Chapitre 3 p2/2 La fin des souffrances


...

Éblouie par un triste jour de pluie je ne ressent plus que la douleur de mon visage le froid s'agrippant à moi comme une huître à son rocher... s'en est habituel maintenant mais le vent me dit que s'est loin d'être fini mais que se ne sera que temporaire.

Gift s'approche maintenant de moi, une flèche de chasse chauffée à blanc à la main. Elle arrive en marchant sachant pertinemment que je ne peux pas bouger, et donc pas me défendre, son sourire sadique à jamais collé sur son visage.

Le goût amer du sang rempli ma bouche. Un rapide examen me confirme que je me suis ouverte à l'intérieur de la joue, sur quelques centimètres. Le coup de pied d'Aaton a été plus dévastateur que je ne le pensais.

Arrivée à ma hauteur, Gift s'arrête. Elle me regarde toujours avec son air complètement supérieur. Qu'est ce qu'elle peut m'énerver à me regarder comme ça.

Elle s'adresse alors à moi toute joyeuse.

- Tu es prêtes ? La chaleur cotérisera la plaie. Tu ne saigneras pas longtemps, dit elle pour me rassurer.

- Il pleut. La flèche ne devrait pas pouvoir rester chaude aussi longtemps et tu ne devrais même pas pouvoir la tenir à main nue.

- Vois-tu, la magie est une chose fascinante. Je vais t'expliquer les bases. La magie ne peut naître qu'à partir du contrôle spirituel d'éléments naturels. Mais ces mêmes éléments naturels ne peuvent rien contre les éléments magiques. Dans le cas précis, dans lequel nous nous trouvons actuellement, pour éteindre cette flèche, que j'ai chauffée magiquement avec l'aide des braises faites par mon frère. Il faudrait que toi ou quelqu'un d'autre créé une pluie ou tout autre sort comprenant l'élément contraire au Feu.

Je baisse la tête abattue devant ces révélations. Bien sûr que je savais que la famille Kanha avait un fort lien avec la magie de Feu mais je ne savais pas que Gift la maîtrisait et encore moins qu'elle l'utiliserait. Voyant ma tête, elle m'attrape le menton de sa main libre.

- Voyons voir si nous sommes pareilles toi et moi, me souffle-t-elle à quelques centimètres de mon visage.

Je la regarde attentivement, me préparant à faire peut être ma dernière provocation. Je lui sourit de mes dents rouges de sang. Et lui crache au visage.

- Jamais... , lâchais-je en dégageant ma tête de sa faible étreinte.

- Vois-tu j'étais à deux doigts de te relacher et d'abandonner. Principalement parce qu'en faisant ça j'attire l'attention des autres qui ne travaillent plus. Mais voyons voir à quel point tu peux être insensible à la douleur.

Elle me plaque la tête contre le sol manquant de m'arracher les bras au passage, et approche la pointe de la flèche de mon visage. Je ferme les yeux ne préférant pas voir quand je souffrirais. La chaleur se rapproche. Je vais souffrir, elle est maintenant à quelques millimètres de ma joue. Je sens la flèche atteindre ma peau. Je ne peux m'empêcher de lâcher un cri de douleur. Je n'en peux plus. Je veux que ça s'arrête, quand est-ce qu'elle va s'arrêter.

Très difficilement, j'ouvre les yeux et une petite perle bleue suspendue à une chaîne dorée se balance à son cou dans un magnifique cliquetis. Je connais ce bijou. Mon esprit se bloque. Une seule chose compte à présent. Je veux le récupérer.

Je pousse un cri de colère mêlé à un autre cri de douleur. Le tout donnant un puissant hurlement de haine crispant mon visage et déchirant mes poumons.

- RENDS LA MOI !!!

Avant que je ne comprenne quoi que ce soit mes membres deviennent lourds et s'engourdissent. La sensations se transforme, peu à peu. J'ai l'impression de descendre, de m'enfoncer dans le sol. Je regarde mes jambes, mais par horreur je ne vois qu'un monticule de sable blanc se changeant progressivement en un nuage blanc assez épais.

Entendant mes hurlements de haine se muer en hurlements de terreurs, Gift et Aaton reculent de plusieurs mètres instinctivement. 

- Mais qu'est-ce qu'elle a ? Pourquoi elle crie? ,demande-t-elle méfiante.

La terre entière se met à trembler un grondement sourd et lointain se fait entendre. De violents craquements se font entendre comme si l'on venais de casser quelque chose d'immense et d'incassable. Le nuage blanc s'agrandit et s'égrène pour finalement s'éparpiller et complètement disparaître en même temps que les tremblements et le bruit continu qui provenait du sol.

Sous moi une immense crevasse s'ouvre, faisant disparaître instantanément le monticule de sable qui cachait mes jambes. Je suis suspendue quelques secondes au dessus du vide avant que les entraves de mes bras ne s'arrachent de leurs poteaux. Je tombe dans ces ténèbres inconnus. La chute me paraît interminable, sombrer de cette façon dans les entrailles de la terre est une chose unique en soi. Je suis encore une fois complètement désorientée, je vais disparaître, disparaître sans n'avoir jamais rien fait.

J'aperçois dans ces ténèbres, qui me paraissent étrangement clairs et familiers, une plateforme parfaitement lisse, se rapprochant à vive allure. C'est sûr je vais m'écraser et mourrir sans comprendre ce qu'il c'est passé.

À côté de moi, je fixe la paroi rocheuse qui semble... non, qui est immobile. Mais si je ne bouge pas et que ça se rapproche... Mon cœur s'emballe, de l'adrénaline plein les veines. La pierre amortie ma chute, me permettant "d'atterrir" sans trop de soucis. Mes jambes flageolent sous la vitesse de la montée vers cette triste lumière tombant dans ce puit obscur.

Je remonte. Le sol est maintenant à porté de main. Rien ne ralenti, au contraire j'ai l'impression d'accélérer. Je monte et continue de monter. Je suis maintenant à une dizaine de mètres au dessus du sol, mais continue de monter. La montée s'arrête subitement, me faisant tomber à quatre pattes à quelques centimètres du bord. Cet arrêt soudain manqua de peu de me faire faire la même course fulgurante de plusieurs mètres en sens inverse.

Je me penche prudemment vers le bord. Les gens paraissent si insignifiants d'ici, on dirait des fourmis qu'un simple coup de vent pourrait enlever de ma vie.

Une petite voix dans ma tête soulève cependant une question très pertinente.

- Et maintenant ... ? On fait quoi ? ,me susurre-t-elle comme indécise.

- Je redescends comment... ,commençais-je en ravalant quelques larmes.

Pas le choix je vais devoir supplier...

- À l'aide ! Je peux pas descendre ! Venez me chercher vite ! Criai-je aussi fort que mes poumons me le permettent.

Ça a l'air de s'agiter en bas. Je repère un petit groupe de personnes se rapprochant de mon piédestal, tentant plusieurs types d'approches pour venir me récupérer. Sûrement sur les ordres de l'autre naine. Quatres personnes, une femme et trois hommes que je ne connais pas attirent cependant mon attention.

Le premier à partir utilise sa magie de Terre de la manière la plus sûre qui soit, en faisant sortir de ma tour, une dizaine grandes marches accompagnées d'une solide rambarde. Le tout montant en même temps que lui.

La deuxième et le troisième à se lancer le font de manières assez semblables, la femme en se propulsant avec se qui semblerait être une magie de type Air provenant sûrement de l'air environnant, tandis que l'autre fait de même avec un jet à haute pression créé à partir de l'eau de pluie. Leurs permettant de se déplacer à vitesse raisonnable mais qui pourrait cependant être largement améliorée avec une meilleure maîtrise.

Le dernier à se lancer semble discuter avec les Kanha. Soudain, il fonce en direction de la tour l'escaladant avec la vitesse et l'agilité des escargots de la régions d'Oxiam. Les êtres les plus rapides du monde pouvant atteindre les cent vingt kilomètres heure en quatre secondes. Cet homme à la musculature imposante, escalade de la manière la plus efficace, en plongeant ses mains dans la tour, qui semble s'écarter et lui laisser une prise juste avant qu'il ne la perfore de ses mains puissantes.

Je me recule vers le centre de ma prison aérienne. Laissant tous les individus se battre pour ma capture, sûrement en l'échange d'une récompense financière.

À peine posais-je mes fesses sur la roche pierre froide et humide que j'entends comme un râle, un râle d'agonie. Deux bras s'arriment au sommet de mon piédestal. Puis une tête, parée d'une belle barbe apparaît. Ses yeux fatigués me regardent avec convoitise, mais ne me paraissent pas hostiles. Il monte complètement me rejoindre, exténué.

C'est un petit homme roux aux yeux noisette et à la musculature imposante. Son corps trapu est remplis de tatouages nordiques, une véritable œuvre d'art... Je ne peux m'empêcher de lui poser la question

- Comment tu t'appelles ? ,lui demandai-je troublé.

- ... el ,lâche-t-il entre deux respirations.

- J'ai pas compris ,insistai-je.

Il inspire bruyamment et s'arrête d'un coup, reprenant un rythme et une tonalité normal, comme s'il ne s'était rien passé.

- Tel. Tel Ephone. Et toi c'est comment ? ,me demande-t-il innocemment.

- T'es monté ici sans savoir comment je m'appelle ?! bredouillai-je.

- Bien sur t'en avais besoin et encore mieux Gift a essayé de me faire chanter pour que je ne te ramène pas.

- Je l'aime pas ! Elle est méchante avec moi ! ,avouai-je en croisant les bras. 

- T'inquiètes pas va... C'est pas qu'avec toi. Mais elle est plus gentille qu'elle ne le laisse paraître, lance-t-il en se relevant.

- Elle cache bien son jeu alors ... ,lui dis-je sur le même ton. 

Je vois les trois autres arriver tant bien que mal et extrêmement fatigués. Encore plus épuisés que Tel, qui les interpellent.

- Et bah les gars... C'est quoi ça ?! Vous êtes vachement fatigués ! ,se moque-t-il.

- Oublie pas que la magie a été interdite pendant trois ans. Et trois ans c'est long ,rétorque la fille d'un ton sec.

- Ouai ouai... C'est ce qu'ils disent tous  de toute facon... On y va petite !? ,me demande-t-il.

- Pas petite ... J'aime pas ! Je m'appelle Pawa... Mora ,répondis-je la mine boudeuse.

- Très bien ma petite Pawa... On y va ?! ,me redemande-t-il sur le même ton chaleureux

En guise de réponse j'accroche mes bras autour de son large cou et hoche la tête quand je suis prête.

- Surtout ne bouges pas tu pourrais me gêner pendant la chute ,me dit-il plein de confiance.

Tel s'approche du bord laissant dépasser ses orteils. Après avoir inspiré à fond quelques fois il se laisse tomberau ras de la pierre, tête dans le vide et bras écartés. Je cri et je pleure, le sang affluant vers ma tête, et la sensation de vitesse m'emportant dans un élan de joie. Tel lui, rit au éclats, à s'en rompre la gorge. Puis dans une agile pirouette, plonge ses mains dans la tour comme si c'était de l'argile et creuse un long et profond  sillon nous ralentissant peu à peu et nous faisant atterrir sans encombre.

Une fois finalement à terre, je lâche Tel, un peu à regret à vrai dire. Je glisse le long de son dos rassurant. À peine ai-je eu le temps de poser un  pied au sol que celui ci se met à tourner, à tanguer violemment. Ne pouvant tenir debout je vacille et tombe. Ma tête heurte violement le sol. Le ciel s'assombrit progressivement, je ne vois plus que Tel et Gift de dire choses, sûrement  des mots doux. Les sons s'atténuent pour que finalement ne me parvienne qu'un silence bruyant finissant par s'éteindre dans la nuit de ce triste jour de pluie.

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