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Attendant devant la porte de la salle, Hermione faisait les cent pas. Il était tôt, en ce samedi matin. Elle avait longtemps hésité à venir à cet atelier, mais avait jugé cela utile. Au bord du demi-tour, elle se sentit rassurée en voyant la professeure McGonagall s'approcher.

- Vous êtes seule ? S'étonna la professeure.

- Bonjour professeure, dit-elle. Je suis en avance.

- Oh je vois, répondit-elle.

Elle entra la clé dans la serrure et poussa la porte de bois lourde. Hermione la suivit de près ; elle ne pouvait plus faire demi-tour maintenant.

- Je suis heureuse de vous voir ici, lui dit alors la professeure.

La jeune fille ne fit que lui sourire. Hermione attendait, assise, que l'atelier de prise de parole commence. Un garçon et une fille de Serdaigle entrèrent en saluant la professeure.

- Bonjour, installez-vous.

Ils s'exécutèrent et s'assirent près de la Gryffondor. Cette dernière jouait nerveusement avec ses doigts, les entremêlant les uns aux autres. Plus que quelques minutes d'attente.

En elle, un petit être lui criait de quitter la salle. Inversement, son cœur lui imposait de rester. Elle avait besoin de parler, c'est ce que lui avait dit Ginny la soirée précédente, en lui parlant de l'existence de cet atelier.

- Bon, je pense que nous allons commencer. Je doute fort que d'autres personnes se présentent...

À l'instant même où elle termina sa phrase, quelqu'un toqua à la porte. Blaise Zabini entra dans la pièce, s'arrêtant au seuil de la porte.

- Professeure, la salua-t-il. Excusez-moi du retard.

- Entrez mon garçon, asseyez-vous.

Il salua ses camarades et vint s'installer à côté d'Hermione. Elle l'observa un moment, silencieuse. Elle connaissait très mal ce garçon, pour ne pas dire qu'elle ne le connaissait pas du tout. De ce que lui avait dit Harry, il était vraiment aimable, et intelligent. Tout l'inverse de son meilleur ami, Drago Malefoy.

- Bienvenue, commença-t-elle. Vous êtes ici, à cet atelier de prise de parole, afin de parler des choses qui vous tourmentent ou qui pourraient nuire à votre apprentissage. En d'autres termes, vous êtes ici parce que vous ressentez le besoin de parler, de vous livrer, peu importe le sujet.

Les quatre élèves sourirent. En réalité, cet atelier venait tout juste d'être créé, et les élèves qui s'y trouvaient n'étaient autre que les septièmes années, traumatisés par la guerre.

- Quelqu'un souhaite commencer ?

Personne ne répondit. La professeure les regardait tour à tour, ne sachant qui interroger.

- Commençons par des présentations, dit-elle. Débutons par la gauche.

Blaise écarquilla les yeux, presque gêné de devoir commencer. Après s'être raclé la gorge, il prit enfin la parole :

- Heu... Bonjour. Je m'appelle Blaise Zabini, je suis en septième année, enfin en deuxième septième année.

- Que souhaitez-vous faire après les études monsieur Zabini ?

- J'aimerais faire dans l'économie, dit-il fièrement en resserrant sa cravate. Mon père travaille au ministère de la magie, il gère les finances.

- Bien. Pourquoi êtes-vous revenu faire votre septième année ?

Il se gratta le front, nerveux. On pouvait facilement deviner à son comportement qu'il ne savait quoi répondre.

- J'avais l'impression de ne pas mériter le diplôme.

- Pourquoi ça ?

- En septième année, enfin je veux dire lors de ma première septième année, je n'ai pas eu de très bonnes notes... Et je ne suivais pas très bien les cours.

- Nous sommes heureux de vous compter parmi nous. Miss Granger ?

Hermione se redressa à l'entente de son nom. Elle sentit ses joues chauffer et son corps frissonner. Tous les regards étaient posés sur elle, et elle détestait ça, ce qui ne correspondait pas avec son envie de participer à cet atelier.

- Bonjour. Je m'appelle Hermione Granger, et tout comme mon camarade je suis revenue faire ma septième année. Je ne me sentais pas prête à quitter l'école, et je voulais obtenir le diplôme pour de vrai. Je ne sais pas encore ce que je veux faire, mais j'aimerais défendre le droit des elfes de maison.

Tous ses camarades restèrent bouches-bée tandis que la professeure en face d'elle, les jambes croisées, affichait un air fier sur son visage, dessinant un large sourire.

Les deux élèves se présentèrent à leur tour, de la même manière dont l'avaient fait Blaise et Hermione. Pendant ce temps-là, la jeune fille observa longuement le Serpentard à côté d'elle. Il avait les traits fatigués ; de gros cernes étaient dessinés sous ses yeux noisette.

- Pourquoi êtes-vous là ?

Hermione sortit de ses pensées en secouant la tête. Minerva McGonagall la fixait, attendant une réponse de sa part.

- Vous l'avez dit vous-même professeure, dit la jeune fille à gauche d'Hermione.

- Je vous propose que chacun de vous prenne la parole et propose un sujet pour chaque jour. Qui souhaite présenter son problème aujourd'hui ?

Personne ne répondit. La pièce resta silencieuse un moment avant que Blaise Zabini n'ose enfin lever la main. La professeure lui fit signe de prendre la parole.
Le garçon se gratta le cou, puis les cheveux, avant de commencer. C'était dur pour lui, ça se voyait à la grimace sur son visage et à son comportement nerveux. Il prit une grande inspiration, puis commença :

- J'aimerais... Parler de la guerre professeure.

Pas étonnant comme sujet.

- Que souhaitez-vous nous dire ?

- J'aimerais parler des choses que j'ai dû faire pour sauver les gens que j'aimais.

Personne ne parlait, tout le monde écoutait. Hermione, assise à côté de lui, devinait ses tremblements sous le sweat épais qu'il portait.

- J'ai dû tuer des gens pour garder mes amis en vie. J'ai dû en emprisonner d'autres. Ce sont des secrets très lourds, qui nous font mal. J'en rêve parfois, la nuit. Et je ne peux pas en parler, à mes amis. Ils me détesteraient. Mais c'était pour leur bien.

Il marqua une pause, entrelaçant ses doigts avec nervosité. Il expira rapidement avant de reprendre :

- J'ai balancé le père de mon meilleur ami aux détraqueurs, qui le cherchaient pour l'emprisonner. J'ai dit où il se cachait. Mais c'était un homme cruel, il lui faisait du mal. Mon ami avait besoin de ça pour aller mieux, pour pouvoir vivre, se justifia-t-il.

Hermione écarquilla les yeux face aux aveux du garçon. Alors Lucius Malefoy était à Azkaban ? Sans surprise quand on y réfléchissait. Mais qu'était devenue la mère du blond ? Le garçon à côté d'elle se remit à trembler vivement, sous la pression des aveux.

- Pensez-vous que ce que vous avez fait est bon aujourd'hui ? Pensez-vous que cela à collaborer au bien-être de votre ami ?

- Je n'en sais rien. Il est malheureux, et il va mal. Mais il est différent, bien différent de ce qu'il a pu être jusqu'à présent. Je pense qu'il se cherche.

- N'avez-vous jamais essayé de lui en parler ?

Le garçon à la peau mate secoua la tête.

- Jamais. J'ai bien trop peur qu'il ne le prenne mal. Depuis... Depuis la fin de la guerre, il s'est tapi dans le silence. Il passe le plus clair de son temps seul. Des fois, il disparait pendant des heures.

Hermione resta choquée face à toutes ces découvertes. Drago Malefoy allait-il si mal que ce que disait son ami ? Ce qui expliquerait son comportement étrange, l'autre jour, dans la cour.

Elle repensa aux regards qu'ils s'étaient échangés ; habituellement, Drago n'aurait pas insisté.

Blaise Zabini grimaça, passant la main dans ses cheveux courts.

- Pourquoi votre ami ne viendrait-il pas avec nous ? Demanda la professeure sans mentionner le nom de Drago.

- Je ne pense pas qu'il s'ouvre un jour, c'est quelqu'un de beaucoup trop... Je ne sais pas comment dire, mais il garde tout pour lui.

- Comment vous sentez-vous ?

Il fronça les sourcils, l'air de ne pas comprendre ce que cherchait la professeure.

- Pardon ?

- Comment vous sentez vous, maintenant que vous nous avez livré votre secret ?

Il haussa les épaules :

- Je ne sais pas.

Elle regarda les autres élèves :

- Avez-vous quelque chose à dire à votre camarade ?

Hermione, ne sachant trop pourquoi, fut prise d'un élan de courage et leva la main. Le brun à côté d'elle la regarda, visiblement aussi surpris qu'elle. La femme en face d'elle lui fit signe qu'elle pouvait parler.

- Nous avons tous commis des atrocités, avec la guerre. Nous avons blessé, torturé et tué. Mais nous avons tous fait ça pour les gens que nous aimons, même si cela ne suffit parfois pas. C'était pour nous, pour eux, pour des vies innocentes.

Il lui sourit ; elle avait raison.

***

Quand la réunion fut terminée, les quatre adolescents sortirent de la salle en saluant la professeure, qui elle resta dans son bureau. Les deux Serdaigle partirent rapidement, n'ajoutant aucun mot. Hermione, qui marchait devant, fut arrêtée par Blaise.

- Merci, lui dit-il.

Elle haussa les sourcils, le questionnant du regard.

- Ce que tu as dit, j'ai l'impression de ne plus être un monstre... Enfin, d'être compris.

Il se mit à son niveau pour marcher.

- Nous ne sommes pas des monstres, nous sommes humains.

- Tu comprends mon geste, n'est-ce pas ?

Elle le regarda un moment avant de répondre :

- Je ne connais pas Drago, et tu sais que je ne le porte pas dans mon cœur. Je ne connais pas son histoire, mais si son père lui faisait du mal, alors oui, tu as bien agi.

Ils marchèrent en silence.

- J'aurais fait pareil à ta place, finit-elle par dire.

Il ouvrit grand les yeux en la regardant, puis lui sourit. C'était important, de se rassurer, dans ces moments-là. Alors, si ces paroles pouvaient aider Blaise à déculpabiliser, il était bon de les laisser sortir.

- Il a changé, dit-il.

- Sûrement.

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