Chapitre 89 : T R A G E D I E

Hey ! Encore un chapitre pas corrigé haha, un peu trop de soirées cette semaine mdrr

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Alix ouvrit la boîte aux lettres. Il attendait un colis. Mais il n'y trouva qu'une seule lettre. Manuscrite, dans une enveloppe colorée et sans timbre, elle interpella le garçon. Son nom était inscrit dessus. Il décida la petite enveloppe pour en sortir la lettre. Aux premiers mots, quand il reconnu l'écriture d'Andrea, un grand sourire s'installa sur ses lèvres. La veille quand il avait essayé de lui parler au lycée, le garçon n'avait rien voulu savoir. Il était pressé, presque comme dans une manie et Alix n'avait pas insisté.

Tu es le premier garçon français que j'ai embrassé, et même s'il n'y avait d'amour que de l'amitié derrière ce geste, saches que ce n'était pas rien !

Alix lâcha un petit rire. Il reconnaissait bien son ami Andrea. Et ce baiser était un souvenir qu'il adorait. Il continua sa lecture :

C'est vrai quoi, un french kiss fait pas un vrai français, même si c'était dans un CDI pourri, ça ne s'oublie pas. J'me rappelle la façon dont tu m'as abordé alors qu'on ne se connaissait même pas, et que j'étais complètement minable à pleurer pour un garçon qui refusait de me voir, de prendre conscience que j'existais. Et simplement, tu as proposé de m'aider à me remonter le moral, et tu m'as embrassé. Et je dois dire que ça m'a surprit au début, mais finalement c'était bien. Je me rends d'ailleurs compte que j'ai été assez égoïste d'en vouloir à Éos pour le baiser avec Élias alors je ne vaux vraiment pas mieux...

Tu as su me redonner espoir et une épaule quand je voyais tout en noir, tu es aller engueuler Éos en plein cours de latin juste pour moi et ouais, t'es juste exceptionnel en fait !

Une fois de plus, Alix se laissa aller à un petit rire. C'était vrai, il avait été remonter les bretelles à Éos, pour un garçon qu'il ne connaissait que depuis quelques minutes.

Prend soin de toi... Ne laisse jamais personne te rabaisser, j'te dis ça parce que c'est important, même si je sais que tu n'es pas du genre à te laisser faire, je sais que tu mords parfois, et que tes remarques peuvent être acides, mais voilà, c'est quand même important de dire aux gens qu'on aime à quel point ils sont fabuleux et on les apprécie !

Ce coup-ci, il fronça les sourcils. Cette lettre prenait une tournure étrange. Il en vint même à se demander si Andrea n'avait pas pour projet de retourner aux États-Unis. Ça, il ne le permettrait pas. Peut-être qu'il avait le cœur brisé, mais ce n'était pas une raison pour prendre la fuite comme ça. Et puis dans cette histoire, pour une fois, Éos n'avait rien fait.

Et je sais pas si c'est la première fois que je te le dis, mais ce sera vraisemblablement la dernière, parce que je m'en vais, je pars pour un lointain voyage, le long voyage, celui dont on ignore tout, jusqu'à la destination finale, celui pour lequel on ne prends ni carte, ni boussole, ni bagages.

Alors voilà, je pense que je te devais ces quelques derniers mots griffonnés à la va vite mais réellement importants, pour te dire à quel point tu es exceptionnel, tous ceux qui te dirons le contraire sont soit des jaloux soit des menteurs, soit les deux. Ne change pas. Jamais.

« Quoi ? Pardon ? » S'exclama le garçon à voix haute alors qu'il était devant chez lui.

Il n'était pas sûr de bien comprendre, ni même de vouloir comprendre. Il n'était pas sûr de savoir ce qui serait le pire. Il fallait qu'il parle a Andrea, qu'il s'assure qu'il ne comptait pas faire une énorme bêtise. Il sortit son téléphone et composa le numéro du châtain, priant pour qu'il lui réponde et que tout cela ne soit qu'un horrible quiproquo. Après tout, ça ne pouvait pas être autre chose, à pas vrai ?

Mais Andrea ne répondit pas. Ni au premier appel, ni au second, et toujours pas au troisième. Ce n'était pas vraiment dans ses habitudes, mais il fallait avouer que ces derniers temps Alix aussi avait ignoré pas mal de ses appels, parce qu'il était avait beaucoup à faire avec Élias, parce que parler de ce baiser entre Éos et Élias avec le châtain était pour lui aussi douloureux. Il reconnaissait que ce n'était pas cool de sa part.

Alix se mit à courir vers chez le châtain. S'il ne voulait pas lui répondre, Alix allait directement aller le trouver chez lui. Il le titrerait du lit si il fallait mais il allait s'assurer que tout allait bien. Il fit un arrêt à l'abris bus pour vérifier les horaires, le prochain passage était dans huit minutes. Il voulut l'attendre, mais son mauvais pressentiment ne le lâchait pas, alors il se mit à courir vers chez son ami. Il essaya une fois de plus de l'appeler, mais encore une fois, il tomba sur sa messagerie. Entendre sa voix préenregistrée lui foutait la trouille. Et s'il ne l'entendait plus que comme ça dorénavant ? Si ces mots étaient les derniers qu'il lirait de lui ?

Non. Non. Non.

Il n'avait pas le droit. Andrea ne pouvait pas choisir de l'abandonner, sur un coup de tête.

Toujours cette foutue peur de l'abandon. Mais pour une fois, même en y réfléchissant bien, rationnellement, elle lui semblait justifiée.

Tout en courant, il composa le numéro d'Eos. C'était le seul à avoir une voiture, il pourrait être chez Andrea en un clin d'œil. Et puis il était grand temps que ces deux là mettent les choses au clair. Mais ce dernier ne répondit pas. Ça c'était nettement moins choquant, à croire qu'il était incapable de décrocher son téléphone. Ça exaspérait Alix. Il lui envoya un message.

À Éos :
Éos répond c important !
Envoyé à 18h08

À Éos :
C à propo dAndrea !!
Envoyé à 18h09

À Éos :
Ptn mais rép là !
Envoyé à 18h11

Alix faisait rarement des fautes en écrivant, même par messages, mais il n'avait clairement pas le temps de se concentrer sur l'orthographe au moment présent.

18h20, Éos le rappela enfin. Ça ne faisait de 9 minutes depuis le dernier message mais ça lui avait parut une éternité. Il décrocha instantanément en criant presque.

"Bordel Éos enfin mais qu'est-ce qui ne va pas avec toi, tu sais pas décrocher ton putain de téléphone !"

Sa voix tremblait légèrement mais plus a cause de à la panique que de la colère, il était essoufflé à cause de sa course. Éos demanda, se laissant lui aussi visiblement gagner par l'angoisse. Il réagissait toujours au quart de tour quand il s'agissait d'Andrea. Et dire que ce garçon était persuadé de ne rien ressentir...

"C'est quoi le problème avec Andrea ?"

"Je suis pas sûr, mais va voir ta boîte au lettres, j'crois qu'à toi aussi il a envoyé un truc, et putain j'ai peur qu'il fasse une connerie. Va chez lui, toi t'as une voiture, moi ça va me prendre des plombes."

Alix entendit de l'autre bout du fil le bruit métallique d'une boîte au lettres.

"Alors ?"

Puis un sanglot étranglé.

Merde.

"Éos ?"

"Ouais, ouais. Je..."

"Va chez lui Éos, j't'en supplie, ne le laisse pas faire de connerie. S'il te plait." Murmura Alix, à la limite de fondre en larmes une nouvelle fois.

Il entendit le moteur vrombir et ça le soulagea un peu. Éos allait le retrouver, Andrea irait bien, o le monde irait bien...

"T'es où Alix."

"Non, t'occupes pas de moi, va directement chez Andrea, juste dépêches-toi."

"Ouais, ouais je suis en route."

"Ok."

Le téléphone toujours vissé à l'oreille, Alix entendait les bruits de circulation, des crissements de freins et des coups de Klaxons. Éos avait l'air de rouler comme un fou, mais Alix était loin de lui en vouloir pour ça.

Encore une fois, la vie lui renvoyait en pleine face qu'il ne pouvait pas rester autocentré sur ses problèmes, car le monde autour continuait de tourner, et de partir en vrille.

Quand Alix arriva chez les grands-parents d'Andrea, la porte n'était pas verrouillée mais il n'y avait personne. Il fit le tour des pièces, unes à unes, et tomba des nues en arrivant dans la salle de bain. Il y avait du sang partout. Le petit tapis devant l'évier était orné d'une grande tache purpurine. Une main sur la bouche, Alix étouffa un cri silencieux. Non. C'était pas possible. Ça devait être une mauvaise blague. Oui, voilà tout. Ses amis lui faisaient une blague de très mauvais goût, une caméra cachée pour publier sur tiktok. C'était forcément une connerie de ce genre.

Quelques jours plus tard, la sentence était tombée, Andrea ne reviendrait pas. Jamais. La nouvelle avait circulé dans tout le lycée et Alix n'était pas sûr d'avoir passé une seule heure sans fondre lamentablement en larmes. Il se sentait un peu responsable, parce qu'il n'avait pas été là quand Andrea avait eut besoin de lui. Pire que cela, il n'avait même pas remarqué que son ami avait besoin de lui. C'était moche. Alix avait toujours été tiraillé entre ses deux facettes de lui, une bien trop nombriliste et l'autre qui essayait de contenter tout le monde. Il le savait. Il avait comprit depuis longtemps qu'il devait travailler sur lui pour changer ça. Et au final, c'était même pas lui qui en souffrait le plus. Il devrait juste vivre avec cette culpabilité toute sa vie alors qu'Andrea, lui, ne pourrait plus vivre du tout. C'était dégueu, à gerber.

Assis au bureau de l'infirmier, Alix se triturait les doigts, sans rien dire. Il ne savait même pas ce qu'il y avait à dire.

« Alix, je sais que c'est compliqué. Et que tu souffres, mais je t'assures que parler te ferait du bien. Tu es sûr que tu n'as rien à me dire ? N'importe quoi, sur n'importe quel sujet. »

Alix hocha négativement la tête.

Une cellule psychologique avait été mise en place par le lycée. Byzance se tenait à disposition des élèves qui voudraient lui parler et les personnes les plus proches d'Andrea s'étaient vues accorder des créneaux de rendez-vous d'office.

« Désolé. Je dois pas être de super compagnie. C'est juste que je ne sais pas vraiment quoi dire. Toute cette histoire... j'realise pas en fait. J'ai l'impression que tout est faux. Et pourtant, chaque matin quand je me réveille, je me rappelle de ce qu'il s'est passé et que je n'ai rien pu faire pour l'en empêcher. »

Rien pu faire pour l'en empêcher. Ces mots raisonnairent en Byzance parce que c'était exactement ce qu'il ressentait lui aussi. Plusieurs fois il avait été voir Andrea, parce qu'il avait vu qu'il s'était éloigné de ses amis, et que c'était son rôle en tant qu'infirmier de veiller aussi sur la sente mentale de ses élèves. Mais à chaque fois, le châtain avait esquissé un sourire et avait prit la fuite en assurant que tout allait bien. Il aurait sûrement dû plus insister. La plus part des suicides chez les adolescents pouvaient être évités avec un suivit psychologique adéquat. Pourtant il n'avait pas su le lui offrir. Il vivait cela comme un échec dans sa carrière, un échec aux conséquences désastreuses.

Le soir, en rentrant chez lui, il avait envie de tout, sauf de voir du monde. Or, il avait promis une soirée à Mellina, et ça faisait trop de fois qu'il annulait sans lui donner d'explications, si ça remontait aux oreilles de sa mère, il allait passer un sale quart d'heure, il le savait pertinemment. Il adorait sa mère, vraiment, mais depuis qu'il était fiancé, elle cherchait à se mêler de toutes les aspects de sa vie, dans les moindres détails et ça en devenait épuisant. Tant qu'il n'avait pas même réussi à se poser cinq petites minutes pour réfléchir à ce que lui voulait vraiment. Il avait pris l'habitude, quand il se trouvait dans cet état de doute, d'envoyer un message à Jena -enfin Lior, parce que c'était d'élus qu'il s'agissait, même s'il s'était voilé la face pendant pas mal de temps pour ne pas en avoir à assumer les conséquences- mais il ne pouvait plus le faire. Ce serait contre toute morale, contre tout code déontologique. Et puis il était l'adulte dans la situation, il n'avait pas le droit de faire n'importe quoi et de faire souffrir l'adolescent.e plus que ce qu'il ne l'avait déjà fait.

« Hey, tout va bien ? »

Sur le canapé, dos à la porte, il se retourna pour voir Mellina et son magnifique sourire se diriger vers lui. Il ne l'avait même pas entendue entrer. Elle posa sur lui un regard concerné. Elle avait bien compris que son fiancé était traçassé depuis quelques temps, et si elle avait d'abord essayé de le laisser venir lui en parler de lui même, elle avait fini par comprendre que si elle ne faisait pas le premier pas, il allait continuer à se morfondre peut-être indéfiniment.

« Le travail. »

Face à sa réponse évasive, Mellina vint prendre place à côté de lui sur le petit canapé et passa sa main sur sa nuque, depuis qu'ils étaient enfants, ce geste l'avait toujours détendu.

« Tu sais, ton travail, au contact des jeunes et de leur problèmes, peut être merveilleux, parce que la jeunesse a énormément à nous apprendre, ils sont forts, résiliants, tout en étant à la fois infiniment fragiles. Mais le revers de la médaille, c'est que c'est un métier compliqué et éreintant moralement. Alors si tu ne veux pas prendre le chemin du surmenage, tout ces problèmes d'adolescents qui se cherchent, il faut que tu les laisses une fois le portail du lycée passé. Sinon ça va te bouffer toi aussi. Et puis dans tous les cas, si tu n'es pas à ton maximum, si tu ne dors pas la nuit, si tu ne vis pas en dehors du travail, tu ne seras les en mesure de les aider correctement. Tu le comprends cela ? »

Elle avait raison, il le savait. Pourtant, cette fois la situation était un peu plus compliqué que de simples problème d'adolescents. Parce que même si tout part de là, un gosse de a peine majeur qui met fin à ses jours, ce n'était pas quelque chose que l'on peut simplement laisser à la porte du lycée quand les horaires de travail sont passées.

« J'ai pas su les aider correctement, Mel. Il y avait ce gosse, et j'étais parfaitement au courant que quelque chose clochait, pourtant j'ai rien fait. Il s'est ouvert les veines dans sa salle de bain. Et bordel, c'est pas des choses qui devraient arriver, jamais. Et tous ses amis, à leur âge on ne devrait pas être confronté à la mort, pas de cette façon du moins. C'était mon rôle de les protéger, de voir ce qui n'allait pas, et j'ai pas su le faire. J'ai échoué, lamentablement. De la pire des façons. Je sais déjà ce que tu vas dire, c'est pas de ma faute. Et quelque part, tu auras raison, ce n'est pas que de ma faute, mais j'aurais... j'aurais pu l'aider. Et ça aurait pu tout changer. »

« Byzance. Tu te soucies merveilleusement des autres, et c'est pour cela que je t'aime, mais tu dois aussi apprendre à te soucier de toi. »

« Je sais Mel. Je sais tout ça. »

« Tu veux que je fasse à manger ? Je suppose que tu n'as pas vraiment envie de sortir ce soir. Même si je maintiens que ça te ferait du bien. Ça te changerais les idées. Aller. Choisi. Lasagnes ou hachis Parmentier ? »

« Lasagnes. Merci. »

Elle lui offrit un petit sourire et se leva pour aller préparer le repas, depuis la cuisine elle demanda :

« Mon cœur, où sont les pâtes ? »

Il se leva pour aller lui sortir les pâtes en question et lui dit :

« Je vais t'aider. »

« C'est gentil. Tu peux couper les tomates. »

Toute la soirée, Mellina lui lança des regards par intermittence, elle essaya de faire la conversation, mais il était bien loin d'être réceptif. Après le repas, elle attrapa son sac et lui dit :

« Je crois que je vais rentrer. »

« Tu ne dors pas ici ? »

« Non. Je ne suis pas sûre que tu en aies envie. Comprends bien, je ne te reproche pas de ne pas avoir le moral, compte tenu des circonstances, c'est tout à fait humain, l'inverse serait bien étonnant, mais je crois aussi que ça te fait une excuse toute trouvée pour repousser nos rendez-vous et pour ne pas me parler. Et j'ai compris le message. Je vois bien que depuis que tu as prit ce job au lycée, tu es en plein questionnements et crois moi je sais ce que c'est. On passe tous par là, c'est une étape normale. Je pense juste que tu as besoin de temps et d'espace pour te mettre au clair avec toi même, et je ne veux pas que ma présence entrave ça. »

Elle lui embrassa le front.

« Alors prends ton temps. Comprends tout ce que tu as à comprendre, et appelle-moi dès que ce sera fait. Moi, je t'attendrai. Bonne soirée Byzance. »

Avant de refermer la porte de l'appartement, elle glissa, comme si elle était incertaine de devoir :

« Je t'aime. »

Presque mécaniquement, il lui répondit :

« Moi aussi. »

Une fois de plus, il se fit la réflexion d'à quel point elle était exceptionnelle, et qu'il avait de la chance de l'avoir. Et une fois de plus il se dit que ce n'était peut-être pas réciproque. Il se dit que son amour pour elle n'était peut-être pas à la hauteur, au fond de lui, il en était persuadé, il ne l'aimait pas comme il le devrait, mais il ne savait pas quoi faire de cette information.

Couché sur son lit, il saisit la petite pierre bleue qu'il gardait toujours sous son oreiller. Une calcédoine. Et il se rappelle du sourire de Lior au moment où iel la lui avait offerte, et du soubresaut qu'avait fait son cœur. Il soupira. C'était bien le moment de penser à ça...

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