Chapitre X

Je décide de sortir de cette chambre, avant que l'ambiance marine ne me donne mal au cœur. Qui plus est, la résurgence de certains souvenirs m'a troublé et j'ai besoin de temps seul pour digérer. S'il y a bien une chose que je ne souhaite pas, c'est que l'ennemi apprenne qui je suis vraiment et comment me renvoyer d'où je viens ! Bien que, j'ignore si c'est possible. Je pense que lorsqu'une âme perdue trouve un corps, elle ne peut le quitter à moins de tuer le corps. Et je sais parfaitement qu'ils n'oseront jamais. Pas une nouvelle fois.

Derrière moi, la porte claque et l'air vient m'ébouriffer les cheveux. Dieu du ciel, en quatre ans, il aurait tout de même pu se raser la tignasse... Je préfère ne pas me regarder dans un miroir, je pense que je me ferais peur. Passant dans le couloir vide, je quitte la maison pour aller à l'extérieur, là où les arbres frissonnent et les feuilles jouent la douce mélodie... Je plaisante. J'ai besoin d'air, je vais dehors. Point barre. Pas besoin de détailler ça pendant six ans. Un sourire satisfait étire mes lèvres tandis que je m'installe sous un arbre.

Je crois que j'aimais ça. Quand j'étais vivant. J'aimais être sous les arbres, écouter le vent jouer avec les feuilles. Je ne sais plus pourquoi, ni même si c'est vrai. Mais comme c'est un soupçon de souvenir, je m'y accroche tel un naufragé à sa bouée de sauvetage. C'est pareil pour les livres. Je suis sûr que je lisais, autrefois. Alors je continue, dans l'espoir de retrouver des fragments de ma vie d'antan dans les pages vieillies et jaunâtres des romans d'aujourd'hui. Mais jusqu'ici, rien de concret, malheureusement. Juste un profond sentiment de déception, pages après pages.

C'est tout ce dont je me souviens. Des pages cornées, d'un bruit de vent dans les feuilles et d'une brève sensation de joie. Au-delà de ça, mon esprit a perdu toute notion de qui il est. Et de là est venue ma colère. La seule qui ne m'est pas quittée. L'espoir est mort si vite... Espoir, joie et amour ont été brûlés, torturés et brisés, pour ne laisser que colère et cynisme. J'ai préféré laisser ce dernier à quelqu'un, pour me consacrer à ma colère. J'aime la puissance qu'elle m'offre, cette sensation de plénitude lorsqu'elle m'envahit... J'aime ressentir de la colère. Et j'aime que les gens y succombent.

— Jolie journée hein, souffle une voix à côté de moi, me dérangeant dans mes pensées.

Agacé, je tourne la tête pour rencontrer deux pupilles émeraudes, déjà posées sur mon visage. D'abord surpris, je relativise rapidement en voyant l'air inquiet sur son visage. Je hausse un sourcil, un sourire amusé sur le visage. Drôle de coïncidence... 

— Certes, je réponds sur le même ton.

La jeune Banshee ne réponds pas et détourne le regard, observant l'océan que l'on peut légèrement apercevoir d'ici. Seulement quelques vagues, perdues au milieu de l'immensité. Elle a relevé l'un de ses genoux, y posant sa main gauche, tandis que sa jambe droite est allongée. Légèrement courbée, son dos épouse parfaitement la forme du tronc, quelques mèches de cheveux me cachant ses yeux. Elle se tourne à nouveau vers moi, se sentant peut-être observée.

— Aoile m'a parlé de votre conversation, lâche-t-elle.

A son ton, je sens que la discussion fut plutôt houleuse. Je réprime un sourire. Ça commence déjà... Ça n'en sera que plus simple, désormais. Les sourcils de la jeune femme se sont froncés, les yeux toujours posés sur moi. J'esquisse un faux sourire triste, témoignage d'une fausse sympathie.

— J'en déduis que tu n'es pas d'accord avec les idées d'Aoile me concernant ?, je réponds, soufflant sur les braises qu'elle a semées.

La jeune femme soupire et l'arrière de son crâne vient frapper le tronc. Ses yeux se ferment.

— Ce n'est pas le problème, Thomas. On s'en fou, que je sois d'accord ou non. Le soucis, c'est qu'elle n'aurait pas dû t'en parler. Pas comme ça. Ça devait être ton choix et nous n'avions pas le droit d'intervenir dans cette décision. C'est ton corps, ta tête, avoue-t-elle.

Elle ouvre les yeux et se tourne vers moi, m'y laissant voir un mélange de colère et de déception. Clairement, elle et Aoile ont vraiment dû diverger sur certains points... Tant mieux. Je pose une main sur son épaule et soupire, pour la laisser croire que je sympathise.

— J'ai apprécié son intervention. Tu sais, je pense qu'Aoile s'est juste sentie obligée de justifier le fait qu'elle ne soit jamais venue me voir. Je ne dis pas que je ne considère pas sa proposition. Je dis juste que c'est une idée parmi d'autres. Mais je ne sais pas si elle marchera et très franchement, pas très envie d'en prendre le risque. Je crois qu'au point où j'en suis, je ne peux pas me permettre de prendre des risques. Ou ça marche, ou toutes les personnes auxquelles je tiens vont en souffrir, je souffle, presque peiné.

C'est si dur de faire semblant ! Le sourire sur les lèvres de la jeune femme s'installe en écho sur les miennes, tandis qu'elle retire gentillement ma main de son épaule. La jeune femme soupire et détourne encore le regard, me permettant de décrisper les lèvres et arrêter de sourire. Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour les faire tomber dans le panneau... Moi qui pensait qu'Aoile serait la plus dire à convaincre... Finalement, les deux filles sont aussi dupes l'une que l'autre.

Le silence perdure et mon cerveau continue de travailler. Samantha est-elle si dupe que ça ? Je veux dire, elle m'a..."vu" étrangler Thomas. Aurait-elle des doutes ? Je pense que non, elle n'oserait aller contre l'avis déjà bien tranché de sa compagne. Mais je ne peux me débarrasser de l'idée qu'elle puisse conserver des doutes et tente de me tester... Tant que je n'aurais pas les preuves qu'elle me fasse totalement confiance, je dois rester sur mes gardes. Tout le temps. A commencer par maintenant, par exemple.

Fouillant dans ma mémoire, j'essaye de trouver un sujet de conversation qui ne m'engage pas trop, de manière à la laisser parler, qu'elle se sente en confiance, sans que je ne me mette moi-même en danger. Le soucis, c'est que nous n'avons partagé qu'un seul moment ensemble, quand j'ai pris le contrôle de Thomas. Pourquoi est-ce qu'il a utilisé ses pouvoirs déjà ? Pour l'envoyer où ? Allez cervelle, allez.... Tu vas bien finir par trouver ! Finalement, un sourire prend place sur mon visage lorsque la réponse fuse. 

— Qu'est-ce qui s'est passé, avec Uriel ?, je demande.

La Banshee se tourne vers moi, visiblement surprise de m'entendre poser la question. Comme si je n'étais pas du genre à m'intéresser à cela. Alors que j'ai risqué mon esprit pour l'y envoyer, tout de même. Finalement, elle reprend une expression plus neutre et fixe le sol, presque ennuyée. Mon sourire fond. Il se pourrait que je n'ai pas choisi le meilleur sujet de conversation, en fin de compte...

— C'était assez décevant. Je pensais qu'elle serait ravie de me voir mais... En fait, elle était plutôt triste. Elle ne m'a pas vraiment dit pourquoi. Évidemment, elle m'a demandé de transmettre ses adieux à sa famille et leur dire qu'elle les aimes, mais quand je lui ai parlé de la guerre, de l'équilibre, tout ça... Elle a ellipsé. Tout en me disant que tout irait bien très prochainement. Qu'il y aura des événements difficiles à venir, mais rien d'aussi monstrueux que le Chaos, souffle-t-elle.

Je fronce les sourcils. Qu'est-ce que c'est que ce charabia ? Ça ne veut rien dire ! Je veux dire, soit la guerre est finie, soit elle continue, mais il ne peut pas y avoir d'entre-deux. C'est la guerre ou la paix. Non ? J'ai manqué un point crucial dans l'évolution humain ? Ou alors, peut-être que le monde dans lequel vie Uriel désormais n'est pas régit par nos lois et il est possible d'être en guerre pendant un temps de paix. Aoutch, je crois que mon cerveau saigne. Visiblement, Samantha partage ma vision car elle éclate d'un rire presque cynique et continue :

— Je voulais être rassurée sur la paix, être sûre qu'elle soit durable... Et elle m'a presque annoncé l'avènement de nouveaux conflits ! Comment est-ce que je suis censée gérer ça ? Je n'en ai même pas parlé à Aoile, je sais déjà comment elle réagira..., avoue Samantha.

La Banshee passe une main sur ses yeux, essuyant les quelques larmes de rage qui ont eu l'audace de couler. Fasciné, je la regarde utiliser la manche de son haut pour camoufler les dégâts. Je ne connais que trop bien ces larmes. Je les ai très souvent vues. Je crois que j'en ai moi-même versé, à une époque. Mais impossible de me souvenir de quand, exactement. C'était il y a trop longtemps, sans doute. Secouant la tête pour me concentrer sur autre-chose, je simule une grimace inquiète quand son regard se pose de nouveau sur moi.

— Peut-être qu'elle parle de conflits mineurs ? Style conflit interne, conflit de famille peut-être ? Entre Lucifer et Michael, ou une sorte de payment de Ramiel contre nous pour avoir laissé sa sœur mourir ?, je propose.

Mais dans ma tête, j'ai presque envie de gifler cette Uriel. Pourquoi ne pas directement avouer que Thomas est possédé, tant qu'elle y est ? Non mais sérieusement ! C'est la dernière fois que j'envoie quiconque la voir, si c'est pour qu'elle bousille le plan avant même qu'il ne naisse... Je ne peux laisser personne marcher sur mon terrain. Samantha hausse les épaules, peu convaincue par mes théories. La jeune femme roule des yeux.

— Je n'en sais rien. J'ai juste l'impression que depuis que je suis allée la voir, plus rien ne va. D'abord Aoile qui essaye de te forcer à prendre une décision, puis Milo qui refuse d'utiliser ses pouvoirs de Banshee parce qu'il a peur de ce qu'il entend... Je ne maitrise plus rien. Comme si j'étais de retour à l'internat. Et ça me bouffe de l'intérieur, soupire la jeune femme, passant une main dans ses cheveux.

Je fronce les sourcils. Autant son embrouille avec Aoile m'arrange, autant le fait que Milo fasse partie de l'équation m'ennuie... Ce gamin n'a rien fait, je n'aimerais pas le voir payer pour rien. Je vais devoir trouver un moyen de l'écarter du puzzle, tant que je le peux encore. Sans doute en utilisant ça ! S'il refuse d'utiliser ses pouvoirs de Banshee, peut-être que je pourrais m'en mêler ? Le manipuler, pour qu'il s'ouvre de nouveau à Samantha et les faire quitter l'échiquier ? C'est encore faisable... Pour le moment.

— Tu veux que je lui parles ? À Milo ?, je propose.

La jeune femme secoue la tête d'un air décidé. Je retiens un cri de rage. Mais va-t-elle me faire confiance à la fin ? Ou est-ce qu'elle compte m'écarter de tout le monde ? C'est rageant ! Pourquoi est-ce qu'elle est plus dure à convaincre qu'Aoile ? Ou alors, c'est sa fichue fierté personnelle qui la bloque, mais ça ne rend mes efforts que plus ridicules ! Quand est-ce qu'elle acceptera d'être aidée ?

— Non. C'est à moi de le faire. Je suis la seule qui puisse le comprendre, en ce moment. Si tu t'en souviens bien, il n'est pas le seul à avoir eu peur des petites voix, au départ, dit-elle avec un semblant d'humour.

Je fais sembler de rire doucement, incapable comprendre le sous-entendu. Il va falloir que j'ai une sérieuse discussion avec Thomas, sinon je risque de me faire griller avec ce genre de blague sous-entendue débile ! Puis, je m'avance pour la prendre dans mes bras, comme Aoile l'a fait pour moi. J'ai l'impression que ça marche, entre eux. Comme un signe de "je te fais confiance et te respecte". Si ça peut marcher avec Samantha... Je ne dis pas non.

Après quelques secondes de paralysie soudaine, Samantha semble réaliser  ce qui se passe. La jeune femme répond au câlin et referme doucement ses bras dans mon dos. Elle semble détendue et sans arrière-pensée, ce qui me fait sourire sournoisement. Encore une qui est tombée dans le panneau... C'est presque trop simple ! Mon sourire s'agrandit lorsqu'elle murmure un "merci" au creux de mon oreille. Oh Sam'... Si elle savait... Elle n'est même pas encore au bout de ses malheurs.

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Salut !
Comment ça va ?
De mon côté.... Ça va x)
#Fatigue

Je crois que Colère-Thomas a vu tout le monde 🤔. Donc on va rentrer dans les détails du plan maintenant. Si vous pensiez que tout irait mieux maintenant.... 😂😂Vous êtes naïf. C'est MOI qui écrit voyons ! Et puis il ne faudrait pas finir le roman en 2 chapitres non plus !

Plus que deux petites parties avant la fin de cette saga. C'est une certaine émotion, tout de même. Même si la saga s'essouffle clairement et moi avec, je suis tout de même triste de quitter cet univers et ces personnages, après trois ans passés ensemble. Samantha, Thomas et Aoile m'auront porté pendant ma licence 🧡

Mais il y a tellement de belles choses à venir... 😉😜 Vous ne perdez rien !
Pour ceux qui sont aussi sur Facebook (Claire Chave -Auteure), n'hésitez pas à rejoindre ma page pour être tenus au courant de la sortie des futurs projets !
Pour les autres, j'annoncerai tout ça sur mon profil & dans les mots de fin de chapitre, évidemment 🧡

Gros bisous et à samedi !
Kisses,
Claire 😜💪

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