Résultat - Concours n°2

Salut à vous tous !

Bon. Je ne vais pas tourner autour du pot... Vous vous demandez peut-être pourquoi j'ai mis "Résultat" au singulier dans le titre et c'est tout simple :

Il n'y a eu qu'une seule nouvelle de rendu.

Par conséquent, je ne peux pas vraiment donner de gagnant. Mais j'aimerais remercier la participante, kinapadidee, pour avoir écrit la charmante nouvelle qui suit (et qui m'a émue... mais chut, c'est un secret). Je trouve que tu as vraiment fait un beau travail, et je n'hésiterai pas à jeter un coup d'œil à ton/tes histoire(s). Ce que je conseille à ceux qui liront cette partie du livre.

Bonne lecture.

Une mitaine noire et blanche


    Loan marchait tranquillement dans la rue, la tête à sa musique, ses pensées divaguant au gré de ses pas.

    Loan avait 24 ans. Il rentrait chez lui après une journée de travail beaucoup trop longue à son goût. Il voulait se concentrer sur sa musique, mais au lieu de ça il perdait son temps dans la boîte d'ingénieurs où ses parents voulaient qu'il travaille.

    Il marchait, ses cheveux châtains coincés sous son casque audio et ses yeux verts perdus sur le macadam.

    Ses yeux accrochaient les chewing-gums écrasés sur le trottoir, petites taches blanches et grises sur le goudron sombre.

    Il croisait les gens sans les voir, ombres invisibles de son tableau musical.

    Il sentit une course à côté de lui, un courant d'air plein de sanglots. Loan n'y aurait pas fait attention si quelque chose n'avait pas accroché son regard.

    Une mitaine noire à rayures blanches, effilochée à chaque doigt.

    Comme si il y avait été aimanté, le regard de Loan ne la quitta pas, elle et la main qui la portait.

    Loan s'était arrêté, en plein milieu de la rue, les bras ballants et la bouche bée.

    Au coin de la rue, la jeune fille qui pleurait, sa mitaine entourant son poing serré, disparut du champ de vision du garçon, le laissant seul, béat, sur le trottoir.

    «Tu me promet que tu deviendra un grand musicien ? Que tu fera tout pour y arriver ?»

    Diane était devant lui, la neige craquant sous ses pas. Des flocons s'étaient accrochés dans ses cheveux bruns bouclés.

    Diane se retourna. Son nez et ses joues s'étaient teintés de rouge à cause du froid. 

    Elle l'interrogea de ses yeux bleus, attendant sa réponse.

    Loan s'approcha d'elle, un petit sourire attendri devant cette vision ravissante. 

Il l'embrassa tendrement, la serrant contre lui.

    Leurs regards se croisèrent, et Loan y lut la question silencieuse que lui adressaient ces beaux yeux bleus.

    «Tu promet ?»

    - Je promet.

    Un petit sourire étira les jolies lèvres roses de Diane tandis qu'elle tendait son petit doigt.

    Loan répondit de bon cœur à cette promesse enfantine, mais il aurait de toute façon fait n'importe quoi pour Diane.

    Les deux reprirent leur marche, main dans la main. Diane portait ses mitaines, noires à rayures blanches, qu'elle ne se résignait pas à jeter malgré que chaque doigt fut effiloché.

    Loan se rendit compte que cela faisait maintenant deux bonnes minutes qu'il regardait fixement l'angle de la rue, et qu'une petite grand mère le fixait elle aussi en se demandant ce qu'il faisait là.

    Pendant deux micro-secondes, Loan hésita. Soit il continuait son chemin comme si il ne s'était rien passé, soit il essayait de la retrouver pour vérifier que c'était bien Diane.

    Il n'hésita pas longtemps et courut rejoindre le coin de rue qui lui avait volé sa vision.

    Loan avait rencontré Diane quand il avait 16 ans. Ça avait été un de ses premiers amours. Et puis la vie avait fait qu'ils s'étaient perdus de vue.

    Jusqu'à maintenant.

    Loan courait sur les trottoirs. Il cherchait la jeune fille, qui disparaissait toujours deux secondes après qu'il l'ai retrouvée au bout d'une rue. 

    Cette course dura longtemps, suffisamment au jeune homme pour retrouver tout ces souvenirs qu'il pensait avoir oublié.

    Loan, après une énième dispute avec ses parents, s'était enfuit chez son meilleur ami, Paul. Le garçon, en voyant l'état de l'adolescent, avait décidé de lui changer les idées en l'emmenant dans un café où se déroulaient des concerts d'amateurs. Paul ne venait pas ici spécialement pour la musique mais plutôt car le patron ne lui faisait pas de problèmes parce qu'il demandait une bière en étant mineur.

    Paul était en train de jouer le psychologue attitré de son meilleur ami tandis qu'un petit groupe de rock s'égosillait sur scène. Loan était prostré sur la petite table ronde, le visage caché dans ses bras.

    Des applaudissements polis retentirent dans la salle tandis que Paul adoptait son visage du vieux sage qui connaissait tout du monde.

    Et puis SA voix retentit. Une voix douce et envoûtante, qui ne donnait envie que d'une chose : de l'écouter jusqu'à ce que mort s'ensuive.

    Loan ne se rendit compte qu'il avait relevé la tête qu'au bout de plusieurs minutes, tellement il était hypnotisé par la scène.

    La jeune fille a qui appartenait la voix était une petite adolescente aux longs cheveux bruns et bouclés qui coulaient dans son dos, habillée d'une petite robe bleue par au dessus d'un legging noir. Elle chantait les yeux fermés en jouant du piano.

    Sa mélodie était magnifique. Elle chantait une chanson sans paroles, à par un enchaînement de charabia harmonieux. La musique marqua tellement tout ce petit monde du café que le serveur reversa tout son plateau sans que personne ne s'en rende compte. Pas même lui.

    Quand la chanson s'était terminée, tout le monde avait applaudi, et Loan plus fort que les autres.

    Paul, qui dés que la musique s'était arrêtée avait recommencé sa plaidoirie sur le bien fondé des infrastructures familiales, ne remarqua pas un instant que Loan ne l'écoutait plus du tout.

    Il ne remarqua pas non plus quand le garçon quitta sa chaise pour se lancer à la poursuite de la petite chanteuse, qui sortait du bar.

    - Attend !!

    La jeune fille se retourna, intriguée.

    - Je... fis Loan, c'était super beau ce que tu as chanté. Tu t'appelles comment ?

    - Diane.

    Loan passa un nouveau coin de rue, mais ce coup ci, il ne vit plus la jeune fille. Impossible de savoir où elle était allée.

    Le garçon ralentit, perdu au milieu de la foule de la soirée, au milieu de ce carrefour du centre ville.

    Un peu sonné par les souvenirs qui revenaient en masse, et par la course qu'il venait de s'imposer, le jeune homme marcha à l'aveuglette au milieu du quartier commercial où il était arrivé.

    Un marché de Noël avait poussé dans les rues. Comme pour agrémenter cette vision, il se mit à neiger.

    - Excusez moi, vous n'auriez pas vu passer une petite brunette en pleurs avec des mitaines noires et blanches ? demandait-il autour de lui, mais personne ne l'avait vue.

    Désemparé, perdu, Loan laissa ses jambes le porter sans but.

    Dans sa tête tournaient les souvenirs.

    - Loan ?

    - Mmh ?

    Diane était allongée sur le lit de sa chambre, regardant le jeune homme assis au piano à côté d'elle.

    - Pourquoi tu joues pas tes musiques en publique ?

    Loan leva le nez de sa feuille et du clavier, en levant un sourcil.

    Loan s'était découvert un don pour la musique en jouant sur le piano de Diane. Il n'y connaissait rien en solfège, alors il retranscrivait ses mélodies et ses chansons sur des feuilles sur lesquelles il notait les secondes et les numéros des touches, sur lesquelles il avait dessiné de petits chiffres au feutre noir.

    Diane remettait au propre ces partitions improvisées en partitions réelles, puis les jouait et les chantait pour lui au café.

    Diane s'était faite une petite réputation, et le café faisait plein dès qu'elle était nommée à l'affiche.

    La jeune fille commençait à avoir un sacré répertoire, mais Loan trouvait toujours de nouvelles mélodies, encore plus belles que les autres.

    Diane pensait qu'il avait un don, ou alors l'oreille ultime, car il arrivait à faire des choses magnifiques sans n'avoir jamais appris à jouer du piano.

    Loan regarda la jeune fille quelques instants, puis soupira :

    - Parce que j'arriverai pas à chanter aussi bien que toi. Et puis je sais trouver des mélodies, mais je sais pas très bien jouer du piano.

    - Mais si tu apprenais ? C'est pas difficile d'apprendre à chanter, et puis le piano tu es déjà doué.

    - J'aurai une moins belle voix que la tienne... Tu n'aimes pas mes chansons ?

    Diane se redressa d'un coup, les sourcils froncés.

    - Mais bien sûr que si, idiot ! T'as un talent qui dépasse l'entendement !! C'est juste que je trouve pas normal que ce soit moi qu'on applaudisse alors que c'est ton travail !!

    Loan sourit et se leva du siège du tabouret sur lequel il était assis. Il s'agenouilla sur le lit et embrassa la jeune fille d'un baiser passionné. Quand leur lèvres se séparèrent, légèrement essoufflées, les deux jeunes gens étaient allongés l'un sur l'autre, leurs bras entremêlés.

    Loan posa son front sur celui de la jeune fille et murmura, entre deux soupirs :

    - Moi j'adore t'écouter jouer, je veux pas qu'on arrête de faire comme ça. Je veux bien apprendre à chanter, mais uniquement si c'est toi qui m'apprend.

    Diane embrassa tendrement le nez du jeune homme et murmura :

    - Ok, on commence ton apprentissage la prochaine fois.

    Et sur ce elle l'embrassa.

    Loan déambulait comme un automate, perdu dans cette ville qu'il connaissait comme sa poche.

    Cette rencontre l'avait tellement chamboulée qu'il n'arrivait plus à se rebrancher à la réalité.

    Jusqu'à arriver sur ce pont. Un très joli pont de l'ancien temps, bordé de vieux lampadaires et sur lequel il n'aurait pas été désuet de trouver une vieille automobile des années 1930.

    Et juste au bord de ce pont, Diane se tenait, immobile.

    Elle devait être là depuis longtemps, à contempler le canal qui coulait bruyamment en dessous. Des flocons de neige s'étaient accrochés à ses cheveux bruns et bouclés, les teintant de gris.

    Loan s'arrêta. Il l'avait retrouvée. Mais maintenant, que devait-il faire ?

    Hésitant, il fit un pas, dans un bruit mouillé dû à la neige qui fondait en frôlant le sol.

    Diane était assise en tailleur sur son lit, en face du jeune homme.

    - Non, là tu chantes un tout petit peu trop bas, refait après moi ?

    Loan fit un deuxième pas.

    Les applaudissements ne décroissaient pas, même après que Loan soit descendu de scène.

    - T'as été magnifique ! s'écria sa petite amie en lui sautant dans les bras. Je te jure que tu m'a fait pleurer tellement c'était beau !!

    Loan fit un troisième pas, encore plus hésitant que le précédant.

    - Diane...

    - Oui ?

    - Je... Je vais déménager. Dans deux mois.

    Diane posa sa main sur la rambarde, sa main habillée de sa mitaine noire et blanche.

    - Je t'aime, murmura Diane entre deux baisers.

    La jeune fille posa le pied sur le rebord métallique de la barrière.

    - Je t'oublierai jamais, souffla Loan dans leur dernière étreinte, tandis que ses parents patientaient dans la voiture.

    - On se reverra peut être un jour ? sourit Diane avec son regard mouillé.

    - Je t'aime.

    - Je t'aime.

    La jeune femme passa sa jambe de l'autre côté de la balustrade. Elle était en équilibre au dessus de l'eau bouillonnante du canal.

    - Diane !! s'écria Loan en courant vers elle.

    Elle sursauta et sa main lâcha, la laissant tomber dans le vide.

    - Diane !!

    Loan ne sut jamais ce qui lui donna cette vitesse à ce moment précis, mais il réussit à rattraper la main de son ancienne amoureuse avant qu'il ne soit trop tard.

    Diane pendait au bout du bras du garçon, une expression étonnée sur le visage.

    Malgré l'obscurité de la nuit d'hiver, Loan vit avec effroi les bleus sur son visage, les marques de coups qui recouvraient sa belle frimousse.

    - Loan ? murmura-t-elle.

    - Oui, Diane, c'est moi, fit le garçon en sentant des larmes couler sur ses joues.

    Des larmes de peine, de voir la femme dans cet état, des pleurs glacés sur les joues. Et des larmes de douleur pour son bras qui lui semblait horriblement faible.

    - Je vais te remonter, grogna Loan, ployant sous l'effort.

    Mais ses bras n'étaient pas assez puissants.

    Diane pendait tristement sous ce pont désespérément désert.

    - Qu'est ce qui t'as mis dans cet état Diane ? sanglota Loan.

    Un flocon de neige vint se poser sur la joue de la jeune femme et fondit en une nouvelle larme sur ses joues glacées.

    - Ils ne sont pas tous aussi doux que toi... murmura-t-elle.

    Loan compris qu'elle parlait de son amoureux, si on pouvait le qualifier ainsi.

    - Loan... Tu n'arrivera pas à me remonter tout seul...

    - Mais si, je vais réussir ! Tiens bon Diane ! 

    Mais le jeune homme sentait les doigts de la femme glisser entre les siens. Tout doucement.

    - C'est con quand même, souffla Diane. Maintenant j'ai plus envie de mourir.

    Loan ne sut quoi répondre à ce ton détaché.

    - Loan... Tu veux bien chanter pour moi ?

    Des sanglots plein la gorge en sentant encore les doigts de Diane glisser dans la mitaine, le jeune homme obéit. Doucement, il chanta.

    Il chanta n'importe quoi, juste pour que la jeune fille ne lâche pas la main qu'il la sentait prête à desserrer.

    Diane ferma les yeux.

    Dans la gorge nouée de Loan, les notes moururent. Il n'avait plus la force de continuer, ni à tenir, ni à chanter.

    Les deux jeunes gens échangèrent un regard qui voulait tout dire.

    Et elle lâcha.

    Loan s'entendit pousser un cri silencieux pendant une éternité. Le temps que dura la chute de Diane. 

    - Je t'aime.

    - Je t'aime.

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