« Un poème ! J'ai reçut un poème. » S'exclama Prune en arrivant à la table où Lior et Alix étaient installés. « Je l'ai trouvé dans mon casier, comme les fleurs ou le chocolat. J'y croit pas c'est si romantique, et ça fait un moment que ça dure déjà ! »

« Rien ne te dit que c'est lui. Je ne vois pas pourquoi un infirmier -adulte qui plus est- t'enverrais des fleurs, des poèmes ou du chocolat. Et puis ce serait pas très déontologique... »

« Soit pas rabat-joie Alix. » Pesta la jeune fille.

Puis elle se tourna vers Lior.

« Il serait temps que tu te réveilles, je suis en train de te coiffer sur le poteau ! »

« Ce n'est pas parce que je fais moins de grabuge à chaque petite avancée que je prends du retard. Peut-être joué-je plus en finesse que toi, voilà tout. »

Iel n'en dit pas plus. En réalité, iel était un peu dépité.e. Si le poème et les fleurs venaient vraiment de lui, alors qu'elles chances restait-il à Lior ? Ça n'allait pas être les quelques messages nocturnes sous le couvert de l'anonymat qui allaient lui donner l'avantage... Et puis l'avantage sur quoi même ? Il allait se fiancer. C'était du solide, du concret, et alors leur petit jeu prendrait fin comme il avait commencé, Prune passerait sans doute à autre chose, se trouvant quelqu'un d'autre à aimer, mais Lior, ellui serait dévasté.e et ne pas dire ce qu'iel savait à Prune et Alix ne l'empêcherait pas, pourtant iel ne se sentait pas prêt à avouer à voix haute que tout était fini, que le jeu avait été remporté par une concurrente qu'ils n'avaient même pas soupçonné, Mellina.

« Hey, je peux vous déranger un petit instant ? »

Les trois comparses relevèrent les yeux vers le garçon aux cheveux clairs qui venait de s'appuyer les deux paumes à plat sur leur table. Lysandre, le capitaine de l'équipe sportive du lycée. Ils n'étaient pas dans la même classe, mais Lysandre était si populaire et si sociable qu'ils le connaissaient tous. Une fois, il avait aidé Lior à porter les photocopies qu'un prof lui avait demandé, un autre jour encore, il avait prêté son gilet à l'emblème de l'équipe sportive lycée à Prune qui devait rentrer chez elle à pied un soir de grand vent, et chaque fois qu'Alix le croisait dans les couloirs, il lui souriait comme pour lui dire : « Tu es légitime. Tu n'as rien à envier aux autres. »

« Ouais, qu'est-ce qu'il y a ? » Voulu savoir Prune.

« Je fais une soirée ce soir chez moi, pour fêter la qualification de l'équipe aux championnats. Si ça vous dit, vous pouvez passer, il y aura un peu tout le monde. Je vous envoie l'heure et l'adresse ? »

« Ok, ouais ça peut être sympa. » S'enthousiasma Alix qui avait par dessus tout besoin de se vider la tête.

« Super. Si vous voulez inviter un ou deux potes ça me va, tant que c'est pas toute la ville. » Il se tourna vers Alix : « Non pas que j'ai quelque chose contre les grosses soirées. La tienne de l'année dernière était sympa. Remarque ça l'aurait plus été encore si tu ne t'était pas cassé une jambe. En tout cas elle t'a valu beaucoup d'éloges. »

Alix lui sourit. C'est vrai que depuis cette soirée, il s'était fait une petite réputation et ça flattait pas mal son égo de lionceau.

« Bon bah à ce soir du coup. Si vous pouvez, ramenez à boire, au moins du diluant, avec l'équipe on se charge des bières et des pizzas. »

« Pas de soucis. Plutôt Rhum ou Vodka ? »

« Personnellement, je suis plus Pastis, mais les gars préfèrent la Vodka. Après prenez ce que vous voulez, même un simple jus d'ananas ça ira. »

« Ça marche. On se dit à ce soir du coup. » Répondit Lior.

La fin de la journée arriva rapidement. Lior et Prune finissaient les cours une heure après Alix, alors ils devaient le rejoindre après, ils avaient choisi de tous se préparer chez le bleu, il leur prêterait des vêtements.

Dans le bus, le bleu envoya un message à Élias sur Instagram.

A Éli_vdt :
Hey 'tit chat, tu viens ce soir à la soirée chez Lysandre ce soir ? Je me disais qu'on pourrait s'y voir.

Le réponse n'est se fit pas attendre.

De Éli_vdt :
Oui. Oui on pourra se voir.

Alix rentra chez lui le sourire aux lèvres.

Quand Alix, Prune et Lior arrivèrent tous les trois chez Lysandre, la soirée débutait seulement, il était encore tôt. Ils aidèrent à couper les pizzas et à sortir les fûts de bière du coffre de la voiture du maître des lieux. Ce dernier était pendu à son téléphone depuis leur arrivée. Il semblait essayer de convaincre quelqu'un de venir.

« Si tu veux je passe te chercher chez toi et je te ramènes avant minuit, comme Cendrillon. Comme ça tu ne te coucheras pas trop tard et tu seras en forme pour ton rendez-vous demain. Je peux ne pas boire au début de la soirée, promis je serais sobre pour te ramener. » Tenta-t-il.

Son sourire fana, et tout le monde devina sans peine quelle avait été la réponse de son interlocuteur.

« Bon ok... Mais on pourra quand même se voir demain ? »

Son sourire se raviva un petit peu.

« Dac, à demain alors. »

Et il raccrocha.

« Franchement mec, tu es vraiment accro ! » Se moqua gentiment un des garçons de l'équipe, provocant les rire des autres.

« Tu verra quand tu seras amoureux. » Rétorqua Lysandre.

Julien, qui venait d'arriver, frappa un coup dans l'épaule de son capitaine.

« Tu joues encore les cougars ? »

« N'importe quoi. »

« Il est en seconde. »

« Ça ne fait que deux ans d'écart je te signale. »

« Tu es dans le déni. C'est un gosse. »

« Trystan n'est pas un gosse ! »

Depuis quelques mois, Lysandre avait officialisé sa relation avec ledit Trystan, et si certains membres de son équipe sportive en avaient profité pour remettre en cause sa place de capitaine, il les avait rapidement remis à leur place en leur faisant comprendre qu'il ne tolèrerait aucune remarque déplacée au sujet de la sexualité de chacun, que ce soit envers lui ou qui que ce soit d'autre, et que ceux qui n'étaient pas contents avec cela n'avaient qu'à quitter l'équipe. Aucun ne l'avait fait, mais Lysandre n'était pas dupe, il savait bien que certains des membres parlaient encore dans son dos, à commencer par Marc, un grand gaillard au rire un peu gras qui traînait souvent avec Julien, mais tant qu'ils ne se moquaient qu'entre eux et laissaient Trystan en dehors de tout cela, ça lui allait. Pour en revenir à Julien, il était celui qu'il arrivait le moins à cerner. Certains avaient tout de suite accepté la nouvelle, d'autres avaient exprimé leur dégoût à cette idée, d'autres encore avaient été surpris, mais avaient fini par s'y faire en comprenant que leur capitaine restait le même sportif compétant capable de leur faire remporter des victoires sur le terrain, mais Julien, lui, semblait quelque part envier Lysandre, et c'était comme s'il masquait cela par un masque de railleries, tantôt empruntes de camaraderie, tantôt blessantes. Non, Lysandre ne comprenait pas son attitude.

A mesure que la soirée avançait, les verres s'enchaînaient, il ne restait plus de pizzas pour éponger l'alcool et la musique devenait de plus en plus étrange, allant chercher des titres de transe au fin fond des playlists, faisant planer les adolescents. Alix avait une fois de plus perdu Lior et Prune de vue. Il avait été aux toilettes et avait parlé avec Julien sur le chemin du retour -il voulait encore lui poser des questions sur Prune, préférait-elle l'odeur des agrumes ou des fruits rouges ?- Paul se tenant un peu en retrait de leur discussion, et quand Alix était retourné au salon, ses deux amis avaient déserté l'endroit. Il était trop bourré pour les chercher. Pourtant, il n'était pas si tard, mais il se rappelait exactement ce qui l'avait poussé à boire autant. Élias qui était arrivé au bras de Nuccya dans sa parfaite robe rouge, sûrement cousue sur mesure. Mais n'allez pas vous faire de fausses idées, ce n'était pas juste par jalousie que le garçon aux cheveux bleus avait vidé à lui seul presque l'entièreté d'une bouteille d'alcool, non, ce qui l'avait fait vriller était l'ecchymose sur la pommette d'Élias. Son père avait recommencé, il l'avait frappé et Élias lui avait mentit en disant que ce n'était pas une habitude, il en avait la preuve formelle.

Le bleu décida d'aller prendre un peu l'air et sortit sur le perron, se tenant à la rambarde de bois. Au loin, il aperçut son ami Andrea qui venait d'arriver, accompagné de... Accompagné d'Éos ? Tanguant légèrement, Alix se précipita vers eux et héla le châtain :

« Putain Andrea, t'as réussi à faire venir ce gars-là à une soirée du club sportif avec toi ? Bordel, t'es carrément un saint, non, un dieu ! Ouais, c'est ça, un putain de dieu ! »

Éos leva les yeux au ciel et Andrea lâcha un petit rire. Laissant Andrea s'occuper d'Alix qui avait définitivement trop bu -ces deux-là étaient devenus assez proches depuis l'arrivée du châtain, le fait qu'Alix était séparé de ses deux meilleurs amis en cours y étaient pour beaucoup dans le fait qu'ils passent tout leur temps ensemble, s'entendant comme deux larrons en foire- Éos entra dans la maison et se dirigea directement vers la cuisine pour se servir un verre. Il y croisa Élias et ils échangèrent quelques mots, avant d'être coupés par Nuccya, qui visiblement avait elle aussi pas mal bu, faisant ressortir son petit côté peste.

« Élias, chéri, qu'est ce que tu fais, je t'attends moi ! Tu devais me rapporter mon verre en plus. Tu ne voudrais pas que je me dessèche si ? »

Élias plongea ses yeux dans ceux d'Éos, comme pour le supplier de le sortir de là.

« Élias ? » S'impatienta la brune.

« En fait, Élias avait prévu de m'accompagner fumer un joint dehors. » Le brun prit un verre propre et le remplit avant de le fourrer dans les mains de la jolie italienne et d'ajouter : « Ne t'en fait pas, il te rejoindra tantôt, princesse. »

Ils sortirent tous les deux, laissant la jeune fille en plan avec son verre de téquila-ananas.

« Je n'aurais jamais cru avoir à te dire cela un jour mais merci. » Souffla doucement Élias, comme gêné.

Éos, dans toute sa loquacité habituelle ne répondit rien, se contentant de sortir un paquet de tabac, un pochon et de commencer à rouler.

« Tu fais quoi ? » Demanda le blond, la voix mal assurée.

« J'ai pas menti à cette fille, on va vraiment se faire un joint. Et tu vas en profiter pour m'expliquer ce que c'est que ça. » Exigea Éos en désignant sa pommette de son petit doigt.

Comme s'il ignorait de quoi il était en train de parler, Élias fronça les sourcils et passa sa main sur sa joue. Quand ses doigts se posèrent sur la meurtrissure, il grimaça et lâcha un soupir.

« Qu'est ce que tu veux savoir ? »

« Qui ? »

« Mon père. »

« Pourquoi ? » Enchaîna Éos.

« Pour que je me rappelle qu'il faut que je sois meilleur que les autres. »

Le brun ne dit plus rien, hochant simplement la tête.

« Question suivante ? » Soupira Élias sans aucune émotion.

Éos secoua négativement la tête, signifiant qu'il en avait fini, qu'il ne désirait rien savoir de plus. Il passa le joint entre ses lèvres et l'alluma.

« Et tu ne dis rien ? » Tenta Élias, parce que n'importe quelle personne aurait soit eut l'air horrifié soit présenté des mots d'excuses dégoulinant de pitié.

« J'ai rien à dire là-dessus. Chacun traine son lot de problèmes. »

Il expira une première bouffée de fumée.

« Même les meilleurs. » Ajouta-t-il pour faire échos aux précédentes paroles d'Élias.

Il lui passa le petit bâton incandescent et le blond le portant maladroitement à sa bouche.

« Tu as surement raison. Au fond, j'ai toujours su que tu n'étais pas qu'un sombre connard. J't'apprécie tu sais. J'sais que t'es quelqu'un de bien, même si toi-même, pour une raison qui m'échappe, tu essayes de te persuader du contraire. »

Élias cracha la fumée en toussant un peu.

« Arrête de dire des conneries, ça t'fais tousser. »

Élias laissa filer un faible sourire avant de se relever.

« Merci pour la petite escapade. Maintenant je vais retourner dans mon rôle de parfait délégué de classe populaire. »

Et il retourna à l'intérieur de la maison, trop pleine et trop bruyante.

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[EDIT (25/10/21) : Version révisée]
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(Désolé de poster si tard, javais cours jusqu'à 20h30 😭)

J'espère que vous avez aimé le chapitre, et qu'il ne vous paraît pas trop redondant si vous avez lu Comme un papillon dans un bocal, beaucoup d'éléments étant déjà présents là-bas :)

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