Chapitre VI


Au fur et à mesure que les jours passaient, l'atmosphère dans la demeure des Fortune rendait la vie commune invivable. Leur père, ayant déjà essayé de régler leur dernière querelle, ne supportait plus de rester dans sa propre maison. Lorsque ses filles dinaient, il s'attendait parfois à ce que l'une d'elle mette un terme à cette guerre épuisante. Cependant, il avait oublié qu'elles étaient ses filles et que par conséquent, elles avaient tiré de lui la rancune. Néanmoins, cela le surprenait que Pandora soit si distante et ne montre pas l'exemple à sa petite sœur. Dès lors, il avait pris la décision de les convoquer à son bureau afin d'avoir une petite conversation et de finalement régler leur dispute, afin que cette atmosphère disparaisse, car il était certain que les domestiques marchaient sur la pointe des pieds dans la demeure depuis cette fameuse dispute.

En voyant arriver sa fille cadette dans la pièce, le menton fièrement levé et essayant de se montrant mature devant lui, il fut désespéré de la voir réagir aussi puérilement lorsque sa sœur ainée pénétré dans la pièce. Faith avait voulu tourner les talons, la tête basse, en l'apercevant, cependant lorsqu'elle avait croisé le regard courroucé de son père, elle s'était tenue à l'endroit où elle était et n'avait plus bougé le petit doigt.

« Je vois. Une réunion familiale ! », déclara d'une voix forte Pandora en se dressant au milieu de la pièce, vêtue d'une robe somptueuse en satin bleu royal.

Elle tourna sur elle-même, observant sa sœur, puis fit face à son père qui fit signe à Henry de fermer la porte de son bureau. La jeune femme poussa un petit soupir, sachant que ce qu'il voulait serait bien impossible tant que sa sœur réagirait ainsi envers elle. Pandora avait bien essayé de se montrer plus mature bien qu'elle n'avait pas encore pardonné les paroles abominables que sa sœur avait dites à propos de leur mère. Elle avait demandé à ce que sa sœur l'accompagne à chacune de ses sorties ces derniers jours, en compagnie de Clarissa et de sa tante, cependant elle les avait toutes déclinées en raison d'une migraine qui n'avait pas cessé. Une migraine qui était passée comme une excuse valable à ses yeux. Mais ne restait-elle pas dans un mensonge ?

« J'attends. », dit le comte en ne cessant de regarder, à tour de rôle, ses filles durant une dizaine de minutes.

Puis dans un soupir, il se dirigea sur son fauteuil afin de s'y assoir.

Assis finalement sur son fauteuil en cuir, derrière son bureau où l'on apercevait un journal ouvert et posé dessus, il sortit de l'un de ses tiroirs une lettre puis la posa à côté du Times. Se saisissant de son journal, il commença sa lecture, sachant que ce serait surement long vu le tempérament qu'avait ses filles.

Pandora regarda son père, hésita à se tourner vers sa sœur, mais campa sur sa position. Elle avait fait des efforts ses derniers jours, mais en vain, à présent, il fallait que sa sœur assume les conséquences de ses actes et ainsi, commence à murir. Celle-ci serra les plis de sa robe pourpre et regarda sa sœur, qui lui présentait son dos. Faith avait réfléchi ces derniers jours, il était vrai qu'elle s'était horriblement comportée et avait surement blessé sa sœur ainée. Elle s'en voulait, mais elle n'avait jamais su comment présenter ses excuses auprès des personnes qu'elle blessait. Habituellement, elle mettait cela sur le coup de son impulsivité, mais là, elle avait dépassé les limites. Elle en avait eu conscience après que sa sœur soit sortie de la pièce pendant cette fameuse soirée. C'était bien pour cela qu'elle n'arrivait plus à faire face à sa sœur ainée, elle lui en voulait surement pour ce qu'elle lui avait dit. Mais l'éviter n'était pas une chose à faire, surtout depuis que Pandora habitait avec eux, et resterait pour une date indéterminée.

« Dora... », parvint-elle à dire dans un souffle.

Ses yeux, commençant à devenir de plus en plus humides, se posèrent difficilement sur la silhouette de sa sœur ainée. Allait-elle la regarder avec ses yeux effrayants ? Allait-elle la mépriser ou même la dégouter ? Qu'inspirait-elle pour sa sœur à présent ?

« Dora, je... », continuait-elle avant de s'approcher finalement d'elle.

Faith se saisit de l'un des bras de sa sœur ainée et serra sa poigne, baissant son regard sur le sol. Essayant de ne verser aucune larme, elle lui dit d'une voix tremblante :

« Je suis désolée...Tellement désolée, je m'en veux tellement, je... Je n'aurais jamais dû dire cela à propos de maman... »

Son cœur manqua soudainement un bond dans sa poitrine. Sa sœur, s'étant dégagée de sa poigne d'un geste brusque, la serrait dans ses bras avec une telle force.

« Je...Suis désolée Dora, maman... Elle me manque et... Tu m'as tellement manqué... Je t'en voulais., finit-elle par s'écrier en sanglotant.

—Chut... Chut..., répétait plusieurs fois Pandora, jusqu'à ce qu'elle sente ses tremblements s'amoindrir.

— Je me sentais si seule... », avoua-t-elle dans un murmure, commençant à se calmer.

Déposant un baiser sur le haut du crâne de sa sœur, elle arrangea les quelques mèches auburn de la jeune fille avant de lui caresser le dos, la réconfortant. Pandora s'efforçait de ne verser aucune larme, elle n'avait jamais vu sa sœur ainsi, hormis la fois où elle les avait quittés pour partir à Londres. Cela la déchirait lorsque Faith était dans cet état, et à chaque fois qu'elle l'était, Pandora essayait de remplacer leur mère et de réagir comme elle lorsque ce genre de choses s'étaient passés avec elle-même.

« Je t'aime ma chérie, ne l'oublie jamais. Je suis désolée aussi...Si j'avais été là pour toi ces dernières années, nous n'en serions pas ici aujourd'hui. »

Sa sœur cadette osa lever son regard sur le visage de sa sœur ainée, elle resta un moment émue de la voir avec les larmes aux yeux, affichant pourtant un doux sourire qui lui réchauffa le cœur.

Durant le long de cette scène, étant resté qu'un spectateur, le comte avait essayé de ne pas repenser au passé. Cependant, en entendant les paroles de sa fille ainée, il n'avait pu le faire. Si elle s'était enfuie en Italie, c'était bien par sa faute. Il avait été négligeant quant à son éducation et n'avait pu lui apporter autant d'amour qu'il l'avait fait pour Faith. Il lui avait valu du temps pour se remettre de la mort d'Arabella. Le comte avait été horrible lors des mois qui suivirent sa mort, et Pandora ne s'était, il en était sur, pas encore remise de ce qu'elle avait vu. L'accident les avait pourtant forgés tous les deux, cependant lui-même n'y arrivait pas. Il les observa durant quelques minutes, soulagé que cela se termine ainsi, avant de leur annoncer brusquement :

« La duchesse de Kent nous invite à passer l'après-midi, dans sa maison de campagne, dans trois jours. Elle organise un heureux événement dit-elle, où toute la société sera conviée. »

Les deux sœurs se regardèrent pendant de longues secondes qui lui parurent des minutes avant qu'elles ne lui sourient et acquiescent d'un hochement de tête.

« Henry ! », s'écria le comte, s'étant levé de son siège.

Apparaissant sur le seuil de la porte entrouverte, Henry se tint aussi droit que possible, répondant à son maitre :

« Oui, milord, m'avez-vous appelé ?

— Oui. J'ai besoin que tu préviennes la duchesse de Kent et son mari, que la famille Fortune sera présente à son événement qui se passera dans quelques jours.

— Je m'en vais de ce pas les informer, milord. »

Dans une révérence irréprochable, il disparut de la pièce en offrant son plus beau sourire aux jeunes femmes qui étaient côte à côte, heureux qu'elles se soient finalement réconciliées.

« Il serait temps que tu me racontes comment s'est passé ton après-midi avec le marquis de Sommerset, Faith, dit Pandora, en esquissant un sourire malicieux.

— Le marquis de Sommerset ? », intervint le père des jeunes filles, fronçant petit à petit des sourcils.

Donovan Fortune fit le tour de son bureau et se dirigea jusqu'à ses filles, subitement intéressé.

« Tu as passé l'après-midi avec le marquis, seule ? »

Il posa son regard sur Faith qui n'avait pas osé le soutenir.

« Non bien sûr que non, Clarissa était avec eux. », expliqua Pandora, visiblement amusée de voir son père se préoccuper des fréquentations de sa fille.

« Hum...Dora...Papa, je... »

Faith supplia sa sœur du regard, ne voulant en parler devant leur père. La jeune femme, remarquant bien l'état de détresse de celle-ci, décida de changer sujet. Elle fit signe à sa sœur de quitter la pièce tandis qu'elle l'occuperait. Bougeant ses lèvres, elle l'informa de l'attendre dans « sa chambre ».

« Père. »

Le comte détourna son regard et le posa sur sa fille ainée, qui le regardait sérieusement. Lorsque Pandora était ainsi, c'était seulement pour l'informer de ses décisions. Son comportement ainsi que ses choix n'étaient nullement décidés par lui, il en avait été habitué depuis son départ, et cela lui manquait terriblement. Bien que si elle ne l'avait pas écouté, elle ne serait venue à Londres pour endosser son rôle d'épouse. Donovan pensait qu'il avait encore une autorité sur elle mais qui disparaissait d'années en années. En sachant que sa sœur avait profité de cet instant pour s'enfuir discrètement, Pandora attendit quelques minutes avant de lui annoncer brusquement :

« J'ai rencontré le duc. »

Il s'empêcha de sourire, s'imaginant de quelles manières ils s'étaient rencontrés et comment ils avaient été présentés.

« Et bien ?, demanda-t-il, attendant la suite de ses paroles.

— Il ne veut pas annuler le mariage. »

Cette fois-ci, le comte ne se retint pas d'éclater de rire. Il se revoyait plus jeune dans la même situation que le duc, encore que celui-ci était déjà marié à Pandora alors que lui, il avait dû faire des pieds et des mains pour épouser la mère de la jeune fille ici présente. Pandora le fusilla d'un regard noir, ne comprenant pas en quoi cela était amusant. Son père commença à se calmer des minutes plus tard, mais, les nerfs à vifs, la jeune femme continua d'un ton plus ferme :

« J'ai besoin que tu plaides en ma faveur.

– C'est-à-dire ? »

Le père de Pandora s'attendait à ce qu'elle lui dise par quoi elle allait commencer tout d'abord pour faire annuler ce mariage. Ensuite, il s'attendrait à ce qu'elle lui explique son plan ainsi que le rôle qu'il allait jouer. Et enfin, il finirait par devenir spectateur des manigances de sa fille ainée, qui ne cesserait de le surprendre.

« Le duc de Wayland a besoin d'une distraction, et j'ai besoin de temps pour mettre en marche ma stratégie.

— Une distraction ? Du temps ? Stratégie ? Ma chérie, que prépares-tu donc ? »

Elle lui sourit malicieusement et cacha dans ses yeux toute la fourberie dont elle était capable. Pandora resta un moment silencieuse, hésitant à lui raconter ce dont elle avait orchestré mais après avoir réfléchi longuement sur la situation, elle s'était lancée à des explications détaillées.

« Et bien... »

****

« Tu dis que tu as déjà travaillé pour un noble ?

— Oui m'sieur, sur m'sieur ! », s'exclama le jeune garçon, se tenant aussi droit qu'un piquet, la main sur le front en un salut militaire.

Le duc de Wayland afficha un sourire amusé sur son visage. Le gamin, qui était venu toquer à sa porte, détenait une détermination sans faille et une telle énergie qui lui plaisait énormément.

« Et que t'a-t-il donc confié ?

—Hum... »

Simon se balança sur ses talons, faisant retomber son bras le long de son corps, puis détourna son regard. Il cherchait quelque chose mais à part le vol ou bien le fait qu'il fut, dans le passé, le messager de maris infidèles ne conviendrait surement pas à un duc, si ?

« Et bien ? »

Le garçon arrêta de se balancer et enleva sa casquette, couvrant ses cheveux blonds. Il passa une main dans sa chevelure et lui avoua en toute honnêteté, la tête baissée sur le sol :

« M'sieur, j'ai été voleur...Mais c'était avant. C'est parce que j'avais faim. Maintenant ça va mieux avec l'habitude ! »

Le duc arqua un sourcil, légèrement surpris que le jeune homme lui avoue cela.

« Mais vous savez, je suis discret. Les m'sieurs comme vous, qui n'aimaient pas leurs femmes, avaient besoin d'un gars comme moi pour mettre en place leur rendez-vous avec leurs maitresses... », se rattrapa Simon en affichant un sourire forcé.

Il essayait de faire bonne figure face au duc. Il devait être pris, il était prêt à tout pour travailler pour le duc de Wayland. Simon attendait la réponse du duc, qui avait eu la bonté de l'accueillir dans son bureau. Les domestiques de la maison l'avaient prié de quitter au plus vite le domaine, ne voulant pas que le duc sache qu'un orphelin trainait autour de sa demeure en pleine soirée. Nombreux nobles n'auraient pas réagi comme le duc lorsqu'il l'avait retrouvé sur le pas de sa porte, il l'aurait sans doute battu ou bien chassé à grands coups de cannes. Trevor avait bien été surpris de voir un gamin d'une dizaine d'années se tenir devant sa porte d'entrée, cependant il avait été attendri lorsqu'il avait vu le sourire du jeune homme.

« Vz'êtes monseigneur, le duc hein ?, s'était-il exclamé lorsque son regard s'était posé sur lui.

— J'aurais aimé te prendre sous mon aile, cependant si tu n'as pas de compétences particulières à m'offrir, je ne peux t'attribuer un poste. », répondit le duc, d'une voix calme.

Un verre à la main, et se tenant adossé contre son bureau, il regardait le garçon se tenir au milieu de la pièce, quelque peu nerveux. Trevor Maynfield ne s'était pas attendu, en voulant rejoindre Douglas au club de jeu, de voir un orphelin sorti de nulle part réclamer un travail auprès de lui. Au départ, il avait désiré l'ignorer cependant le sourire du jeune garçon lui avait fait chaud au coeur. Dans ce sourire, il avait retrouvé James, son frère cadet.

« Les chevaux m'sieur ! Les animaux m'aiment bien milord ! », rajouta Simon, prêt à renchérir s'il le fallait.

Ce mensonge ne manqua pas d'étonner le duc, il savait que le jeune homme était prêt à tout pour avoir un travail bien payé. C'était donc indispensable pour lui, s'imaginait Trevor en voyant le visage de Simon. Il était à la fois chamboulé et nerveux. Mais à cause de quoi ?

« Bien. Tu commenceras demain, je verrais si tu es d'une grande aide pour le palefrenier, sinon il faudra que tu trouves ta place autre part. »

Simon afficha un sourire radieux, ses yeux s'illuminèrent néanmoins sa gaieté ne resta que pendant quelques secondes, il n'y connaissait rien aux chevaux, ni comment s'en occuper, que ferait-il lorsque le duc le remarquerait dès le lendemain ? Celui-ci le sortit de ses pensées, en lui demandant, curieux :

« As-tu au moins un endroit où dormir pour la nuit ? »

Il en avait bien un mais il ne pouvait le lui dire, et s'il lui disait qu'il dormait dans les bas quartiers, ou même aux alentours du parc, le duc lui donnerait peut-être un endroit où dormir pour cette nuit. Simon devait faire son rapport à la Dame, et savoir ce qu'il devait faire pour la suite, puisqu'à présent, il travaillait pour le duc de Wayland.

« M'sieur vous en faites pas, la rue c'est mon chez moi. »

Trevor ne lui demanda rien de plus. Vu la détermination qu'il avait remarqué dans les yeux du jeune homme, il savait que quoiqu'il puisse dire, Simon refuserait de rester ici. Et puis il était déjà bien en retard à son rendez-vous avec Douglas. En chemin, il penserait aussi au moyen de faire tomber sa belle Italienne qui n'était pour lui qu'un défi à relever. Il laissa le garçon s'en aller et finit par rejoindre Douglas en prenant son cheval qu'il avait demandé à faire préparer, quand l'imprévu lui tomba dessus.

Pandora faisait les cents pas dans le salon de la demeure familiale, elle attendait avec impatience que Simon vienne lui apporter la bonne nouvelle, néanmoins, il n'était pas encore arrivé, et cela faisait près de deux heures qu'elle attendait sa visite. S'arrêtant devant Sophie, elle esquissa un sourire en voyant le plateau qu'elle transportait. Des tartes aux fruits rouges étaient prêtes à être dégustées et, en voyant la fumée sortir des tartelettes, Pandora en conclut qu'elles venaient de sortir du four.

« Ma petite, pensez-vous qu'il ne serait pas temps pour vous d'aller vous coucher ?

— Maintenant que vous êtes là avec ces gâteaux, je ne pense pas. »

Sophie en rit un peu avant de lui en tendre un dans une petite assiette.

« Je vais finir par devenir énorme, Sophie.

— Qu'importe, il faut que je me rattrape sur ses dernières années. Je n'ai pu vous nourrir convenablement, et à présent je le peux puisque vous êtes de retour ! »

Pandora se saisit de l'assiette et la déposa sur la table basse, près de laquelle elle n'avait cessé de marcher depuis ses deux dernières heures. Elle sentit la présence d'Henry dans la pièce, bien que même Sophie, sa propre femme, ne la remarque pas et soudainement, elle se tourna vers lui.

« Et bien, ne voulez-vous donc pas venir manger avec nous ?

— Hum...Je suis en service.

— Puisque vous le dites.

La jeune femme mit du temps avant de voir Simon se détacher du majordome qui l'avait caché depuis son entrée.

— Simon !, s'était-elle exclamée, soulagée qu'il soit revenu sain et sauf.

— M'dame ! J'ai eu le travail, m'dame. »

La jeune femme lui rendit son sourire. Pandora venait d'enclencher le premier rouage du mécanisme. Maintenant qu'elle avait commencé à lancer sa stratégie, grâce à l'aide de Simon, elle ne pouvait plus revenir en arrière. La suite n'allait pas tarder à arriver à présent et elle devait être prudente, car lorsque l'on joue à un jeu, il faut faire attention où partira la mise.

« Mais il y a un petit problème... », finit-il par lui annoncer tandis qu'elle s'était assise sur son fauteuil, en face de la table basse.

« Je t'écoute.

— Je dois aider le palefrenier de m'sieur, mais je n'y connais rien à ces animaux m'dame. »

Pandora resta un moment, silencieuse, réfléchissant à ce petit problème qui pourrait en être un gros si jamais Simon ne pouvait plus travailler pour le duc.

— Je suis aussi mauvaise que toi dans ce domaine, mais si j'avais été à ta place, j'observerais le palefrenier faire son travail. Je recopierai ses moindres faits et gestes lorsque je le verrais en contact avec les chevaux. En une nuit, tu ne peux apprendre ce qu'un palefrenier peut savoir sur ses animaux en quelques années. Alors demain, tu ne feras que l'observer. En seras-tu capable ? »

Simon fut ennuyé mais répondit, les sourcils froncés :

« Je pense m'dame, mais si jamais le duc ne veut plus de moi...Je ne vous servirai plus à rien.

— Si jamais le duc ne veut plus de toi, cela ne veut pas dire que tu ne me seras d'aucune utilité. Tu as l'air d'un jeune homme intelligent, et avec l'éducation que je t'apporterai, tu iras bien loin. »

Le garçon sortit les mains de ses poches, il regarda la jeune femme et lui demanda finalement :

« Pourquoi moi ? »

La jeune femme était restée quelques minutes, silencieuse. C'est vrai, pourquoi l'avoir choisi lui au lieu d'autres ? Peut-être parce qu'à vue d'œil, il n'avait pas l'air d'être un mauvais garçon dont la rue avait changé le cœur. Bien qu'il ait pu voler dans le passé, Simon s'était toujours justifié et il pouvait les compter les erreurs sur les doigts de sa main car ce fut rare qu'il le fasse. Et enfin, il était un piètre menteur, ce qui avait plu à la jeune femme. Simon était encore innocent et elle pouvait encore faire de lui, un homme bon.

Soudainement Sophie posa le plateau sur la table et regarda le garçon puis sa maitresse converser, elle était restée en retrait au départ mais en sachant ce que Pandora pouvait avoir derrière la tête, elle demanda soudainement, empêchant Pandora de répondre au garçon :

« Que préparez-vous donc ? »

Pandora posa son regard sur la cuisinière puis sur son majordome. Elle les connaissait depuis sa plus tendre enfance. Lorsque sa mère fut morte, Sophie et Henry s'étaient occupés de son éducation. Quant à son père, il avait préféré se noyer dans l'alcool, jusqu'à ce qu'il se rappelle qu'il avait une autre enfant dont il devait s'occuper, et que ce ne pouvait être les domestiques qui devaient le faire à sa place. Le comte s'était aussi rappelé que ses filles n'avaient plus que lui sur qui compter. Mais pour l'une d'elle, c'était trop tard. Pandora avait préféré le fuir que de rester à ses côtés.

« Il serait mieux pour toi que tu n'en saches rien. Elle marqua une pause et reprit : Viens donc t'assoir Simon et goute les tartes de Sophie. Elles sont délicieuses ! »

Le jeune garçon se tourna vers le majordome qui ne trouvait rien à dire, il savait que la jeune femme pouvait être diabolique, mais il préférait la laisser faire. Par le passé, cela avait toujours marché ainsi entre eux, elle finissait, à la fin, par regretter ses actions et apprenait donc de ses erreurs. Quant à sa femme, Sophie, ne se mettait guère en travers du chemin de la jeune fille. Elle écoutait souvent Henry et laissait Pandora froncer tête baissée jusqu'à ce qu'elle se cogne à un mur et qu'elle vienne la soutenir. Néanmoins, elle préférait savoir de quoi il s'agissait. A présent qu'elle avait grandi, c'était comme si un fossé s'était creusé entre elles sans que Pandora ne le voit.

Simon détourna son regard et le posa sur Sophie, tandis qu'il s'avançait prudemment jusqu'au fauteuil où était assise la jeune femme. S'asseyant finalement à côté de Pandora, il se saisit d'une tartelette après qu'elle le lui en ait tendu une et croqua à l'intérieur de celle-ci avec appétit.

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