Dans leur état organique de Banshoks, les Dérivateurs ont tout le loisir d'assister, impuissant au déclin d'écosystèmes entiers de producteurs, entraînant avec eux la disparition des consommateurs des chaînes trophiques dépendantes.  Il faut dire que ce monde avait tenté le gigantisme.  Tout y était disproportionné, les plantes, les animaux, les insectes et même les oiseaux.  Leurs besoins étaient proportionnels à leur démesure donc, un simple accroc dans le chaînon, et tout tombe très rapidement.

Les deux petits Banshoks, doués d'une capacité de régénérescence intrinsèque aux dérivateurs, constatent ainsi l'extinction, dans la glauque atmosphère remplie de poussières, de générations d'espèces animales et végétales.  L'effet de serre provoqué par la présence des poussières volatiles et d'une activité sismique intense, rejette de grandes quantités de dioxyde de carbone et acidifie les milieux aquatiques.  Près de soixante-quinze pour cent des espèces disparaissent ainsi sous les yeux des deux témoins impuissants.  Avec le temps, la poussière retombe en couches épaisses sur le sol et les rayons de l'astre rejoignent la surface de plus en plus.  Ainsi de nouvelles espèces colonisent des niches écologiques libérées par leurs occupants disparus car incapables de s'adapter aux changements survenus.

Mayvin et Jiork s'habituent avec le temps à leur nouvel organique et savourent surtout le fait de n'avoir aucun compétiteur de même corpulence dans leur habitude alimentaire.  Pour les décomposeurs, suite à cette extinction massive, cette planète est d'une grande richesse et, même si une partie des êtres morts est inaccessible, car ensevelie sous des monceaux de poussières ou échouée au fond des cours d'eau, le recyclage de l'organique va bon train.  Autre avantage, les deux Banshoks émettent des émanations acides et irritantes, ce qui repoussent les prédateurs.  Ils profitent de cette aisance pour, tout à loisir, se consacrer à l'étude du potentiel des espèces présentes. 

Cette étude amène les deux amis à avoir de très longues discussions sur les capacités des êtres observés.  Sans les ressources de Pantash et les autres savoirs de leurs compagnons de voyage, la décision d'un être valable à la dérive est en effet d'une grande complexité.

Ce n'est qu'après bien des années, selon le cycle de révolution de cette planète, qu'un petit animal soulève leur attention.