Chapitre 21 (2) (corrigé)
Lorsque la porte métallique s'ouvrit, le policier Ayre entra en sifflotant, manches retroussées, une barre de fer à la main. Il se figea lorsqu'il vit son compagnon ligoté sur la chaise et inconscient à son tour, Sam Ayre se précipita vers lui sans se douter une seconde que Jane, qui s'était planquée derrière la porte, en profiterait pour filer. Elle referma la porte métallique et la bloqua avec la barre de fer prévue sans doute à cet effet avant que le policier n'ait pu comprendre ce qui lui arrivait. Elle l'entendit hurler derrière la porte, mais elle s'élança à toute allure dans le couloir sombre, le pistolet du compagnon d'Ayre qu'elle avait lui dérobé alors qu'il était inconscient. Jane courut. Longtemps. Comme si sa vie en dépendait. Elle ne savait pas si cela était tout à fait le cas et elle s'en moquait éperdument. Elle ne serait soulagée qu'une fois barricadée dans sa chambre.
De longues minutes s'écoulèrent avant que Jane ne parvienne à se repérer de nouveau dans le dédale des rues de l'East End. Elle s'était trouvée enfermée dans une vieille usine désaffectée, et en sortir n'avait pas été une mince affaire. Elle avait beau être vaillante, son cœur galopait comme un cheval affolé contre sa cage thoracique, prête à exploser. Ses jambes la brûlaient, ses pieds lui faisaient mal, sa tête l'élançait et sa gorge était si sèche qu'elle avait l'impression d'avoir entièrement avalé le désert du Sahara.
La Tamise apparut enfin, si belle dans sa robe de saphir. Jane s'engagea sur le pont de Blackfriars et s'agrippa à la rambarde qui la séparait des profonds abysses. Elle respirait si fort que ses poumons se désagrégeaient dans sa poitrine à chaque bouffée d'air frais. Comme son cœur se consumait sous l'explosion de son angoisse. Elle serra la rambarde si fort que ses phalanges en blanchirent, la chair à vif de ses poignets incendia sa peau, l'obligeant à serrer les dents pour ne pas pleurer.
Elle leva la tête vers les étoiles cachées par les nuages pour se donner un semblant de courage. Cependant le ciel demeura muet, seul le remous tranquille du fleuve accompagna son souffle court. Le silence de la nuit avait quelque chose d'inquiétant, et à la fois si hypnotique qu'il encourageait Jane à se laisser aller au mouvement incertain de ses battements de cœur. C'était dangereux. Elle aurait voulu s'écrouler, ici, et s'endormir le regard rivé vers la voute céleste, bercée par la mélodie lancinante de la Tamise. Il fallait qu'elle se ressaisisse, elle n'était pas en sécurité. Ce fut difficile, mais elle parvint enfin à reprendre ses esprits ; les mains vissées à la rambarde du pont pour se soutenir, elle trouva malgré tout la force de quitter son observatoire et repris sa course jusqu'à chez elle.
Alors qu'elle approchait de sa chère maison, Jane remarqua une silhouette qui trottinait vers son domicile. La demoiselle ralentit sa course pour mieux scruter cette ombre qui se détachait dans l'obscurité mourante. Le spectre devait son aspect fantomatique à la longue cape noire qu'il portait sur ses épaules, la capuche rabattue sur sa tête. La silhouette était de petite taille, très peu imposante. Lorsque Jane vit cette dernière bifurquer vers sa propre maison elle n'y réfléchit pas à deux fois ; elle s'élança sur ses jambes douloureuses et bondit sur l'ombre. Quand la silhouette se rendit compte qu'un homme étrange lui fonçait dessus, elle déguerpit comme une gazelle avant de se retrouver plaquée au sol par son assaillant couvert de sang.
Le spectre se débattit comme un beau diable alors que Jane tentait tant bien que mal de le maintenir à terre lorsque soudain, sa capuche glissa, dévoilant des cheveux blonds.
Jane resta muette, la bouche grande ouverte, les yeux ronds quand elle reconnut le visage de son mystérieux fantôme. « Ce n'est pas possible... Béatrice ? » La femme de chambre contempla un instant son agresseur, comme si elle reconnaissait elle aussi Jane. Il n'y avait aucun doute possible, la cape de Jane avait disparu parce que Béatrice s'en servait pour ses petites escapades nocturnes ! Mais pourquoi diable l'employée des Blancksfair filait en douce aussi tard le soir ? Si Jane fut paralysée par ce nouveau coup de théâtre, Béatrice en profita pour repousser de toutes ses forces l'horrible personnage sale qui se tenait au-dessus d'elle. Elle poussa violemment Jane qui tomba sur les fesses, et se releva à la hâte pour courir à toute allure vers la villa de son employeur, refermant à brûle-pourpoint la porte dans son dos.
Abasourdie, Jane dut patienter quelques instants avant de se décider à passer la porte, d'une part parce qu'elle était trop choquée pour se rendre parfaitement compte de ce qu'elle venait de voir, d'une autre par précaution. Si la femme de chambre voyait surgir sous ses yeux son agresseur sous le toit de Mrs Blancksfair, qui sait le scandale qui pourrait d'ores et déjà poindre le bout de son nez !
La porte était verrouillée, et lorsque Jane pénétra par la porte de derrière dans la maisonnée endormie, une immense vague de fatigue la saisit immédiatement. Elle eut envie de se laisser glisser sur le parquet, s'écrouler à même le sol et ne plus se relever. La soirée avait été si riche en émotions qu'elle était vidée de toute énergie. Mais la douleur se rappela à son bon souvenir, l'obligeant à demeurer consciente et alerte.
Alors, elle retira ses chaussures, ses petits pieds glacés et endoloris par sa course effrénée la conduisant machinalement vers la cuisine. Elle se débarrassa de sa moustache postiche, et passa une main dans ses cheveux poisseux. Une grimace déforma son visage quand elle effleura la blessure derrière son crâne. C'était sûrement là que le policier Ayre l'avait frappée. Ses poignets aussi lui faisaient mal, sa chair malmenée à cause de la corde trop serrée rendait la douleur difficilement supportable. Il fallait qu'elle se soigne, éviter les infections et surtout le cacher. Le printemps réchauffant l'atmosphère n'aidait en rien, et elle pria pour que la température reste basse quelques semaines encore, le temps qu'elle puisse dissimuler ses blessures sous les manches longues de ses robes.
Il fallait que Jane agisse ; elle se munit une casserole dans les placards, mit de l'eau à bouillir, puis ajouta du thym afin de créer un antiseptique. Une fois son infusion prête, elle déposa la casserole bouillante à terre et remonta ses manches jusqu'au coude. Elle n'avait pu encore s'attarder sur l'étendue des dégâts, elle laissa échapper un hoquet d'horreur en découvrant une chair écarlate à vif, garnie de stries sanguinolentes. Des traces violacées venaient s'entremêler au dessin tortueux qu'avaient laissé les cordes. Comme un tatouage sanglant imprégné dans sa peau. En découvrant l'horreur, la douleur redoubla, comme si le simple fait de voir l'objet même de sa mutilation suffisait à la rendre malade une fois de plus. Jane sut que ce qu'elle s'apprêtait à faire la ferait souffrir, beaucoup souffrir. Désinfecter des plaies, mêmes superficielles, n'était jamais agréable. Alors elle se munit d'un chiffon propre sur la pile de lingue qu'elle coinça entre ses dents, et ni une ni deux, elle plongea ses mains dans le bassin chaud.
La réaction fut immédiate et la jeune fille dut réprimer un petit cri de souffrance qui remonta de ses poumons gonflés par le supplice qu'elle endurait. Toutefois ce n'était rien à côté de ce qu'elle s'apprêtait à faire. Un linge imbibé sur la plaie à l'arrière de sa tête, elle alla déboucher une bouteille d'alcool qu'elle vida dans un petit récipient. Jane laissa deux tissus s'imprégner de l'alcool avant de tapoter ses afflictions avec précaution.
La douleur enfla, la chair de ses poignets la piqua douloureusement, remonta jusqu'à ses coudes et atteint l'extrémité de ses doigts, elle eut l'impression que cette zone de son corps prenait feu au contact de l'alcool. Elle aurait bien voulu se passer de cette étape, mais elle n'avait pas le choix, si elle voulait éviter l'infection et bien d'autres désagréments elle devait passer par là. Elle souffrit, longtemps, seule dans le silence nocturne brisé par son gémissement étouffé.
Grâce à Dieu, son calvaire prit fin quelques minutes plus tard. Sans attendre elle sécha ses larmes et prépara une mixture à base de miel et de quelques gouttes de citron. Voilà qui apaiserait ses douleurs et permettrait à sa peau de se régénérer.
Elle badigeonna ses poignets de sa concoction, et les enroula dans une bande propre pour les protéger, et accessoirement mieux les cacher. Sur son visage, les larmes avaient creusé des sillons pâles sur sa peau salie par la suie. Du revers de la manche, elle essuya rageusement ses joues et jeta un nouveau coup d'œil à son reflet cadavérique. À bout de forces, elle éclata en sanglots.
Jane inspirait difficilement dans les rues déjà actives de Londres. Différents bruits assaillaient ses oreilles ; le son des pas battant le pavé londonien, les roues des calèches, les sabots des chevaux, le froissement des jupes des dames, les birbes de phrases... Si Jane percevait aussi distinctement les bruits c'était parce qu'elle était vidée de toutes émotions.
Malgré les événements bouleversants de la veille, la demoiselle avait cherché à se faire coquette ce matin. Elle ne sut si c'était pour masquer les témoins de ses aventures nocturnes ou bien si c'était parce qu'elle se retrouverait en tête à tête avec un célèbre journaliste. Elle avait relevé sa tignasse brune en un chignon élégant en laissant, comme à son habitude, des mèches ondulées encadrer son visage pâle. Elle avait justement triché en colorant un peu ses joues et ses lèvres, avait revêtu une robe rose printanier au col et aux manches ornés de dentelle. Elle portait un châle léger sur ses épaules et une paire de gants blancs assez opaques pour dissimuler ses bandages. Pour parfaire sa tenue, elle s'était parée de boucles d'oreilles et un bracelet d'or finement ciselé, le tout ajusté avec une chaîne dorée où reposait fièrement sur sa poitrine un rubis de la taille d'un ongle. Le point final se constituait en un chapeau orné de fleurs de soie et de rubans rouges.
En dépit de tous ses efforts, elle ne pouvait masquer les terribles cauchemars qui la hantaient. Les longues nuits d'insomnie, les tracas de la vie. Cependant, le simple fait de se savoir presque jolie lui rendit un peu de gaieté. Quelques regards de jeunes hommes se posèrent furtivement sur elle et pour la première fois de sa vie, elle aima cela. Elle qui avait toujours détesté le fait d'être un objet de convoitise comme un autre... Mais aujourd'hui Jane se trouvait charmante. Elle qui n'avait jamais cherché à plaire, la voilà qui allait y prendre goût !
Bonjour tout le monde ! Oui, je sais. Je suis sacrément en retard pour le chapitre de la semaine... Pour ma défense, je suis rentrée très tard chez moi hier soir et j'ai voulu profiter de ma petite famille que je vois rarement. Mais enfin, le chapitre est là et c'est tout ce qui compte !
J'ai plusieurs choses à vous dire, la première et la plus importante selon moi, j'ai appris récemment (peut-être que vous aussi vous le savez) que des sites en vietnamien profitaient allègrement du fait que nos histoires soient en libre accès sur Wattpad pour les voler (oui le terme est juste) afin de se les approprier, les modifiant à leur guise, et les publiant de leur côté. Vous devinez bien que je n'ai pas du tout été enchantée d'apprendre cela. Dans l'optique d'une éventuelle tentative de publication, je souhaite protéger mon texte. La seule alternative à cela semblerait être la privatisation des chapitres (donc en fait seuls les abonnés pourraient lire). Je n'aime pas cette pratique en ce qui me concerne mais si cela peut protéger mon travail, je le ferrais. Je désire avoir votre avis sur la chose...
La seconde est que je pars en vacances samedi prochain dès que j'ai fini mon ds de français. Durant une semaine je vais être au ski avec des amis. Alors il est plus que très probable que je ne puisse pas publier... Alors je voulais vous demander : désirez-vous que je publie le prochain chapitre maintenant (du moins aujourd'hui) ou bien vous préférez attendre que j'en publie 2 à la suite quand je serais rentrée de vacances (à savoir dans 2 semaines puisque je rentre chez moi le samedi de la première semaine des vacances scolaires). Je ne sais pas si j'ai été claire mais sachez que je me plie à votre volonté ! Personnellement les chapitres sont prêts, vous seuls êtes maîtres de la décision ;)
Troisième et dernière chose, pour me faire pardonner de mon petit retard je vous offre un petit dessin. Alors en fait il s'agit d'un amusement, à savoir j'ai imaginé ce que cela pourrait donner si Jane et Will étaient dans le monde d'Harry Potter, à Poudlard ! A l'origine je devais juste dessiner nos deux vedettes... Puis c'est parti en cacahuète et j'ai carrément fait le décor xD (sachez que c'était la première fois que je dessinais un décor entier !) Bref, ça m'a beaucoup amusé, c'est une esquisse (donc pas de couleurs, ni ombres) et j'ai une question pour vous : si Jane et William avaient été à Poudlard, selon vous, dans quelle maison auraient-ils atterri ?
Je suis curieuse ;D
Bien, ce n'est pas tout mais, j'ai envie de savoir ce que vous pensez du chapitre ! Alors, cette Béatrice, qu'est-ce qu'elle mijote ? Et le rendez-vous de Jane et Simon, va-t-il bien se passer ? Pourquoi veut-il la voir ? A vos claviers ;)
Ceci est la version corrigée.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top