Chapitre 8 - Magie et Pantalon
Dans le chapitre précédent :
Soudain, je sentis comme une force se propageant en moi. Je me figeai un instant avant de réveiller mes sens en alerte. De la magie. Les vieilles femmes nous avaient prévenus qu'on pourrait sentir la magie. Et en ce moment, je sentais cet arôme magique en provenance de l'immense château.
Le château était rempli de magie. De cela, j'en étais convaincue. Mais ces hommes étaient-ils des sorciers utilisant de la magie ou étaient-ils eux mêmes composés de magie comme des créatures fantastiques ?
J'espérai sincèrement qu'ils étaient de simples mages usant de pouvoirs sinon ce mariage était une très mauvaise décision de ma part. Une décision qui coûterait à mon vrai frère.
Les inquiétudes en tête, je m'approchai de ce château qui serait ma prison pour un temps.
***
Soudain, les chevaux s'arrêtèrent devant un pont. Les hommes descendirent un à un de leurs montures. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Mon mari descendit aussi. Une fois sur la terre ferme, il me prit par la taille et me souleva avec aisance. Je lâchai un petit cri de surprise et m'agrippai à ses épaules. Je ne m'y ferais pas avant quelque temps. Il me déposa à terre et avança en me prenant la main. Je dus le suivre. Ses grands pas ne me facilitaient pas la marche. Aussi dus-je presque courir pour être à son niveau.
« Adonis ? » l'appelai-je, un peu essoufflée. « Adonis ! »
Je criai en tirant sur sa main de toutes mes forces. Il daigna enfin s'arrêter et se retourna vers moi. Sous son masque, je ne pouvais pas voir son expression, mais j'étais sûr qu'il était en colère.
Moi aussi, je l'étais.
« Je peux marcher toute seule sans que vous me teniez la main, » déclarai-je d'une voix claire.
Je pense que la surprise le fit relâcher sa poigne. Je me blottis contre mon manteau de fourrure et avançai. Seule cette fois-ci. Je pus admirer le paysage. Les remparts étaient de plus en plus grands. Un pont-levis s'ouvrit et se déposa lourdement sur la douve. J'attendis que le pont s'affaisse complètement en le regardant avec émerveillement. Comme dans un film, les grosses chaînes sur le côté abaissèrent le pont-levis.
L'excitation tout comme la peur me gagnaient. Je pouvais ressentir la magie qui entourait l'immense château. Une magie féroce. Je craignais de tomber dans les pommes en traversant le pont-levis. La première partie où la magie me toucherait à coup sûr. Néanmoins, j'avançai à pas mesuré jusqu'à ce que la décharge de force magique m'enveloppe. J'avais l'impression d'être plus forte, tout comme une impression de sécurité. Avec une telle force, je n'aurais pas été surprise que le château puisse se mouvoir. Comme un château ambulant...
Des gardes étaient postés tout le long du chemin de pierre. Cependant, ils n'étaient pas en armure comme l'étaient nos chevaliers. Ils ne portaient que des vêtements en maille sur eux. Lourdes et grises. Et, ils me fixaient avec des regards perçants qui me mettaient mal à l'aise. Après avoir traversé ce pont et surtout échappé aux yeux de ces hommes, j'arrivai sur une petite cour intérieure. Des charrettes remplies de foins logeaient dans les coins. Je restai là à scruter les environs. Certaines personnes travaillaient et me lançaient des regards curieux, mais tout aussi intenses et déstabilisants. Les habitants de ce château semblaient avoir autant de pouvoir et de charisme que les gardes. Je ne savais pas si c'était la fameuse magie qui les rendait ainsi, ou si c'était mon imagination qui s'amusait avec mes émotions.
Alors que je restais sur place, les hommes qui nous accompagnaient me dépassèrent sans même me regarder. Claire me rejoignit et resta accrochée à mon bras comme s'il était une bouée de sauvetage. Ses yeux ne montraient que panique. Elle avait sûrement dû avoir peur quand Adonis m'avait emmené de force en la laissant seule avec que des hommes.
Je soupirai et attendis qu'Adonis arrive pour le suivre. Il ne manquerait plus que je me perde à travers les dédales de cet immense château. J'avais déjà mis du temps à me situer dans mon ancien logis. Cette demeure semblait beaucoup plus grande. Et sombre.
L'atmosphère qui y dégageait quand on passait les portes n'était pas accueillante. Au contraire, une majorité d'hommes. Claire et moi étions les seules femmes dans la salle du trône qui était similaire à la nôtre sauf qu'il n'y avait qu'un immense trône en haut des marches. Les colonnes de marbre supportaient la salle, tandis que les vitres laissaient passer les derniers rayons du soleil couchant. Les torches accrochées aux colonnes blanches avaient déjà été allumées. Lorsque nous marchions au milieu de la salle pour rejoindre le trône, des gardes en ligne s'inclinèrent.
Le Roi ne me regardait même pas et me dépassa. Je l'avais vexé, j'en étais sûre. Je ris, puis essayai de m'arrêter quand je vis tous les regards converger vers moi. Je me mordis la joue et avançai en attendant de savoir quoi faire. Je voulais aller dans ma chambre et prendre une bonne douche.
Quand j'ouvris la bouche pour lui demander où je pouvais me reposer, une jeune femme entra dans la salle. Je la fixai tandis qu'elle avança vers moi. Elle était d'une beauté éblouissante. Ses longs cheveux noirs étaient attachés en queue de cheval mettant en avant son visage fin. Malgré sa beauté apparente, elle croisait les bras sur sa poitrine, et me toisait de ses yeux sombres. Et elle portait un pantalon. J'étais si étonnée que je fixais son bas au lieu de ses yeux. J'aurais tellement voulu en porter. Mais si elle en avait, cela voulait dire que je pouvais aussi mettre un pantalon en toile comme elle pour me promener dans le château. Leur coutume me plaisait bien.
Quand je relevais la tête, je déglutis face à cette femme qui ne me semblait pas très amicale. Néanmoins, j'essayai de sourire en cachant ma nervosité.
« J'espère que vous avez fait un bon séjour, ma Dame. Je m'appelle Adélaïde et je suppose que vous voulez vous reposer dans votre chambre, annonça-t-elle sans un regard pour Claire.
– Oui, je... »
Elle commença à partir avant même que je finisse ma phrase. Je regardai mon mari, mais il avait le visage détourné vers un homme habillé en vert pomme de haut en bas avec qui il parlait avec entrain. La seule personne avec autant de couleur gaie dans la salle. Je soupirai puis courus pour rejoindre Adélaïde. Claire me suivit de près. Nous réussîmes à la rattraper au bout d'un couloir. Nous passâmes plusieurs portes, plusieurs couloirs, avant de nous arrêter devant une porte en bois. Elle l'ouvrit et nous laissa entrer. Une fois à l'intérieur, j'entendis la porte se refermer.
Je soupirai et observai la chambre. Elle était spacieuse pour une simple personne, comme mon ancienne chambre. Un lit en baldaquin trônait sur un côté tandis qu'une baignoire avec un éventail reposait d'un autre côté. Je vis que mes affaires étaient déjà parvenues jusqu'ici comme celle de Claire.
« Je vais prendre ma douche, Claire.
– Bien ma Dame... La femme portait un bas comme un homme, ne trouvez-vous pas cela étrange ?
– J'aimerais tellement porter cela. Son pantalon doit être si confortable, tu ne penses pas ? lui demandai-je en souriant.
– Je ne crois pas, déclara-t-elle en plissant le nez avec dégoût. Que va-t-il se passer maintenant ?
– Je ne sais pas, mais tu ne pourras pas éternellement rester avec moi. Je suis mariée, et je devrais rester dans la couche de mon mari, Claire. En plus, Amédé semble t'intéresser.
– Q-quoi ? Non ! Il est..., bredouilla la jeune femme en rougissant.
– Allons, il est bel homme.
– Il est l'ennemi.
– Plus maintenant. Nous sommes alliés. »
Elle ne trouva rien à y redire et se contenta de hocher la tête.
« Il faut que tu restes près d'Amédé. Il te protègera du danger, retentai-je de lui expliquer.
– Non ! Pourquoi resterais-je avec cet homme ?
– Je ne serais pas toujours présente derrière toi, Claire. Amédé semble être intéressé par toi et pour l'instant il n'a pas essayé de te violer à ce que je sache. Il a été assez attentionné même.
– Mais c'est vous qui m'avez amené ici ! C'est vous qui m'y avez obligé ! »
Des larmes de colères envahirent ses joues. Je voulus la consoler, mais elle s'en alla en claquant la porte. Je la rouvris pour m'élancer à sa poursuite, mais je fus surprise de croiser le regard du messager au bout du couloir. Il me fixa avec ses yeux gris. Intenses.
« Si vous lui faites du mal, je vous tuerai, » chuchotai-je, menaçante.
Il était pourtant à une dizaine de mètres de moi, mais je savais qu'il m'avait entendu quand il hocha la tête. Il n'était pas humain. Ma certitude était confirmée. Mais qu'était-il alors ? Je devais apprendre d'abord leur coutume avant de leur poser des questions. Ces êtres devaient m'accepter pour que leurs langues se délient en ma présence.
Je retournai dans la chambre et fermai la porte. Je défie les sacs posés au pied du lit et pris une robe de couleur bleue. De l'eau fumante stagnait dans la baignoire. Je me déshabillai de suite et rentrai doucement dans la grande bassine. Le doux liquide transparent détendit mes muscles endoloris par la chevauchée de plusieurs jours. Je me lavai puis sortis de la baignoire avec regret. Je pris un tissu pour m'essuyer et commençai à me rhabiller. J'enfilai une robe fine qui faisait office de sous-vêtements puis sortis un corset, mais hésitai à le mettre. La nuit était déjà tombée dehors. Je ne savais pas si un dîner était prévu ou pas. Personne ne m'avait informé de la suite des événements.
Soudain, la porte s'ouvrit. Je me retournai pour voir qui était entré. Adonis. Il portait toujours son masque, ce qui ne me permit pas de voir son expression. J'espérai qu'il puisse enfin l'enlever étant donné qu'on était seul. Mais il ne fit rien. Au contraire, il regarda mon corps.
La longue robe blanche était près du corps, et montrait sans discrétion ma féminité. Je roulai des yeux et sortis mes autres robes.
Adonis attendit en croisant les bras. Je mis la robe bleue par-dessus la blanche puis me brossai les cheveux.
« Un mariage selon nos coutumes aura lieu demain devant la Grande Prêtresse.
– Est-ce vraiment nécessaire ? Nous sommes déjà mariés.
– Selon vos croyances. Mais je ne me considère pas marié tant que nos Dieux n'auront pas approuvé notre union.
– Très bien, soufflai-je en optant pour un chignon rapide.
– À partir de demain, l'autre femme logera dans cette chambre tandis que vous partagerez ma couche, » déclara-t-il d'un ton décisif.
C'était seulement la première étape afin de m'intégrer à leur culture différente de celle d'Alexandre. Ce n'était qu'un mariage. Rien de plus. Je hochai la tête à son ordre. Il m'indiqua ensuite que le dîner serait amené dans cette chambre, et que je devais me reposer. Il me regarda longuement avant d'ouvrir la porte. Je fis de même ne sachant que faire.
« Dormez bien. »
J'avais l'impression d'avoir imaginé ses dernières paroles tellement elles étaient chuchotées. Il semblait si distant avec moi que c'était décevant et frustrant. Peu de temps après, Adélaïde vint me porter le dîner sur un plateau. Du pain, de la viande et de l'eau. Je ne me plaignis pas, ne souhaitant pas manger à outrance puis allai me coucher rapidement. Dans mes songes, je repensai à ma première rencontre avec Adonis. Un sourire naquit au creux de ma bouche. Je me laissai aller à ce doux souvenir, jusqu'à ce que je sois aspirée dans un tourbillon blanc m'emmener dans une bâtisse inconnue.
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