DIX-HUIT

Encore cette voiture rouge qui avance.
D'abord lentement.
Puis elle accélère et mon souffle se fait plus difficile. Les parois se rapprochent et le mur aussi.
La voiture fonce dedans!
Je crie, je hurle.

NON!

J'ouvre les yeux. Je me réveille en sursaut, essoufflé.

Je regarde autour de moi et j'entends quelque chose qui bouge dans la chambre: la couverture de Kian vient de se lever et j'aperçois dans le noir sa silhouete qui s'approche.

- Char... Charlie? Tu va bien?

Il continue à marcher jusqu'à moi à tâtons.
Il arrive vers mon lit et je le vois pencher sa tête.

- Oui.... ça va. Juste un cauchemard, je murmure.

Il s'assied sur mon lit.

- Tu as rêvé de quoi cette fois?

- Toujours de la même chose...

Je sens que cette réponse ne le satisfait pas.

- De.... tu sait... l'accident.

Il hoche la tête doucement et vient se blottir dans mes bras.

- Et il se passe quoi dans ton cauchemard? me demande-t-il calmement.

J'hésite à lui répondre. Je n'aime pas me confier...

- Je suis dans la voiture et je fonce dans un mur. Et la voiture accélère de plus en plus et elle rétrécit aussi...

- Hum... je vois. Tu es peut-être claustrohobe... murmure-t-il près de moi.

- C'est surtout que maintenant j'ai peur des voitures... Ça m'angoisse rien qu'à l'idée de rentrer dedans.

Kian passe ses doigts sur mon bras, il y laisse des petites lignes invisibles qui me calment.

- Ne t'inquiète pas Charlie... je suis là, tu peux te rendormir.

Et ses mots me font l'effet d'un vrai somnifère. Quelques minutes plus tard, je suis déjà retourné dans l'étreinte de Morphée. Je sens Kian tout près de moi, je sens son torse qui se soulève au rythme de sa respiration. Et ça me rassure de savoir qu'il sera là pour me protéger de mes démons du rêve, tout comme je serais son gardien face aux démons réels.

Le lendemain, je me réveille en douceur. Kian n'est plus là. Il ne reste plus qu'Émile dans la chambre. Il tourne la tête.

- Ah bah t'es enfin réveillé! Tu as loupé le p'tit dèj, Kian nous a dit de te laisser dormir...

Je ronchonne un coup et me lève.
Je déteste me réveiller tard, j'ai l'impression de gâcher mon temps. Heureusement, je ne me suis levé que trente minutes plus tard...

Pendant que j'enfile mon T-shirt je réfléchis, un peu à tout et à rien. À mes parents, à ma nouvelle vie qui n'était pas censée être comme ça.
Oui, au départ je suis allé dans ce pensionnat pour recommencer une vie, ou plutôt pour tenter d'effacer les erreurs de l'ancienne. Je pensais arriver ici et être tranquille. Je ne voulais pas d'amis, et encore moins de petit-ami et surtout pas d'ennemi. Je voulais juste vivre dans ma bulle mais c'est bien loin de s'être passé comme ça...

Bien sûr je ne retournerais pour rien au monde à mon ancienne vie triste, sombre et lugubre! Mais il est vrai que toutes ces histoires m'ont apporté un lot de problèmes que j'aurais bien évité...
Et pourtant, quand j'y repense, je me dis que j'ai de la chance d'avoir ces amis.

Ça fait seulement deux mois que je suis ici et les choses ont bien changé!

***
Kevin a encore frappé. Et cette fois-ci il s'est encore une fois attaqué à Dali.

Durant une soirée organisée dans une des chambres, il s'était approché d'elle avec trois de ses sbires et ils l'avaient traquée jusqu'à un mur. Kevin avait voulu la coincer dans un coin mais elle ne s'était pas laissée faire comme ça. Elle avait usé du coup imparable dans les couilles et s'était enfuie en jettant son verre à la tête de ce connard.

Je hurle presque lorsque j'entends ça! 

- Non mais pour qui il se prend ce con!? Putain je vais lui casser la gueule si ça continue!!

Même Dali me regarde bizarrement. Je n'ai pas l'habitude de parler grossièrement mais tout le monde sait que je hais les injustices et que je peux être pris de fluctuations subites d'humeur. Là tout de suite? J'ai envie de le rouer de coups... Et peu importe si je suis moins fort que lui et que je finis avec des blessures!

Mais Kian se rapproche et passe son bras sur mon épaule.

- Ok... calmons-nous! Ça ne sert à rien de s'énerver et de se mettre en danger pour des gens aussi stupides...  Pourquoi tu n'es pas allé te plaindre chez le proviseur?

Il parle doucement, pour calmer tout le monde, comme il le fait tout le temps. C'est un peu le médiateur qui parvient toujours à garder du recul et qui réfléchit avant de faire quoi que ce soit. Tout le contraire de moi. C'est cette complémentarité dans nos caractère qui fait notre force.

Dali fait la moue. On peut voir qu'elle s'est elle aussi calmée. Elle a maintenant cet air zen qui lui colle à la peau.

- J'peux pas... murmure-t-elle dans un souffle.

- Mais pourquoi? s'exclame Emile en s'avançant un peu vers elle.

Elle se recule d'un coup en baissant la tête.

- J'peux pas je vous dis.... Cherchez pas à comprendre... Je vais juste m'éloigner de Kévin et si il continue bah... cette fois-ci j'hésiterais pas à me battre.

Quand elle parle comme ça, on dirait une amazone, une guerrière redoutable. C'est le genre de fille qui en jette, que l'on remarque pour son caractère fort et imposant. Emile s'approche encore et met une main sur son épaule.

- Dis-nous s'il-te plaît...

Mais elle recule encore une fois et s'en va plus loin.

J'observe Emile. Il la regarde partir et baisse la tête. Je sais ce qu'il ressent, il se sent inutile... 

- Vous avez pas une idée de la raison pour laquelle elle ne veut rien nous dire? nous demande Emile avec un air dépité.

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