Une histoire de fesses (partie 2)

Plus tard, le soleil qui traverse les rayons d'une fenêtre pour effleurer de sa chaleur ma joue dénudée me tire d'un sommeil peuplé de rêves tous plus agréables les uns que les autres. Je souris et étire doucement mes muscles, encore tout engourdi et ravi de ma soirée d'hier. Repenser aux sensations qui parcouraient mon corps lorsque ses lèvres se sont posées sur moi me fait soupirer d'aise et le souvenir me pousse à me lever.

Mon regard parcourt le décor qui m'entoure alors que mes yeux s'habituent doucement à la lumière. Ce n'est pas ma chambre. Ma chambre n'est pas recouverte de posters de vieux films. Ma chambre n'a pas un trophée représentant un nageur qui plonge posé au sommet d'une armoire immaculée. Ma chambre n'est pas dans un désordre indescriptible, remplie de livres ouverts et de vêtements qui traînent.

Et surtout mon lit n'est pas censé contenir la silhouette vêtue d'un simple T-shirt du blond qui m'a tant fait rêver, tourné vers moi avec un tel air innocent sur son visage endormi que je meurs d'envie de l'embrasser.

Ce que je fais. Et après quelques secondes de pression, je le sens doucement émerger et me caresser les cheveux avant de se décaler presque à regret.

Je souris. Il me rend mon sourire avec cette lueur dans son regard que je peine à définir.

"Salut."

Il ne me répond pas, se contente de se redresser sur ses coudes et de planter son regard dans le mien. Toujours souriant. Tandis que je me remémore ce qui m'a conduit à partager sa chambre. L'extase qui n'avait pas voulu partir. La douceur de sa paume sur mon dos alors qu'il me poussait doucement vers un terrain vague où était cachée sa voiture. Son absence brève puis la petite demi-heure de route sous l'ambiance monotone de la radio. Son immense maison où il vivait seul. Un brutal accès de fatigue après la retombée des hormones.

Il se penche vers moi.

"Tu as vraiment tué tes parents?"

De nouveau, mon sourire s'élargit. Alors il s'en souvient. Tant mieux dans un sens. En parler me procure une certaine fierté qu'il m'est impossible de partager avec les autres. Puisque le meurtre, c'est mal, dans notre société.

"-Ils m'imposaient des limites."

Sa main repasse de nouveau dans mes cheveux et il me fixe avec cet air avide qui a ce je-ne-sais-quoi d'excitant.

"-Heureusement que je ne compte pas t'en imposer alors."

Et malgré nos haleines du matin respectives, l'embrassade me fait presque grimper au plafond. Est-ce la marque du début de notre relation? Je ne sais pas. Mais mon célibat forcé s'arrête à cet instant précis pour moi.

Les jours passent, et se déroulent avec un bonheur qui ferait pâlir de rage la routine. Aucun jour n'est pareil. Je sens mon métier qui me passionne de nouveau. Le soir, mon interne m'attend et nous passons la soirée à parler ou à nous coller l'un à l'autre de plus en plus près, de plus en plus accros l'un à l'autre.

Je ne tarde pas à découvrir que mon ex n'était pas sa première victime. Jules a d'étranges appétits qu'il lui faut satisfaire et des pulsions sadiques particulièrement violentes. Alors certaines nuits, plutôt que de dormir, nous nous rendons au hasard dans certaines villes. J'apprends à commettre le crime parfait. Et le lendemain ne reste d'une personne choisie au hasard qu'une trace de sang sur le sol, un air satisfait sur le visage du blond et un reste d'extase dans mes veines. Il torture, je tue, il mange. Une parfaite combinaison entre nous qui me tire encore plus de ma routine fangieuse.

Le temps passe, et je m'attends à me lasser. Mais non. L'addiction augmente. Et atteint son point de paroxysme lorsqu'il finit par me poser une question à laquelle je ne m'attendais pas, une boîte de préservatifs entre les mains.

"Matis, as-tu déjà couché avec un homme?"

Je hausse un sourcil. Non, je n'ai jamais expérimenté avec un représentant de mon sexe. Je me considère bisexuel mais mes partenaires jusqu'à mon interne ont toutes été des femmes. Sans doute encore quelque chose dont la société doit me blâmer. Même si je ne comprends pas pourquoi.

Je secoue la tête, et il sourit.

"Tu aimerais?"

La proposition cachée me ferait presque rire. Bien sûr que j'aimerais. Il est tout à moi. J'ai envie de le lui prouver.

Je me penche pour l'embrasser et glisse doucement mes doigts sous sa chemise, savourant le contact avec sa peau et le battement de son cœur. Ses mains se chargent de faire glisser la fermeture éclair de mon sweat avant d'écarter de son chemin mon T-shirt. Je me décale juste le temps qu'il ne me l'enlève, lui dévoilant pour la première fois mon torse maigre, avec cette cicatrice qui marque mon flanc, petit souvenir de mon adolescence. Son air étonné en voyant la marque me distrait.

Son doigt l'effleure avec délicatesse, tandis qu'il me demande avec curiosité d'où vient cette blessure. Je soupire et hausse les épaules.

"Il a bien fallu me trouver un alibi."

Ça le fait rire.

"Tu es vraiment quelqu'un d'extraordinaire."

Son ton me fait sentir qu'il a envie de m'embrasser. Alors je souris et tends le cou en fermant les yeux. Pour les écarquiller de surprise lorsque je sens une tension dans mon cou.

Ça ce n'était pas prévu. Ses dents se sont enfoncées dans la peau fragile de la jonction entre mon cou et mon épaule, et je peux presque sentir un vaisseau sanguin palpiter dans sa bouche. Au début, ça me fait bizarre. Une morsure n'est pas censée faire du bien si? Et puis, au fur et à mesure du temps, je sens la pression de sa mâchoire s'accentuer, et un liquide chaud finit par me couler sur le torse. Je le récupère du bout des doigts. C'est du sang.

Soupirant, je tapote doucement sur l'épaule de mon interne qui sursaute et desserre les dents, mais ne décroche pas le visage de mon cou.

"Jules? C'est mon épaule, pas celle de tes victimes.
-Désolé, je l'entends soupirer dans le creux de mon cou. Je me suis trop pris au jeu."

Ça ne l'empêche pas de laper le sang qui s'écoule de la plaie, me faisant frissonner. Avant de lever le visage vers moi. Il a les lèvres rouges de mon propre sang. Et il me fixe.

"On continue?
-On continue."

Sur mon assentiment ses doigts se séparent de ma peau pour venir déboucler le bouton de mon pantalon.

Une heure plus tard je suis dans son lit, l'air incapable de réaliser ce qu'il vient de se passer.

C'était ma première fois homosexuelle et je dois dire que le changement de rôles ne m'a absolument pas déplu. Ni la parfaite connaissance du corps masculin que semble avoir mon interne.

Ma plaie saigne toujours. Il est beaucoup retourné dans mon cou. Ce qui fait que j'ai beaucoup eu le goût de mon propre sang dans la bouche.

Le souvenir de ce qu'il vient de se passer me fait rire. Un rire satisfait, comblé même. Est-ce qu'il est possible de se sentir aussi bien? Le temps ou ma routine était empreinte d'ennui est tellement loin désormais.

De son côté, Jules s'est déjà levé. De légers rayons de soleil crépusculaires passent à travers la chambre, faisant reluire son torse recouvert de sueur. Il est en train de boucler son pantalon. Une fois que c'est fait, il attrape son T-shirt et se tourne vers moi.

"J'ai faim. Tu viens?"

Quitter le lit empreint de toute notre chaleur et notre plaisir ne me plaît pas plus que ça, mais j'obtempère. J'ai besoin de quelque chose pour me calmer. Alors j'enfile rapidement un pantalon et une chemise, lace mes chaussures et me redresse. En passant pour sortir, je lui claque un baiser sur la joue. Il me répond en caressant mes cheveux.

Décidément je ne peux plus me passer de lui.

Dans sa voiture, la tentation est grande de reprendre nos jeux, mais je me retiens. Il ne faudrait pas qu'on se fasse repérer par la police pour une raison aussi stupide. Nous atteignons donc sans encombre et avec une profonde frustration pour moi un bar d'une ville assez éloignée ou nous venons, parfois.

À l'intérieur de la boîte, la fête fait rage. Des adolescents et étudiants de toute sorte dansent de manière plus ou moins lascive sur des musiques à la mode qui me font froncer le nez. Mais on doit repérer une cible, pas s'amuser. Du coup après un regard échangé entre nous, nous nous séparons sur la piste et je commence à danser, plus ou moins bien.

Il n'aura pas fallu longtemps pour que je me fasse aborder. Une fille me tape sur l'épaule, un sourire ironique aux lèvres. Une brune caucasienne de base, avec une tenue affriolante et une forte odeur de parfum. Pile ce qu'il me fallait.

Je discute de façon casanière avec elle sous l'œil pesant de mon compagnon qui s'est attablé au bar avant de me diriger avec elle vers le comptoir béni, lassé de danser, de la sentir m'attraper aux hanches en commentant ma manière peu sensuelle de bouger mon bassin. Comme si ça m'intéressait. Il y a seulement deux heures, la seule personne qui me fait me soucier de mon mouvement de hanches a émis les meilleurs compliments qui soient. Des gémissements de plaisir.

Je la fais boire, boire et encore boire sous l'œil furieux et avide de mon interne adoré, jusqu'à ce qu'elle commence à hoqueter et rire bizarrement, et que dans un mouvement de sollicitude digne de la comédie française je me propose de l'accompagner dehors. Ce qu'elle accepte volontiers. J'espère quand même qu'elle a pas trop d'alcool dans le sang, c'est moins drôle.

Dehors, je me poste sur le mur, me mouvant avec une extrême lenteur vers un endroit sombre, alors qu'elle me suit en riant et que ses commentaires tournent de l'ironique à l'aguicheur. J'attends Jules, qui devrait me rejoindre d'une minute à l'autre. Mais il n'arrive pas, et la fille finit par essayer de me grimper dessus.

"-T'es quand même vachement mignon pour un gars qui sais pas danser!"

Je m'en fiche. Je ne veux pas d'elle. Elle pue l'alcool, est trop basique, est l'incarnation d'une routine. Si bien que je n'ai jamais autant béni la seringue qui se plante dans son petit cou et la fait s'effondrer au sol sous le regard terrifiant de Jules alors qu'elle tente de m'embrasser.

Je soupire de soulagement.

"-Merci."

Mon interlocuteur la prend sur son épaule, une colère rentrée toujours dans le regard, et se tourne vers moi.

"-Même si c'est pour jouer la comédie je déteste te voir faire ça. Tu es à moi."

Je lui souris.

"-Évidemment. Allez, emmenons ça dans un endroit sûr."

Il acquiesce, et une heure plus tard nous voici dans un bunker abandonné quelque part en campagne. On change de planque régulièrement, c'est plus sûr.

Il attache rapidement la fille et attend tranquillement que le produit disparaisse de ses veines. De mon côté, je dispose les outils dont il se sert habituellement. Outre des haricots entiers piqués au bloc, il y a aussi des couverts, des outils de jardinage, et également de quoi se préparer à manger. Je pouffe. Bon appétit, blondinet.

Un petit bruit de chaîne qui cliquette et un grognement me signalent que le futur repas de mon interne est réveillé. Ce dernier se tourne vers elle en souriant, jouant avec un scalpel, attendant qu'elle émerge complètement. Et puis ses yeux se posent sur moi, elle écarquille les paupières, voit Jules, hurle. Ce dernier ne s'en préoccupe même pas. La pièce est recouverte de béton armé.

Une fois qu'elle a repris ses esprits, elle se met à protester de toute la force de sa voix. Des idioties de victime. Du genre allusions à notre folie, insultes, menaces. Rien ne nous fait flancher. Jules se met même à pouffer. Ce qui la fait encore plus crier.

"Attends, c'est toi l'interne que j'ai vu lorsque je me suis cassée le bras! Le joli gars pas très aimable qui m'avait dit être homo?"

Alors comme ça il la connaissait? Probablement une dragueuse de plus. Mais ce constat m'énerve. Elle a tenté de le séduire, de me le prendre? Cette fille m'horripile de plus en plus.

Plus encore lorsque Jules confirme en fronçant le nez.

"-Et toi tu étais la petite pute homophobe qui m'avait sorti un bon gros "je peux te rendre hétéro" dans la face. Au risque de te décevoir, j'ai un copain. Et il ne m'a jamais autant comblé."

Je souris en agitant la main. Les compliments sont mérités. Et j'adore ça. J'en veux d'autres. Et elle elle crie.

"-Nan mais attends c'est pas juste! T'as vu le gâchis pour nous les meufs? Fallait bien essayer?
-Le saviez-vous? Je grommèle. Les mecs hétéros bien foutus attirent aussi les gays. Est-ce que c'est un gâchis aussi pour eux?
-Oui mais là c'est pas pareil, c'est la nat...."

Une baffe monumentale de mon blondinet lui fait valser la tête sur le côté. Son visage est tordu par la haine. Et franchement je le comprends. Je lui tends mes ciseaux chirurgicaux.

"À toi l'honneur."

Il fait un sourire. Un sourire qui dévoile toutes ses dents parfaitement alignées et fait trembler sa pas si malheureuse victime. Elle se met à supplier de toutes ses forces, hurlant de terreur à la vue du scalpel qui se lève, mais ni l'un ni l'autre n'avons envie de faire preuve de pitié. Et son sang gicle au sol.

Jules est adorable lorsqu'il est absorbé dans son travail et les hurlements de la fille sont une douce mélodie à mes oreilles. Sur le plateau à côté de lui, il a déjà recueilli un oeil et quelques doigts dénués d'os. Les phalanges et ses dents traînent au sol. Le silence finit par se faire vers la fin, alors que plusieurs de ses organes sont sur le plateau et que sa voix s'est éraillée. Mon interne lui a tranché les cordes vocales d'un geste expert. Avant de s'écarter et de me tendre le scalpel.

À moi l'honneur semble-t-il. Et j'ai un petit cadeau à faire à mon précieux blondinet. Je lui ouvre donc sans ménagement la cage thoracique et prend son cœur dans mon poing. C'est à ce moment précis qu'il cesse de battre. Alors je lui tranche l'aorte et les caves, ainsi que les autres vaisseaux, et le pose sur le plateau sous l'œil ravi de Jules. Ne reste plus d'elle qu'un tas de chair informe.

Je la détache, prêt à la transporter. Il me fait signe qu'il préférerait manger seul, comme à son habitude, alors je l'embrasse, la pose sur mes épaules et sors, me dirigeant vers le fond du bunker, relié à un gouffre naturel. J'y jette le corps abîmé, puis réunis dans un sac mes vêtements ensanglantés et mes gants avant d'y mettre le feu et de le jeter aussi dans le gouffre une fois la combustion bien entamée. Je me retrouve donc en T-shirt et caleçon, et va attendre devant la porte dans cet accoutrement.

Mon interne ne tarde pas à en ressortir. Il n'a pas pris la peine d'essuyer le sang qui goutte d'entre ses lèvres, mais il ne porte plus qu'un bermuda et un T-shirt. Une lueur s'allume dans ses yeux lorsqu'il me voit dans ma tenue actuelle, mais il sort malgré tout de son sac une veste et l'enfile avant de s'avancer vers moi. Ses lèvres ont le goût du sang.

Je savoure comme au premier jour ce contact, le serrant contre moi, incapable d'entrevoir une sortie à mon addiction.

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Bon bah au final ce sera un triptyque.

Un avis? XD

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