Assis depuis de longues minutes dans le salon de mon oncle, les autres me regardent longuement essayant de comprendre pourquoi je suis partie tôt ce matin sans les prévenir. Ludovic reste dans son coin, bras croisé à me regarder tandis que Val et Aurélie sont assis en face de moi, leurs sacs aux sols, prêts à partir.
Val souffle après un moment puis pose enfin la question.

_ On peut savoir où tu étais ?

_ Chez les chasseurs, répondis-je en jouant avec mes mains.

En entendant ma réponse, Ludo fronce des sourcils et Aurélie ricane avant de s'approcher un peu plus et de me poser la question suivante.

_ Et tu faisais quoi chez eux ? Je veux dire..on les évite et toi tu vas les voir ?

Ok, ma réponse n'aide pas et je conçois que j'ai mal répondu mais c'est complètement le contraire de ce qu'elle pense. J'enlève mon pull pour être plus à l'aise, sors un plan de mon sac, le pose sur la table et en sors aussi un stylo pour mieux leur expliquer ce que je sais et ce que j'ai vu. Je ne sais pas encore si je dois omettre le fait que j'ai rencontré Clément ou non et je sais que Ludo fera le lien mais pour l'instant c'est les gens innocents que je dois sauver.

_ C'est vrai que je suis censé les éviter après ce qu'il s'est passé mais j'ai entendu des infos au sujet d'un jeu morbide là-bas et j'ai voulu voir où ils cachaient les zombies et j'ai eu mes réponses, dis-je en entourant une zone sur la carte et en l'avançant vers eux.

Ludo s'approche pour voir de quelle zone je parle pendant que Val hoche la tête en expliquant qu'il a entendu que cette zone est prise par les chasseurs. Ma cousine ne pipe pas un mot et je ne sais pas quoi dire de plus. Elle est censée réagir, me dire que c'est une très mauvaise idée mais rien de sa part. Et plus on traine, plus on a moins de chance de passer à l'acte. Bon il y a aussi la partie des lucioles mais je suis certaines qu'elle ne me croira pas et moi-même je ne me croirais pas.

_ Ella, il y autre chose, dit Aurélie, toujours sérieuse.

Elle me connait réellement. Elle sait lorsque je cache quelque chose.

_ Celui qui m'a donné l'info au sujet du jeu morbide s'appelle Clément. Je sais que la règle est de ne pas faire confiance surtout lorsqu'on ne connait pas réellement la personne mais le sujet était important. James est le chasseur qui gère ce jeu et c'est dans deux jours que ça va se passer. On a besoin d'aide, d'un plan et de munitions ainsi que d'armes pour libérer les innocents qui seront exposés.

_ James comme le gars qui était là à l'école ? Demande Val en se levant.

_ Oui, ce James là.

_ Et ce Clément, il sort d'où ? Demande cette fois ma cousine.

_ Je suis désolée, je n'ai pas plus d'info sur lui, je réponds en passant une main sur mes cheveux.

_ Ça commence mal et tu le sais, on ne sait pas si il dit la vérité ou pas, argumente Aurélie.

_ Oui je sais..mais pour l'aide j'ai une idée et je souhaite creuser davantage. C'est pour cela que je refuse qu'on parte. Si on a une chance, on doit la saisir, dis-je avec conviction.

_ Le problème est que nous sommes pas vraiment certains de faire confiance à ce Clément. Du jour au lendemain, il débarque et il vient te voir pour te demander de l'aide alors que tu ne le connais pas et toi tu acceptes ?!

_ Aurélie je sais, mais..

_ Non, elle a raison répond cette fois Ludovic, tu lui fais confiance dès la première rencontre mais moi ça a pris quoi...plus de deux semaines ?

Aïe, ça fait mal. Dans un sens, il n'avait pas tord. J'avais eu du mal à le faire confiance et je voulais à tout prix m'éloigner de lui et éviter de tout dire à mon sujet au risque qu'il en sache trop comme Stella mais c'est le contraire qui s'est produit. Il m'a aidé, je l'ai sauvé et on a réussi à faire la paix et je venais de le blesser en faisant confiance à quelqu'un d'autre et aussi rapidement. Val tourne en rond dans le salon réfléchissant à une solution pendant que Ludo quitte la pièce nous laissant ici. Je baisse la tête, attristé de voir que nous n'avançons pas et décide de tout dire puisqu'il était trop tard pour faire machine arrière.

_ Le plus fou dans cette histoire c'est qu'il m'a proposé de l'aide pour rechercher les lucioles et avant que tu dis quoique ce soit, je sais qu'il est difficile voire impossible de les trouver mais..

_ Cette solution est une carte qu'on ne peut pas abattre sur la table comme ça Ella, réplique Aurélie.

_ Les lucioles sont des rebelles introuvables et toi-même tu sais que c'est difficile de savoir où ils se trouvent. Même si les rumeurs sont répandues qu'ils sont un peu partout en Amérique, la probabilité est faible, rajoute Val.

_ Alors on fait quoi ? On laisse James massacrer ces gens et on s'en va ? je demande sous le choc. On n'est pas comme ça nous.

_ Ella, on n'a pas d'autres solutions.

Frustré de ne pas avoir le soutien des autres, je frappe sur la table basse avant de récupérer mon sac et de monter à l'étage. Val et Aurélie tentent de m'appeler mais je suis trop énervé pour les écouter. Fermant la porte comme je peux, je lance mon sac sur le côté et m'assois au sol tout en fermant les yeux. Je pensais à quoi sérieusement ? Tout le monde sait que les lucioles sont un mythe. Ils voulaient simplement détruire le gouvernement et leurs règles strictes afin de nous aider dans un sens et malgré que pas tous le monde soit du même avis, ils l'on fait et aujourd'hui, on essaie de savoir s'ils existent. On essaie de savoir s'il y a une encore une trace d'eux quelque part.
De plus, je ne sais pas comment je ferais si je décide de rester pour trouver une solution. Nous n'avons que deux jours pour avoir une idée et je n'ai aucune idée de comment prendre contact avec Clément. Merde !!

La journée passe et je reste dans ma chambre. J'hésite à sortir et même si les autres tentent de me raisonner, je reste sur ma position. Il faut les aider. Même si je n'ai pas de l'aide, je trouverais un autre moyen. Je sors le plan de mon sac et regarde la zone que j'ai entouré. Le bâtiment est entouré de plusieurs autres bâtiments pour la plupart délabrés et détruits. On peut peut-être les utiliser comme cachette au cas où on nous cherche. Quitter cet endroit sera plus difficile, déjà car la salle où sont déposés les otages est en hauteur et donc je ne peux pas m'incruster comme ça sans l'aide de Clément. Puis il y a autre chose, les gardes qui surveillent en hauteur ont des snipers et peut voir assez loin ce qui est un danger pour nous. Les neutraliser est a la fois une bonne et une mauvaise idée. Je souffle, ne sachant pas quoi faire et range le bout de papier lorsque quelqu'un frappe à la porte.
Je ne réponds pas car je voulais être seule mais la personne réitère son geste ce qui commence à m'énerver et décide d'ouvrir. Si ce sont les autres, je refuserais de partir quitte à être seule. Si c'est Ludo, m'excuserai mais je ne bougerai pas.
La porte s'ouvre sur Ludo qui me pousse pour entrer dans la pièce sans demander ma permission. Je ferme la porte derrière moi, croise les bras et dos au mur, attends qu'il m'explique pourquoi il est là.
Ludovic s'assoit sur le matelas, lance un regard au sol avant de commencer à parler.

_ As-tu la moindre idée de ce que ça engendre ?

Je ne réponds pas immédiatement. Bien sûr que je le sais, je retarde mon arrivée, notre arrivée là-bas et chaque seconde loin d'elle est horrible mais je sais que si elle était là, elle m'aurait dit de réfléchir et de surtout peser le pour et le contre. Sauver des vies ce n'est pas un jeu que je dois prendre à la légère et je sais que si je rate mon coup, je peux être blessé ou bien blesser ceux que je tente de sauver ou pire, mourir. Alors oui je sais ce qu'engendre mon action, mais s'il dit la vérité, je dois me préparer et trouver une solution.

_ Oui.

_ Je ne fais pas confiance à cette personne mais je souhaite moi aussi sauver ces gens. Si ce que tu as dit est vrai, alors je t'aiderais. Les autres n'ont pas donné leur avis.

_ Merci.

_ Cependant sache une chose, je t'en veux de donner ta confiance si rapidement à quelqu'un dont tu connais à peine tandis que j'ai eu du mal de mon côté. Et je ne fais ça pas pour toi mais pour quitter plus vite cette ville, répond rapidement Ludovic avant de quitter la pièce sans rajouter un mot.

Au moins nous étions clairs. Cette envie soudaine de l'aider venait du fait qu'il voulait juste les sauver et quitter rapidement cet endroit. Il ferme la porte et me laisse seule avec mes pensées. Je m'assois de nouveau mais cette fois sur matelas et fixe le plafond en réfléchissant à une solution. Il fallait que je trouve des indices au sujet des lucioles, sur comment les trouver et les demander de l'aide et trouver une solution pour l'établissement. Parce que même si je sauvais ces gens, James allait recommencer et c'était avant tout pour qu'il cesse cette tuerie.

Le soir arrive assez vite sur la ville. Depuis ma place je peux voir que certains groupes d'oiseaux passent devant la fenêtre, signe qu'il était de se mettre à l'abri. Je fixe durant un long moment le ciel et après avoir réfléchi, sourit, me lève aussitôt, prends mon sac et descends au salon. Ludovic est assis en train de manger pendant que le reste n'est pas là. Je m'assois en face de lui, dépose mon sac et croise les doigts attendant qu'il se concentre sur moi. J'avais une idée et même si elle n'était pas complète, c'était un début. Je regarde Ludo qui me lance quelques regards d'incompréhension avant de poser sa boîte de conserve et de croiser les bras. Maintenant, il va m'écouter sans être distrait.
Je récupère la carte que j'avais laissée dans mon sac plutôt avec un stylo et le dépose sur la petite table du salon qui nous sépare avant de commencer mon explication.
Le but était de les sauver et donc il fallait au moins deux plans au cas où l'un se foire.

_ J'ai une solution pour aider ces gens mais il faudra être très prudent.

_ Ok vas-y, commence Ludo.

_ Lorsque nous sommes partis voir le lycée, il m'a montré une entrée au niveau des égouts pour accéder à une salle de classe qui est au rez-de-chaussée. Et on a découvert ou plutôt on pense que la cantine est la salle où il garde les infectés.

_ Vu qu'elle est grande elle peut contenir autant de personnes, pas mal, commente Ludo.

_ Donc l'idée est que nous bloquions la salle où nous serons et devrons trouver un moyen d'éliminer les infectés dans la cantine avant que leur jeu ne commence.  Ensuite dès qu'ils sont dans la cour, on attend un peu, tu lances des fumigènes pour les empêcher de voir et on ouvre la porte pour les récupérer au maximum.
Clement quant à lui, devra passer le message aux visiteurs avant qu'on les évacue et lorsque ça sera fait, il devra ralentir au maximum les chasseurs pour qu'ils ne nous suivent pas.

_ Et.. j'espère que tu as un second plan si celui-ci ne fonctionne pas ?
Nous nous retournons en même temps pour constater que Clément était dans le salon à l'embrasure de la porte, bras croisé. Il fixait la carte avant de me regarder puis s'approche pour s'asseoir et mieux voir le déroulé de mon plan. Je ne m'attendais pas à ce qu'il vienne me voir et ce n'était pas prévu mais puisqu'il est ici autant qu'il écoute la suite.

_ Eh bien, oui mais sans les détails. Il suffirait que les lucioles soient de la partie mais les chances sont minimes. Ils nous aideraient à créer une embuscade et à sauver ces gens.

_ Moi qui pensais que tu aurais un plan plus solide, rajoute-t-il.

_ Sois ravie qu'il y en ai un, commente Ludo sèchement.

_ C'est vrai, il répond en croisant les bras.

_ Tu as sûrement des indices au sujet des lucioles, je demande en prenant place.

_ Certains disent qu'ils vivent dans les égouts et d'autres qu'ils vivent dans une zone rouge de la ville. Mais personne n'est parti pour affirmer les théories.

_ Personne sauf moi, dis-je en souriant.

_ Tu veux y aller ? Demande étonné Ludo.

_ C'est un indice simple mais un indice et ça peut aider. On se repose et demain on y va, je dis en mettant une croix sur la zone rouge que m'a dit Clément.

Il nous donne d'autres explications et d'autres théories à leur sujet avant de quitter la maison en nous laissant seuls. Ludo ne dit toujours rien, mais je sais qu'il ne l'apprécie pas. Il gardait constamment son surin dans la main droite et avait cessé de manger. Sa jambe droite sautille de temps en temps preuve qu'il était sur ses gardes. Il ne voulait qu'une chose mettre Clément à la porte et même s'il n'a rien dit, ça se lisait sur son visage. J'espère juste qu'il tiendra aussi longtemps qu'il pourra jusqu'à ce qu'on parte. C'est tout ce que je demande.

_ Il est parti sans dire son nom, réplique Ludovic.

Je souffle, voyant déjà qu'il est énervé et lui répond simplement.

_ Son nom est Clément.

_ Hmm.

_ On travaille ensemble pour un temps, tiens jusqu'à ce qu'on parte s'il te plaît.

_ Désolé madame si je ne l'aime pas, dit-il sarcastique.

Je rigole en le voyant se comporter comme un enfant avant de soupirer puis de parler.

_ J'ai toujours des doutes à son sujet et je ne vais pas te mentir, je ne me sens pas vraiment à l'aise. Le fait est que je me maîtrise. C'est juste pour un temps et nous serons tranquille. Il ne viendra pas avec nous et il restera ici, c'est sa ville et nous ne sommes que des passagers.

_ Alors pourquoi l'aider ? Demande Ludo en se rapprochant un peu plus à chaque parole.

Il était trop proche et sa main caresse mon bras avant de reprendre sa place initiale. Dans ses yeux, je peux voir qu'il se soucie de moi et qu'il ne veut pas du tout être lier avec Clément mais il sait aussi que c'est un mal pour un bien. Bien entendu, il est têtu comme moi et ne veut pas le faire mais comme je me lance alors il le fait aussi. Plus pour se donner bonne conscience d'avoir été là au cas où il se passerait quelque chose d'anormal.

_ Pas lui, ces gens innocents qui pensent qu'ils sont sauvés hors ce n'est pas le cas. Et puis, dis-je en souriant, je ne suis pas seule.

Il recule cette fois et croise les bras avant de répondre.

_ Je t'en veux toujours.

Génial.

Je ricane en entendant sa dernière phrase. Il ne lâche pas l'affaire lui non plus. Préférant laisser cette histoire de côté, je m'allonge sur la canapé et ferme les yeux. Ce soir, c'est moi qui reste dans le salon pour surveiller au cas où il y aurait un intru et donc avoir l'œil sur la porte arrière. Ludo récupère ses affaires mais dors sur l'autre canapé, le dos tourné vers moi.
Même si j'ai un deuxième plan et que je lui ais dis ce qu'il va se passer si le premier plan ne fonctionne pas, mon instinct me hurle de ne pas lui faire confiance. Qu'il est préférable que je modifie mon deuxième plan.

La question est, pourquoi ?