Chapitre 10 : S C A R Y

Alix regardait les éclairs de chaleur dans le ciel d'été. Il reflétait bien son humeur actuelle. Calme et bouillonnant à la fois. Et pour une fois ce n'était pas bouillonnant sur le plan sexuel, enfin si, un peu, toujours un peu, mais surtout émotionnellement parlant. En surface, il était juste un garçon de seize ans qui regardait le ciel, mais à l'intérieur il avait cette interrogation qui n'arrêtait pas de tourner dans son cerveau : Pourquoi ne pouvait-il jamais s'arrêter au bon moment ? Il était toujours obligé de pousser trop loin et évidemment, il l'avait encore fait avec Élias. Pas étonnant que celui-ci ait arrêté de lui répondre. Quand il relisait la conversation -pour la dixième fois au moins, il allait finir par la connaître par cœur- il se sentait terriblement gêné. Il lui avait presque avoué qu'il était mordu de lui ! Enfin non, il l'avait fait, mais à demi-mots. Et après il s'étonnerait encore qu'Élias le prenne pour un dégénéré sexuel, à cause de ça et le fait que tu utilises plus souvent les toilettes du lycée pour baiser que pour pisser, cingla sa conscience. Il ne pu que lui donner raison.

Un nouvel éclair illumina le ciel et le bleu quitta sa fenêtre. Quand un objet la percuta, il sursauta, imaginant immédiatement qu'un psychopathe l'attendait en bas de son jardin, ou pire, que sa fenêtre venait de tuer un petit oiseau sans défense. De nouveau un objet qu'il identifia comme un caillou, entra bruyament en collision avec la vitre.

Donc c'est vraiment un psychopathe, il n'y a plus de doutes.

Apeuré, le bleu s'approcha de nouveau de la vitre et vit une silhouette, tout bien observé, plutôt deux, l'une plus en retrait que l'autre, appuyée contre la balançoire dans son jardin. Mais pas celle d'un oiseau.

Au moins, pas de volatile mort. Heureusement.

La silhouette la plus proche, qu'il devinait être celle d'un garçon de taille moyenne et plutôt jeune, portait une capuche sur la tête l'empêchant de discerner son visage.

Au moins ton psychopathe n'est pas un vieux pervers. Ce sera surement moins pire s'il décide de te violer.

Mais à quoi tu penses ! Se réprima le bleu en s'éloignant de la fenêtre. Son téléphone vibra sur la tablette de fenêtre et le garçon à l'extérieur avait le sien en main. Le smartphone qu'il n'avait toujours pas touché se mit alors à sonner. Ce coup-ci, il eut vraiment peur. Qui était ce malade ? D'une main tremblante, il attrapa l'appareil et déverrouilla les yeux toujours rivés vers l'extérieur.

« Alors qu'est-ce qu'tu fous, tu viens m'ouvrir ? »

Son frère putain, c'était juste son petit-frère qui rentrait...

« J'ai cru que tu étais un violeur psychopathe. J'ai eu beaucoup trop peur ! » S'exaspéra le jeune homme.

« T'es vraiment bête ! Qui m'a donné un idiot pareil pour frère ! »

« Mais d'où t'as vu qu'on venait en pleine nuit jeter des petits cailloux sur les fenêtres des gens ? En plus t'avais gardé ta capuche, c'était creepy ! »

Son cœur se remettait encore de la frayeur qu'il venait d'avoir.

« Ouais aller, maintenant que tu t'es remis de ta crise, vient ouvrir. Maman a refermé la fenêtre de ma chambre. Et j'ai ton pote avec moi, j'l'ai r'trouvé qui délirait dans la rue, près du Monoprix. J'crois il s'est sifflé quelques bouteilles qu'il a dû acheter là-bas je suppose et... »

« Attends Léo, de quel pote tu parles ? » Demanda Alix confus.

« Celui qu't'embrasse. Enfin un de ceux qu't'embrasse, ils sont nombreux à ce que je sais. »

« Ta gueule où j'te laisses dehors. » Souffla Alix alors qu'il traversait le couloir en essayant de faire le moins de bruit possible, de peur de réveiller ses parents qui dormaient en bas.

Il entra dans la chambre de son frère pour ouvrir la fenêtre en grand. Son frère leva la tête vers lui et avisa la façade.

« Mais comment on fait pour ton pote, j'peux pas l'porter. » Cria-t-il en regardant Alix.

« Gueule pas crétin y'a les parents qui dorment. » Le réprimanda son aîné avec un regard de désapprobation.

« Ok mais on fait quoi ? » Chuchota exagérément son frère qui ne devait pas être des plus sobre non plus.

« Toi grimpe, moi je sors l'aider. »

Il vit son frère escalader le chéneau du garage pour atteindre le toit de celui-ci, et de rentrer dans sa chambre. Il avait tellement l'habitude de faire cette acrobatie depuis son enfance, qu'Alix ne s'inquiétait pas pour lui, même avec un peu d'alcool -ou que savait-il encore- dans le sang. Avant de le laisser, Alix lui dit :

"T'étais où ? Tu rentres tard. Tu sais je déteste mentir aux parents mais j'aime encore moins m'en faire pour toi. Alors si il faut te couvrir, je le ferais, mais dis-moi juste où tu vas quand tu disparais."

Il ne lui faisait pas la morale, ce n'était pas son rôle et Léo avait passé l'âge, mais il voulait tout de même que son frère comprenne qu'il se faisait du souci pour lui.

"Seulement si toi tu me dis où tu es allé quand tu es partit toute une semaine et pourquoi tout le monde est bizarre quand on amène le sujet."

Silence.

Alix était dans une impasse. Alors Léo reprit.

"Tu vois, toi aussi tu as tes secrets. Et je te force à rien si t'es pas prêt à les révéler. Mais si tu gardes tes secrets, je garde les miens. Et puis Alix, je doutes que savoir où je vais t'évite de t'en faire pour moi."

En un sens, il n'avait pas tort, Léo avait toujours été plus intelligent que la moyenne.

"Ouais. Ok."

Léo lui offrit un petit sourire fatigué, tout ce à quoi il aspirait était de retrouver son lit. Alix le comprit et lui rendit son sourire avant de sortir de sa chambre.

Le bleu emprunta les escaliers pour sortir devant la maison pour s'approcher du garçon qu'avait ramené Léo. Il se demandait qui ça pourrait être, quels amis avait-il que Léo soit capable de reconnaitre.

« Attends, dites-moi que je rêve... Élias ? »

Le blond se releva un peu, pour regarder qui se tenait devant lui et sourit bêtement en voyant Alix.

« Ouais, je sais, on est loin du parfait délégué de classe à l'attitude modèle. »

Il tangua légèrement.

« Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? »

« Rien. J'ai juste bu un peu du précieux whisky de mon père, comme une petite vengeance ridicule. »

Il tituba, repensant pathétiquement à la façon dont il avait voulu se confier à sa mère, mais que celle-ci, en voyant l'ombre menaçante de son mari, l'avait repoussé, purement et simplement. Alors tout ce qu'il avait pu faire, comme dans une tentative désespérée d'attirer son attention, pour recevoir l'amour maternel qui lui faisait tant défaut, avait été de boire quelques grandes lampées de l'onéreux whisky de son père, pour se donner un soupçon de courage avant de fuguer. Maintenant qu'il y repensait, il se trouvait ridicule. D'autant plus qu'il y avait de fortes chances que sa mère n'ait pas même remarqué son départ.

« Ok. Alors... Tu veux passer la nuit ici ? On a une petite chambre d'ami. » S'enquit Alix en le voyant totalement perdu dans ses pensées.

« S'il te plaît. Tu as dit que je pouvais venir quand je voulais en message, non ? »

C'était presque une supplique.

Quand il lui avait dit que sa maison lui serait toujours ouverte, Alix n'avait pas pensé que le blond le prendrait au mot. Non pas que ça lui déplaise de le voir, il était simplement surpris. Après tout, entre eux deux, ça n'avait jamais été l'entente folle. Ils vivaient bien plus de piques et de regards noirs que d'amour et d'eau fraîche.

« Ouais. Ouais, absolument. En parlant de message, je suis désolé si j'ai été trop loin tout à l'heure. Je suppose que c'est pour ça que tu ne m'as pas répondu. »

« Non. Tu as tout faux. C'est mon père qui m'a pris mon téléphone. »

« Alors quoi, t'es puni ? Et t'as bu son whisky pour lui faire payer ? »

« Ouais. Un truc comme ça. »

Alix allait rire devant le ridicule de la situation qu'il voyait comme un caprice de gosse de riche, mais quand il vit les yeux d'Élias briller de tristesse avant de se baisser vers le sol, il ravala son sourire.

« Attends, y'a eu un truc moche ? Tu veux en parler ? »

« Non. C'est rien d'important. »

Rien de plus que son habituelle routine dans sa relation conflictuelle avec son père. Après tout, il avait l'âge de la discorde, tous les adolescents se disputaient avec leur parents, pas vrai ?

« Comme tu veux. Viens on rentre. Par contre, pas de bruit. J'me sens mal à chaque fois que je réveille mes parents la nuit. Ils travaillent tous les deux beaucoup. »

« Ouais, pas de soucis. Je peux m'appuyer sur toi ? J'ai un peu les jambes en coton. »

« Viens là. »

Le bleu passa le bras d'Élias sur ses épaules et le guida vers sa maison, puis jusqu'à sa chambre.

« Je te laisse mon lit. Vas-y, installes-toi, fais comme chez toi. »

« Hum... Alix ? » Demanda le blond pendant qu'il se déshabillait pour revêtir le pyjama en soie que lui tendait le bleu.

« Ouais ? »

« Je... j'ai rien mangé ce soir, t'aurais pas un petit truc à me donner ? »

« Je vais te chercher ça. »

Il retourna dans la cuisine pour lui préparer une petite assiette. Il y mit le reste de riz que sa mère avait fait, une tranche de jambon blanc, une tomate, et il prit une nectarine. Il retourna dans la chambre, où Élias se tenait encore debout, au centre de la pièce, comme s'il n'osait pas toucher à quoi que ce soit.

« Tiens. Le riz est froid, j'espère que ça ne te dérange pas. »

« Non, c'est bien. C'est très bien. »

Alix ouvrit la couette du lit pour inviter le blond à s'y allonger, une fois qu'il aurait fini de manger. Il attrapa ensuite son téléphone et son chargeur, prêt à sortir de la pièce pour rejoindre la chambre d'ami. Il s'arrêta néanmoins pour dire à Élias :

« Quand tu auras fini, laisse simplement l'assiette et les couverts sur le bureau, je débarrasserais demain. Oh et aussi... Si tu as besoin de parler de quoi que ce soit, même si tu as raison je t'ai souvent jugé, parfois même méjugé, bah... Je suis là. N'importe quand. »

C'était vrai. Même si Élias et lui n'étaient pas réellement ce que l'on peut qualifier d'amis, Alix saurait faire l'effort de l'écouter s'il avait besoin de parler. Élias hocha la tête sans rien ajouter et le bleu quitta la pièce pour celle d'en face qui se trouvait être une petite chambre d'ami avec un lit double couleur lilas.

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[EDIT (23/08/21) : Version révisée]

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