9. Désir sanglant
LEV
Les quatre gorilles me lancent leur regard le plus méprisant tandis que je grimpe avec ennui les escaliers en marbre qui conduisent à l'entrée de la villa. Du moins, c'est ce que je déduis en voyant leurs yeux écarquillés, leurs visages contractés et la veine palpitant follement sur leurs tempes. Soit ça, soit ils s'entraînent pour un très mauvais numéro de cirque que même leur gueule de singe ne suffirait pas à rendre divertissant.
La haine quasi tangible qu'ils ressentent à mon égard est rendue ridicule par leur incapacité à bouger de leur poste et leur obligation à me saluer avec respect. Je fais exprès de soutenir chacun de leur regard et ralentis jusqu'à ce qu'ils baissent imperceptiblement la tête, un par un. Alors, un petit rictus moqueur étire mes lèvres et je suis persuadé que leur tête est pleine d'un millier de scénarios pour me tuer.
J'adore ça.
J'enfonce mes mains dans mes poches et pénètre dans la villa de Petrucci. Après en avoir pris possession quelques semaines auparavant, Gian s'y est momentanément installé, histoire de bien faire passer le message aux autres clans. Son arrogance m'amuse énormément, mais son comportement est très mal vu par certains de ses hommes qui craignent que les autres familles mafieuses ne voient cela comme une déclaration de guerre.
Ils n'ont pas compris que c'est le but. On ne va pas s'arrêter en si bon chemin !
A chaque fois que je reviens ici, je ne sais jamais si c'est la satisfaction de posséder cet endroit ou le souvenir amer de la première nuit passée entre ces murs qui prend le dessus. Gian a l'air de s'en foutre royalement, mais moi, je ne parviens pas à entrer dans cette villa en toute tranquillité d'esprit.
Alors que je me dirige vers le bureau de ce connard d'alpha, une intense odeur boisée me parvient au nez et je sens mon corps se tendre légèrement. Je reconnaîtrais entre mille ces phéromones et, si elles m'ont longtemps indifféré, mon putain de corps semble désormais y réagir au quart de tour. Et ça me rend fou.
Pourtant, ce n'est pas Gian que je croise dans le couloir. A la place de son imposante silhouette et de son regard condescendant se trouve un corps tout en rondeurs, aux longs cheveux ébènes et aux lèvres sensuelles. Je reconnais immédiatement la belle oméga qui avait dansé pour nous lors de la soirée de Petrucci et, lorsqu'elle me voit à son tour, son visage se teinte d'une jolie couleur rose et ses yeux se rivent sur le sol. J'ignore si c'est parce qu'elle est impressionnée par moi ou parce qu'elle me craint. Sûrement un mélange des deux. A moins qu'elle ne pense que je puisse la frapper pour s'être roulée comme une chienne dans le lit de Gian.
Je me contente de lui lancer un regard blasé et continue mon chemin, tentant d'ignorer les putains de phéromones boisées qui me suivent tout le long du couloir.
Lorsque je pousse la porte du bureau de Gian, l'odeur est cette fois si forte que je ne peux m'empêcher d'avoir un temps d'arrêt. Mon corps se crispe inconsciemment et je me sens faire un pas en arrière, comme si mon cerveau me hurlait des signaux de détresse.
Agacé, je claque la porte derrière moi et m'avance d'un pas assuré vers le propriétaire des lieux, nonchalamment assis derrière un immense bureau en bois massif. Sa chemise est ouverte, ses cheveux ébouriffés et ses phéromones virevoltent dans l'air comme un putain de feu d'artifice.
Je m'empresse d'ouvrir grand les fenêtres, irrité par l'odeur moite de sexe qui flotte dans l'air et qui se colle à ma peau. Je m'accoude quelques secondes contre le petit balcon qui donne sur le jardin et m'allume une clope dans l'espoir vain d'atténuer l'odeur entêtante des phéromones capiteuses de l'oméga qui vient de sortir. Ça me dégoûte.
— Jaloux que ça n'ait pas été toi ?
Je me tourne avec indolence et plonge mon regard désabusé dans les yeux sombres de Gian. Ce dernier me fixe, un pied posé sur son genou et ses bras reposant négligemment sur les accoudoirs de son fauteuil. Ce gars pue l'arrogance et l'estime de soi, c'est vraiment aberrant.
Je jette un regard en direction de la porte du bureau par laquelle est sortie l'oméga et tire une nouvelle bouffée de ma clope.
— Tout le monde peut avoir ce genre de filles, rétorqué-je en haussant les épaules.
— Je parlais du fait d'être entre mes jambes.
Mes phalanges se contractent autour de ma clope et je sens un début de colère agiter mon estomac. Mon regard se durcit mais celui de Gian conserve son étincelle moqueuse et provocatrice. Un jour, je le balancerai par le balcon. Lui et son putain d'ego d'alpha.
Je m'approche de lui, tire la chaise de l'autre côté de son bureau et m'y laisse tomber. Je prends soin de poser mes pieds sur les papiers étalés devant lui et croise mes bras sur ma poitrine.
— Tu m'as fait venir pour me prouver que tu n'étais plus puceau ou parce que tu as quelque chose de réellement intéressant à m'annoncer ?
Ses lèvres se tordent en un petit sourire amusé et il rabat ses cheveux en arrière d'un geste suffisant.
— Les Cortese nous ont déclaré la guerre, m'annonce-t-il avec un rictus violent au coin des lèvres. Ils clament que c'est pour venger l'honneur de Petrucci, mais la réalité c'est qu'ils sont ravis que l'on se soit occupé de son cas pour eux. Ils craignent juste que l'on prenne de l'ampleur et veulent nous couper l'herbe sous le pied.
Je ne réponds pas. Les querelles entre mafieux sont le dernier de mes soucis. Et je commence à me dire qu'un bon passage à tabac pourrait calmer les ardeurs de ce connard arrogant. Ce dernier passe outre mon silence et continue sur sa lancée.
— J'ai besoin de tes gars en renfort ici et chez moi. Je vais essayer de déterminer où les Cortese veulent nous attaquer en premier, mais en attendant, il me faut du monde partout.
Il finit sa phrase en sortant une bouteille de whisky de l'un de ses tiroirs et en verse dans un verre qui trône près de ses dossiers. Il ne m'en propose pas. Évidemment.
— Non.
Gian hausse un sourcil face à mon refus, mais conserve son air sûr de lui. Il boit une gorgée d'alcool et garde le verre dans sa main.
— Je ne crois pas t'avoir posé de question, rétorque-t-il.
— Tu n'auras pas besoin de le faire. C'est non. Je souhaitais personnellement la mort de Petrucci, c'est pour ça que j'ai accepté que mes gars t'aident à prendre possession de son empire. Pour le reste, tu te démerdes.
— Tu prends peur ?
Gian penche la tête sur le côté et esquisse un sourire mauvais.
— Tu acceptes les petits défis que tu es sûr de pouvoir relever mais tu fuis dès que les choses sérieuses commencent ? C'est ça que tu es en train de me dire ? Que Dario a raison et que tu n'es qu'une petite merde des bas-fonds qui n'a pas les couilles assez grosses pour s'attaquer à de réels adversaires ? C'est quoi ton problème Lev, tu as tellement l'habitude de te faire marcher dessus que tu y as pris plaisir ? Tu n'es pas capable de lever la main sur ceux qui te crachent à la gueule ? Tu préfères continuer à baisser la tête jusqu'à lécher le sol crasseux de tes rues ? Tuer Petrucci et voir les dorures d'une villa t'ont suffi ; maintenant tu peux retourner croupir avec joie dans ton taudis dégueulasse ?
Gian n'a que le temps d'énoncer son dernier mot que cette fois, ma lame a entaillé sa chair. Je sens sa respiration s'accélérer tandis que le sang commence à couler le long de son cou. Quelques gouttes de ce liquide poisseux atterrissent sur mes doigts et je dois me faire violence pour ne pas approfondir sa blessure. A la place, je fais glisser mon canif de sa mâchoire à sa gorge, décorant sa peau d'un long sillon rouge qui ne se résorbera jamais totalement.
Je la connais, cette morsure brûlante de la lame qui écorche la chair, cette douleur aiguë qui met tous les sens en alerte et affole les battements du cœur. Je la connais parfaitement et je prends d'autant plus plaisir à l'infliger à cet enculé.
Désormais assis sur le bord du bureau, juste en face de Gian qui a ma lame posée entre les clavicules, j'écarte les jambes de sorte à poser mes pieds sur chaque accoudoir de son putain de fauteuil en cuir et me penche en avant.
— Tu aboies beaucoup, mais tu mords peu, susurré-je contre ses lèvres. Tu es comme ces petits chiens qui font beaucoup de bruit pour impressionner leur adversaire mais qui, au moment de passer à l'acte, fuient la queue entre les jambes parce qu'ils savent qu'ils ne font pas le poids. Tu peux me provoquer autant que tu veux, je sais que tu ne feras rien parce que tu as besoin de moi.
Je marque une pause et appuie un peu plus la lame contre sa peau, enfonçant le bout à la base de son cou.
— Mais on ne joue pas dans la même cour ; je n'hésiterai pas à te tuer si tu oublies où est ta place, continué-je en durcissant mon regard. Contrairement à ce que tu as l'air de croire, rien ne me fait peur et je suis prêt à tout pour m'élever. A tout, tu comprends ? Alors si ta belle gueule devient un obstacle, je me ferai un plaisir de l'arracher de tes épaules.
Gian sourit. Un sourire violent, exalté, presque fou. Un sourire qui me prend aux tripes et fait se tordre mon bas-ventre. Un putain de sourire que je n'ai pas vu venir.
Soutenant mon regard, il avance la tête vers moi et, faisant fi de la lame qui s'enfonce dans sa chair, vient poser sa joue à l'intérieur de ma cuisse. Je sens son souffle chaud traverser mon pantalon et tente d'ignorer le frisson qui remonte le long de ma colonne vertébrale.
Toujours en gardant notre contact visuel, il sort sensuellement la langue de sa bouche et la pose tout près de mon sexe qui tressaute sous sa barrière de tissu. Ses yeux obscènes accrochent les miens.
— Si tu es prêt à tout, alors accompagne moi, rebondit-il d'une voix lourde de désir. Soyons plus qu'associés et partageons tout. Tu le sais aussi bien que moi : ensemble, nous sommes invincibles.
Il mord l'intérieur de ma cuisse puis frotte son nez contre la bosse qui déforme mon pantalon.
— Je veux que nos noms résonnent dans tout le pays, je veux qu'aucun clan n'ose plus s'opposer à nous. Je veux que nous ayons tout. Tout. Et je te promets que tu pourras te venger de chaque personne qui t'a un jour manqué de respect.
Mes yeux se voilent d'excitation tandis que mon bas-ventre rugit de plaisir. J'empêche ma main qui tient le couteau de trembler et me contente de resserrer mes jambes autour du visage lascif de Gian. Au milieu de son éternel air moqueur et prétentieux, je distingue l'étincelle brûlante de la luxure et cette vision me donne autant envie de le frapper que de m'abandonner dans ses bras.
Je sais qu'il a raison ; l'évidence de ce nous surpuissant s'est déjà imposée à moi, et cette sensation d'invincibilité est putain d'excitante. Je veux pouvoir l'utiliser pour m'élever, je veux pouvoir le soumettre à ma volonté et savoir qu'il me sera toujours fidèle, je veux que ce «nous» brouille la frontière de notre individualité jusqu'à créer une entité que rien ni personne ne pourra arrêter. Jamais.
Alors, je retire le couteau de sa peau, me délecte de la vision de son sang maculant son torse musclé et me penche en arrière avec volupté. Ses yeux sombres ne lâchent pas les miens puis se voilent de désir lorsque j'écarte un peu plus les jambes et lui lance un sourire provocateur.
— Montre-moi à quel point tu veux que je reste avec toi.
NDA : J'avance plutôt vite sur cette histoire, j'espère que j'arriverai à tenir le rythme !
Alors, qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? J'attends vos retours avec impatience :)
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