DOUZE
Je me regarde dans le miroir de la salle de bain. Ma mâchoire a repris de la forme mais il me reste des bleus sur les épaules et sur les côtes. Mes yeux sont encore un peu rouge mais ça s'améliore de jours en jours. Je passe la main dans mes plumes de corbeaux qu'on appelle cheveux et je soupire. Une autre journée commence. Une autre journée dans laquelle je vais être à moitié endormi en cours et ce ne sera que le soir que je pourrais vraiment vivre.
Parfois j'ai vraiment l'impression d'être un corbeau nocturne qui vit une fois la nuit tombée. C'est vrai, la nuit je ne dors pas beaucoup, je réfléchis, je pense mais je ne dors pas. L'insomnie devient alors mes ailes noires avec lesquelles je vole jusqu'à toucher le sol et rejoindre les bras de Morphée.
Je marche vers la chambre, ma bonne humeur sûrement oubliée sous mon oreiller. Émile, comme d'habitude débarque tout sourire en m'accueillant.
- Charlie!!! Bien dormi?
Je m'efforce de lui sourire. On ne peut pas décevoir une personne comme lui! Il est bien trop adorable pour ça.
- Pas trop mal et toi?
- Très bien! On descend pour le p'tit-dèj ensemble?
- Oui pas de problème.
En bas, les élèves papotent et piaillent de tous côtés. Nous nous asseyons à une table pour manger.
- Dis Charlie? Ça va mieux depuis.... depuis lundi?
Je hoche légèrement la tête. Ça fait trois jour, j'ai eu le temps de me remettre.
- Oui ne t'inquiètes pas! Tu vois, je n'ai presque rien.
Émile hoche la tête avec un air tout de même inquiet et affiche un grand sourire
Je vois Dali s'approcher et s'assoir à côté d'Émile. Elle a de grandes cernes en ce moment et ça me fais peur. Je n'aime pas la voir comme ça car ce n'est pas dans son habitude d'être fatiguée.
- Yo les gars... ça va?
-Moui et toi? demandé-je insistant sur la fin.
Elle me dévisage puis réponds.
- Bah ouais nickel! Je dors pas beaucoup en ce moment mais c'est rien.
- Vu ta tête, s'esclaffe Émile, c'est pas rien non!
Dali relève la tête et lui jette un regard noir. Au moment où elle donne une tape sur la tête du blond, Kian arrive et pose son plateau à côté de moi.
Je le regarde furtivement, je ne veux pas qu'on me voie le regarder.
Au bout de cinq minutes, je sens sous la table que Kian me tiens la main. Il continue à parler comme si de rien n'était mais encore une fois on garde un petit secret dont nous sommes les seuls au courant. Il caresse ma main et y forme de petit cercles. Ça me fais du bien de sentir sa main dans la mienne, nos doigts entrelacés.
Et je souris comme un con.
Je n'écoute pas vraiment ce qui ce dit, je suis juste concentré sur ce contact qui me paraît interdit.
Logan débarque comme à son habitude un peu au moment où on ne l'attendait pas.
Nous le saluons tous pendant qu'il commence directement à manger.
À l'heure de fin des cours, je me dirige avec Kian jusqu'à l'endroit de rendez-vous pour le club de course.
- Par contre cette fois-ci tu essaye de rester avec nous, me taquine-t-il en faisant référence à la semaine dernière.
Je hoche la tête en souriant.
Une fois arrivés vers le reste du groupe, nous commençons à courir dans les bois. J'essaye de ne pas aller trop vite mais c'est comme si mes jambes avaient besoin de se défouler, c'est comme si en courant ainsi, tous mes problèmes pouvaient s'en aller.
Et contrôler cette envie de courir sans m'arrêter est difficile. Je veux courir. Je veux sentir mon cœur battre, qu'il me rappelle que je suis en vie, moi.
Je veux sentir mon torse chercher de l'air pour mes poumons. Je veux que mes pieds se détachent de mon contrôle et foulent le sol jusqu'à l'épuisement. Je veux plus que tout ne me soucier de rien et simplement avancer sans réfléchir. J'en ai envie.
Mais je regarde Kian qui souffle à côté de moi et ça me donne envie de rester. Alors je continue à courir au même rythme que tout le monde.
Le soir alors que je rentre de la douche, j'apprends que les autres veulent faire un tour dans la cabane. Il nous reste bien une heure avant l'extinction des feu donc je les accompagne.
Nous marchons tous les cinq dans les bois en regardant autour si personne ne nous suit. Arrivés devant l'arbre, je lève la tête et aperçois, camouflée par les branches et les feuilles, la cabane de bois.
Encore une fois, j'ai l'impression de rentrer dans un autre monde, un monde bien plus merveilleux que le nôtre, rempli de couleurs et de souvenirs en tous genre. Et bien que ces souvenirs ne soient pas les miens, cela fait du bien de se blottir dans cette bulle de confort.
Je m'assieds sur un fauteuil rouge éventré sur le côté et entreprends de feuilleter un petit livret rempli de vieilles photos.
- Bon, s'exclame Dali qui est assise en tailleur au milieu de la pièce, Kian m'a dit que tu viens au festival ce week-end!?
Je hoche la tête.
-Cool, ça va être super!
Je me retourne vers Logan qui farfouille par ci par là. Il met, dans sa veste en jean, quelques cigarettes qui ne me paraissent pas être du tabac. Je me demande à qui il peut bien les vendre. Je ne comprends vraiment pas pourquoi des gens lui achètent ce genre de choses... Et lui, il prend énormément de risques en faisant ça... Après tout, je me dis que je ne connais pas sa vie.
Je remarque que Kian me fixe, il a du voir que j'observais Logan. Je vois dans son regard une once de jalousie. Il fronce les sourcils avec un air un peu triste.
- Kian, on peut descendre? Je dois te parler d'un truc important...
Il paraît surpris par mes paroles mais hoche la tête en se levant.
Une fois arrivés vers le tronc d'arbre, je m'approche de lui et, avec tout mon amour, je l'embrasse. Il écarquille les yeux puis se prête au jeu.
Nos deux bouches sont unies.
J'espère qu'il a comprit le message de cet acte et son symbolisme. C'est le fait que je sois venu le voir de moi-même qui fait de ce baiser un baiser si spécial. Car je lui ai offert mon premier baiser. Je me suis offert à lui. Je lui ai donné mon cœur et tout ce que j'espère c'est qu'il en prendra soin.
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