Chapitre 6 (1) (corrigé)

Lieu de perdition

« Pas d'injures à ces malheureuses que vous coudoyez le soir dans la rue. Souvenez-vous que la plupart ont été livrées à la prostitution par la faim et se sont laissées tomber dans le ruisseau pour ne pas se jeter à la rivière.»

Victor Hugo, Post-scriptum de ma vie.


      Dans la nuit froide, au coin de l'intersection entre Commercial Street et Fournier Street, un établissement lugubre se tenait devant les deux jeunes gens. Ce fut ici que l'on vit Annie Chapman et Mary Kelly pour la dernière fois avant qu'elles ne soient toutes deux retrouvées assassinées par Jack l'Éventreur. Jane eut un frisson en revivant l'horrible scène, elle n'osa penser à ce que les deux femmes avaient dû subir le soir de leur mort... Le dernier visage qu'elles avaient vu était celui de l'ange de la mort. Ce fut cet instant que Will choisit pour lui expliquer ce qu'il avait en tête :

– Nous y voici. Le Ten Bells, dit-il. Fulton se trouve à l'intérieur avec d'autres individus de son espèce. Ils viennent assouvir leurs désirs les plus inavouables avec certaines filles de joie, expliqua-t-il les yeux rivés sur le bâtiment. J'espère que vous êtes prête parce que ce que vous allez voir n'est pas très catholique... Bon, écoutez-moi bien, enchaîna Will en se tourna vers sa coéquipière. Voilà votre mission : vous allez séduire Fulton.

– Très bien, lâcha Jane en hochant la tête.

Surpris par l'assentiment beaucoup trop rapide de sa partenaire pour être naturel, Will haussa un sourcil.

- Vraiment ? demanda-t-il incrédule.

- Oui, je peux le faire, affirma Jane.

L'Irlandais lui jeta un œil inquisiteur, réellement intrigué par l'obéissance de la demoiselle. La jeune fille soutint son regard et mis ses poings sur ses hanches.

- Je refuse, s'indigna Jane. Seigneur pour qui donc me prenez-vous ?!

- Il faut savoir ce que vous voulez Miss Warren ! Rares sont les individus que Fulton laisse approcher de sa petite personne, et le nombre a dû se réduire davantage depuis la mort de Judy. Il doit être sur ses gardes, si un homme tente de lui parler il se fermera immédiatement. Cependant, comme pour la majorité des hommes, sa plus grande faiblesse semble résider en le beau sexe. Justement il se trouve que nous vous avons sous la main, alors autant en faire bon usage.

- Quelle chance que vous ayez songé à apporter une digne représentante du beau sexe avec vous, ironisa Jane.

- Vous êtes notre seule chance d'en savoir plus.

Il y eut un silence durant lequel la demoiselle sembla peser le pour et le contre

– Mais... Comment le séduire ? Ce que je veux dire c'est qu'il ne doit certainement pas accepter la compagnie de n'importe qui.

– Débrouillez-vous, utilisez votre imagination Jane ! On ne vous apprend pas ça dans vos salons de thé ? Le but est de séduire Fulton et de le convaincre de vous isoler dans une chambre, à l'étage.

– Seule avec un suspect et je suis censée être rassurée ?

– Où est passé votre courage ? se moqua le jeune homme.

– Là où se trouvent vos manières !

– Rassurez-vous, je m'occupe de tout.

– Oui, bien sûr, il suffit de voir la qualité de votre plan pour être rassurée !

– Calmez-vous, vous m'angoissez ! Sachez que je travaille très mal quand je suis sous pression alors si vous voulez ressortir d'ici en un seul morceau par pitié du calme ! Jane, faites confiance à vos charmes, reprit Will avec davantage de sérieux. Je ne vous laisserai pas seule, je vous le promets. Vous êtes le meilleur antidote pour extraire la vérité.

Jane ne parut cependant pas très convaincue. Mais le temps leur filait entre les doigts et elle devait agir.

À l'intérieur le Ten Bells n'avait rien à envier à un autre établissement miteux du même acabit : un pub de quartier presque ordinaire. Noyé dans les chansons paillardes et le bruit des verres qui s'entrechoquaient, quelques courtisanes aguicheuses attendaient, bavardaient pendant que leur regard s'attardait sur Will comme sur un met alléchant.

Will saisit discrètement Jane par la main et l'entraîna à sa suite, ils traversèrent le bar en catimini et s'arrêtèrent devant un rideau de pourpre au fond de la pièce, le jeune homme jeta un coup d'œil à sa partenaire, un seul regard qui lui demandait de lui faire confiance, puis il souleva l'épais tissu comme on ouvre une porte sur un monde parallèle.

Derrière le rideau, des lanternes rouges donnaient une ambiance tamisée à l'endroit, une musique douce et entêtante s'échappait d'un petit orchestre qui faisait chavirer les corps féminins avec grâce. Sur des divans disposés au hasard mais suffisamment éloignés les uns des autres pour créer une bulle d'intimité, des hommes de tous âges étaient installés et conversaient en compagnie d'une gent féminine peu vêtue. Jane remarqua qu'ils appartenaient tous à un même monde : l'argent. Tirés aux quatre épingles, fumant le cigare, un verre de cognac à la main. La fumée qui s'échappait de leur bouche s'ajouta à l'atmosphère déjà lourde qui pesait sur l'endroit.

– Et maintenant ? demanda Jane.

– Cherchons Fulton.

Ne l'ayant pas lâchée, Will se fraya un chemin en entraînant sa partenaire parmi les corps qui ondulaient de façon hypnotique, parfaitement à l'aise, comme si ce spectacle n'avait rien extraordinaire. « Si tante Helen voyait cela, elle serait sans aucun doute en train de faire une attaque. » Se dit Jane. Elle comprit que si Will ne lui avait pas imposé une telle chose, elle ne l'aurait sans aucun doute jamais fait d'elle-même. Aussi n'aurait-elle jamais eu le cran d'approcher un suspect de façon aussi sournoise. Sournoise certes, mais efficace.

Elle se cogna brusquement contre le dos de Will qui avait fait une pause dans son exploration, elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule et remarqua qu'il observait une tablé à laquelle un homme près de la cinquantaine discutait vivement avec d'autres messieurs de son espèce, cigares aux lèvres, et demoiselles aux toilettes légères autour d'eux comme un essaim d'abeille autour d'un pot de miel.

« Fulton. » Pensa Jane.

– C'est le moment d'entrer en scène ma chère, lui souffla Will. Faites en sorte qu'il vous invite à sa table. (Il détourna les yeux, comme s'il cherchait quelque chose.) Je dois vous laisser, ne vous inquiétez pas, je garde un œil sur vous, lui promit-il.

Jane voulut le retenir mais Will se faufilait déjà à travers la foule. Voilà, il l'avait abandonnée comme elle le craignait. Elle s'était tue par fierté, mais elle n'avait osé avouer à Will qu'elle n'avait jamais séduit d'hommes. Elle ne savait pas comment s'y prendre, ni comment leur plaire. Évidemment elle avait bien tenté faire tomber dans ses bras ce policier l'autre jour, mais il n'avait été alors question que d'un simple battement de cils en tout bien tout honneur...

Toutefois elle avait réussi et habillée qui plus est ! Le caractère cocasse de la situation lui fit regretter de n'avoir pas assez de complicité avec Julie, elle aurait pu lui donner bien des conseils en la matière. Elle inspira, il était trop tard pour reculer maintenant. Après tout, n'est-ce pas en terrain inconnu où l'on apprend le mieux à se débrouiller ?

C'était le moment de vérifier cette théorie. Elle voulut inspirer fortement pour se donner du courage mais manqua lamentablement de s'étouffer à cause de l'air chargé de tabac. Aussi, elle devina que la fumée qu'elle respirait n'était pas exclusivement du tabac, ce qui l'inquiéta davantage. Elle examina scrupuleusement les alentours, cherchant un moyen de se démarquer des concurrentes potentielles. Son regard s'arrêta sur une jeune femme qui brillait par son assurance, elle se déhanchait lentement, ondulant comme un serpent, Jane ne put s'empêcher de la trouver séduisante et de l'admirer. Elle tenta donc reproduire ses mouvements gracieux, mais la présence d'hommes la mettait terriblement mal à l'aise. Elle n'en resta pas moins fascinée, comment une femme pouvait-elle faire cela avec son corps ? On lui apprenait à valser, à danser le quadrille, à marcher lentement en se tenant bien droite, pas à rouler des hanches de la sorte. La partie était clairement loin d'être gagnée.

Timidement, Jane commença à se mouvoir entre les silhouettes légèrement vêtues. Ses vêtements étaient trop étroits pour elle, de plus la gêne la rendait trop raide pour imiter la grâce de la femme serpent. Ses mouvements manquaient atrocement de souplesse et de sensualité, ils étaient saccadés et maladroits, c'en était presque risible tellement c'en était ridicule. Soudainement elle sentit quelqu'un poser une main sur son épaule, apeurée elle tenta de se dégager discrètement. Elle lâcha un soupir de soulagement quand elle comprit que ce n'était que Will qui se tenait derrière elle.

– Que faite-vous ? lui demanda-t-il amusé.

– Comme vous pouvez le constater, je suis vos conseils à la lettre, répondit-elle gênée.

– Ce n'est pas de cette façon que Fulton vous remarquera, ni aucun client d'ailleurs.

– De toute évidence vous êtes un expert en la matière, rétorqua Jane vexée. Peut-être auriez-vous l'amabilité de me remplacer ? Je suis sûre qu'avec un jupon vous ferez des merveilles.

– Je pourrais mais je suis beaucoup trop grand pour rentrer dans cette robe qui ne me mettrait pas en valeur.

– Vous appelez ça une robe ? railla Jane.

– Chut. Laissez-moi vous montrer et apprenez.

Quand Will posa ses mains sur les hanches de la jeune fille, celle-ci se raidit malgré elle.

– Laissez-vous faire bon sang je ne vais rien vous faire ! s'exaspéra Will. Vous n'arriverez à rien si vous ne vous détendez pas.

– Pas la peine de me brusquer ! Ce n'est pas tous les jours qu'un rustre pose ses mains sur moi de la sorte.

Elle sentit Will sourire dans le noir.

- Eh bien il y a un début à tout, lui glissa-t-il. Faites-moi confiance.

À contre cœur, elle laissa Will la diriger, lentement il lui montra comment se mouvoir avec la même grâce que les autres filles.

– Écoutez la musique et suivez là, lui conseilla-t-il.

La jeune femme ferma les yeux et se concentra sur les battements lents de la musique qui ne ressemblait en rien à ce sur quoi elle avait pu danser jusqu'à présent. Lasse, elle n'opposa plus aucune résistance à ce qu'il la dirige sur le tempo. Elle sentait la force de ses mains sur sa taille et la chaleur de son corps contre le sien. Ou peut-être était-ce le surplus de monde combiné à la fumée étouffante qui lui donnait l'impression d'avoir chaud ?

– N'oubliez pas d'être sensuelle, lui conseilla le jeune homme.

Une main dans son dos, il la poussa délicatement vers la tablée. Elle se retourna pour le chercher mais il avait disparu. Elle se demanda si cet instant avait bien été réel. Son cœur battait dans ses oreilles au rythme des corps qui dansaient lascivement.

Le bruit typique du jacassement féminin lui parvint et elle distingua deux voix échanger quelques commérages. D'une curiosité maladive, elle ne put s'empêcher d'écouter attentivement ce qu'elles se disaient. Pour éviter de se faire remarquer, elle essaya de danser comme Will le lui avait montré. L'une des deux femmes portait une perruque, cela se voyait, elle expliquait à son amie quelque chose de très intéressant.

– Paraît qu'il recherche des choses assez particulières. Ses demandes sont bizarres, c'est pour ça qu'y a peu de filles qui acceptent.

– J'en ai entendu parler, répondit son interlocutrice. Mais c'est très bien payé ! D'quoi boire du champagne et manger du caviar pendant six jours au moins !

– Oui mais à quel prix ! J'ai entendu d'une amie d'une fille que j'connais qu'il fait partie d'un club privé dans l'quel y s'passe des choses pas très nettes, insista la femme à la perruque. D'ailleurs, j'ai appris qu'sa maîtresse a été retrouvée morte ! C'était affreux y'avait du sang partout !

– C'est vrai ! C'te fille comment qu'elle s'appelait déjà ? Huly ? Ludy ? Quelque chose comme ça.

« Judy. » Comprit Jane.

– Cette fille était tellement bizarre, remarqua son interlocutrice, j'l'ai souvent vue à sa table. Oh ! Tu crois qu'on l'a tuée à cause de ça ?

– Chut ! Dis pas de bêtise chérie ! Paraît qu'il l'aimait bien. Ou alors c'est sa bonne femme qui l'a tuée, ricana la femme à la perruque.

– J'sais pas moi ! J'me pose des questions, comme tout l'monde d'ailleurs... Depuis cette histoire tout l'monde il est bizarre...

Les deux courtisanes s'interrompirent brusquement, ayant remarqué qu'elles étaient écoutées à leur insu par une petite fouine qui avait cessé de bouger et qui tendait l'oreille d'un peu trop près. Alors la femme avec sa grosse perruque chuchota quelque chose à l'oreille de son amie et toutes deux s'éloignèrent en dévisageant Jane.

La jeune fille était furieuse contre elle-même d'avoir été si peu discrète. « Je suppose que cela fait partie de l'apprentissage du métier... » Songea-t-elle avec amertume. Pourtant lorsqu'elle reporta son attention sur la table de sa cible, elle constata que Fulton la regardait, ou plutôt la déshabillait du regard. Le politicien le plus en vogue de Londres avait dégagé une place à côté de lui sur le divan de velours qu'il tapotait avec un sourire gourmand sur les lèvres, invitant cette belle créature à le rejoindre.

Ce fut à contre cœur que Jane se dirigea vers lui, lancinante, et se laissa tomber sur la banquette moelleuse tout en recherchant activement Will des yeux.

– Bonsoir douce petite, vous êtes magnifique. Une aussi belle créature dans votre genre doit bien avoir un nom ? roucoula-t-il.

Jane eut envie de vomir en sentant son souffle imbibé d'alcool lui chatouiller la joue. C'était un homme aux larges épaules, et au ventre bien rebondit. Ses longs cheveux noirs enduits de pommade étaient plaqués sur son crâne légèrement dégarni, ils luisaient d'une sinistre lueur rouge. Ses grands yeux bruns surmontés d'épais sourcils noirs l'observaient avec délice, son nez cassé lui donnait un air de boxeur et ses lèvres fines se fendaient dans un rictus calculateur. Cet homme lui faisait peur.

– Ah ah ! ricana-t-elle nerveusement. Oui, bien sûr, évidemment ! Mon nom est Ja... Jackie !

Elle se félicita d'avoir eu la présence d'esprit de fournir un faux nom, William aurait été fier d'elle !

– Jackie ! Quel prénom merveilleux ! Il sonne déjà dans mes oreilles comme une prière que l'on adresse à la muse la plus sublime.

Au passage, l'homme profita de leur proximité pour déposer une main baladeuse sur le genou de la jeune femme. Cette dernière se reteint de lui tordre les doigts le plus fort possible et tenta de dissimuler son dégoût. Fulton fit courir ses doigts boudinés le long de sa jambe. Cette fois Jane ne put contrôler sa surprise et s'écarta malgré elle.

Fulton se rendit compte de sa réticence et décida de jouer la carte de la facilité, celle qui parvenait à convaincre la plupart des femmes de mauvaise vie de céder à ses moindres désirs : l'argent abondant. Mais avant il essaya de mettre la jeune fille plus à l'aise.

– Vous savez, j'ai un aveu à vous faire Jackie, commença-t-il. Je me sens extrêmement seul...

– N'avez-vous pas de femme ? le coupa Jane qui osa enfin le regarder dans les yeux.

– Euh, le bonhomme prit de court se mit à bégayer. C'est-à-dire que j'ai l'impression que la passion amoureuse de mon épouse s'est quelque peu... atténuée, voyez-vous mon enfant ? Et je manque cruellement de tendresse.

– Quelle surprise ! railla Jane avec ironie.

– Vous avez dit quelque chose ?

– Non ! Rien. Je disais que je comprenais votre douleur, très cher monsieur, minauda-t-elle en lui servant un sourire innocent.

– Que vous êtes belle lorsque vous souriez ! la complimenta Fulton qui sentait qui allait atteindre son but.

Voilà qu'elle recevait des compliments d'un bonhomme lubrique à l'haleine empestant l'alcool. Un comble.

– Vous me flattez mon bon monsieur, dit Jane déçue que ce commentaire sorte de la bouche d'un homme obsédé et malsain.

Fulton tira sur son cigare et l'odeur qui s'échappa de ses lèvres fines donna à Jane un nouveau haut-le-cœur.

– Jackie, mon cher petit, vous m'avez l'air bien jeune, j'hésite à vous demander un service.

La trappe venait de s'ouvrir, c'était le bon moment, Jane sauta sur l'ouverture qu'il lui offrait.

– Vous pouvez tout me confier. Remettez-vous en à moi, je saurai bien m'occuper de vous. Je soignerai vos maux.

Les yeux de Fulton brillèrent, étonné par une telle éloquence chez cette péronnelle.

– C'est que... hésita-t-il, j'ai des demandes très particulières, voyez-vous. Mais rassurez-vous, j'ai de quoi payer. Je suis fortuné, j'ai de l'argent. Beaucoup d'argent. (Il se pencha pour lui murmurer dans le creux de l'oreille.) Je pourrais combler vos moindres désirs.

Jane eut un frisson. Fulton la contemplait comme une bête affamée reluque un morceau de chair fraîche, cette sensation fut extrêmement désagréable. C'était donc cela que ressentaient toutes ces femmes obligée de se vendre pour survivre ? L'East End était cruel. La vie était cruelle, et elle l'était davantage avec les femmes. Forcée et contrainte, elle ravala son dégoût et se fit violence. Il fallait qu'elle fasse confiance au plan de Will.

Elle se rapprocha à contre cœur, et passa sensuellement sa main le long de son cou en entortillant une mèche brune autour de son doigt. Elle prit son regard le plus enjôleur et lui murmura :

– J'accepte. Mais avant cela que diriez-vous de monter faire connaissance ? C'est un de mes principes, je tiens sincèrement à connaître mes clients personnellement avant le premier... rapprochement.

Le mot lui écorcha la bouche. Fulton parut surpris de sa demande qu'il mit sur le compte de la jeunesse et de la timidité, car encore aucune de ses partenaires ne lui avait jamais demandé cela. D'habitude, ils montaient à l'étage, il disait ce qu'il désirait pour la nuit, celles dans le besoin s'exécutaient sans avoir leur mot à dire, Fulton les payait puis ils ne se voyaient plus jusqu'à que l'homme eût de nouveau besoin de leurs services. La plus part du temps les partenaires n'étaient jamais les mêmes. Judy fut l'exception. Fulton commençait même à s'y attacher.

À la pensée de Judy son estomac se noua, une paranoïa soudaine s'empara du politicien qui songea un instant à un éventuel piège que ses ennemis pourraient lui tendre. Il s'apprêtait à refuser quand le regard brûlant de la jeune créature si douce et mystérieuse à ses côtés le décida à accéder à sa requête. L'homme est faible.

Alors qu'ils quittaient le confort précaire du divan, ils se frayèrent un chemin parmi la foule et pendant qu'ils montaient l'escalier, Jane essaya de trouver Will dans la foule, en vain. La panique commença alors à la gagner lorsqu'elle se rappela qu'elle portait une arme cachée sous sa jupe. « Huit coups. » Se rappela-t-elle. Quand bien même elle ne comptait pas s'en servir, elle se dit que cela pouvait faire grande impression au gros bonhomme s'il tentait quelque chose de déplaisant. Juste au cas où.

Fulton referma la porte derrière lui, les mains tremblantes d'excitation. La pièce disposait d'un lit en mauvais état, doté de draps défaits et tâchés. La fenêtre était couverte par un misérable tissu de lin tandis qu'une odeur de moisi emplissait la chambre. La tapisserie s'écroulait des murs et des tâches sombres d'humidité apparaissaient un peu partout au plafond. Le parquet était poussiéreux, il grinçait sous les pas récalcitrants de Jane dont le regard s'attarda sur une misérable chaise rongée par les rats.

Elle porta les mains à ses épaules nues pour se réconforter. Elle avait du mal à imaginer que dans cette chambre humide, de pauvres femmes désespérées avaient accepté de vendre leur corps pour une bouchée de pain.

Fulton la dévisagea ; quelque chose avait changé dans ses yeux, ils étaient plus sauvages, comme le chasseur regarde son futur dîner avec envie. Jane le scrutait avec méfiance alors que l'homme s'approchait d'elle avec un peu trop d'empressement. Face à cette image grotesque Jane se demanda s'il pouvait avoir l'allure de Jack l'Éventreur... Il avait foncé tête baissée dans le piège qu'elle lui avait tendu. « Trop vieux, pas assez malin, il n'avait aucune raison de commettre ce crime. » Pensa-t-elle alors.

Fulton la saisit brutalement par les hanches et l'attira contre son ventre dodu, son haleine empestant le tabac et l'alcool agressèrent Jane.

– Détendez-vous mon enfant, nous allons bien nous amuser tous les deux, ronronna Fulton.

Il s'approcha pour déposer un baiser dans le cou de Jane, crispée, elle ferma les yeux et chercha à tâtons son arme sous sa jupe afin de repousser les assauts amoureux du politicien. Elle le repoussa avec vigueur et réussit à se dégager de l'emprise de l'homme facilement, trop facilement même, prête à dégainer son arme. Alors qu'elle redoutait un nouvel assaut Fulton s'immobilisa, soudainement blême. Il s'était littéralement figé, son regard exorbité par la peur. Jane poussa un long soupir de soulagement quand elle remarqua que Will se tenait derrière le politicien libidineux, le canon de son arme chatouillant le dos de Fulton qui leva lentement les mains en signe de reddition.

Bien le bonjour chers lecteurs ! J'espère que la première sortie de notre duo de choc aura su vous contenter ! Par ailleurs je publie un peu en retard suite à une semaine désastreuse et mon ordinateur qui a rendu l'âme... Je n'avais pas le coeur à l'ouvrage et il fallait que je trouve une solution en substitution, j'ai donc préféré attendre un peu...
Enfin j'espère vous voir pour la suite ! ;)

Ceci est la version corrigée.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top