Chapitre XII

Un déchirement. C'est ce que je ressens à cet instant précis. Chaque respiration est douloureuse et provoque son lot de larmes. Mon cœur continue de pomper malgré la douleur qui s'infiltre pernicieusement dans toutes les veines de mon corps. Sa tête repose dans mes mains ensanglantées. Son sang de répands presque plus sur mes mains que sur le sol et je n'ai plus assez de force pour bouger. Son cœur que je croyais en ma possession, s'est arrêté aujourd'hui, quelques minutes plus tôt. Une balle, tirée d'un mousquet, l'a atteint en pleine tête. Il gît sur mes genoux, brisant mes rêves d'amour et de liberté. À présent, c'est mon tour et je bouge à peine tandis que la balle explose mon cœur fragilisé.

Je ne sais pas ce que j'ai ouverts en premier : la bouche ou les yeux ? J'aspire quasiment tout l'air de la pièce avant de comprendre que je suis vivante et que personne ne m'a tiré dessus. Ces rêves sont si réels... C'est une torture à vivre. Chaque émotion, chaque sentiment, chaque pensé de la personne concernée occupe ma tête. Nos visages se mélangent jusqu'à ce que je devienne celle dont je rêve, brisant la fine ligne entre la normalité et la folie.

— Encore un ? M'interpelle Aoile, assise sur son lit.

Je me redresse lentement, décollant mon dos des draps trempés par autant de larmes que de sueur, pour fixer la jeune femme. Ses yeux regardent le plafond, une main passée sous sa tête. Comme si elle savait que je la fixe, elle se tourne vers moi et me dévisage​. Je hoche la tête de manière affirmative pour répondre à sa question. Oui, encore un cauchemar qui ruine ma nuit dans un hôtel thaïlandais miteux. Aoile continue de me fixer, visiblement intéressée par le contenu dudit rêve.

— Je me suis pris une balle en plein cœur, après avoir vu mourir mon amant. C'est grave docteur ? J'ironise, fatiguée.

Le petit poste radio de l'hôtel indique qu'il est trois heures vingt du matin, soit sept heures après notre départ de la grotte. Je suis censée y retourner avec Aoile dans deux heures et quarante minutes. Quelque chose me dit que je ne vais pas me rendormir de suite. Fichu cauchemar briseur de nuit ! Un soupir sort de ma bouche tandis que j'analyse mon cauchemar. Au moins, contrairement à un rêve classique, je peux presque le mettre sur pause et faire une analyse image après image pour en comprendre le sens. S'il y a un sens, bien sûr. Je passe une main dans ma tignasse de cheveux courts, mais épais et je rage contre les quelques nœuds qui ont le malheur de s'y trouver.

— Sam, arrête de prétendre que tu vas bien. En l'espace d'une petite semaine, tu as appris que tu es la dernière Banshee connue, que tes proches te croient morte et tu es venue jusqu'en Thaïlande pour rencontrer un vieux détraqué. À ta place j'aurai pété les plombs, s'insurge Aoile.

Une grimace déforme le bas de mon visage en essayant d'imaginer Aoile péter un plomb. Cela impliquerait sûrement des coups de poings, des injures et pas mal de bleus. Je ne suis pas vraiment sûre de vouloir voir Aoile péter un plomb en fait. Je pourrais être blessée ou même finir avec des blessures étranges. Définitivement, c'est un non.

— Je ne suis pas sûre d'avoir totalement réalisé les conséquences de tout ça. En même temps, si vous m'en disiez plus..., je me moque gentiment.

Aoile soupire et retourne à sa contemplation du plafond.

— Je sais que dans les films, quand tu caches des choses aux héros pour les protéger, c'est ce qui les mène vers la mort. Mais crois-moi Sam. On est pas dans un film, nous ne sommes pas des héros et la mort, tu vas la côtoyer plus souvent que tu le crois, soupire la blonde.

Je me laisse retomber sur l'oreiller suite à ces révélations. Quelque part, elle avait peut-être raison : toute la vérité ne me plairait pas. Mais comment en être sûre tant que je ne sais pas tout ? Ce genre de dilemme philosophique me donne un mal de crâne... Je laisse échapper un grognement avant de replacer correctement mes couvertures et fermer les yeux. Même en essayant de penser à de jolies choses, je pouvais me retrouver à rêver de mes profs de lycée.

— Si je m'endors, je vais rêver d'eux. Est-ce qu'on peut aller à la grotte maintenant ? Je suis sûre qu'Archibald est réveillé. Et ce n'est pas un vieux détraqué, je m'insurge soudainement face à ce jugement.

Aoile sort du lit comme si elle ne s'était pas assoupie une seule seconde et attache ses cheveux en queue de cheval. L'espace de dix minutes, elle disparaît dans la salle de bain attenante à la chambre tandis que je tente mollement de regrouper mes cheveux autour de mon visage. Alors que je parviens enfin à poser un pied sur le sol gelé de l'hôtel, Aoile sort de la salle de bain. Habillée d'un slim de sport noir et d'un top de la même couleur sous une veste légère grise accordée à ses baskets, la blonde m'accorde un œil peut attentif. Je me frotte les yeux et me traîne comme une âme en peine vers la salle de bain afin de me vider la tête sous l'eau chaude. Quinze minutes et un hurlement plus tard à cause de l'eau gelée de la douche, nous voilà toutes les deux en route vers la grotte. J'ai pris le temps d'enfiler un vieux jean gris, des bottines noires et un sweat de même couleur, deux tailles trop grands. D'après Archibald, cette journée est réservée à l'apprentissage mental de mon don. En gros, un gros cours d'histoire accélérée sur les Banshee et leurs pouvoirs. Mes cheveux emmêlés sont balayés par le vent frais.

— Ça gèle, je me plains.

Aoile soupire si faiblement que j'ai failli ne pas l'entendre. D'un coup, je ressens une faible chaleur et quelque chose de doux effleurer mon visage. Je sursaute avant de chercher la source autour de moi, forçant Aoile à s'arrêter. Comme prise dans un étau de chaleur, je ne ressens plus le vent froid sur mes joues rougies, ni dans mes cheveux. Je place ma main vers ce que je pense être la source de chaleur mais ne sent rien. Rien d'autre que le vent frais qui passe à travers mes doigts, me forçant presque à retirer ma main. Je bouge mes mains un peu partout autour de moi, cherchant cette fichue source, mais ne trouve rien. Aoile me dévisage ne pouvant pas comprendre ma situation. On est arrêté depuis quelques minutes et elle me regarde m'activer depuis tout ce temps. Sous son regard inquisiteur, je continue mes recherches.

— Qu'est-ce qui t'arrives ? La grotte est encore à dix minutes ! Tu ne vas pas t'arrêter toutes les dix secondes ? Grimace la blonde à mes côtés.

Je souffle doucement, mais je ne vois pas l'air qui sort de mes poumons, comme lorsqu'il fait vraiment froid. Aoile grimace et frissonne, me faisant comprendre que je suis la seule à bénéficier de cet étau. Alors j'arrête de chercher et me remet en route, sentant toujours cette chaleur autour de moi. Et avec le fait que j'ai cherché, j'ai encore plus chaud, ce qui doit avoir fait rougir mes joues.

— J'avais froid. Et maintenant, j'ai plus froid. Est-ce que le temps m'obéis aussi ou c'est juste une illusion de mon cerveau fatigué ? Je questionne, intriguée.

Aoile lève les yeux au ciel et m'attrape le bras, me forçant à marcher plus vite sur les dix minutes de marché que nous avions à faire. Nous trouvons sans grande peine l'escalier caché par la roche et je descends en première, comme toujours. À peine arrivée en bas de l'escalier, Archibald sort de l'ombre avec un grand sourire.

— Miss Green, je ne vous attendais pas si tôt ! S'exclame-t-il, visiblement heureux d'avoir de la compagnie.

Aoile, descendue après moi, dévisage en silence le vieil homme comme s'il était une menace à éliminer. Je soupire devant son comportement et souris à Archibald, qui regarde Aoile à son tour. Visiblement, Aoile ne semble pas très à l'aise avec Archibald mais ne tente rien à son encontre. Je soupire et m'approche du vieil homme.

— Excusez-là, elle..., je commence, avant qu'Aoile ne me coupe froidement la parole.

— Si je veux m'excuser, je le fais Sam, me réprimande-t-elle, glaçant mon sang dans les veines.

Un duel de regard commence entre nous, mais j'y mets fin rapidement, sachant pertinemment que j'aurai de toute manière, perdu. Visiblement, j'ai dit quelque chose de mal et elle m'en veut. Je ne cherche pas non plus à savoir quoi, puisque sa réponse consisterait en un « regard qui tue » et rien d'autre. Autant ne pas me tirer une balle dans le pied et ranger ma question avec le reste, quelque part dans mon cerveau désorganisé. Archibald sourit à Aoile avant de reporter son attention sur moi.

— Enfin Samantha, je ne vois pas pourquoi elle s'excuserait de faire son travail ! C'est une protectrice, elle veille à ce qu'il ne vous arrive rien... Venez avec moi, je vous expliquerai.

Je m'avance vers lui sans crainte, tandis qu'Aoile reste bien figée. C'est étrange. Elle n'est pas censée me protéger de tout ? Et cela n'inclut pas de me suivre partout également ? Je lui fais part de mon idée, mais peut-être que je n'aurai pas dû. Elle me fusille du regard, me donnant presque envie de me faire ensevelir sous un gros tas de romans.

— Je ne suis pas ton chien Sam, crache-t-elle avant de se diriger vers un autre endroit de la grotte, plus à gauche.

Interdite devant cette démonstration de violence, je ne sais plus quoi faire : suivre Archibald et avoir ce fichu cours, ou rattraper Aoile pour m'excuser ? Quelque part, je lui en veux un peu aussi : si elle me faisait part de ce qu'elle savait, je ne poserais pas des questions déplacées. Je soupire avant de tourner les talons et suivre le vieil homme qui s'engage dans un couloir un peu étroit. Aoile se calmera seule, comme toujours.

____________________________________

Hello !Un petit chapitre avec Sam et Aoile ^^ On aime hein ? :P Pauvre Sam, elle ne comprend plus du tout Aoile... Qu'est-ce qui se passe ?


J'avoue que je m'inspire pas mal de ma vie pour ces chapitres 😂 ! J'ai déjà vécu (trop de fois) la situation suivante : à table, avec mes parents, je pose une question et pour eux, c'est la question la plus débile du monde, que je l'ai posée exprès pour me faire engueuler et que je vaux mieux que ça. Alors qu'en fait.... Je me posais VRAIMENT la question ! xD Je suis la seule ?Sinon, le cours de Samantha dans le prochain chapitre : ça risque d'être un peu "chiant" parce que l'action sera en fin de chapitre ^^ Mais si vous voulez en savoir plus sur les Banshee... La semaine prochaine, notez dans vos agendas ! 😂


Aussi, le passage où elle a subitement chaud... Magie ou pas ? Aoile y est pour quelque chose ? Ahaha... ^^Aoile dans ce chapitre : une vraie saleté ! En même temps, je suis d'accord avec elle xD Elle n'est pas le chien de Sam ! Après, pourquoi est-ce qu'elle dévisage Archibald ? Ce n'est pas de la méfiance, sinon en effet elle aurait suivi Sam. Alors quoi ? 💙Postez vos théories, comme toujours j'y répondrai avec plaisir 💙

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top