Partie 46 : Bienvenue au Paradis - 2
(Media : Over and over again - Nathan Sykes)
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Kea n'en revenait pas, elle n'aurait jamais pu imaginer qu'un tel retournement de situation soit possible. En définitive, c'était bel et bien son pouvoir de Nephelie qui l'avait sauvée. Ce même pouvoir qui l'avait arrachée à sa famille au départ. C'était la puissance brute de sa nature qui lui avait permis de se libérer invariablement de l'emprise de Manakel.
Elle repensa alors aux mots de Siya : « Tu as toujours été très forte, il suffit juste que tu t'en rendes compte. Toi seule peux te libérer de lui ». Son amie l'avait toujours su. Elle n'avait jamais cessé de croire en elle et dans sa capacité à vivre libre. La jeune femme aurait tant aimé que Siya soit là en cet instant précis, qu'elle puisse voir à quel point elle avait eu raison.
Mais après tout, n'était-ce pas le cas ? Depuis le jour où son ange s'était envolé de cette falaise, elle n'avait jamais cessé d'être présente à ses côtés, dans son cœur, dans son âme. Kea sourit à cette idée. Elle serra son poing contre sa poitrine, là où elle sentait battre son organe vital, et elle se recueillit un instant en mémoire de sa tendre amie.
— Enfin bref, reprit promptement Amiziras en la sortant de ses rêveries. Maintenant que Manakel est mort, et qu'on est sûr que les liens du mariage ne te réduiront plus à l'état de poussière, tout danger est écarté. On peut donc retourner sur Aderoth sans tarder. Tu es prête à passer ton marché ?
Manakel n'était plus de ce monde, le lien qui l'unissait à Kea avait disparu en même temps que lui, et la traversée du portail avait protégé la jeune femme contre l'effet néfaste du sort. Le lien ne pouvant pas transcender les deux mondes. Elle était donc de nouveau libre, purement et simplement.
Une douce chaleur emplit son âme. Pour la première fois en trois cent ans, elle comprenait de nouveau le sens du mot liberté. Jamais elle n'aurait pensé voir ce jour arriver. Elle était si heureuse qu'elle en pleurait. Après tant d'années de souffrance, elle redevenait finalement maîtresse de sa destinée. Et elle souriait à la vie, mieux encore, elle la célébrait.
La jeune femme reporta son attention sur Amiziras.
— Attends, l'arrêta-t-elle soudainement.
— Quoi encore ? s'impatienta la vieille folle.
— Pourquoi suis-je obligée de passer un marché ?
— Il est impératif que tu reviennes au plus vite sur Aderoth, et puisque ton dernier contrat est devenu caduc, nous devons en établir un nouveau pour que tu puisses nous suivre dans les règles de l'art. Une humaine immortelle sur Terre est une aberration, c'est pour cela qu'on est revenu te chercher avec Nounours. Les lois de notre monde ont déjà suffisamment été transgressées ces derniers temps, et perturbées par le même fait... Je t'ai dit de dégager ! Infâme peigne-cul !
Commençant à être habituée aux sautes d'humeur imprévisibles d'Amiziras, Kea n'y prêta pas attention et prit plutôt quelques secondes pour réfléchir à tout ce que la sorcière venait de lui dire. Ainsi qu'à tout ce que cela impliquait. Une idée commençait à germer dans son esprit.
— Et... est-ce que je peux choisir le démon avec qui je passerai ce marché ? demanda-t-elle avec soudain beaucoup d'espoir.
— Oh...
Amiziras ne s'y attendait pas. Elle n'avait pas même réfléchi à cette option, il était vrai.
— Et bien, techniquement, oui. Tu peux invoquer un démon en particulier à condition que tu connaisses son nom...
— Alors c'est ce que j'aimerais faire, trancha Kea sans attendre la suite.
— Bon, très bien. Mais tu aurais pu me le dire avant ! rouspéta la vieille sorcière. On a dû interrompre une bataille de polochons mémorable pour venir te chercher.
La jeune femme fut amusée par cette révélation. Elle observa Okiri qui était finalement descendu de son arbre et se frottait maintenant contre sa drôle de compagne, et elle rit devant le spectacle que lui offrait le couple.
— Merci à tous les deux, du fond du cœur. Amiziras, tu es fabuleuse. Et toi Okiri, dit-elle en secouant tendrement la tête, je t'aime boule de poils.
— Eh ! s'indigna la démone extravagante. C'est le mien ! Alors tu ferais mieux de garder tes mains bien en évidence !
Kea sourit encore davantage et les prit tous les deux dans ses bras. Ils lui rendirent son accolade et disparurent en un clin d'œil.
La jeune femme se retourna et observa la jungle qui s'étendait devant-elle à perte de vue. Elle ignorait totalement où elle se trouvait, le portail n'était pas visible à l'œil nu de ce côté du monde. Celui qu'elle avait emprunté avec Manakel se trouvait en France, son pays natal. Il était également caché au milieu d'une forêt, mais celle-ci n'avait rien à voir avec la première. Au lieu des chênes, des érables et des sapins qui lui étaient coutumiers, elle se retrouvait en face de lianes, de palmiers et d'arbres titanesques dont elle ne connaissait pas les noms.
Elle avait été si triste de quitter la Terre la première fois, mais aujourd'hui son sentiment était bien différent. Elle aimait ce monde, il l'avait vu naître. Elle aimait le soleil, elle aimait le chant des oiseaux.
Mais elle était partie depuis si longtemps..., elle avait vécu le plus gros de son existence sur Aderoth, elle ne se sentait plus vraiment humaine, elle n'était plus de ce monde. En tant que Nephelie, y avait-elle déjà vraiment appartenu ? En réalité elle se sentait aussi bien humaine que démone. Mais en trois siècles, la Terre avait eu le temps de changer, elle n'avait plus aucun repère, elle était une étrangère.
Elle observait la nature qui l'entourait, sauvage et un peu effrayante, et elle savait où était sa place. Aderoth était son monde. Elle ne l'aurait jamais cru possible trois cent ans auparavant, mais elle n'aspirait plus qu'à une chose, le retrouver sur le champ. Et comble de tout, elle voulait passer un marché avec un démon, elle n'attendait même que cela. Un revirement de situation qu'elle n'avait pas vu venir.
— Yuan, Seigneur d'Edrahel, je t'invoque. Obéis et viens à moi, récita-t-elle sans trop savoir comment s'y prendre et espérant que cela suffirait.
Dans sa hâte, elle avait complètement oublié de questionner Amiziras à ce sujet. Un changement singulier dans l'atmosphère qui l'entourait lui apprit cependant que sa tentative avait dû s'avérer payante.
— Qui es-tu humaine pour oser t'adresser à moi de la sorte ?
Kea sourit en entendant la voix de son démon hypnotisant. Il venait d'apparaître devant elle, splendide et ténébreux. Elle était captivée par la vue de ce démon du merveilleux. Un être féerique qu'elle ne pensait jamais revoir dans cette vie.
Une larme dévala sa joue et elle dut s'y reprendre à trois fois avant de parvenir à retrouver la parole.
— Est-ce ainsi que tu réponds à tous les humains qui t'invoquent ? le questionna-t-elle finalement.
— Seulement aux plus impertinents, répondit-il dans un sanglot, contenant difficilement son émotion lui aussi.
— J'aimerais passer un marché.
— Et que crois-tu avoir à m'offrir ?
— Une éternité de bonheur.
— Il va falloir que je trouve une contrepartie qui puisse être à la hauteur dans ce cas.
— Je suis sûre que tu trouveras.
N'y tenant plus, Yuan se rua sur Kea et referma ses lèvres sur les siennes dans un baiser passionné qui transpirait tout le désespoir et la souffrance qui les avaient tenus séparés jusqu'ici. Un baiser qui contenait la plus belle des promesses, celle d'un amour éternel.
FIN
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Voilà, c'est fini. Je peux verser ma petite larme.
J'espère que vous avez eu autant de plaisir à lire cette histoire que j'en ai eu moi-même à l'écrire, et j'espère aussi que cette fin sera à la hauteur de vos attentes.
Merci de m'avoir lue jusqu'ici, d'avoir voté, d'avoir commenté. Et à très vite pour du neuf ;)
Je publierai certainement un autre segment dans la journée avec quelques bonus et surtout pour vous tenir au courant de mes futurs projets d'écriture (qui arrivent tout bientôt) ;)
Bisous, bisous !
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EDIT du 04 décembre 2021 :
Ce roman est paru dans une version réécrite et corrigée avec un plus gros contenu (chapitre supplémentaire, partie bonus sur Sytry et Zaebos, carte du monde, etc.)
Si vous avez apprécié votre lecture, n'hésitez pas à me soutenir en vous procurant sa version éditée (disponible en broché ou ebook).
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Cela me permettrait de toucher d'un peu plus près le rêve que j'ai de vivre un jour de mes écrits. ♥
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