Chapitre 36 : Eden
Quand je me réveil le matin du jeudi, je suis toujours allongé dans la carrière où je suis revenu après être allé me dégourdir les pattes et avoir abandonné Lydia. Quand je suis revenu, elle avait disparu. J'ai donc passé du temps à regarder les étoiles en me demandant comment aurait été les choses si tout avait été différent. Je me demande même si j'aurais eu une chance de sortir avec Lydia Peterson.
En rentrant, un bout de papier était scotché à la baie-vitrée. Je le décroche avant de courir m'habiller pour sortir ensuite Kay du lit et redescendre faire le petit déjeuné. Je n'ai toujours pas ouvert le message au moment où Kay descend en baillant bruyamment. Quant il le remarque, il me le montre avec un mine interrogative. Je ne lui réponds que d'un haussement d'épaule et il le déplie pour en lire le contenu.
Sans aucune expression sur le visage il le déchiffre puis me le tend ouvert pour que je puisse le lire à mon tour :
« RDV demain matin pour en finir. Papa. »
Succin et claire. C'est tout mon père ça, même si je le soupçonne d'être un zombi à la solde de mon grand-père. Enfin, c'est ce que mes cauchemars me laissent suggérer.
- Tu n'as pas dormi à la maison cette nuit.
- Nan. Je n'avais pas très envie de dormir alors je me suis baladé les trois quart de la nuit avant de tomber de fatigue dans la forêt.
Je passe sous silence mon altercation avec Lydia parce que même moi je ne sais pas quoi en penser et les critiques incessantes de Kay et d'Alice sur le sujet me tapent sur le système.
- On fait quoi aujourd'hui ?
- C'est toi qui décide. Je pense t'avoir expliqué l'essentiel. Sinon nous serons là pour t'aider.
Je me lève et le regarde droit dans les yeux.
- Et je ne te laisserais pas mourir, je te le promets.
- Je sais, Eden. J'ai juste peur que si tu doives choisir entre Lydia et moi, tu l'as choisisse elle.
Je recule et commence à ranger la cuisine.
- Elle sait se battre, je ne me fais pas de soucis pour elle. De toute façon elle en à marre qu'une bande de mec lui dise ce qu'elle doit faire.
Je m'arrête nette. Je viens de dire une connerie et mon esprit surchauffe. Espérons qu'il n'est pas fait gaffe à ce que j'ai dit. Je reprends très vite mes mouvements pour ne pas montrer mon trouble mais peine perdue.
- Comment tu sais ça ?
Je fais une grimace pas très sexy en serrant les dents avant de me relever pour affronter son regard inquisiteur.
- Parce que je l'ai vu hier soir. (j'anticipe ses questions) Mais je ne pensais pas la croiser et elle m'a forcé à parler avec elle comme avec son frère le matin.
- C'est tout ?
- Quoi c'est tout ?
- Arrête, Eden. Pas de mise au clair, pas d'éclair, pas d'engueulade.
Ma grimace refait surface et Kay roule des yeux dans une mimique agaçante.
- Qu'est ce que tu lui as dit ?
Je siffle presque entre mes dents.
- Qu'entre nous c'était... finis, pour de bon.
Mon meilleur ami souffle d'exaspération. Voilà ce que je voulais éviter.
- Fais-toi une raison, Kay. Je ne retournerais pas avec. Il faut savoir lâcher l'affaire des fois.
- Ce n'est pas dans ta nature.
Je frappe la table de mes mains ce qui la fait trembler et effraies Kay par la même occasion.
- Il est là le problème. Je ne suis plus le même gars qu'au début de l'année. Je suis près à abandonner ma relation avec Lydia et même ma chasse à la vengeance contre Kyle.
Je secoue la tête avant de lui intimer de laisser tomber. Je finis par annoncer que je pars faire un jogging. Sur le passage je chope mon portable et mon casque avant de claquer la porte derrière moi. Je mets la musique à fond et part directement vers la ville. Je rattrape même le jogging de Matthew, qui me regarde bizarrement alors que le dépasse.
J'ai besoin de penser à autre chose. J'ai l'impression que depuis quelques temps ma vie ne tourne qu'autour d'elle. Les gens ne me voient plus comme Eden mais plutôt comme l'ex de Lydia. Je ne sais même pas si on me voyait avant, j'ai toujours été invisible et ça ne me déplaisait pas. Pourquoi tout à changé ? Pourquoi tout change quand on se fait des amis ? Pourquoi Jayden a remit les pieds ici ? Je me pose énormément de question mais ça n'a pas de sens. Pourtant tout en aura un à la fin, j'en suis sûr. Cette semaine est la pire de ma vie.
Quand je reviens à la maison, tout le monde campe dans le salon visiblement en train de m'attendre. Jayden se relève et vient vers moi. Alice éteint la télé que tout le regardait plus ou moins. Même Lydia et Matthew sont dans la maison. On dirait une garçonnière.
- On devrait mettre au point un plan d'action.
- On n'a pas grand-chose. S'ils ont des armes automatiques, Malakay les désarmera et je me servirais de l'orage pour les désavantager. Mais on ne sait pas combien ils sont et quels sont les autres paramètres, comme les pouvoirs, les créatures qui les accompagneront. On a juste le choix de l'endroit, ça nous donnera peut être une chance.
Il acquiesce. Je les laisse parler entre eux pour aller prendre une douche. Une fois enfermé dans la petite pièce, je laisse couler l'eau sur mon corps recouvert sueur. J'ai tellement de souvenir qui me reviennent en tête ces temps-ci. Comme si j'allais mourir et que je voyais repasser toute ma vie devant mes yeux, comme un film.
J'y vois ma rencontre avec Kay dans la cours de récréation en petite section, comme si nous étions destinés à être ami. Je me rappelle mon enfance avec Jayden et Kay, nous étions tout les trois les meilleurs amis du monde. Je me rappelle encore quand Jayden a commencé se transformé.
Il a du passer une semaine à la maison parce que ses yeux étaient violets en permanence et une autre à garder la bouche fermer à ne rien manger parce qu'il avait un mal de chien aux gencives. J'étais jaloux à cette époque là, parce que beaucoup filles venaient le voir. Pourtant physiquement rien n'avait changé, nous étions exactement pareils mais il dégageait dix fois plus de phéromones que moi.
C'est à partir de ce moment là que nous avons commencé à nous détestés. Ça devait être ma faute parce que j'étais jaloux, mais il ne m'aidait pas en se pavanant devant moi avec une fille différente à son bras chaque jour alors que j'étais invisible. D'ailleurs au début de l'année j'ai eu peur qu'il revienne et que Lydia ne me voit plus pour se jeter dans ses bras.
Je me rends compte que je suis complexé par mon corps, ma voix, ma façon d'être parce que j'ai toujours été dans l'ombre de mon frère. J'étais celui qu'on ne voyait pas, celui qu'on ne croyait pas parce qu'il ne savait pas imposer sa voix ou sa place. Physiquement nous nous sommes toujours ressemblés comme le reflet dans un miroir, mais nos caractères et nos comportements ont toujours été très distincts.
Je suis le vilain petit canard, timide et froid. J'étais toujours sur la défensive, comme agressé par tout ce qui m'entourait. Tout ça encore jusqu'à il y a quelques mois. Et pourtant je ne n'ai jamais eu la prévenance de mon frère, ça capacité à brosser dans le sens du poil et une aisance pour prendre la voix en public.
A aujourd'hui, je me rappelle aussi tout ce qu'il à fait pour moi depuis le début de notre aventure. Je me rappelle des balles qu'il a prit pour moi quand il était encore qu'un vampire, de la balle qu'il m'a enlevé du dos après que nous nous soyons fait enlever. Je me rappelle des moments qu'on à passé ensemble, des risque qu'il a prit pour calmer mes crises, ce qui lui a valut sa cicatrice. Je me rappelle les bons moments de notre voyage entre coupé des tueries qui nous ont donnés une réputation à travers le monde.
Mais il n'y a pas que ces souvenirs qui me reviennent en mémoire, il a aussi tout les bons moments avec Lydia. Toutes ces fois où nous avions des rendez-vous clandestins dans la forêt entre un loup et une jeune fille rousse. Notre premier baisé où j'ai dû la repousser et où elle m'a dit pour la première fois qu'elle savait ce que j'étais. Je me rappelle cette douche dont j'ai détruit la faïence en Russie où je l'ais faite louve et premier membre de ma meute.
J'ai eu beau tout gâché, ils sont tous restés et ils ont tous envies ou au moins ils veulent tous se jeter dans une bataille où nous ne savons pas si nous en reviendrons. Ce n'est pas une guerre. Ça ressemble plus à un règlement de compte sanguinaire.
Quand je sors de la douche, l'eau est froide depuis un bout de temps. Je retrouve Kay allongé sur mon lit en train de contempler mon plafond. C'est rare qu'on se retrouve ici en pleine journée.
- Eden ?
- C'est moi.
Je plonge la tête dans mon armoire à la recherche d'un caleçon je j'enfile par-dessous ma serviette avant de sortir un short en jean et un tee-shirt cintré. Je viens ensuite m'assoir à côté de lui.
- J'ai eu des nouvelles quant à la mort de mon père.
- A bon ?
- De l'ADN a été retrouvé et il correspond à ta mère.
J'écarquille les yeux. A vrai dire ça ne devrait pas m'étonner. Ma mère et celle de Lydia ont disparu juste après la mort de Charles. Ma mère est du genre à trahir et décevoir tous ceux qui l'entour.
- Je suis désolé.
- Tu n'y es pour rien.
- C'est de ma faute si ma mère à trahis ton père, c'est de ma faute si elle a décidé de tous nous envoyé au cimetière et que ton père ne l'a pas voulu. Il a dû se mettre sur son chemin et elle ne l'a pas supporté.
- C'est notre faute à tous.
Un sourire en coin se dessine sur mon visage. Il ne me laissera jamais tomber. Au final, nous restons tous les deux silencieux, perdus dans nos pensées.
- Je suis quand même désolé.
Kay rigole avant de se relever et de me pousser.
- Arrête de porter le poids du monde sur tes épaules.
- Jamais.
Je prends un coussin et lui envoie au visage. Nous rigolons tous les deux avant qu'il ne m'attaque à son tour et nous continuons sur notre lancé comme deux gamins de dix ans. Et pourtant nous en avons bientôt dix-huit tous les deux.
Après nos gamineries, nous rejoignions nos amis qui sont silencieux. Une tension palpable nous enveloppe maintenant. Nous étions enfin tous conscients de la dure réalité des choses. Même Alice reste de glace, toujours au côté de mon frère.
Quelques heures plus tard, après des discussions silencieuses sur tout et rien afin de détendre l'atmosphère, Lydia, Nial et Matthew rentrent chez eux. Jayden et moi proposons aux garçons de rester dormir à la maison. Ils acceptent. Deux vont dormir dans le lit de mon père tandis que Thomas dormira sur le canapé. Jayden et moi sortons un matelas gonflable, bougeant la table basse pour avoir la place de le posé. Une fois gonflé, Jake s'y allonge.
Mon frère, Alice, Kay et moi montons ensuite à l'étage pour une nuit réparatrice. Même si je doute que nous puissions dormir. Nous sommes tous nerveux et effrayés par ce qu'il risque d'arriver. Dans la peine ombre de la lampe de chevet, Malakay et moi nous regardions dans le blanc des yeux.
- J'ai peur.
- Moi aussi.
- Le loup-garou sanguinaire dont la réputation traverse le monde à peur ?
Je lui ris au nez.
- Tu crois que les autres dorment ?
- Je peux t'assurer que Jayden et Alice ne dorment pas. Jake et Thomas parle aussi de ce qui arrivera demain, comme nous. Allan et Peter ronfle comme des ours par contre.
Kay fait une grimace de dégoût avant de rire aux éclats. Si tout pouvait être aussi calme et serein comme à l'instant. Mais j'ai apprit une chose cette année. Chaque fois qu'on croit retrouver une stabilité, un semblant de calme, quelque chose vient perturber cet équilibre.
Vers sept heures du matin, je me lève emportant Kay dans mon sillage. Nous retrouvons Alice et Jayden assis l'un près de l'autre sans toucher à leur petit déjeuné. Thomas dort toujours comme une masse alors que Jake regarde le plafond, des poches sous les yeux. Il n'a pas dû beaucoup dormir.
- Vous êtes prêt ?
Je me retourne vers Jayden et hausse les épaules. Je pense que nous le saurons quand nous y serons.
- Je vais protéger la maison par un sortilège qui empêchera quiconque d'entrer. Il faudra tu reste à l'intérieur, Alice.
Elle acquiesce, pas spécialement heureuse d'être mise sur la touche mais Jayden semble plus que satisfait qu'elle soit protégée dans une bulle à l'abri des combats. Qu'est ce que j'aimerais en faire de même avec la fille que j'aime. Je suis sûr que Matthew serait d'accord avec moi.
- Mettez des vêtements qui libèrent vos mouvements et auxquels vous ne tenez pas trop.
Ils opinent tous comme des soldats recevant des ordres. Au même moment, la petite famille voisine entre dans la maison, tous habillés aussi de tenues de sport. Allan et Peter sortent à leur tour de leur chambre. Nous étions tous au complet. Pendant que les derniers se changent, je prépare un semblant de petit déjeuné pour tout le monde afin que nous prenions des forces.
Quand vient le temps de partir, nous trainons tous plus ou moins les pieds. La tension est visible sur les visages de mes camarades et dans les muscles des garçons. Nous courrons tous à notre perte. Nous ne savons même pas combien serons nos adversaires.
Jayden embrasse langoureusement sa petite amie. Un pincement au cœur me force à détourner le regard qui s'arrête sur le corps de Lydia alors qu'elle aussi ne les regarde pas en face. Qu'en elle relève les yeux, je me détourne subitement sans aucune subtilité. Je n'ai jamais été doué pour cacher mes sentiments.
- Jayden.
Il se détache de son rocher et nous rejoint. Kay lève les mains, paumes tendues vers la maison et récite une formule dans une langue incompréhensible alors qu'un voile blanc recouvre la maison comme une cloche. Quand je tente de m'approcher, une décharge électrique de grande intensité parcours mon corps. Elle ne m'atteint pas mais je n'imagine pas quelqu'un sans mes pouvoirs y survivre.
Un dernier regard vers notre foyer avant de marcher tête haute vers notre purgatoire. Jayden porte une petite sacoche où il a dû mettre des graines. La plupart d'entre nous n'étant habillé que de l'essentiel, aucun ne tremble de froid. Le ciel est gris et un vent glacial souffle à travers les feuilles. Heureusement que nous n'annonçons pas l'apocalypse.
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