Chapitre 25 (2) (corrigé)
Will avait tout de suite repéré le grand blond à l'autre bout du wagon qui semblait plongé dans la lecture de son journal. Son attitude était beaucoup trop étudiée pour être naturelle. Il avait aussi très bien compris que sa partenaire et lui-même étaient outrageusement espionnés. Cependant, il ne pouvait pas provoquer l'homme ici et maintenant. S'il avait des amis, et Will ne doutait pas que ce ne soit pas le cas, le jeune homme se retrouverait vite dans une situation compliquée. Il fallait isoler le mouton du reste du troupeau.
Au même moment un employé du train entra dans le wagon, Will sortit de la poche de sa veste un étui à cigares. Bien qu'il ne fume pas, cela n'empêchait pas le fait qu'il en ait toujours sur lui, Dieu seul savait pourquoi. Il coinça donc un cigare entre ses dents et interpella l'employé, lui expliquant clairement qu'il désirait fumer dans un endroit isolé, si possible au grand air ; ce à quoi l'employé répondit en désignant l'arrière du train qui offrait une petite passerelle.
William le remercia et, sans prêter aucune attention à l'homme au journal, il fit mine de chercher un paquet d'allumettes dans sa poche alors qu'il se dirigeait à l'endroit indiqué, son cigare entre les lèvres.
L'homme ne le prit pas en chasse tout de suite. Toutefois, Will était prêt à l'accueillir comme il se devait lorsque le bonhomme franchit la porte du dernier wagon, qui donnait effectivement sur ladite passerelle. Lorsque le grand blond eut fermé la porte derrière lui, il fut inquiet de ne pas trouver sa cible, et se précipita d'emblée vers la barrière de la passerelle, à la recherche de l'Irlandais.
- Vous savez que c'est très impoli d'écouter aux portes ? s'enquit une voix suave.
Lorsque l'individu fit volte-face, le canon d'un révolver était braqué sur lui, le propriétaire de l'arme le gratifiait d'un sourire si narquois qu'il donnât immédiatement envie à l'homme de se jeter sur William. Il entreprit de chercher son arme respective mais Will le rappela à l'ordre d'un claquement de langue, comme l'on capte l'attention d'un animal ou d'un enfant qui s'apprête à faire une bêtise.
- Oh, je vous en prie, reprit-il toujours plus railleur. Ne vous donnez pas cette peine. Et si vous répondiez plutôt à mes questions ?
L'homme demeura muet. Il ne leva même pas les mains en signe de reddition. Au contraire, il décida de provoquer Will et lui offrit son plus beau sourire.
- On n'est pas très bavard à ce que je vois, fit remarquer Will.
- J'ai tout mon temps, lui répondit enfin l'autre. Je ne suis pas venu seul, tu n'es pas un débutant, tu dois le savoir. Nous allons bientôt avoir de la compagnie.
Will n'eut pas l'occasion d'en demander davantage que la réponse vint à lui d'elle-même. La porte s'ouvrit brusquement sur deux autres hommes. L'Irlandais eut tout juste le temps de tirer dans l'épaule d'un que le blond et un autre de ses compagnons se jetèrent sur William. Son revolver lui fut arraché et il dut s'en remettre pleinement à son corps pour se défendre.
Un bonhomme brun venait de lui saisir les bras et les maintenaient fermement dans son dos afin de le tenir tranquille, mais l'Irlandais savait aussi bien se servir de ses jambes que de ses poings. Il sauta pour balancer un coup de pied dans l'abdomen du blond qui avait volé son revolver tandis que son agresseur qui le maintenait fermement s'écroula sur le dos, entraînant Will dans sa chute. Le jeune homme profita de cette seconde de liberté pour dégainer son couteau avant que le blond ne se jette sur lui en criant. Ce qui frappa Will ce fut incontestablement le manque de précaution de ces hommes. Pour des gens exerçant un tel métier, cette absence d'expérience était des plus aberrantes ! Et Will put aisément blesser l'homme qui se jetait sur lui.
Bien qu'il n'en eût pas l'air au premier abord, Will connaissait très bien son « métier » en dépit de son jeune âge. On lui avait appris à frapper aux bons endroits et aux bons moments, et cette connaissance couplée à une certaine dextérité faisait de lui indéniablement un atout, ou dans le cas contraire un ennemi redoutable. Le jeune homme lui avait alors éraflé la côte, pile où se trouvait les os, car il ne voulait pas tuer son assaillant, juste le ralentir. Cependant, Will, aussi brillant soit-il, avait négligé les deux autres bonshommes, le brun qui avait tenté d'immobiliser Will se jeta de nouveau sur lui. Le jeune homme se retrouva plaqué au sol, son arme lui glissant des mains et pour couronner le tout sa tête bien faite pendait dans le vide entre la passerelle et les rails du train.
Son agresseur le maintenait avec force à terre, et ce fut avec rage qu'il abattit son poing sur le visage de Will. Un. Deux. Trois. Des coups toujours plus véhéments et quand il eut fini de déverser sa haine sur l'Irlandais, ce dernier cracha un peu de sang.
- Beurk, commenta Will, je n'arrive pas à m'y faire. C'est toujours aussi écœurant !
- Si tu fais de l'humour c'est que t'en as pas eu assez ! s'écria le brun.
- Oh si, je vous assure, j'en ai eu assez.
Will avait profité de cette courte distraction médiocre pour attraper fermement son assaillant et ni une, ni deux, il le fit basculer par-dessus lui. Le bruit de sa chute fut masqué par son hurlement, mais Will avait tout juste pu percevoir le son des os qui craquent comme une douce mélodie.
Quand le jeune homme se releva il était quelque peu sonné, s'il ne reprenait pas rapidement ses esprits c'était lui qui allait finir sur les rails. Il était seul face à deux hommes et désarmé, il fallait qu'il gagne un peu de temps. Il sauta et s'agrippa pour se hisser sur le toit du train. L'homme qu'il avait blessé à l'épaule en lui tirant dessus attrapa sa jambe, empêchant Will de grimper. Agacé, il lui asséna un violent coup de pied qui fit lâcher prise à son agresseur. Alors qu'il se relevait difficilement au sommet du train, il entendit un de ses assaillants hurler des ordres dans le vent. S'il parvenait à rejoindre l'avant-dernier wagon il pourrait les prendre par surprise. L'air lui fouettait le visage, la poussière l'aveuglait, encore désorienté par les coups il peinait à rester stable sur ses appuis.
Alors qu'il avançait péniblement, les deux hommes tentaient de le rejoindre. Tant pis, Will n'avait d'autre choix que de tirer parti de la hauteur pour se débarrasser d'eux. Un coup mal placé et c'était lui qui irait saluer ses ancêtres, c'était quitte ou double. L'homme qu'il avait blessé arriva la premier, il se rua sur Will qui l'attendait de pied ferme. Il tenta de lui assener un coup de poing au visage que Will esquiva.
- Raté ! s'écria l'Irlandais.
Furieux, l'homme essaya de nouveau de le frapper alors que son poing ne fouetta que le vent.
- Encore raté ! fanfaronna Will, insolent.
Ivre de colère, l'homme mit toute sa force dans l'ultime coup de poing qu'il s'apprêtait à donner, enhardi par un cri de rage. William l'avait suffisamment déstabilisé pour que le blessé soit aveuglé par sa colère. Il fonça sur le jeune homme à la chevelure de jais qui s'écarta de son chemin au dernier moment non sans avoir laissé traîner son pied auparavant. L'homme se heurta au pied de William, et perdit l'équilibre pour finalement perdre l'équilibre et faire un plongeon dans le vide.
- Terminus tout le monde descend ! se moqua Will.
Sa puérilité l'avait aveuglé et le coup brutal qui s'enfonça dans son abdomen le ramena brusquement à la réalité. Le souffle coupé, le jeune homme tituba de quelques pas en arrière.
- Aller O'Brien ! Relève-toi et bats-toi ! hurla le grand blond.
Will lança un regard empli de colère au gaillard. Le fait que l'inconnu prononce son nom ne lui échappa pas en dépit de la douleur qui malmenait son corps, et ceci eut le don de le faire réagir. « Assez rigolé. » Se dit le jeune homme prêt à en découdre. Il n'avait plus envie de jouer, il voulait que cela cesse et qu'on réponde à ses questions. Il désirait remporter la manche, quitte à être le plus vicieux possible.
Les deux hommes se toisèrent en chiens de faïence. Will inspira fortement avant de balancer une droite magistrale dans la mâchoire de son ennemi. Il ne laissa pas le temps à son adversaire de récupérer et enchaîna les coups. Le visage impassible, une expression de concentration extrême, il faisait bon usage de l'enseignement qu'il avait reçu. Après avoir suffisamment amoché son adversaire, il enfonça son coude dans son abdomen, la respiration coupée il en profita pour faucher les jambes instables de l'homme qui tomba à terre dans un bruit sourd, suffoquant douloureusement. Alors qu'il tentait dans un dernier espoir d'attraper le couteau de l'Irlandais à sa ceinture, William se rapprocha, cette colère malsaine qui transformait ses yeux, et il écrasa avec rage la main du blond qui hurla de douleur alors qu'il sentait des os dont il ne soupçonnait pas même l'existence se briser sous le pied de l'Irlandais.
Déterminé, William récupéra son révolver dans sa veste et le pointa sans état d'âme vers le blond, prêt à l'achever. Contre toute attente l'homme se mit à rire.
- Je suis épaté, dit le blond entre deux rires.
Will se trouva quelque peu dérouté par la réaction de sa victime, or il conserva son masque de froideur.
- Finalement, ce qu'on dit sur toi est vrai, déclara l'homme.
- Qu'as-tu entendu ? l'interrogea Will toujours aussi impassible.
- Oh ! Des tas de choses merveilleuses ! T'as déjà une belle réputation pour ton âge William O'Brien.
- Qu'est-ce que tu veux ? Qui t'as envoyé ?
- Oh on se calme (Will lui donna un coup de pied et l'homme étouffa un cri de souffrance)... C'est bon je vais parler ! Pas la peine de me frapper !
- Je n'ai pas beaucoup de temps bonhomme, continua Will dont le ton sous-entendait clairement la menace. Alors je te conseille d'accélérer. J'ai la gâchette facile, on a dû te le dire puisque tu m'as l'air pas mal renseigné.
La vérité était que Will était inquiet. Ces hommes qui s'en étaient pris à lui avaient eu vent de ses prouesses. En même temps difficile de passer à côté de sa réputation surtout à Whitechapel, et davantage encore dans ce milieu. Mais si Will s'était donné tout ce mal pour qu'on le croit mort ce n'était pas pour rien. Il pensait avoir fait le mort suffisamment longtemps pour qu'on se soit désintéressé de lui, ou du moins pour qu'on l'ait relégué aux oubliettes. Manifestement pas, il fut fâché de l'apprendre.
- Je suis porteur d'un message pour toi, c'est Tobias Hathaway qui m'envoie, lui apprit le blond.
Bonjour ! Vous avez remarqué le petit "Précédemment" au début du chapitre, c'est parce qu'on m'a demandé si je pouvais rappeler en gros ce qu'il se passait au chapitre précédent parce qu'il y a trop d'éléments. Cela ne me gêne pas de le faire et j'espère que ça aide la lectrice qui me l'a demandé ! :)
Alors, voilà que ça devient un peu intéressant ce fouillis... Le passé de Will resurgit par bribes, et ce dernier le rattrape on dirait bien... Ça ne laisse rien présager de bon si vous voulez mon avis ! ;) (Je rappelle qui est Tobias Hathaway : il est évoqué au chapitre 22 pendant la discussion entre Baner et Will. Je ne peux rien dire de plus pour l'instant, ce chapitre vous en apprend davantage à son sujet, mais il a pas l'air très sympathique !)
Petite info : J'étais censée commencer à publier la réécriture des Chroniques Infernales à partir du 18 avril (fin de mon concours). Or il se trouve que des petits problèmes ont fait que certaines de nos épreuves ont été annulées, puis reportées. Donc je pense commencer à publier le début à partir du 23 avril. :)
J'attends vos avis !
Ceci est la version corrigée. (J'ai supprimé le "Précédemment" au début, puisque le tome 1 est entièrement rédigé aucun besoin de ce petit rappel !)
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