19
Quitter le ranch n'était pas une mince affaire. Les infectés aux alentours ont réussi à trouver un moyen pour y entrer et nous ont cherché. Mais nous avons réussi à nous en sortir par la fenêtre de droite proche des escaliers. De justesse. Malheureusement, je me suis blessé à la jambe en voulant éviter de me faire attraper par un infecté de niveau un et j'ai une jolie cicatrice qui prend forme au niveau de la cheville.
Ludovic a essayé de panser la blessure au maximum mais j'ai besoin de repos. Sauf que ce n'est pas le plus important.
Nous devons continuer.
La maison qui est non loin du ranch était bien plus abîmée. La porte était bloquée, les fenêtres de chaque pièce brisées, et le toit pouvait s'effondrer à n'importe quel moment. La couleur était partie depuis bien longtemps et je voyais depuis le pas de la porte cet endroit était fragile. Comme si c'était un château de carte et que le moindre effort pouvait la briser en quelques secondes. Le temps avait fait son travail. Je fais le tour pour voir où je pourrais rentrer et découvre qu'il y a une ouverture à l'étage. Je crois que c'est au niveau du grenier. J'observe autour de moi pour trouver une solution et Ludovic m'interpelle pour me montrer qu'il a trouvé un échelle. Je le demande de ramener vers moi et nous le plaçons correctement avant de monter.
Quand nous sommes à l'intérieur, la première chose qui me frappe sont les multiples dessins collés au mur. Des crayons de couleurs sont étalés au sol et au fond du grenier, on peut voir des matelas avec des poufs légèrement abîmés. Un endroit pour les enfants, pour qu'ils se sentent en sécurité et qu'on les fasse oublié durant un moment ce qu'il se passe réellement dehors.
Je touche du bout des doigts certains dessins comme si c'était un chef d'oeuvre avant de me tourner vers Ludovic qui fixe un dessin en particulier. Il ne bouge pas quand je l'appelle et reste stoïque. C'est la première fois que je le vois ainsi. Et ça me trouble. Parce que je ne peux pas le réconforter et je n'ose pas lui demander ce qui a pu le toucher dans le passé pour qu'un simple dessin le rend aussi nostalgique. Nous restons dans un silence de plomb pendant quelques minutes avant que je le touche à l'épaule pour le faire revenir. Le geste le fait sursauter mais il reprend ses esprits, me lance un rapide sourire et descend. Je fixe une dernière fois le dessin, représentant un garçon et une fille et je comprends très vite qu'il s'agit d'un frère et d'une sœur.
Quand je le rejoins à l'étage, c'est un autre ami que j'ai en fasse. Renfermé, concentré et silencieux. Je ne pipe pas un seul mot et commence à fouiller partout où je le peux tout en faisant attention au cas où je rencontre un infecté. Peu de lumière mais beaucoup de poussière. Chaque pièce est une chambre aménagé de façon à ce que trois personnes puissent y dormir. Pas de bureau mais un dressing ou plutôt ce qu'il en reste permet de ranger ses affaires. Pas de lettre, pas d'indice, pas de logo. Rien.
Alors pourquoi il y en avait dans les vestiaires du ranch, ce n'est pas normal ?
Je souffle déjà alors que nous venons tout juste de commencer à fouiller. Génial la motivation.
Je continue de fouiller puis pars au premier étage pour constater la même chose. La maison est vide, pas d'indice et surtout c'est sale comme si personne n'était venue dormir ici depuis des jours alors que nous savons qu'ils n'ont pas bougé. Pas de lampe, mais des lanternes posé un peu partout pour éclairer la nuit. Pas de sac de voyage, rien.
Je sors de la chambre pour me diriger vers la salle de bain lorsque Ludovic me demande si j'ai trouvé quelque chose.
_ Rien et toi ?
_ Idem.
_ C'est absurde quand même !
Il ne rajoute rien puis descend en me laissant seul. Lui-même n'a rien trouvé. Alors que cela devrait être le contraire. J'ai des hypothèses mais je ne suis même pas sur qu'ils tiennent la route. Soit, ils ont décidé de changer d'avis et ont voulu partir pour éviter que l'organisation les retrouve, soit ils se cachent depuis des jours car ils ont eu vent de quelque chose.
Disparaître de cette façon demande des jours de réflexion et surtout des plans de la ville, des munitions, des provisions et j'en passe. On ne part pas comme ça sur un coup de tête. C'est dangereux et c'est irréfléchi.
Je tourne en rond à l'étage à fouiller un peu partout lorsque Ludovic m'appelle depuis le salon. Je le rejoins et découvre que la grande pièce est vide. À part la table, le canapé, une bibliothèque et des tapis dans un coin de la pièce, elle est vide et Ludo n'est pas là.
Je marche vers la bibliothèque pour vérifier s'il y a quelque chose d'intéressant avant de me souvenir que Ludo est introuvable.
Fronçant des sourcils, je l'appelle une nouvelle fois et il me répond.
_ Ella, viens voir ça, crie Ludovic.
_ Tu es où ?
_ Dans la buanderie, au sous-sol.
_ J'arrive.
Je vérifie la bibliothèque une dernière fois avant de le rejoindre. Le sous-sol ne devrait pas être si difficile et compliqué à fouiller. Et pourtant ça l'était. En descendant les marches des escaliers, je remarque que la pièce est immense avec plusieurs bibliothèques qui longe le mur de droite, une grande table à ma gauche avec un canapé et une radio pour communiquer ou entendre ce qu'il se passe à l'extérieur. La salle a été rénovée plusieurs fois et il y a des bassines d'eau non loin de moi. Ludovic est assis avec une carte à la main. Je me rapproche, dépose mon sac afin de soulager mon épaule puis m'assois en face de lui et demande ce qu'il a pu trouver.
_ Sur cette carte est marqué la route qu'ils ont empruntée pour venir jusqu'ici. Ils viennent d'une ville proche de Pittsburgh et ont marché durant des mois avant d'arriver dans la ville. Il n'y a pas d'autres tracés ce qui veut dire une seule chose.
_ Qu'ils ont décidé de s'arrêter ici.
_ Exactement, mais ce que je ne comprends pas c'est pourquoi il y a des croix un peu partout.
_ Fais voir ça.
Il tourne la carte pour que je puisse mieux regarder et constate qu'il y a en effet plusieurs croix sur la carte. Ils sont éloignés mais pas non plus a une grande distance. En tout, il y en a sept.
_ C'est vrai que c'est bizarre et il n'y a pas d'indication à ce sujet.
_ Ça peut être n'importe quoi..comme leurs planques, les coups qu'ils ont fait à l'organisation ou bien les planques des chasseurs, rajouté-je.
_ On garde la carte et on continue. On a pas beaucoup de temps et je ne souhaite pas y rester.
_ J'espère qu'on aura quand même une réponse, dis Ludo en passant une main dans ses cheveux.
Je hoche la tête en accord avec lui. Cette carte donne un indice de plus sur ce que faisait les lucioles là-bas. Le souci est que nous n'avons jamais rencontré un pour l'instant et la recherche ne mène à rien. Tout ce que nous savons c'est où ils étaient avant, aujourd'hui et pourquoi ils n'ont plus bougé mais où ils sont actuellement, aucune idée. Je souffle. On avance a rien et j'ai extrêmement du mal à me dire que je suis venue pour rien. La frustration se fait ressentir et je n'ai qu'une seule envie, frapper quelqu'un.
Je dépose la carte sur le côté et ferme les yeux avant d'entendre un bruit bizarre au niveau du mur. J'ouvre les yeux et regarde autour de moi. Personne. Pourtant..
Un autre coup se fait entendre et Ludo lève la tête pour se tourner vers la source du bruit. Je me lève doucement et avance vers la bibliothèque avant que le troisième coup ne retentisse. C'est sûr et certain, nous avons bien entendu et cela provenait de la bibliothèque. Sans attendre, je cherche une façon d'ouvrir la porte secrète que me mène à la source. Je touche à tout. Que ce soit des livres, des lampes, je bouge la biblio mais rien. Elle ne bouge pas.
_ Attends une minute, réplique Ludovic.
Je le laisse faire et continue à réfléchir. La maison est assez vieille mais grande pour garder un groupe de lucioles même si cela dépend de la quantité. La cave est immense, pour cacher des gens mais ce que je ne comprends pas c'est à quel moment ils ont pu rajouter cette entrée derrière la bibliothèque. Je veux dire cela fait des années que nous n'avions plus les moyens de faire une rénovation correctement sans électricité et ne parlons pas du bruit que cela ferait avec les infectés aux alentours alors comment ?
Le temps que je réfléchisse à une hypothèse, la porte s'ouvre devant moi. Ludo s'exclame en criant un oui tandis que je lui souris en le remerciant d'avoir trouvé la solution. Quand la porte est enfin ouverte, Ludo s'approche allume sa lampe en même temps que moi.
_ Je parie qu'il y a plusieurs couloirs.
_ Si c'est le cas, qu'on ne s'enfonce pas, rajouté-je en récupérant mon sac. On fait le maximum et on s'en va.
Il accepte en hochant la tête et nous avançons, arme à la main, prêt à descendre le prochain infecté que nous croiserons.
Les différents couloirs que j'ai en face de moi après avoir marché pendant de longues minutes sont fragiles malgré les poutres en bois pour la soutenir. De temps en temps, un peu de poussière du plafond tombe mais rien de grave. On entend des bruits de pas, des infectés en dehors du tunnel mais toujours pas de trace d'eux.
Au bout d'un certain temps, je fais signe à Ludovic qu'il est temps qu'on sépare mais qu'on essaie de rester en vie et de ne pas trop s'enfoncer. Il hoche la tête, me regarde puis tourne à droite pendant que je tourne à gauche. Il n'a pas changé depuis qu'il a vu le dessin au grenier et sa façon de me regarder m'a perturbé. Mais tant qu'il ne veut rien dire, je ne vais pas le lui obliger.
Je continue à marcher sur une longue distance et me retrouver confronter à deux autres chemins. Je m'arrête et réfléchis. Si je vais plus loin, je risque de me perdre. Je ne connais pas ces tunnels et je suis sûr que les lucioles ne viendront pas. Ils tiennent à rester discrets. C'est ainsi qu'ils ont commencé leur vie et ils ne changeront pour rien au monde.
Je ferme les yeux, triste de ne pas les avoir eu quand je sens une présence. J'ouvre rapidement les yeux pour voir un jeune homme loin devant moi dans l'un des tunnels en train de me fixer. Étant dans l'ombre, je ne peux pas voir correctement son visage mais je sais qu'il est l'un des leurs. Je le sens tout simplement.
Une luciole.
_ Bonjour...
Rien de sa part. Tant que je ne bouge pas, il ne fera pas de même. Ma main commence à trembler mais je la cache en la mettant dans la poche de ma veste. Je respire lentement pour me calmer mais cela ne fonctionne pas.
Je peux deviner qu'il attend que je parle, que je lui explique la raison de ma présence mais je bloque. Il me déstabilise et c'est là première fois que cela m'arrive. Enfin, c'est un étranger qui me fait ressentir ça. Habituellement, j'ai juste peur de mourir et je me bats pour éviter ça mais là non.
Je n'ai pas peur, je suis terrifié.
_ Les lucioles sont dans ces tunnels n'est-ce pas ?
Toujours rien de sa part. Bon..
_ Mon nom est Ellana et je suis là pour vous demander de l'aide. Des chasseurs prennent un plaisir à tuer des innocents et à l'heure où je vous parle, cet acte va recommencer dans moins de 24h. Vous nous avez aidé dans le passé en éliminant le gouvernement et la police, je pense qu'il est temps de recommencer avec les chasseurs et cette organisation qui rôde.
Pas de signe de sa part qu'il accepte de m'aider ou bien un refus catégorique. Je suis perdu et je ne sais pas moi-même si je dois continuer dans ma lancée ou reculer et partir pour me débrouiller avec ce que j'ai déjà en main.
Je souffle face à son silence et termine mon monologue.
_ Tout cela va se passer au lycée vers la sortie de la ville. J'espère que vous y serez. Il est temps de sortir de l'ombre.
Après cela, je recule tout en le regardant puis pars définitivement pour sortir des tunnels. J'attends Ludovic dans le sous-sol et lorsqu'il revient après plusieurs minutes, nous décidons de partir de la zone en emportant ce que nous avons déjà sous la main et en espérant que cela suffit pour nous aider dans la suite de notre voyage. J'ai l'infime conviction qu'ils viendront mais rien ne peut garantir cette conviction. Ils peuvent décider de ne pas s'impliquer et je peux comprendre. Cette organisation ainsi que les chasseurs ont tués plusieurs de leurs groupes et tout le monde essaient de les éviter au maximum, nous y compris alors je ne peux pas juger leur décision. C'est leurs vies, leurs choix. Je ne demande simplement que leur aide. Pour rétablir l'ordre ici. Que la peur doit changer de camp.
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