31 - RENZO

RENZO

Pourquoi faut-il qu'elle me pousse dans mes retranchements et n'en fasse qu'à sa tête ? Merci à orrace57 FIBULON pour leur suggestion de titre.

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Vendredi 30-11-18 | Appartement de Renzo, 4 rue Dancourt, 75018 Paris

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La porte de ma chère voisine claque. Tout comme je l'ai fait en sortant de son appartement, elle doit vouloir m'envoyer un message simple « Je me casse connard ». Pas de souci ma belle Italienne. Je me saisis d'un CD et le glisse dans la fente. Voici ma réponse...

La voix rauque de Bon Scott, le chanteur de AC/DC, gicle de l'enceinte. Juste assez pour que Perle l'entende. Pas question que je fasse chier mes autres voisins avec notre nouveau mode sonore de communication.

Niché sous les toits, mon atelier me permet d'être dans ma bulle et personne ne monte dans mon antre. Et c'est pour une de ces raisons que j'y passe autant de temps.

Assis devant le triptyque, je savoure mon café et tourne dans ma tête ce qui s'est joué ce matin. Et je ne sais même pas pourquoi, je m'adresse à son portrait dissimulé par ses longs cheveux.

Tu es une vraie chieuse. Tu ne pouvais pas te taire et te contenter de jouir ?

Merde ! Je venais de lui offrir tellement de plaisir avec ma bouche qu'elle a dû en perdre la tête. Je ne vois pas d'autres explications.

On était pourtant d'accord, Perle. On ne veut pas de liaison à la con.

On a assez donné dans nos deux dernières relations, et pas question de remettre ça. On veut juste passer du bon temps sans se prendre la tête.

J'ai l'impression de l'entendre me répondre.

Tu trouves que c'est aussi simple que ça entre nous ?

Justement, ça devrait l'être ! Je n'ai rien d'autre à t'offrir.

On frappe à la porte et l'espace d'une seconde, je me dis que Perle vient me retrouver pour discuter de la situation. Mais je déchante en voyant Gianni.

Ciao, fratello.

Ciao.

Je laisse le passage ouvert et reviens dans mon studio.

— Quel accueil ! La nuit a dû être bonne, se marre-t-il.

— Par son absence.

— Perle est toujours déchirée ?

— Elle a dormi comme un bébé.

— Et toi ?

Je lui tends un café et reprends ma place face au triptyque.

— Je l'ai badée.

Gianni s'assoit à côté de moi et découvre mes peintures.

— C'est Perle ?

— Ouep !

— Elle sait que tu vas exposer ces moments intimes de sa vie ?

— Tu me prends pour qui ?

— Pour un trou du cul !

Mon poing atterrit dans sa mâchoire juste pour le faire grimacer.

— Ne déconne pas ! Pas question que tu abîmes cette œuvre d'art, me désigne-t-il sa tronche.

— Perle les a découverts et m'a donné son accord pour que je les expose. De toute façon, on ne voit pas son visage.

— Alors pourquoi tires-tu la gueule ?

— C'est terminé entre nous.

Ma réponse a fusé sans que je prenne le temps d'y réfléchir.

Est-ce que c'est le cas ? Est-ce que c'est ce que je veux ?

Le dire à voix haute me fout royalement les boules. Je penche mon buste vers l'avant, mes coudes prennent appui sur mes genoux et ma tête dodeline entre mes mains.

— Qu'est-ce que tu as encore branlé ? C'est une super nana et...

— Justement, elle l'est trop !

— Tu veux dire qu'être heureux te fait chier ?

Gianni a-t-il raison ? Ai-je réagi de peur d'être heureux ?

— Elle m'a donné un surnom...

— Elle t'a appelé « Petite bite » ?

— Tu connais mon matos, c'est impossible.

Gianni continue de se foutre de ma gueule. Pourtant il sait ce qu'on ressent en étant largué par une nana. Lui aussi, il en a bavé en se retrouvant tout seul. Pourtant, il a toujours foi en la vie. Certes, il s'amuse tout autant de moi, mais il ne ferme pas la porte aux sentiments.

Alors pourquoi n'en suis-je pas capable ?

— Allez, balance, que je me marre !

Je n'arrive pas à le lui dire, car je sais qu'il va se foutre de ma gueule. Mon meilleur ami n'aura pas tort, même moi, je trouve débile de donner autant d'importance à ces deux mots.

Je suis ridicule.

— Mon Loup !

Gianni éclate de rire et évite une boule de chaussettes sales.

— Non, mais t'es sérieux, mec ?

— Très sérieux, même.

— Je sais bien que tu ne veux pas laisser parler tes émotions parce que tu as peur de douiller. Mais là, tu abuses !

— Il n'y a pas de sentiments à refouler parce que je n'en ressens aucun pour elle.

— Alors, arrête de nous emmerder avec tes états d'âme. Ne te cherche pas d'excuse. Si tu ne veux plus la baiser, tu n'as pas besoin de te servir d'un motif aussi minable.

— Tu m'emmerdes !

— Parce que tu sais que j'ai raison. Reconnais que Perle n'est pas juste une nana qui te sert de vide couille.

— En plus, je ne l'ai même pas baisée ce matin.

— Alors pourquoi « Mon Loup » ?

Je souris fier de moi avant de lui en donner la raison.

— Je l'ai satellisée.

— Donc, c'est normal qu'elle te vénère ! Tu aurais dû être heureux au contraire.

— La première fois, je l'ai été, mais je n'ai pas apprécié ce que j'ai ressenti là, je lui montre mon palpitant de l'index.

— Tu le lui as dit ?

— Tu me prends pour un canard ?

— Arrête de te planquer derrière ta trouille !

— Je me préserve. Elle n'a pas réglé son histoire avec son Boss. Et puis...

— Quoi ? Je sais qu'il y a autre chose.

Il me connaît par cœur et a probablement capté ce qui me fout la trouille avant même que je l'admette.

— Elle bosse avec mes darons et les apprécie.

— Ok... Je comprends.

Gianni pose sa main sur mon épaule. Il la serre, le temps que je digère ce que je viens de lui avouer.

Mon ami s'agenouille devant moi et tente de me rassurer.

— Tu sais que Perle et Charlotte sont deux personnes différentes et distinctes.

J'approuve en secouant la tête de haut en bas. Ma jambe sautille à un rythme trop rapide. Mes doigts se tordent entre eux. Je ferme les yeux comme si ça pouvait empêcher les idées de me bombarder.

— Je ne peux pas prendre le risque.

— Tu ne peux pas où tu ne veux pas ?

— L'un ou l'autre, qu'est-ce que ça change ?

— Quand on veut, on peut... Tu captes. Alors tu tiens vraiment à arrêter ce début de complicité entre vous ?

— Il vaut mieux. Comme tu le dis, on en est au début. Ça sera plus simple de tout arrêter maintenant.

— Très bien. C'est toi qui vois. En attendant, il faudrait charger tes peintures.

— Allons-y.

Dire que je me sens mieux est un euphémisme. C'est le bordel dans ma tête. Mais j'ai une exposition à présenter ce soir. Je la prépare depuis des semaines. Alors je dois mettre de côté ma voisine et ce que je ressens pour elle.

Trente minutes plus tard, la camionnette de Gianni est chargée.

— Tu prends bien soin de mes bébés !

— Comme à la prunelle de mes yeux.

Mon ami me charrie tout en rigolant. Ce mec est un vrai rayon de soleil. Contrairement à moi. En descendant pour la énième fois de l'ascenseur, je serre contre moi la sacoche remplie de photos. J'y ai ajouté les dernières qui ont été prises ces jours-ci.

Forcément, elles concernent Perle. J'ai hésité à les emporter. Me battant entre le devoir et la raison.

Mais surtout en luttant contre mon envie de penser à elle. Perle est partout. Peu importe l'endroit où je pose mon regard, elle apparaît resplendissante, belle à en crever.

Et le hall de l'immeuble ne fait pas exception. Je ferme les yeux. Secoue la tête pour la déloger de mes rétines. Mais même l'obscurité de mon geste ne me permet pas de l'effacer.

Elle me sourit. Me défie. Elle me charme. Ses courbes m'envoûtent...

Putain. Cette déesse m'emmerde.

Je savais que c'était une mauvaise idée de sauter ma voisine.

— C'est bon ?

Oh oui, ça l'est !

— C'est nickel ! On se retrouve au Hangar.

Je passe mon casque, enfourche ma moto et démarre, alors que Gianni monte à peine dans sa camionnette. J'ai besoin de créer le vide avant de me rendre à l'ancienne halle réhabilitée par mon grand-père.

Je roule jusqu'à la Basilique du Sacré-Cœur. Je me gare près du parvis et sans même retirer mon casque, je me dirige vers la balustrade. Paris se déroule à mes pieds. La vue est toujours à couper le souffle et je ne sais pas pourquoi elle m'apaise.

Je reste planté devant ce fabuleux décor pendant quelques minutes. La visière ouverte, je respire calmement. Je vide ma tête. Je me laisse emporter par cet air d'accordéon joué un peu plus loin. Mon regard se perd sur ces couples qui se tiennent la main, qui se sourient, s'embrassent...

— Pourquoi ne suis-je pas heureux comme eux ?

J'étouffe. Je retire mon casque. Mais c'est trop tard. Cette vague de mélancolie me submerge. Ce qui ne me permet pas de retenir mes larmes.

Elles coulent comme un goutte-à-goutte en s'écrasant sur la pierre blanche. Les mains posées à plat sur la balustrade. Les bras tendus. Le buste penché vers l'avant. Je reste là sans pouvoir calmer cette déferlante.

Depuis quand n'ai-je pas pleuré ?

Je n'ai pas besoin de réfléchir longtemps. La dernière fois, c'était à l'enterrement de mon grand-père.

Il y a quatre ans que mes yeux sont secs. Alors pourquoi est-ce que je craque maintenant ?

Putain de gonzesse...

Elle me rend faible. Pas question de lui accorder ce pouvoir. Mes mains se crispent sur la pierre. Les larmes ont cessé de couler, mais pas celles qui vivent dans mon cœur.

Elles se perdent dans mon sang et transportent avec elles toute ma tristesse, ma colère et ce que je ressens pour Perle.

Voilà. J'ai noyé cette émotion destructrice.

Mon téléphone sonne. Pas besoin de regarder. Je sais que c'est Gianni. Il a dû arriver au Hangar et doit se demander où je suis passé.

Déterminé, je remets mon casque, récupère mon bolide et roule au plus vite que m'accorde ce quartier de Paris.

Montmartre.

Mon antre.

Je gare la moto près de l'entrée de l'ancienne halle. Je souffle quelques secondes les yeux fermés, bien à l'abri derrière ma visière.

Et j'aurais dû y rester...

— Ciao, Lorenzo.

Je retire mon casque pour gagner quelques secondes et tenter de calmer toute la merde qui se propage dans mon corps tendu.

— Qu'est-ce que tu fous ici ?

— Bon anniversaire, amore mio.

Je la regarde abasourdi. Certes, je suis complètement paumé depuis ce matin, mais je m'en souviendrais si c'était ma date de naissance. Par contre, la fureur que je ressens, elle, je me la rappelle bien en regardant cette femme, qui a fait de moi cet homme sans cœur.

— Tu n'as rien trouvé de mieux comme excuse pour te pointer ?

— Je n'allais pas rater ta première exposition.

— Tu as reçu un carton d'invitation ?

— Non, mais...

— Ça aurait dû te donner un indice sur mon envie de te voir ici.

— Allons, amore mio...

— Je t'interdis de m'appeler ainsi. Tu as perdu ce droit depuis quatre ans.

— Arrête de râler et embrasse-moi.

— Non, mais tu as craqué ?

— Tu ne te souviens pas de notre anniversaire ?

C'est quoi encore, cette idée à la con ?

— Celui de notre rencontre à Saint Rémy, le jour de mon vernissage.

— Et tu t'es dit. Tiens, si je lui rendais visite ?

— Tu n'es pas heureux de me voir ?

— Non.

Je descends de ma moto, la bouscule en la dépassant et entre dans le hall.

Et forcément, je tombe nez à nez avec Perle.

Putain de karma de merde.

∞ ∞∞ ∞

➥ Renzo s'offre un dialogue assez particulier entre la peinture de Perle et lui, non ?

➥ Gianni n'épargne pas son ami et lui dit ce qu'il pense de son attitude envers Perle. A-t-il eu raison ?

➥ Renzo tente de se détendre en admirant Paris depuis le parvis de la Basilique du Sacré-Cœur. Y est-il arrivé ?

➥ Renzo ne s'attendait pas à trouver Charlotte devant le Hangar. Pourquoi son ex est-elle vraiment venue ?

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📍 Dans le prochain chapitre de PERLE :

🎭 Entre prise de conscience et...

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🥰 Bonne journée, mes #Sexys #Love, gros bisous 💋

💗 Kty.Edcall.Autrice 💙



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