12

Il était là, assit en face d'elle. Hermione crut avoir une hallucination, tout comme les trois autres élèves qui se trouvaient à sa gauche. Blaise Zabini était figé. Elle serra la mâchoire, repensant à la semaine passée.

Drago Malefoy se trouvait là, à l'atelier. Ce n'est pas à ce genre d'activité que l'on aurait trouvé le garçon autrefois.

Mais il était assis sereinement, l'air de rien, les mains dans les poches, comme attendant une séance de cinéma.

Quand la professeur McGonagall pénétra dans la pièce, elle-même eut un petit recul de surprise.

- Monsieur Malefoy, c'est un plaisir de vous voir parmi nous.

Il sourit brièvement.

Le garçon était marqué par la fatigue. Hermione, de l'autre bout de la pièce, parvenait à voir ses cernes noirs. Ses cheveux étaient décoiffés, légèrement relevés en arrière.

- Aujourd'hui, toujours la même chose ; un élève prend la parole, les camarades écoutent et partagent.

Tous restèrent silencieux.

- Drago, voulez-vous prendre la parole aujourd'hui ?

Il hocha la tête, geste accompagné d'un haussement d'épaules.

Le garçon ne prit pas tout de suite la parole. Il se concentrait pour trouver des mots à ses maux.

Blaise avait l'air mal à l'aise, comme peureux qu'on ne découvre son secret. Hermione n'avait pas oublié ; le garçon avait vendu le père de Drago aux détraqueurs, chose que le blond ignorait. Mais c'était un élève intelligent ; il n'y avait aucun doute sur le fait que Drago ait compris le fait que quelqu'un ait vendu son père à Azkaban. Mais avait-il une quelconque idée de qui pouvait bien être l'auteur de cette trahison ? Hermione avait un doute là-dessus.

- Je sais que la grande majorité des personnes dans cette pièce ne m'apprécient pas.

Si tu ne comportais pas comme un imbécile arrogant aussi.

- Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? Demanda la professeure.

- J'ai fait des choses mauvaises, dit-il froidement. Très mauvaises. J'étais un garçon mauvais, avant.

Blaise sourit face à ces paroles, comme fier d'entendre son ami prononcer ces mots.

- Et qui êtes-vous aujourd'hui ?

Il haussa les épaules :

- C'est justement très dur de répondre à cette question, professeure. Je suis en phase de... Transition. Et c'est dur.

Hermione était surprise de voir la facilité avec laquelle Drago se livrait à eux.

Il avait énoncé cette phrase tout en la fixant. Avait-il un message à lui faire passer ? Était-ce un message caché ? Elle n'en savait trop rien, tout ce qu'elle comprenait, c'était que tous ces mots lui étaient adressés. Mais pourquoi ?

Elle repensa à cette nuit-là, où Drago avait crié. Elle pardonnait sa réaction, pensant à la gêne qu'il devait avoir ressenti après avoir passé ces brèves secondes avec elle. Peut-être s'en voulait-il de s'être comporté ainsi ?

Ça m'est égal.

- Vous sentez vous mieux aujourd'hui ?

- Mieux, non. Différent, oui.

La professeur McGonagall fit mine de comprendre. Hermione elle, ne comprenait rien. Blaise lui souriait. Les deux autres semblaient s'en ficher totalement.

L'atelier se finit plus tôt ce jour-là. Hermione se redressa et quitta la pièce. Finalement, Drago n'avait pas tant parler que ça. Mais elle avait ressenti sa douleur, et savait qu'il était souffrant.
Comment faisait-il pour aussi bien le cacher ? Faisait-il des cauchemars toutes les nuits ? D'ailleurs, pourquoi n'avait-il pas abordé ses cauchemars lors de l'atelier ? N'était-ce pas le but de sa venue ?
Elle comprit à travers toutes ses questions que le garçon vivait bien pire que ses cauchemars répétitifs.

Elle se retourna un court instant comme pour vérifier que tout allait bien ; il plongea son regard profond dans le sien, et disparu au bout du couloir.

***

Il était tard. Hermione lisait encore, au coin du feu, quand de nouveaux cris retentirent. Elle ne bougea pas d'un poil, préférant le laisser gérer ce moment seul.

Quand les cris se stoppèrent enfin, le blond sortit de sa chambre, recouvert de sueur et les traits tirés. Elle ne fit pas attention à lui, ne jugeant pas nécessaire la question de savoir s'il allait bien ; non, il n'allait pas bien.

- Tu lis encore ? Demanda-t-il en faisant comme si rien n'était.

Elle hocha la tête. Il but une gorgée d'eau dans un verre posé sur la table, et soupira en passant la main dans ses cheveux.

- On va instaurer des règles, dit sèchement Hermione en se retournant brutalement.

- Hein ? Demanda-t-il en écarquillant les yeux.

- On arrête de s'appeler par nos noms de familles. Nous ne sommes plus ceux que nous étions avant, alors oublions cette manie. Reprenons tout à zéro, et pas sur les mauvaises bases que nous avons connues il y a des années.

Il secoua la tête en rigolant :

- Mais qu'est-ce qu'il te prend ?

- Tu l'as dit toi-même ; tu es en changement. Alors si tu veux changer, change ton rapport aux gens.

- N'est-ce pas ce que j'ai fait depuis le début de l'année Granger ?

Elle haussa les épaules :

- Qu'est-ce que j'en sais moi ? Et ne m'appelle pas par mon nom de famille !

- Il me semble que tu es la première concernée.

Elle fronça les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il cherchait à lui dire.

- Ne t'ai-je pas aidée ?

- Je t'ai remercié, dit-elle.

- Ce n'est pas ça que je cherche à dire.

- Alors quoi ?

Il s'installa à côté d'elle, fixant le feu de ses grands yeux bleus.

- Je ne t'aurais pas aidée avant.

Elle haussa les épaules.

- C'est quoi, ta deuxième règle ?

Elle se mordit la lèvre :

- Ne réagis pas mal, mais je sais que tu as besoin d'aide. Je n'aurais jamais été capable de te dire ça avant, mais je vois bien les efforts que tu fais pour changer... Alors si tu as besoin d'aide pour ça, j'aimerais t'aider. Je te dois bien ça, après l'aide que tu m'as apportée.

- Je doute fort que tu ne veuilles m'aider, dit-il nerveusement. Après tout ce que j'ai pu te faire. Puis l'aide dont tu parles n'est rien par rapport à ce que tu proposes-là. Mais c'est gentil de ta part.

- Tu n'es pas dans ma tête Malefoy, alors ne pense pas à ma place.

- La règle numéro une ! S'exclama-t-il.

Elle rit timidement. Elle-même allait avoir du mal à respecter ce règlement visiblement.

- Alors règle numéro trois, laisse-moi t'aider pour les cours.

Elle fronça les sourcils :

- Je n'ai pas besoin d'aide.

- Bon bah je te laisse avec tes cahiers vides.

Elle leva les yeux au ciel.

- Ils ne sont pas vides.

- D'accord, tant mieux pour toi.

Qu'est-ce qu'il peut être têtu, grogna-t-elle intérieurement.

- Bon d'accord.

Il sourit fièrement.

- Tu as d'autres règles ?

Elle secoua la tête ; rien ne lui venait à l'esprit. Se levant en direction de sa chambre, elle se retourna et dit :

- Vois ça comme un challenge ; si je change d'avis sur toi, Drago Malefoy, c'est que tu auras réussi. C'est que tu seras devenu quelqu'un d'autre.

Elle disparut alors qu'il souriait bêtement, les mains tendues vers le feu qui dansait.

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