Chapitre 66 : E N C O U N T E R
{Je publie un peu tard, c'était l'anniversaire de ma maman alors j'ai pas eut le temps à midi}
Aïssah avançait doucement sur le trottoir. Elle n'avait pas voulu prendre le bus parce que marcher la faisait réfléchir. Elle, amoureuse de Nuccya ? Quelle idée encore ! Elle secoua la tête, mais au fond d'elle, elle savait déjà que c'était vrai, elle refusait simplement de se l'avouer. Parce que à quoi bon... A quoi bon s'avouer ses sentiments quand on savait d'avance que ceux-ci ne seraient jamais réciproques... Parfois, le déni valait mieux.
« Hé mademoiselle ! Tu sais que t'es bonne. Ça te dirait de venir boire un verre avec nous cinq minutes ? Après on pourrait aller chez moi si tu veux. »
Aïssah resserra son manteau autour d'elle et continua son chemin sans accorder la moindre importance aux mal-appris qui cherchaient à l'accoster de manière si irrévérencieuse.
« Et ! Fait pas ta coincée, on te parle, on sait bien que tu nous entends. Pourquoi t'es mal polie comme ça, tu devrais nous répondre ! »
« Ça ne m'intéresse pas. Maintenant laissez-moi tranquille. » Grogna la jeune fille, passablement énervée.
Il ne manquait plus que ça, comme si sa soirée n'avait pas été assez merdique jusque-là pour que la vie choisisse d'en rajouter une couche.
« Mais si, juste quelques minutes. Aller soit pas timide. »
Un des gars alla jusqu'à l'attraper par le bras, et à ce moment, Aïssah commença vraiment à avoir peur. Parce que contrairement à l'idée que l'on se fait de ses moments-là, la rue était loin d'être déserte, il y avait des couples qui se promenaient, des bandes de jeunes, mais personne ne bronchait, tout le monde passait à côté d'eux sans rien dire, comme si cette scène était banale, et malheureusement elle le devenait, voilà pourquoi personne ne faisait rien. Et c'était encore plus effrayant que d'être seule, être seule mais entourée de monde. Et les décorations de Noël pendues aux lampadaires offrait un contraste tout à fait mal-venu.
« Mec, tu ferais mieux de la lâcher et de rentrer chez toi. »
Un garçon blond à la carrure avantageuse venait de s'interposer, défiant l'autre avec un léger accent américain.
« Tu devrais rester en dehors de ça, frère. C'est ma copine. Elle est avec moi. »
Comme tétanisée, Aïssah n'osa même pas réfuter ce mensonge éhonté. Heureusement pour elle, le blond plongea son regard dans le sien.
« C'est vrai, tu es avec lui ? »
« Je... non. Non, je ne le connais pas. »
Il hocha la tête.
« Tu vois mec, comme je te l'ai dit tu ferais mieux de la laisser tranquille. Je sais pas si t'es au courant, mais ce que tu fais là, c'est une agression. C'est puni par la loi. Tout comme ivresse sur la voie publique. » Dit-il le plus calmement du monde, en baissant les yeux sur la canette de mauvaise bière que son vis-à-vis tenait à la main.
L'homme qui lui faisait face cracha au sol avant de tourner les talons, sans se priver de lâcher quelques insultes pleines de haine.
« Ça va ? » Demanda alors le jeune homme blond à Aïssah.
« Ouais. Ouais je crois. Merci. Je vais rentrer chez moi. »
« Je t'accompagne. » Déclara-t-il du tac au tac. « Enfin si ça ne te dérange pas. Je ne veux pas m'imposer, sinon je ne vaudrais pas mieux que ces gars. »
« Je veux bien oui, merci. »
Ils se mirent en route, Aïssah se remettant tout juste de ses émotions.
« Tu devrais éviter de sortir seule le soir avec une robe aussi courte, c'est dangereux. »
« Attends, tu es en train d'insinuer que c'est de ma faute ? Que j'ai attiré tout cela ? » S'indigna la jeune métisse, s'arrêtant sur le trottoir pour lui faire face.
Pourquoi tout le monde s'arrangeait pour lui reprocher quelque chose ce soir, à croire qu'ils s'étaient passé le mot !
« Non. Je ne voulais pas dire ça. Juste que ne pas sortir seule et tout cela, ça pourrait limiter les risques. »
« Pourtant, avec ce que tu dis, les femmes devraient s'imposer un couvre-feu forcé à cause des hommes, on devrait aussi choisir nos vêtements en fonction et se demander à chaque fois qu'on sort dans la rue si notre tenue ne va pas choquer, si les autres ne vont pas se méprendre sur nos intentions, alors que bordel on s'habille pour nous, pas pour allumer Pierre, Paul, ou Jacques, ou pour faire parler Bertrand ou Jean-Maurice ! Tu ne te rends pas compte du poids permanent qui pèse sur nos épaules. Sans parler évidement des différences de salaire ou de la prise au sérieux de nos propos ! »
Isabelle en avait marre de ce genre de réflexions, et à cet instant, elle était bien incapable de retenir sa nature sanguine, sous peine d'imploser.
« Désolé... J'avais jamais... Je ne m'étais jamais vraiment mis à votre place. En réalité, je viens seulement de revenir en France, enfin je ne dis pas que c'est mieux ailleurs, en vrai j'en sais rien. Je suis arrivé ce soir, je suis venu pour rejoindre mon cousin. Et dans ma famille et plutôt vieux jeu... ma mère fait les corvées et mon père travaille... Et toute mon enfance, j'ai pensé que c'était normal, que les choses devaient être comme cela. D'ailleurs j'ai de plus en plus l'impression que ce n'est pas la seule chose sur laquelle ils m'ont donné une vision biaisé. Enfin BREF, assez parlé de moi, je ne sais pas pourquoi je t'embête avec ça. C'est ridicule on ne se connaît même pas. »
« Non, vas-y, parle-moi encore. Ça m'évitera de trop penser. »
« Et bien je suis ici pour voir mon cousin. Il s'appelle Andrea. Mais j'ai l'impression que depuis qu'il est ici, il a.. changé ? Il traine avec ce garçon, Éos, dont il me parle a longueur de temps au téléphone, ils ont l'air super proches... Et j'ai peur qu'il... J'en sais rien, qui lui mette des idées en tête, ou quelque chose comme ça. A moins que ce soit moi qui me fasse des idées. Au fond j'en sais rien. »
« Attends, ton cousin, il est dans ma classe je crois. Et Éos aussi. » Rit Aïssah.
Des fois ce genre de hasard lui faisaient presque croire au destin.
« Ah oui ? Tu le connais, tu peux me dire quel genre de garçon c'est ? »
« Éos ? Il est difficilement qualifiable. » Pouffa-t-elle.
Alors il ajouta :
« La première impression que l'ai eut quand Andrea m'a envoyé une photo d'eux, était qu'il il avait vraiment l'air souriant et sympathique. Mais maintenant... J'en sais rien, je le trouve vachement proche d'Andrea, le genre de promiscuité que les garçons n'ont pas entre eux. C'est comme s'il avait quelque chose derrière la tête. Je crois que j'ai peur qu'il fasse changer Andrea, qu'il ait une mauvaise influence. »
Aïssah lâcha un petit rire.
« Éos ? Souriant ? Tu es sûr que l'on parle du même garçon ? Personnellement je crois plutôt que c'est ton cousin qui le fait changer lui, pas l'inverse. »
Il haussa les épaules, peu convaincu.
« Au fait, mon nom c'est Dwight. »
Il lui tendit une main qu'elle serra.
« Aïssah. »
« Enchanté Aïssah. »
Elle s'arrêta sur le trottoir.
« Bon, bah c'est chez moi. Merci de m'avoir raccompagné. Et désolé, je dois avoir un peu ruiné ta soirée, t'avais sûrement d'autres plans. »
« Pas vraiment. Tu m'as évité une soirée insipide en boîte de nuit. Je devrais plutôt te remercier. »
« Ok. Alors je te laisse mon numéro. J'ai trouvé ça vachement cool ce soir. On pourrait se revoir. »
« Ouais. Ouais ça me ferait vraiment plaisir. J'ai pas beaucoup d'amis dans le coin. »
Il n'en avait aucun pour être exact. Après avoir échangé leur numéros, Aïssah remonta la petite allée jusqu'à la porte d'entrée, et rentra chez elle. Dwight, de son côté resta un instant planté devant chez elle avant de rebrousser chemin pour rejoindre la maison de ses grands-parents, là où ils séjournaient, lui et son cousin. Dwight avait toujours aimé cette maison. Elle était pour lui, et depuis sa plus tendre enfance, synonyme de vacances et de calme. De liberté aussi.
Il poussa la porte et la verrouilla derrière lui, puis monta dans sa chambre. Il se déshabilla, laissant tomber sa chemise, puis jetant ses chaussures dans un coin de la chambre et enfin se débarrassant de son pantalon et de son boxer. Il se laissa enfin tomber dans son lit, s'enroula dans ses couvertures à cette odeur si particulière qui lui rappelaient son enfance et laissa le sommeil l'emporter, heureux de s'être fait une amie dans cette ville. Une amie qui n'était pas de ceux qui lui avaient été présentes par Andrea. Une amie qui était normale, pas exubérante comme l'était ce garçon, Alix, dont Andrea lui avait parlé, photos à l'appui, ou alors comme cet Éos, qu'il n'arrivait toujours pas à cerner. Enfin bon, il verrait bien quand il les connaîtrait mieux, peut-être qu'il ne se faisait rien d'autre que de mauvais films.
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[EDIT (5/11/21) : Version révisée]
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