendre une expression plus grave. Je suis désolée de venir vous interrompre comme ça, mais j'ai une bonne nouvelle.
- Oh, quoi comme nouvelle ? Artémis avait des étoiles plein les yeux, alors que Riks attendait la réponse avec appréhension.
- Vous allez pouvoir revenir en ville. Enfin... presque. La deuxième phrase de la déviante intrigua l'ancien Ranger.
- Pourquoi, presque ? Que se passe-t-il ?
- Coroks se prépare à révéler le complot qui entoure la mort de l'ancien général des Rangers, et l'incendie de la maison d'Artémis. Vous serez sûrement demandé à apporter votre témoignage en plus. Il a prévu un discours dans peu de temps, on doit y aller maintenant. Les informations que venaient de révéler Tana étaient importantes, mais il fallut quelques minutes aux deux exilés pour assimiler tout.
- Très bien... Artémis, prend mon épée pour l'instant. Je vais éteindre le feu, et nous rentrons à Lestall. Riks avait pris sa décision assez vite.
Il alla directement jeter un peu d'eau de la mer sur le maigre feu de camp, tandis qu'Artémis ramassait l'épée, la rangeant dans son fourreau qu'elle avait accroché à son pantalon. La pisteuse s'avança vers les taillis pendant ce temps, en attendant que le jeune homme les rejoigne. Une fois le groupe réuni, ce dernier se mit rapidement en route vers la cité, courant à toute vitesse dans la petite forêt bordant la plage. Riks s'était préparé à rentrer tôt ou tard à Lestall, mais pour Artémis, il avait peur. Elle n'avait plus de famille, plus rien, et elle devrait témoigner contre les Rangers eux-mêmes. La tâche ne s'annonçait pas facile, mais il était prêt à accompagner la jeune déviante jusqu'au bout.
L'estrade improvisée était installé depuis seulement quelques minutes, mais déjà une majorité de citoyens de Lestall s'était réunis sur la plus grande place de la cité. La majorité se serrait pour faire de la place aux personnes arrivant encore. Au milieu de tout ça, plusieurs dizaines de Rangers étaient disposés, alors que leur général était juste devant le point où Coroks délivrera son discours. Il était entouré d'une dizaine de soldats, rallié à sa cause, alors qu'en face, un nombre équivalent de combattants de la NDA attendait leur commandant. Alors que des murmures s'élevaient légèrement dans la foule, ce dernier sortie du QG, à proximité de la place, pour venir prendre place. Il posa la feuille avec son discours devant lui sur un pupitre en bois, avant d'observer toute la foule présente. Son regard s'attarda quelques instants de plus sur un lieutenant des Rangers, qui planta son regard dans celui de Coroks. Puis, il observa le général des protecteurs de la cité, qui semblait s'impatienter d'entendre le discours. « Bonsoir, peuple de Lestall. Je suis désolée que vous ayez été prévenu si tardivement de ce qui se passait, mais je vous remercie d'être venue si nombreux. » Les murmures se turent quand le commandant prit la parole, mais la tension dans l'air était plus que palpable. « Je pense que vous vous souvenez tous de l'assassinat qui a endeuillé les Rangers, mais aussi la cité, de l'ancien général, Hamon. L'enquête menée par les Rangers fut infructueuse, mais celle de la NDA se révéla plus intéressante. » Alors qu'il continuait, le colosse remarqua le trépignement du général Harax, qui semblait savoir déjà la suite. « Nous avons découvert que l'assassin était un déviant, un tueur à gages opérant en ville depuis le marché noir, sous Lestall. Nous avons mis du temps pour remonter jusqu'à lui, mais nous avons surtout découvert quelque chose de plus intéressant. Lors de notre mission d'aujourd'hui, nous avons appréhendé le déviant, mais aussi le commandant des Rangers, qui serait venu pour préparer un assassinat. » Un hoquet de stupeur prit la foule, et de nombreux murmures surprit montèrent des civils qui écoutaient les accusations. « Après un interrogatoire des deux prévenus, il semblerait que l'hypothèse de notre enquête s'avérât vraie. Le général Hamon est mort assassiné par le tueur à gages, qui était employé par l'actuel général des Rangers, Harax. » Cette révélation eut l'effet d'un éclair dans l'assemblée. L'homme concerné par l'accusation éleva la voix pour couvrir les paroles que s'échangeaient les citoyens présents.
- Tout ceci ne sont que des mensonges ! La NDA ne cherche qu'à renverser les Rangers pour instaurer un ordre nouveau sur la cité, en contrôlant déviant et humain à la fois ! Le général des Rangers essayait de rallier l'opinion à sa cause, mais cette fois-ci, peu l'écoutait.
- Et pour cacher vos agissements, vous détournez le regard des citoyens en accusant la NDA. Comme lors de l'incendie qui a suivi votre prise de parole, n'est-ce pas, général ? La question du commandant prit de cours l'homme, qui planta un regard assassin dans son adversaire.
À ce moment-là, deux soldats de la NDA fendaient la foule, accompagnés de trois personnes. Les citoyens reconnaissaient assez vite les deux exilés, mais pas la jeune fille sous sa cape qui les accompagnait. Coroks sourit légèrement de ce timing presque parfait. « En parlant de cet incendie, notre enquête s'est aussi portée sur ce dernier. L'accusation principale était formulée sur une jeune déviante. Or, nous avons eu des révélations de la part du commandant des Rangers. Mais plutôt que cela soit lui qui parle, j'aimerais laisser la parole à la personne qui, ce soir-là, à tout perdu. » Artémis leva son regard vers le commandant de la NDA, qui l'invitait à le rejoindre sur l'estrade. Cette dernière fendit la foule, suivit par l'escorte qui l'avait mené jusqu'à la place centrale. Lorsqu'elle fut aux côtés de Coroks, elle dut faire face à un afflux important de pensée, l'obligeant à se tenir légèrement la tête. « Bonjour, citoyens de Lestall. Je m'appelle Artémis, et je pense que certains d'entre vous me connaissent, ou connaissaient mes parents. Ils ont autrefois contribué à la ville, mais ce soir-là, ils ont perdu la vie. » Elle prit une fois son souffle, avant de se lancer. Elle haussait la voix pour être entendue de tous, mais lorsqu'elle fit une pause, sa voix manqua de se briser. Le colosse posa alors doucement sa main sur le dos de la jeune déviante, l'invitant à continuer sans crainte. « Lorsque j'étais en train de rentrer chez moi, ce soir-là, j'ai vu le commandant des Rangers qui venait de déposer quelque chose devant la maison où j'habitais. Il se recula, et quelques instants après, la boite explosa, détruisant en partie la maison et créant un violent incendie. Si j'étais dedans à ce moment-là, je ne serais plus là pour vous conter ce qui s'est passé. Et je n'ai même failli ne pas pouvoir être là dans tous les cas... » Sa voix se brisa une fois, alors qu'elle décocha un regard noir vers le général des Rangers, qui fusillait déjà la jeune fille. « Le commandant des Rangers, en voyant que je n'étais pas dans la maison, s'est précipité vers moi pour essayer de m'éliminer. J'ai pu m'enfuir, mais les autres Rangers sont arrivés assez vite, et il n'a pas pu le faire avant d'être vu. Il m'a alors fait passer pour une terroriste. » Les murmures montèrent de nouveau, et certains habitants criaient de rage contre les Rangers et leurs agissements.
- C'est ce que tu es, petite. Tu es une déviante, tu es une terroriste, tu ne mérites rien de plus que la mort ! Le général hurla pour couvrir la foule, en direction de celle qui venait d'achever ce qui restait de crédibilité au chef des Rangers.
- Artémis n'est qu'une adolescente innocente. Même si elle est une déviante, on ne peut l'accuser aujourd'hui de quoi que ce soit. Coroks reprit la place au parloir, laissant la jeune fille rejoindre le duo qui l'attendait dans la foule.
Peu après, le commandant de la NDA se prépara pour conclure son discours. « Citoyens de Lestall, vous avez maintenant entendu les nombreuses accusations, témoignages, et preuves accablantes des agissements du général Harax et du commandant Iroc. Ces derniers ont agi dans leur propre intérêt, cherchant à déstabiliser la cité et la région. Nous ne pouvons laisser passer ça. Ainsi, général Harax, je vous mets en état d'arrestation pour assassinat, complot et haute trahison. » L'annonce choqua l'assemblée toute entière. Le combattant accusé observa celui qui venait de prononcer ses mots, avant de prendre son épée en main. « Je refuse ces accusations. Il est temps que la NDA sache où est sa place. » Il s'élança à toute vitesse contre le commandant, qui dégaina sa masse. Les deux armes se rencontrèrent dans un choc, qui créa une puissante onde sur toute la place. Très vite, les Rangers qui encadraient leur général prirent leurs épées en main, fonçant vers les troupes de la NDA pour en découdre une bonne fois pour toutes. Tout ceci créa un chaos sans précédent, alors que les citoyens tentaient de s'enfuir de tout côté. Les deux soldats de la NDA qui avait escorté les exilés allèrent se joindre au combat, laissant le trio au milieu des hurlements, des pensées confuses, et des personnes poussant comme ils pouvaient pour s'enfuir. « Riks ! » Une voix s'éleva dans la mêlée, que le jeune homme reconnut rapidement. Il guida les deux filles avec lui jusqu'au combattant qui l'avait interpellé.
- Les Rangers vont s'occuper de coordonner les évacuations de civils. Mais on a besoin de plus de personnes. Le lieutenant observa le trio qui semblait déterminé à aider.
- On va vous aider. Dites nous où on doit se positionner et on va s'en occuper. L'engagement de Riks n'avait rien perdu de sa superbe, ce qui fit sourire son supérieur.
- Je veux que tu rejoignes le groupe qui évacue à l'Ouest. Artémis, il nous faut quelqu'un à l'Est pour éviter que des personnes tombent dans l'eau. Et toi, jeune fille, peux tu donner un coup de main au passage du Nord ? L'homme donna ses directives, et tout le monde hocha la tête en guise de réponse.
Riks fonça rejoindre deux sergents, qui menaient l'évacuation en deux lignes distinctes. Le soldat guidait les civils qui arrivaient vers les files. Même sans un remerciement explicite, le jeune homme savait que ses supérieurs étaient contents d'avoir un coup de main. En parallèle, Tana cordonnait le passage vers le Nord de la cité, pendant qu'une Ranger guidait les citoyens qui remontaient depuis le chaos de la foule, et que deux autres combattants attendaient sur la place au Nord de la cité pour s'assurer qu'il n'y avait aucun blessé. Et pendant ce temps, Artémis s'assurait que tout le monde traversait le pont sans encombre. Elle n'hésita pas à prendre un jeune garçon sur son dos pour le faire traverser au milieu de la foule, sous le regard reconnaissant de sa mère.
L'évacuation se passait donc plutôt bien, alors que les combats autour de l'estrade faisaient rage. Des soldats, sergents, et même un lieutenant des Rangers combattaient les soldats et sergents de la NDA, dans des duels où les coups d'épées d'une grande précision partaient des deux cotés. Au milieu de tout ça, le général Harax faisait face à Coroks, tentant tant bien que mal de percer la défense de fer de ce colosse et de sa masse.
- Je savais que j'aurais dû m'occuper de ton cas plus tôt ! Le général tenta une attaque par le bas, mais fut rapidement stoppé par la puissante masse qui écrasa la lame contre le sol.
- Tu as fait l'erreur de penser que tu pourrais rallier tout un peuple derrière toi. Mais tu es plus seul que jamais. Rend toi maintenant, et arrête toute cette folie. Après avoir écrasé l'épée de son adversaire, Coroks fit remonter la masse pour essayer de donner un puissant coup au visage de son adversaire, qui esquiva aux derniers moments.
- Jamais ! Si je dois combattre jusqu'à la mort, alors je le ferai ! L'homme était déterminé, et ses troupes étaient aussi prêtes à aller jusqu'au bout du combat.
Le commandant leva alors sa masse, laissant ce qui semblait une ouverture au général, qui fonça à toute vitesse vers son adversaire, visant le torse du colosse afin de l'abattre en un coup. « Accrochez-vous tous ! » Le cri de leur supérieur était le signal parfait qu'attendaient les soldats de la NDA. Ces derniers s'accrochèrent au sol, alors que le commandant fit s'écraser violemment la masse sur le sol, créant une onde de choc qui fit léviter tous les Rangers pendant quelques instants. Harax observa la scène, en l'air, sans comprendre. Son regard stupéfait se planta dans celui du colosse, qui avait intentionnellement caché une telle capacité. Lorsqu'ils retombèrent au sol, la plupart des combattants étaient vulnérables, et les soldats de la NDA en profitèrent pour déloger les armes de leurs adversaires. Mais l'un d'eux réussi à récupérer la sienne à temps. « Je vais m'occuper d'eux, vas buter la gamine ! » Le général se rattrapa plus facilement que ce Coroks pensait, et hurla au dernier soldat en état de combattre un dernier ordre. Même s'il devait périr, il voulait au moins emporter celle qui l'avait fait tomber.
Alors que les combats faisaient encore rage, les derniers habitants finissaient d'évacuer à l'Est. La place s'étant enfin vidé en grande partie, Artémis pu apercevoir comment se passait les autres évacuations, puis les combats. C'est là qu'elle remarqua un Ranger fonçant à toute vitesse vers elle, épée en main. Tana remarqua l'homme, mais n'avait pas le temps de rejoindre la jeune fille à cette distance. « Artémis ! Fait gaffe ! » Elle ne pouvait que hurler à l'attention de la jeune déviante, qui prit conscience après quelques instants du danger approchant. Le cri de l'insurgée interpella les troupes qui réalisaient les autres évacuations. Ils observèrent la blondinette dégainant l'épée de Riks, qui rencontra celle du traître. « Je vais t'éliminer ! On ne tombera pas sans t'emporter, foutu déviante ! » Artémis se recula, alors que les coups d'épée adverse pleuvaient sur elle. Elle avait l'entraînement de l'ancien Rangers pour elle, mais cette fois-ci, elle était face à un adversaire plus coriace que prévu. Ce dernier finit par réussir une frappe, venant entailler légèrement l'épaule de la jeune fille, qui s'arrêta pour se tenir la zone blessé, grimaçant de douleur. Alors que le soldat était prêt à achever la jeune fille, le lieutenant qui avait guidé le trio percuta de plein fouet le Ranger traître, d'un coup d'épaule, le faisant manquer sa cible.
- Ça va, Artémis ?! L'homme s'inquiétait quelque peu pour la jeune fille, qui arrivait encore à tenir debout.
- Ça va... Je peux encore me battre. Le lieutenant remarqua une détermination à toute épreuve dans le regard de la déviante.
Ensemble, ils lancèrent une contre-attaque féroce contre le combattant adverse. Ce dernier était forcé de reculer, jusqu'à faire un faux pas. L'épée d'Artémis s'approcha dangereusement de son visage, et il n'eut d'autre choix que de tomber en arrière, faisant tomber son arme au même moment. La déviante pointa alors son épée vers le cou du soldat, le souffle court. Le lieutenant dégagea l'épée du Ranger, avant de doucement poser une main devant Artémis. « Pas besoin de le tuer. Nous l'avons neutralisé, c'est le principal. » La jeune fille regarda d'un œil le Ranger, avant de ranger l'épée dans son fourreau. Elle entendit au loin la voix de Riks et Tana, qui accourait pour venir en aide à la jeune fille blessée.
Pendant ce temps, Harax tentait encore d'attaquer Coroks, en vain. Il ne faisait que s'épuiser de plus en plus, alors que le commandant semblait inarrêtable.
- Tous tes combattants sont neutralisés Harax. Ne penses-tu pas qu'il est temps de te rendre, toi aussi ? Le colosse pointa sa masse devant son adversaire, qui tenait son épée, prêt à une ultime attaque.
- Non... ça n'aurait pas dû se passer comme ça... Il observa autour de lui les combattants de la NDA et des Rangers qui encadraient les traîtres, avant de lâcher son épée, signe qu'il se rendait lui aussi.
- Tu as vu trop grand, mais tu n'avais rien prévu de ce qui allait arriver. Emmenez-les tous. Coroks posa sa masse, observant les combattants de son groupe qui emportaient les futurs prisonniers.
Il remarqua au loin qu'un Ranger était en train de faire un pansement à Artémis, qui se tenait aux côtés de Riks et Tana, pendant que le lieutenant qui avait dirigé la contre-offensive prenait des nouvelles de toutes les troupes, faisant un point avec eux. Le commandant fut ensuite interpellé par une faible voix émanant du général déchu, qui était emporté par deux soldats qui le portaient à bout de bras. « Vous avez peut-être réussi à m'empêcher de faire tomber la NDA aujourd'hui... Mais je vous le promet, un jour, vous sombrerez. Votre sang coulera sur le pavé de cette cité, et je serais là pour vous voir, vous videz de votre sang. La fin est proche pour vous tous, la guerre éclatera bien, tôt ou tard. » La voix était faible, mais emplit d'une détermination macabre. Coroks l'écouta, mais décida qu'il n'avait rien à faire d'une telle menace venant d'un homme comme lui. Il fit signe à ses soldats de l'emmener, avant de rejoindre le dirigeant des Rangers qui avait su rester du bon côté.
- Lieutenant Amari. Je suis content que tout se soit passé comme nous l'avions prévu. La remarque du commandant fit sourire l'homme.
- Heureusement pour nous, il n'y a pas eu plus de désistement chez les Rangers. Il y a plusieurs blessés parmi les civils, mais rien de grave. Le lieutenant observa les troupes restantes, fier comme un paon.
- Attendez, lieutenant Amari, vous aviez prévu quelque chose avec le commandant Coroks ?! Riks, qui s'approchait avec Artémis et Tana ainsi que le Ranger qui a pris en charge la jeune fille, était surpris d'entendre ça.
- Il est venu me voir il y a deux jours. Il m'a expliqué son plan, son enquête, tout en détail. Il savait que j'étais contre les décisions du général, et il m'a demandé combien de Rangers seraient prêt à le suivre en cas de rébellion armée contre la NDA. De là, nous avons prévu de faire une contre-offensive, au cas où les traîtres voudraient s'en prendre à Coroks lors du discours. Pendant que Harax et ses troupes se plaignaient de la capture du commandant, j'ai réuni les troupes pour expliquer le plan. Nous avons ainsi pu lancer notre contre opération. Et grâce à ça, nous n'avons aucunes pertes civiles, et hormis les traîtres, il n'y a aucun Ranger blessé ou emprisonné. L'explication convint très largement l'ancien Ranger, qui était content que tout ce soit bien déroulé.
- Il y a beaucoup à faire maintenant. Les prochains jours seront décisifs pour les Rangers. J'aimerais pouvoir m'assurer que tout soit fait dans les règles, lieutenant. Coroks proposa son aide, mais surtout sa supervision des différents changements à venir. Même si cela n'emballait pas les combattants présents.
- Je comprends votre demande, commandant. Mais j'aimerais qu'il n'y ait aucune ingérence dans nos affaires. Vous aurez seulement un rôle d'observateur indépendant. La proposition était un entre deux qui raviraient les deux cotés opposés.
- Ça me va. Je passerai demain à votre QG pour la passation de pouvoir. Sur ces derniers mots, l'homme tourna les talons, partant rejoindre ses troupes qui traversaient petit à petit le checkpoint de leur base.
- Je vais y aller aussi. On va finir par s'inquiéter. Alors que Tana allait partir, une main attrapa doucement sa cape, la retenant.
- Merci pour tout ce que tu as fait pour nous, Tana... Le regard d'Artémis était resplendissant, et il en émanait une véritable reconnaissance envers la déviante.
- C'est normal... Un simple murmure, qui n'échappa pas à son interlocutrice, qui lâcha la cape. Toi et Riks... m'avez ouvert les yeux. Je te remercie. Alors qu'elle redescendait vers le sud de la cité, Artémis capta les pensées de l'insurgée, qui lui était évidemment destinée, ce qui lui mit du baume au cœur.
- Qu'est-ce que nous allons faire ? Artémis n'a plus de chez soi, et aux dernières nouvelles, je ne suis plus un Ranger. Le jeune homme observa le lieutenant, attendant de savoir la suite qui serait donné aux anciens exilés.
- Nous allons te réintégrer dès demain à l'aube, Riks. Quant à Artémis, elle pourra loger dans le dortoir des combattantes ce soir, nous aviserons demain de comment nous allons faire pour la suite. Une solution temporaire donc, mais qui restait une solution viable.
Alors que le soleil déclinait au loin, et que la pénombre s'emparait petit à petit de la cité, tous les Rangers se mirent en marche vers leur QG. Menés par le lieutenant Amari, ils rentraient affaiblis par le nombre, mais vainqueur par l'espoir que les choses allaient s'arranger. Artémis s'accrochait comme elle pouvait à Riks pour suivre le rythme, avant qu'une Ranger lui propose de l'épauler, pour laisser l'ancien combattant prendre lui aussi un peu de repos. Il remercia la soldate d'un regard, alors qu'Artémis semblait ravie.
Une semaine était passée depuis l'arrestation et la destitution du général Harax et du commandant Iroc. Dès le lendemain, une cérémonie de passation de pouvoir avait eu lieu, et c'était le lieutenant Amari qui avait été porté à la tête des Rangers. Tous les combattants avaient placé leur confiance en lui, et il le rendit bien. Il réintégra immédiatement Riks, qui reprit sa place de soldat, puis nomma un nouveau commandant, et annonça une vague de recrutement et de promotion à venir dans les prochaines semaines. Il reprenait d'une main de maître l'institution, sous le regard de Coroks, qui approuvait très largement l'initiative. Le général de la NDA avait accepté de laisser son commandant s'occuper de cette partie, pendant qu'il gérait la suite de l'enquête, et notamment le jugement à venir des traîtres.
Artémis, en attendant, s'était faite une petite place chez les Rangers. Dès le lendemain du chaos à la place centrale, elle s'est proposé pour aider en échange d'un endroit où dormir et manger. Elle donnait donc un coup de main pour les courses, la couture, ou encore la préparation des repas. Tout le monde chez les Rangers louait son engagement, et bien qu'elle soit une déviante, elle faisait autant voir plus de travail que les humains. Si certains étaient parfois assez véhéments avec la jeune fille, certains plus hauts gradés n'étaient jamais très loin pour recadrer les cadets.
En ville, la semaine fut à la reconstruction du lien avec les habitants. Les patrouilles de Rangers avaient ce double objectif de surveiller la ville tout en montrant bien qu'ils étaient là pour la population. Cela prendrait du temps, mais la majorité des citoyens semblaient enfin prendre conscience de ce qui s'est réellement jouée. Au détour d'une patrouille, une mère accompagnée de son fils demanda même aux Rangers comment se portait la jeune fille qui les avait aidées à évacuer. Elle était rassurée de savoir que les combattants s'occupaient d'elle, et cette nouvelle se répandit largement en ville. Certains étaient réticents au fait de garder une déviante en ville, mais la majorité pensait avant tout à l'avenir de cette orpheline, qui avait ému la foule lors du discours.
Mais après cette longue semaine, il restait beaucoup à faire. Et une autre grande cérémonie se préparait au QG des Rangers. Le crépuscule approchait, et la dernière patrouille du jour rentrait tout juste, alors qu'une foule de combattants s'était installée sur la place du QG. Le général Amari et son commandant était à l'avant, sur une estrade monté pour sa passation de pouvoir, et qui était depuis rester en place le temps des multiples cérémonies s'étant tenu toute la semaine. L'escouade de patrouilleur ne prit même pas le temps de se changer et rejoint directement le reste des troupes. Coroks était là aussi, installé un peu en marge de la foule. Riks était accompagné d'un soldat à peine plus âgé que lui et d'un autre lieutenant. Artémis, elle, discutait avec deux soldates d'une vingtaine d'année qui était chez les Rangers depuis quelque temps, et qui avait pris l'habitude de manger avec la jeune déviante. Alors que tout le monde était enfin réuni, Amari s'éclaircit la voix, signifiant au passage que sa prise de parole allait commencer. Les voix qui s'élevaient encore se turent rapidement, alors que toute l'attention était tournée vers le général. « Bonjour à tous. Je pense que vous avez pris l'habitude cette semaine de mes discours, et je ne vais pas m'éterniser dessus encore aujourd'hui. Tout d'abord, je souhaite remercier tous ici présents pour ce que vous avez fait depuis une semaine. Les citoyens de Lestall reprennent espoir en nous, et la mauvaise passe que nous avons traversé sous l'ancien général est enfin derrière nous. Il y a encore beaucoup à faire, évidemment. Mais je suis fière de vous tous, ici présent, pour votre engagement. » La prise de parole fut accompagnée par des applaudissements, qui résonnèrent dans toute la place. Ils se turent après quelques instants, laissant le général reprendre. « Depuis mon accession au grade de général, il y a eu de nombreuses promotions, et plusieurs recrutements. Aujourd'hui ne fait pas exception à la règle, car nous avons une promotion et un recrutement. Nous allons donc enchaîner les deux cérémonies dès maintenant. » Il marqua une pause, cherchant Riks du regard. « Soldat Riks, rejoignez moi sur l'estrade. » La demande surprit le jeune homme, mais les deux combattants avec lui le poussèrent doucement. Il traversa la foule qui s'ouvrait sur son passage jusqu'au promontoire.
- Soldat Riks, vous êtes chez les Rangers depuis un certain temps déjà. Vous avez participé à de nombreuses patrouilles, des enquêtes, et même des combats. Vous avez décidé de protéger une déviante, que vous pensiez innocente, même si cela venait à mettre en danger votre carrière. Le jeune homme était gêné qu'on rappelle bien cette partie, mais il remarqua le regard fier de nombreux autres soldats.
- Je n'ai fait que mon devoir de Rangers, général. Nous devons protéger tout citoyen de Lestall, humain comme déviant. Cette phrase était aussi destinée au colosse qui observait au loin, mais ce dernier n'en dit rien de plus.
- Et vous l'avez fait avec brio. Vous avez prouvé que vous étiez prêt à vous donner corps et âme pour la cité et ses citoyens, nous vous saluons pour ça. Un tonnerre d'approbation s'éleva de la foule, avant que le général reprenne. Soldat Riks, êtes vous prêt à encadrer des combattants, préparer des missions d'envergures, gérer des patrouilles, et prendre une part plus importante dans le commandement des troupes ? Cette phrase était connue de tous, et elle signifiait beaucoup.
- Je suis prêt, général. Quelques instants d'hésitation, avant que le regard du soldat, déterminé, ne se plante dans celui de son général, et que la réponse tombe.
- Dans ce cas, par les pouvoirs de généraux, je vous nomme lieutenant. Tâchez de faire honneur à vos prouesses passées, et montrez nous que ce choix était le bon. Le général tendit la main, que le nouveau lieutenant s'empressa de serrer.
Le nom de Riks résonna dans toute la place, alors que ce dernier redescendait de l'estrade pour rejoindre les autres lieutenants qui l'attendaient pour le féliciter. Artémis avait des étoiles plein les yeux en voyant celui qu'elle a autrefois simplement aider sur une affaire de vol, devenir l'un des lieutenants des Rangers. Mais elle n'était pas encore au bout de ses surprises. « Artémis, peux-tu me rejoindre ? » Lorsqu'Amari s'adressa à la jeune fille, elle crut d'abord rêver. Puis, elle vit la foule s'écarter pour la laisser rejoindre le général. Elle tremblait légèrement, mais fit finalement un premier pas, puis un autre, et s'avança jusqu'au promontoire, au côté du commandant et du général des Rangers.
- Artémis, bien que tu sois une déviante, et une orpheline à cause des actions de l'ancien commandant Iroc, tu as su t'affirmer chez les Rangers. Tu as pris part à de nombreuses tâches, et tu t'es intégré parmi les troupes. C'est quelque chose de très particulier pour quelqu'un comme toi, je me trompe ? La jeune déviante prit quelques instants pour réaliser ce qui s'était passé pendant cette longue semaine, où elle avait réussi à ne plus penser tous les jours à ce qu'elle avait vécu ce soir-là.
- Je ne sais pas si c'est particulier... Mais c'est quelque chose que j'ai grandement apprécié. Ce fut un grand plaisir d'aider les Rangers, encore aujourd'hui. La jeune fille s'inclina solennellement, alors que de nombreux applaudissements retentirent.
- Aimerais-tu pouvoir en faire plus ? Quand les applaudissements se calmèrent, Amari posa la question essentielle.
- Je... je voudrais faire plus, pour les Rangers, mais aussi pour cette ville. Artémis avait ce quelque chose dans le regard, l'envie de reconstruire quelque chose en elle, avec les Rangers.
- Serais-tu prête à te donner corps et âme pour protéger les citoyens de Lestall, veiller à ce que la paix règne, et que la vie puisse prospérer encore longtemps dans la région ? La question était importante, et tout le monde dans l'assemblée retenait son souffle, attendant la réponse d'Artémis.
- Je suis prête, général. Il fallut quelques instants à Artémis pour comprendre ce que ce serment impliquait. Mais c'était bien là le choix qu'elle voulait faire, celui de rejoindre les Rangers, en tant que combattante.
- Très bien. Dans ce cas, Artémis, c'est avec joie que je te nomme recrue des Rangers. Bienvenue dans nos rangs. Le général tendit sa main à la jeune fille, qui la serra avec assurance.
Les hurlements de joies ne tardèrent pas à monter de la foule de combattant, qui acclamait la nouvelle recrue. Riks n'hésita pas à donner de la voix, jusqu'à tousser. Les lieutenants durent l'aider à reprendre son souffle pour qu'il ne s'étouffe pas. Coroks ne se joint pas au cri, mais il offrit un regard approbateur à Artémis.
- Soldat Stephen, rejoignez nous s'il vous plaît. Quand le moment de liesse se calma enfin, le général demanda à un soldat un peu plus âgé que Riks de quelques années de venir.
- Oui, général ? Ce dernier s'arrêta au niveau de son supérieur, qui était entre lui et Artémis.
- Tu as déjà formé une recrue par le passé, et si mes souvenirs sont bons, tu as été un bon formateur. Accepterais-tu aujourd'hui de prendre cette recrue sous ton aile, pour lui permettre de s'épanouir chez les Rangers, tout en apprenant les codes et coutumes, pour devenir une grande soldate à l'avenir ? Artémis observa l'homme qui allait peut-être devenir son mentor, attendant la réponse.
- J'accepte, mon général. La réponse arracha un sourire au jeune dirigeant, qui se recula pour laisser l'apprenti et son mentor se serrer la main.
Les cris montèrent de nouveau pour féliciter autant la nouvelle recrue que le soldat, qui redevenait le formateur d'une future combattante des Rangers. Ce dernier était connu des autres troupes pour être quelqu'un d'aimable, compréhensif, et qui n'avait aucun souci particulier avec les déviants. Sous ses courts cheveux bruns, la jeune fille vit dans son regard marron la joie de pouvoir s'occuper à nouveau de former quelqu'un. « Bien. C'est ainsi que nous allons clore les cérémonies de ce soir. Je vous remercie à tous d'être venu, et je vous souhaite de passer une très bonne soirée. » Les deux plus hauts gradés redescendirent du promontoire improvisé, pendant que la foule de Rangers se dispersaient. Stephen proposa directement à Artémis de venir avec lui pour choisir une tenue adéquate, et lui expliquer un peu le fonctionnement de ces prochains jours avec son nouveau mentor. Riks lui se résigna à laisser la jeune fille avec une autre compagnie, alors qu'il suivait les autres lieutenants pour qu'ils lui expliquent les tâches qu'il aurait à réaliser lui aussi. Enfin, Coroks s'avança vers le général, pour lui parler un peu avant de repartir. Ce dernier fit signe à son commandant qu'il le rejoindrait juste après.
- Un problème, commandant ? Amari observa le colosse, qui ne laissait paraître aucune émotion.
- Aucun. Les choix d'aujourd'hui sont judicieux, je trouve. Le commandant de la NDA semblait plutôt content, même de la décision d'intégrer Artémis.
- Alors pourquoi venir me voir après coup ? L'homme soupçonnait quelque chose, mais il attendait de savoir la suite.
- Simplement par précaution. Artémis est peut-être une jeune fille qui semble calme et réfléchie, mais faites bien attention. Elle est comme tout déviant, et il se peut qu'elle perde un jour le contrôle. La mise en garde surprit le général, qui fronça les sourcils.
- Comment ça, perdre le contrôle ?
- Lorsqu'elle était en exil, quand je l'ai trouvé, elle est entrée dans une rage inhumaine. Elle était prête à m'éliminer. Heureusement pour elle, Riks était là et l'a calmé. Mais je vous conseille de faire attention à ça. Si la rage prend le dessus sur elle, je ne sais pas comment elle réagira face à ses propres alliées. Après sa mise en garde, Coroks tourna les talons, pour quitter le QG des Rangers.
- Très bien. Nous tâcherons d'y faire attention. Merci de nous en informer, commandant. Le général Amari observa le colosse partir, avant de se retourner pour rejoindre son commandant. Sa journée était loin d'être finie, et il avait encore beaucoup à faire.
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