On a vu, la dernière fois, l'attaque du premier chapitre et le fait d'être percutant. C'est un des points essentiels lorsqu'on veut retenir un lecteur sur le premier chapitre. Une mission tout aussi difficile est ensuite de le retenir jusqu'à l'épisode suivant. C'est le principe du cliffhanger, ou climax de fin de chapitre. Le principe est assez simple : il faut terminer le chapitre par un moment de grande tension de façon à donner envie au lecteur de poursuivre à tout prix sa lecture.

Si le principe est effectivement très simple, la pratique ne l'est pas tant que ça. D'abord, ce n'est pas simple à appliquer à tous les chapitres. Difficile effectivement d'imaginer, surtout dans certains types d'histoires, un suspens de fin de chapitre pour chacun d'entre eux. Ensuite, il est là encore, très facile de tomber dans les clichés et les techniques horribles.

« C'est alors qu'il entra dans la pièce et découvrit avec stupeur... » Fin de chapitre !

Quelle horreur ! Non seulement c'est moche de faire ça, mais en plus, à moins d'avoir le chapitre disponible immédiatement, vous perdez tout votre effet. C'est une technique de fumiste ça ! ^^

Oui, le lecteur se demande ce que le personnage découvre. Mais cette phrase laissée en suspens ne tiendra pas le lecteur en haleine plus de quelques minutes une fois le livre refermé.

Le principe du suspens n'est pas de laisser une phrase à mi-parcours, mais bel et bien d'instiller une curiosité. Sans être particulièrement subtile, une formule qui marche bien tout en étant beaucoup plus élégante serait celle-ci :

« Lorsqu'il pénétra dans la pièce, il tomba nez à nez avec Mike. Mike... Dix ans qu'il ne l'avait pas vu. Ils s'étaient séparés après cette mission en Australie et s'étaient jurés de ne plus entrer en contact. Quelle que soit la raison. Et pourtant, il était là, face à lui. »

Avec ce petit passage, assez peu recherché, je l'avoue, vous nous faites grâce de la phrase découpée à la tronçonneuse et mettez quand même un peu de suspens. D'abord, qui est Mike ? Que s'est-il passé en Australie ? Et pourquoi Mike revient alors qu'ils n'auraient jamais dû se revoir ?

On a donc trois interrogations au lieu d'une. C'est carrément les soldes !

Vous voyez le principe ? Je n'ai moi-même, posé aucune question. Je laisse ce boulot au lecteur. Je l'emmène sur le chemin et c'est lui qui l'arpente ;)

Mais comme je disais, ce n'est pas forcément très subtil non plus. Pourtant ça marche bien.

Ce qui fait que ce n'est pas subtil, cette fois-ci, ce n'est pas la forme, mais plutôt la scène. En effet, le coup de faire apparaître un nouveau personnage en fin de chapitre est un peu facile. Mais, encore une fois, il vaut mieux ça que couper une phrase en plein milieu !

Le suspens peut être emmené par de nombreuses choses, mais globalement le but est toujours, ou presque, d'amener le lecteur à se poser une question. Pour autant, la question n'a pas forcément à être posée à la fin du chapitre. Ce fameux Mike pourrait très bien débarquer au tout début de mon chapitre. Dans ces cas-là, je pourrais par exemple m'abstenir de le nommer. Dire simplement qu'il n'avait pas changé depuis la dernière fois. Que leur dernière rencontre avait laissé un goût amer au héros et qu'il ne pensait jamais le revoir. Puis lancer un début de conversation plutôt amère, histoire de bien montrer qu'il y a un passif entre eux. De cette manière, le chapitre se déroule, le personnage est à la fois bien intégré et complètement mystérieux. Quelle que soit la façon dont se terminera le chapitre, tant que les détails n'ont pas été apportés, le mystère reste et le lecteur va vouloir trouver l'information dans le chapitre suivant.

Et là, il ne faut surtout pas commettre l'erreur de croire que si on ne répond pas aux questions qu'on a distillées, le lecteur va continuer de lire. Il faut donner une piste, même une fausse, mais quelque chose. Le lecteur doit toujours garder quelque chose sous la dent. Sinon il va penser que vous vous moquez de lui...

Et évidemment, ce qui marche avec un personnage marche avec tout et n'importe quoi. Pour l'exemple, c'était plus simple avec Mike. Mais le même principe s'adapte à un sceptre magique, une météo capricieuse, une ombre dans la rue ou n'importe quoi !

À vous de jouer maintenant et de mettre des fins de chapitre qui donnent envie de lire le suivant.

Si jamais vous avez envie qu'on aborde un sujet particulier n'hésitez pas, ça pourra être sympa ;)

À bientôt...