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La bibliothèque n'avait pas changé ; c'était comme si elle n'avait jamais connu cette effroyable guerre. Hermione parcourait les rayons du bout des doigts, retirant la fine couche de poussière qui recouvrait les livres. Ses ongles grattaient les gravures, ses yeux glissaient le long des couvertures. C'était apaisant, de se retrouver ici. Le lieu n'avait tellement pas changé qu'il en venait même à lui faire oublier les atrocités qui hantaient ses pensées, jours et nuits.

Elle tira un livre à la couverture noire qu'elle posa dans ses bras, sur une pile de livres déjà bien fournie. L'odeur qui se dégageait des vieilles pages venait chatouiller ses narines, ce qui valut l'esquisse d'un sourire. Un jour à peine après sa rentrée, la jeune fille s'était sentie dans l'obligation de venir vérifier les lieux. Et la voilà qui repartait avec un sac plein de manuels et autres récits.

Elle s'installa quelques minutes dans un des fauteuils cachés au fond de la bibliothèque, entre deux rangées de livres. Elle regardait les élèves passer devant elle, tous occupés. Le temps passait si vite.

Elle regardait la vie devant elle. Tout avait avancé si vite qu'elle en avait perdu le fil. Elle soupira, resserrant sa queue de cheval d'un geste rapide. Ses mains amaigries tremblaient et peinaient à tenir fermement les livres.

C'était rassurant de se tenir ici ; Hermione se sentait bizarrement en sécurité, ce qui n'allait pas de soi dans le reste du château. Partout ailleurs, son instinct lui chuchotait de se méfier, de rester sur ses gardes ; mais le mal était bien loin, désormais. Elle n'arrivait pas à se faire au fait que le Seigneur des Ténèbres avait bel et bien été tué, et son armée, dissoute et emprisonnée.

Elle n'avait jamais connu une année de tranquillité à l'école de sorcellerie. Ces sept premières années n'avaient pas été de tout repos, il fallait le dire. Elle sourit en repensant à ces douces années, qui l'avaient marquée de bons souvenirs.

Et aujourd'hui, tout semblait trop calme, trop fade et mort.

L'été avait été dur pour tout le monde. Il fallait dire que la guerre avait été un véritable traumatisme. Beaucoup de personnes étaient décédées, laissant derrière-elles des personnes brisées ; comme l'était Hermione.

Fred, Lupin, Tonks, Dobby ; beaucoup trop les avaient quittés. Les mois qui ont suivi la perte de ces êtres chers s'étaient montrés comme de véritables calvaires. Certaines personnes s'en remirent assez bien, rapidement, ou arrivaient à le cacher : mais pas Hermione.

Ron avait quitté Hermione il y a deux mois de là, sous prétexte qu'il voulait se sentir seul. C'était bizarre, mais elle le comprenait sans le comprendre. Cette rupture avait été un choc pour la jeune fille, qui avait passé l'été seule. Bien que leur relation n'ait duré que quelques semaines, Hermione avait été éperdument amoureuse du roux pendant des années, sans qu'il ne le sache.

Il n'était pas revenu à Poudlard pour faire sa septième année, ni Harry d'ailleurs. Hermione était seule aux côtés de Ginny, qui passait le plus clair de son temps dans la salle commune accompagnée d'autres Gryffondor.
La brune avait besoin de rester seule, dans le silence. Ce n'était sûrement pas bon, mais elle en ressentait le besoin. C'était nécessaire pour sa guérison.
Certaines personnes géraient mieux leur douleur en groupe, accompagnée : ce qui était loin d'être le cas de la brune.

Tout semblait beaucoup trop rapide pour elle ; elle était larguée.

Une larme perla sur sa joue pâle. Elle l'essuya du revers de sa manche, souriant nerveusement.

Allez Hermione, tout va bien se passer. Tu vas t'en sortir.

Elle se redressa et quitta la pièce, sa pile de livre contre elle.

Les couloirs étaient vides en ce samedi après-midi. La professeure McGonagall avait sûrement prévu le fait que la rentrée se déroule juste avant un week-end, afin de laisser le temps aux anciens guerriers de se remettre de leur retour sur le champ de bataille, car oui, c'était dur de revenir sur le front.

Hermione n'avait croisé que quelques visages familiers parmi les septièmes années, ce qui ne l'étonnait pas vraiment étant donné que les diplômes leur avaient été offerts. En revanche, le visage de Drago Malefoy dans le Poudlard Express l'avait marquée. Elle ne s'attendait pas à le revoir, et n'était pas pressée d'avoir de nouveau cours avec lui. Il représentait tout ce qu'il y avait de plus désagréable pour elle.

Évite-le au maximum.

Drago était entouré de plusieurs Serpentard. Comme c'était le week-end, les élèves de sa maison avaient décidé de manger à Pré-au-Lard, lui forçant la mise. Ils avaient fini par réussir à le sortir de son lit, ce qui leur valu quelques grognements de sa part.

Il n'avait toujours pas dit un mot depuis leur arrivée à Poudlard. Un silence que beaucoup remarquaient. Lui qui habituellement était toujours la bouche ouverte, à se vanter, à se moquer ou à rire ; il était bien silencieux.

Il ne ressentait pas le besoin de s'ouvrir, ni de parler à qui que ce soit. Il cherchait de la tranquillité, et ce n'était pas dans ce pub qu'il allait la trouver.

De l'autre côté de la pièce, une blonde lui souriait et lui adressait des regards insistants auxquels il ne répondait pas. Elle ne lui faisait aucun effet.

Il n'en avait pas envie.

Sur ce point-là, Drago avait énormément changé. Le coureur de jupon qu'il avait été était resté mort à la guerre, laissant un Serpentard plus sérieux que jamais. Le jeu de séduction ne l'attirait plus, et la satisfaction de la réussite non plus. Il voulait être seul, et ce n'était sûrement pas cette blonde qui allait le laisser tranquille.

- Salut, dit-elle.

Il sortit de ses pensées, levant ses yeux vers elle. Il ne l'avait même pas vu s'approcher.

- Drago Malefoy, c'est ça ?

- Qu'est-ce que tu veux ? Demanda-t-il froidement.

Elle parut surprise de sa question, reculant légèrement en écarquillant ses grands yeux marrons. D'un geste timide, elle vint jouer avec ses cheveux, les emmêlant autour de son doigt.

- Je me demandais si...

- Arrête de te demander, la coupa-t-il sèchement. Pars de là.

Elle fronça les sourcils, dans l'incompréhension totale :

- Mais tu ne m'as pas laissée te dire ce que je voulais...

- Parce que moi, je ne veux rien.

Il se redressa et finit son verre d'une traite, grimaçant légèrement. L'alcool réchauffa sa gorge avant de le faire tousser. Il s'éloigna du bar, sous le regard surpris de ses amis.

- Je vous rejoins plus tard, dit-il en leur faisant signe.

- Tu as changé, tu n'es pas celui que l'on m'avait décrit.

Oui, il avait changé.

Il s'enfonça dans la noirceur de la nuit. 



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