Chapitre 3 : Eden

Un hurlement m'appelle quelques heures plus tard. Je pars au ralenti avec un profond désintéressement. Je m'enfonce dans la forêt pour faire mon petit rituelle. À peine ais-je le temps de retirer mon pantalon qu'une voix m'interpelle. Je le remets et me retourne vers la torche qui me suit.

- Que fais-tu là, Eden ?

- Retourne chez toi, Lydia.

Chuck m'appelle une nouvelle fois.

- Pourquoi tu es torse nu ?

Un grognement me parvient. Je me retourne et me place devant elle. Et merde. La meute entre dans mon champ de vision et Lydia semble totalement perdue.

- Tu as oublié notre marché, Carter ?

- Non. Mais elle me colle depuis des heures. Je te jure que je fais tout pour qu'elle reste loin de moi. Je ne lui veux pas de mal. Je t'en supplie.

Lydia pose une main sur mon épaule. Je tressaille.

- Que se passe-t-il, Eden ?

Sa main entre en contact avec la blessure dans mon cou. Elle me retourne rapidement et plaque le faisceau de sa lampe en face de la blessure. Et merde, encore merde.

- C'est Chuck ? C'est pour ça que tu ne veux pas t'approcher de moi ?

- Reste en dehors de tout ça, Lydia.

- Non ! Dis-moi !

- Rentre chez toi !

Elle a un mouvement de recule et j'ai toutes les peines à garder mon calme. Elle baisse la tête, surement déçue, et s'en va. Je ne pouvais pas faire autrement. Ma colère redouble et je n'ai pas la force de me déshabiller, je me transforme donc et rejoins le groupe. Ma colère enfle et je ne peux retenir le coup de patte qui vient heurter la truffe de Chuck, lui laissant trois entailles en travers. Je sens sa colère dans mon esprit. Un combat se déclenche alors et je pars les coups de mon adversaire. Il est fort, bien plus fort que moi et ainsi prend vite le dessus sur moi. Une griffure vient parcourir mon torse, j'ai de plus en plus de mal à me défendre et sa gueule vient emprisonner mon cou au moment où je suis trop faible pour rester un loup. Je vois ses yeux noirs me transpercer.

- Tu as intérêt à te soumettre sale chien ! Je ne vais plus être gentil longtemps.

- Si tu la plaques, je te jure d'être obéissant !

Chuck recule et regarde ses acolytes. Comme si leurs avis étaient importants.

- D'accord. Alors soumets-toi !

Il grogne et je baisse la tête jusqu'au ras du sol, les oreilles en arrière. Il semble satisfait et s'éloigne.

- Demain, on part en balade. Pas de retard, sinon tu passeras un mauvais quart d'heure.

- Quoi ?! Et tu l'as envoyé chier ?!

- Oui. Et Chuck m'a enchainé. Je sais. On peut aller en cours maintenant ?

Lydia passe près de nous sans un regard pour moi. Je ressens un pincement au cœur, mais je n'avais pas le choix.

- Salut, Lydia !

Elle se retourne vers Kay, lui sourit et entre dans la classe.

- Tu nous l'as vexé !

- J'y suis pour rien !

Les cours passent lentement et entre deux, Lydia disparait. Je m'inquiète et demande à sortir. Une fois dans les couloirs, rien ne me parait suspect et je n'ose pas entrer dans les toilettes des filles. J'écoute mais rien ne semble bouger. Jusqu'à ce qu'un bruit de chute m'interpelle. Je me dirige vers les vestiaires et entre, trouvant Lydia recroquevillée contre un lavabo, un loup noir devant elle. Je ne réfléchis pas et me place entre eux deux alors que le loup se préparait à mordre. Je reçois la morsure dans le flan. Ça fait un mal de chien. Le loup semble surpris et déguerpis aussi vite. Je soulève mon tee-shirt pour voir comment ça se présente. Ce n'est pas profond, je devrais survivre.

- T'es malade ! Il aurait pu te tuer !

- Toi aussi. Alors arrête de crier.

Elle se renfrogne mais entreprend quand même de laver la blessure. L'eau sur ma chaire à nue me provoque une terrible douleur et je lui attrape le poignet pour qu'elle arrête. Elle me regarde de ses prunelles d'un vert profond et je n'arrive plus à les lâcher. Ma poigne se dessert mais je garde toujours son poignet dans ma main. Nos visages sont tellement proches, j'ai tellement envie de l'embrasser. Je rapproche mon visage du sien et elle en fait de même mais avant qu'on ait pu seller se baiser, je me détourne et la lâche pour finir par sortir de la pièce. Je me retrouve dans les toilettes, essoufflé et irrationnel. Je l'avais, devant moi, à ma porté, elle en avait envie aussi et je l'ai laissée là, en plan. Je me laisse glisser contre le mur et jette la tête en arrière. Je suis trop con. Mais qu'est ce que Chuck voulait faire en la mordant ? Je plisse les yeux et ma colère monte. Il veut en faire une louve.

Je me relève aussitôt et pars à sa recherche. Son odeur de chien mouillé m'attire et j'entre dans le vestiaire des garçons pour plaquer Chuck contre l'un des casiers. Son sourire s'efface et il demande à ses chiens de ne pas bouger.

- Qu'est ce que tu allais faire ?

Son sourire réapparait.

- Mais rien. Juste une bonne louve obéissante que tu ne pourras pas protéger de la vie que tu détestes tant.

Je frappe le casier derrière lui et recule. Je sens la colère affluer dans toutes les parcelles de mon corps, je sens mes os se transformer, je sens les poils parsemer mon corps et au final, je finis à quatre pattes devant mon alpha attitré.

Mes sens s'aiguisent encore plus avec ma transformation et ma colère emplit. J'entends le cœur de Chuck battre à tout rompre, j'entends les pleurs de Lydia dans le vestiaire à l'autre bout du couloir, j'entends le sang battre dans les veines des hommes qui m'entourent attendant un geste de leur alpha. Mais ce que j'entends surtout, c'est les os craquants de Chuck qui ne se contrôle plus. Il se transforme et écoute Lydia. Je sens son sourire.

Alors que je posais une patte devant moi, une voix retentit dans ma tête. C'est celle de Chuck mais elle ne s'adresse pas à moi mais à lui même.

« Qu'est ce qui m'a prit de le transformer ? Je n'ai jamais été confronté à un loup aussi désobéissant. Avec Lydia, je pourrais en faire ce que je veux. »

Les autres loups parlaient. Certain se demandaient si Chuck avait besoin d'aide, d'autre voulaient partir en courant sachant de quoi j'étais capable et ce que pouvait faire leur alpha. Et ce qui me brisait le cœur fut les pensées de Lydia.

« Qu'est ce que j'ai fait de mal ? Entre les coups de maman et Chuck, la méchanceté de mon petit ami et le caractère bipolaire d'Eden. Pourquoi je mérite de me faire jeter par le garçon que j'aimais et celui que j'aime ? »

Déconcentré et profondément affligé, je ne remarque pas Chuck charger et la morsure qu'il m'inflige à la gorge me fait hurler. Un coup de patte m'atteint sur le dos de justesse avant qu'elle ne touche mes yeux. J'entends Lydia courir. Si je reprends un coup, je me retransforme. Les gars comprennent qu'elle arrive et déguerpissent alors que Chuck continue son assaut que j'esquive comme je peux. La porte s'ouvre, stoppant Chuck dans son mouvement. Il me regarde pour me faire comprendre ses intentions et se dirige vers elle. Malgré mes blessures et mon pelage maculé de sang, je m'interpose entre eux, tous crocs dehors. Elle frissonne, je le sens, mais elle ne bouge pas. Elle se demande surtout qu'est ce que des loups font au lycée mais que surtout elle m'a reconnu et qu'elle se pose des questions sur mes deux présences ici. Chuck s'assoie et me laisse partir.

- Ce n'est pas finit Carter. Tu ne pourras pas la protéger éternellement et toi non plus. J'ai compris une chose aujourd'hui...

- Laquelle ?

Un sourire s'affiche sur sa face sans le voir vraiment, je le sens énormément.

- Tu le sauras bien assez tôt.

Sur ses mots, il s'en va en marchant tranquillement dans les couloirs. Je pars dans le même sens, un regard pour cette fille que j'aime de plus en plus, et cours jusqu'à chez moi, loupant la fin de la journée.

Il est dix-neuf heures quand elle toque à ma porte. J'ai du mal à bouger et je ne supporte pas ce pull qui cache les morsures. Quand je lui ouvre, je ressemble à un cadavre et elle semble avoir pleurée toute l'après midi. Elle entre et s'assoie sur mon canapé. Je ne sais pas vraiment quoi lui dire et je prends énormément sur moi pour ne pas grimacer en m'asseyant près d'elle.

- Tu n'as pas chaud ?

- Non, je crois que j'ai attrapé quelque chose.

- D'où ton allure de zombi.

En vrai je crève de chaud mais je n'enlèverais pas mon pull devant elle. Elle regarde constamment devant elle et je ne peux plus me retenir. Je prends son menton et retourne son visage face à moi.

- Pourquoi tu as pleuré ?

Je connais une partie de l'histoire, mais je veux voir si elle est prête à me parler ou si elle va me mentir.

- Je me suis fais jetée par Chuck.

- Ça va ?

- Ça pourrait aller mieux.

Elle reste quelques secondes sans rien dire puis elle fouille dans son sac.

- J'ai prit tes cours et je te passe mes notes si tu veux.

- C'est bon. Je ne suis pas très assidu.

- Je sais.

Elle me sourit et je lui réponds. Elle est tellement belle. Ses cheveux flamboyants m'hypnotisent comme les flammes d'un feu et le vert de ses yeux lui va tellement bien. A ce moment j'aimerais tellement lui dire que je l'aime, j'aimerais lui parler de mon secret, j'aimerais tellement embrasser ses lèvres pulpeuses.

- Qu'est ce qu'il y a ?

- Rien. Je te trouve belle.

Elle écarquille les yeux.

- T'as pas le droit de me dire ça alors qu'à chaque fois que j'essaie de me rapprocher de toi tu t'esquives.

- Ma vie est trop compliquée. Je ne veux pas que tu subisses la même chose en restant avec moi.

Elle se lève, visiblement agacée.

- Qu'est ce que je dois comprendre ?! Que tu n'es pas assez bien pour moi ?!

Je m'apprête à répondre mais elle me coupe.

- Tu ne sais pas à quel point ma vie est pourrie, à quel point je suis mal dans ma peau, à quel point j'aimerais que tout change !

- Je sais...

- Non tu ne sais pas ! Ma mère me frappe dès qu'elle peut et mon frère ne peut pas me défendre car il n'est que très rarement à la maison. Chuck est violent. Quand quelque chose ne lui plaît pas, il passe ses nerfs sur moi et il se fait pardonner avec du sexe. Tu ne comprends pas à quel point ton comportement me déroute. Un coup tu es super gentil et la seconde d'après tu me repousse. Qu'est ce que je dois faire pour que tu me dises ce qu'il se passe ?! Tu ne sais rien !

Je me lève et la regarde dans les yeux.

- Si je sais ! Parce que tous les soirs je vois ta mère te frapper pour des raisons stupide. Chuck se vente dès qu'il peut d'avoir une copine obéissante. Alors si je sais !

Ses yeux se remplissent de larmes alors que je ne décolère pas. Oui, elle ne le savait pas, mais ce n'est pas une raison pour rejeter toute la faute sur moi. Je recule, passe une main dans mes cheveux jusqu'à rencontrer ce putain de pull. Je le retire aussitôt et pars dans ma cuisine. Je l'entends retenir un cri face aux différents pansements imbibés de sang que j'ai sur le corps. Ses pensées se demandent comment j'ai pu finir ainsi. Elle me suit avant que je ne puisse ouvrir un placard, elle me retourne vers elle et m'embrasse. Je suis un peu pris de court et ne lui rend pas tout de suite. Mais je l'ai tellement attendue, elle contre mes lèvres, elle a moi, elle dans mes bras, n'en sortant jamais. Je finis par lui rendre, la prenant dans mes bras et la serrant contre moi.

Je sens mes os craquer et mes griffes sortir. Je la repousse aussitôt et baisse la tête. Mes crocs sortent. Je n'arrive pas à me contrôler, je n'arrive pas à arrêter ma transformation et j'ai peur qu'elle découvre tout.

- Ça va ?

Elle s'approche de moi alors que je cache mes griffes. Je ne pourrais pas revenir en arrière et je ne veux pas la blesser. Avant qu'elle ne me touche je cours vers la bais-vitrée et sors. Je ne prends pas le temps d'enlever mes vêtements et une fois assez loin dans la forêt je laisse mon loup sortir. Je m'assoie et commence à pleurer. Pour une fois que je pouvais être heureux, je gâche tout.

Une petite voix m'appelle.

- Eden ? Tu es là ? Qu'est ce qui ne va pas ?

Chier. Je retourne sur mes pas toujours sous forme poilue et la retrouve près de mon jardin, essayant de ne pas se briser de nouveau une cheville. Elle me sent ou me voit et vient dans ma direction.

- Eden ?

Elle me regarde en prononçant mon nom. Je ne bronche pas puis tourne la tête histoire de faire croire que je ne pense pas qu'elle me parle.

- Eden, je sais que c'est toi.

Je garde la tête dirigée vers la forêt. Non impossible. Elle ne peut pas savoir.

- Chuck c'est transformé devant moi dans les vestiaires et à chaque fois que j'étais avec toi, j'avais le pressentiment que c'était toi. Aujourd'hui tu m'as prouvé à deux reprises que tu étais les deux à la fois.

Ce n'est pas possible.

- Si bien sûr que si, c'est possible. Je ne sais pas comment mais je t'entends et je sens ta présence. Je ne pensais pas que c'était possible avant que Chuck me le montre.

Elle s'arrête et s'assoit près de moi. Je la regarde par intermittence comme un chien qui n'est pas sûr de son choix. Je ne sais pas quoi en penser, je ne voulais pas qu'elle sache, encore moins par Chuck.

- Pourquoi tu ne te transformes pas.

Je tourne la tête à l'opposé pour qu'elle ne voit pas ma gêne. Ce n'est pas comme si j'étais nu.

- Je comprends.

Ah ! Foutues pensées ! Je m'allonge les pattes sur les yeux. Ne pense à rien, ne pense à rien, ne pense à rien.

- Tu es trop drôle !

Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle. Je la regarde. Quand elle est assise elle semble tellement plus petite que moi. Elle enlève son manteau et me le tend. Je ne comprends pas jusqu'à ce qu'elle se tourne. Je pèse le pour et le contre avant de prendre son manteau dans ma gueule et de rentrer chez moi. Je le dépose sur le canapé et monte dans ma chambre au moment où elle met un pied dans ma maison.

Je passe un caleçon et un jogging au moment où elle déboule dans la pièce. Elle pose ses yeux sur mon corps et je souris espiègle. Elle lève les yeux au ciel et approche sa main de la morsure que j'ai prit à sa place. Il n'en reste qu'une légère trace avec des croûtes. Au dessus de mon tatouage elle remarque la trace de dent que m'a faite Chuck pour me transformer.

- Chuck t'as transformé.

- Oui.

Alors qu'elle garde le silence, le regard absent rivé sur mes blessures un hurlement me parvient. Je regarde par la fenêtre même si je ne peux pas les voir.

- Je dois y aller.

- Quoi ?

- J'ai promis à Chuck de rester avec lui.

- Tu te fous de moi ?

Je la regarde dans les yeux, puis descends les escaliers en retirant mon jogging. Je sais qu'elle me suit et qu'elle n'a pas du tout envie que je parte, mais je n'ai pas le choix, si je veux qu'elle soit un minimum en sécurité. Alors je pars, sans un regard, me transformant aussitôt dans mon jardin.

Je retrouve la meute. Ils m'entourent tous et Chuck reste avec moi.

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