Chapitre 15 - Froideur et Jalousies

Dans le chapitre précédent :

« Je prends soin d'elle, je... tenta-t-il de se justifier.

– Vous n'êtes pas humains. »

Un silence. Une minute puis deux où ils se fixèrent sans un mot.

« Vous communiquez par la pensée. »

Je réfléchis à vive allure. Pouvaient-ils être des loups-garous ? Ou des dragons ? En tous cas, un peuple qui vivait en meute et reclus. Leurs grognements faisaient penser à des animaux... Peut-être des ours ? Ou était-ce comme dans la Belle et la Bête où une malédiction les avait condamnés à être des objets, ici ils seraient condamnés à être des humains alors qu'ils ne l'étaient pas ?

« Comment as-tu deviné ? demanda Adonis.

– Je peux sentir la magie, révélai-je avec hésitation. Et ce château en est rempli. J'ai su que vous étiez différent.

– Et que sommes-nous ?

– Je ne sais pas. Qu'êtes-vous ? »

***

Les deux hommes restèrent silencieux face à ma question. Je soupirai quand ils se fixèrent encore dans les yeux. Ils n'allaient rien m'avouer. Pas maintenant en tous cas.

« Ce n'est pas grave, j'attendrais. Est-ce que je peux voir Claire ?

– Elle est avec les autres femmes dans la chambre d'Emeline, nous informa Amédé en levant un sourcil.

– Je veux juste revoir mon amie, » me justifiai-je.

Je m'étais mis Amédé à dos. Et c'était bien normal après mon désaccord sur son envie de mariage avec Claire. Mais je ne pouvais pas accepter sachant qu'un lien magique se formait entre les mariés. Un lien dont je ne saisissais pas l'ampleur. Une discussion sérieuse s'imposait avec Adonis, mais pour l'instant, Claire était ma priorité et c'était l'occasion de parler avec cette Emeline.

Adonis ordonna à son cousin de s'en aller à des occupations tandis qu'il m'accompagnerait jusqu'à la chambre de son ancienne maîtresse. Avec regret, Amédé partit en me lançant un dernier regard presque menaçant. Je l'ignorai et suivis mon mari qui marchait vite. Nous traversâmes divers couloirs et portes pour nous retrouver dehors suspendus sur un pont de cinquante mètres. Je m'arrêtai un instant admirant les rayons du soleil jouant avec les couleurs de la forêt. Celle-ci semblait si vivante, comme si son âme était enchantée d'être couvée par le grand astre flamboyant.

Adonis m'appela pour rentrer à l'intérieur. Les bourrasques de vent me fouettaient le visage tout en valsant avec mes cheveux blonds. Je trottinai jusqu'à mon mari puis les gardes refermèrent la lourde porte coupant l'air frais. Nous marchâmes encore quelques minutes avant d'entendre des rires cristallins.

Soudain, Adonis s'arrêta au bout du couloir d'où les gloussements sortaient. Je le regardai avec interrogation en penchant la tête tandis qu'il m'intima de m'y rendre seule. Il me prévint, avant de partir, que s'il y avait un problème, je n'avais qu'à penser à lui pour qu'il arrive. Je ne posais aucune question sur le comment il pourrait m'entendre par la pensée, et hochai la tête.

Je me rendis vers la chambre à la porte entrouverte. Le coeur battant plus vite, je passai ma langue sur mes lèvres asséchées. Le fait de rencontrer de nouvelles personnes me fit stresser. Je ne savais pas comment me comporter, ni si elles allaient m'accepter ou me rejeter avec dédain. Si ces femmes étaient du côté d'Emeline, je n'aurais pour l'instant aucune chance de les amadouer pour me faire respecter.

Je levai la main pour toquer, mais la porte s'ouvrit sur une femme blonde d'une beauté éblouissante. Surprise, je la regardai puis fit un sourire.

« Je suis désolée de vous déranger, on m'a dit que Claire était ici, » dis-je avec douceur à Emeline.

Celle-ci hocha la tête avant d'appeler le nom de mon amie. Je vis le sourire étincelant de la jeune femme. Elle sortit de la pièce, puis nous marchâmes à l'écart de la chambre.

« Cela fait longtemps Claire... Comment vas-tu ? demandai-je pitoyablement.

– Bien, ma Dame. Je vais beaucoup mieux qu'à mon arrivée. Amédé m'aide beaucoup.

– Concernant Amédé, j'ai appris qu'il voulait t'épouser ? Est-ce vrai ?

– Oui, dit-elle en rougissant tout en triturant ses doigts fins.

– Mais en es-tu sûre ? » appuyai-je mes mots en m'approchant d'elle.

Celle-ci releva les yeux en me regardant comme jamais elle n'avait osé jusque maintenant. Elle avait toujours été d'une timidité maladive. Surtout avec les hommes qu'elle ignorait. Mais avec les femmes aussi, elle se faisait toute petite, et ne parlait presque jamais, écoutant seulement les ragots des autres femmes en secouant la tête de temps à autre. Je fus surprise par ce regard déterminé ainsi que cette voix décisive.

« Mais vous venez à peine de vous rencontrer... Tu devrais y réfléchir un peu... tentai-je de la raisonner, mais l'effet inverse se produisit.

– Non, je sais que c'est lui et lui seul. Je l'aime et je l'épouserai. Si vous pouviez savoir à quel point ! À chaque fois que je le vois, mon coeur tambourine, à chaque fois qu'il sourit, je me sens réchauffée de l'intérieur, à chaque fois qu'il me touche, je... »

Embarrassée, la jeune amoureuse se mordit la lèvre pour éviter d'en dire davantage. Mais ses joues roses et son regard fuyant en disaient long. Je grimaçai un sourire, mais j'étais jalouse. Jalouse qu'elle éprouve tout cela avec un homme avec qui elle n'était pas mariée, alors que je n'arrivais pas à passer plus de deux heures dans la même pièce que mon mari. J'étais si envieuse que je peinais à retenir les larmes.

Je m'éclaircis la gorge et dit à Claire que nous pourrions rentrer dans la chambre. La jeune femme hocha de la tête avant de se retourner. Je la suivis docilement. Je ne pouvais pas la faire changer d'avis, elle était amoureuse, mais je pouvais retarder ce mariage et c'était ce que je comptais faire. De toute façon, avec la missive reçue quelques minutes plus tôt, l'événement ne sera pas fêté dans les jours qui suivent. J'avais le temps de trouver la véritable nature de ces créatures.

Je rentrai dans la chambre remplie d'une luxure débordante. De l'or étincelait partout, sur la coiffeuse, les boîtes de bijoux, la table et les chaises d'un marbre blanc. J'étais impressionnée par cet étalage de richesse.

« Ma Dame ? »

Mon regard revint sur les femmes assises en tailleur ou allongées sur un tapis confortable cachant une partie du sol. Claire s'était déjà installée auprès de ses trois nouvelles amies. Mon coeur se comprima dans ma poitrine. Quand je pensais à ses rires mélodieux avant que je n'arrive et à son attitude quand j'étais seule avec elle, j'avais l'impression qu'elle m'avait déjà remplacée. J'étais devenue l'étrangère avec qui elle ne savait pas comment parler.

Emeline m'invita à m'assoir avec les femmes tandis qu'elle fit de même. Elles recommencèrent à parler quand Emeline fit un hochement de tête. Mais ce n'était plus aussi joyeux qu'avant mon arrivée. Je les écoutais distraitement. Elles discutaient de la grossesse d'une femme avec enthousiasme en espérant cette fois-ci qu'elle ne ferait pas une fausse couche. Puis elles enchaînèrent avec la chasse moins fructueuse, la saison des glaces arrivant sous peu de temps.

Je ne savais pas comment ils jugeaient les heures, minutes et secondes. J'avais remarqué, dans mon ancienne demeure médiévale, que le jour et la nuit étaient séparés avec un compte de douze heures chacun. Ainsi, la journée contenait douze heures jusqu'au coucher du soleil, puis vint la nuit de douze heures jusqu'au levé de l'astre. Entre ces heures-ci, l'église sonnait les cloches en fonction des prières. Je n'avais pas tout compris n'osant pas demander pour une chose aussi basique, je m'étais simplement fait un cadran solaire à l'aide d'un bâton planté au sol et avait estimé les heures.

Heureusement que mon père était un aventurier qui nous emmenait souvent en randonnée avec seulement le strict nécessaire pour que nous nous débrouillions seuls, Onyx et moi. Certaines excursions dans les bois étaient plus épuisantes que d'autres, mais elles nous apprenaient à aimer les bruits de la nature tout en étant ensemble. En famille.

« Ambre, tout va bien ? demanda Emeline, en me fixant de ses magnifiques yeux bleus.

– Oui, j'étais dans mes pensées... Je voulais m'excuser pour ce que je vous ai dit hier. C'était déplacé. Un acte d'humiliation gratuite, mais comprenez-moi. Vous couchiez avec mon mari. »

Mes excuses et ma justification avaient laissé les femmes dans un silence étonné. Emeline les yeux grands ouverts se reprit rapidement avant de me regarder avec un regard impénétrable. Nous nous fixâmes ainsi pendant des interminables secondes. Elle baissa enfin son regard avec un soupir discret.

« Notre Roi est un homme bon et généreux. Il est très respecté parmi les nôtres et sait se montrer fort pour nous. Il est un fier combattant qui tue avec bravoure et acharnement. Ce que vous avez fait avec Adélaïde était bien, mais pas assez pour être à sa hauteur, envoya-t-elle en redressant son dos.

– Vous semblez bien aimer votre Roi, mais que vous le vouliez ou non, il est à moi. C'est avec moi qu'il s'est marié même s'il pensait que je n'avais pas d'aptitude au combat. C'est avec moi qu'il passe ses nuits maintenant, » sifflai-je les poings fermés, en colère par ce revirement de situation.

Je pouvais voir ses veines du cou ressortirent tellement elle était vexée par mes paroles, mais elle se contrôlait. Tout comme moi. J'avais voulu être amicale, mais ce n'était apparemment pas la bonne méthode. Avec son discours, elle avait rajouté de l'huile sur le feu brûlant. Elle semblait avoir des sentiments amoureux à l'égard d'Adonis, mais il était maintenant à moi, et elle n'avait pas intérêt à me le prendre.

Soudain, elle ferma les yeux pour se calmer, ce qui marcha. Elle les rouvrit puis fit un doux sourire narquois.

« Je l'ai vu sans son masque, plus d'une fois. Il l'enlève quand je le lui demande, » chantonna-t-elle.

Telle une furie, je bondis sur cette femme en lâchant un cri. Mais plusieurs bras me retinrent. J'essayai de me dégager, mais la prise sur mon corps se serra. Au bout d'un moment, je me calmai en prenant de longues respirations. On me relâcha avec prudence puis je sortis sans un regard en arrière. Les paroles d'Emeline avaient su me toucher en plein coeur.

Des larmes de rages s'écoulaient alors que je marchais en tapant des pieds. Pour qui elle se prenait ?! Elle a juste couché avec lui avant, plus maintenant. Ils n'étaient plus ensemble. Et, lui. Lui avait enlevé son masque en sa présence. Je lâchai un cri en me rendant compte que je tournais en rond.

Épuisée, je m'assis au sol et contemplai le mur en pierre devant moi. Je restai je ne sais combien de temps à ne rien faire. Seules des pensées meurtrières passaient en mon esprit. Contre Emeline et contre Adonis. L'aimait-il aussi ?

Je reniflai bruyamment en essuyant mes larmes. J'avais l'impression d'être seule. Vraiment seule. Claire et Amédé étaient contre moi, Adélaïde préférait se battre que me tenir compagnie, Adonis avait des obligations de Roi, et voilà qu'Emeline me met en rogne et mettait les autres femmes présentes en ligue contre moi.

Prise d'une soudaine envie de me défouler, je me levai et marchai à travers les couloirs en quête de fenêtres. J'en trouvais enfin une, et y passais ma tête pour contempler le sol. Celui-ci était assez loin. Avec un air hésitant, je regardais la paroi et me mis au travail. Je devais faire un rappel pour descendre le mur en pierre, sans corde. Je pouvais le faire, il suffisait simplement de mettre les mains et les pieds dans les creux puis de bien se maintenir. La détermination me captivant, je montai dans l'encadrement de la fenêtre et commençai ma descente risquée.


J'ai un peu l'impression que ce chapitre n'a pas servi à grand chose et que rien n'avance, ça m'énerve un peu...

Pas mal de proposition concernant leur nature ! J'ai eu Vampire, Loup-garou, Magicien, Centaure, Dragon, Sorcier... ça en fait du monde ! Je peux déjà vous dire que ce ne sont pas des loups-garous ou des vampires x) Sinon, va falloir attendre encore un peu avant de connaître qui sont ces créatures :p

Bon, le prochain chapitre est un tête-à-tête entre Ambre et Adonis et...

– Euh Shasha, t'es sûre que je peux descendre comme ça ? C'est assez haut... demande Ambre qui s'incruste dans ma note d'auteur. Encore.

– Mais oui ! Tu es une femme forte Ambre ! Je te fais confiance ! m'exclamé-je avec un grand sourire en me retournant vers sa mine hésitante.

– Je vais mourir, c'est sûr, souffla-t-elle en regardant une nouvelle fois les mots que j'avais écrits quelques lignes plus haut.

– Ambre, je t'ai créé, tu survivras quoi qu'il advienne ! Je t'aime assez, donc tu ne mourras pas tout de suite.

– Oui, tu m'as créé, et merci de ne pas me faire tuer tout de suite, mais tu étais obligée d'écrire cette scène ?!

– C'est pas de ma faute si tu n'as aucun sens de l'orientation quand même ! C'est le seul moyen que j'ai trouvé pour te sortir de ce pétrin. Tu devrais me remercier, tu sais. Tu peux sortir du château en toute discrétion ! dis-je toute excitée.

– Sortir du château avec juste quelques côtes cassées ou en ayant carrément la tête explosée au sol. Oui, je te remercie vraiment, dit-elle avec sarcasme.

– Fais-moi confiance un peu !

La belle Ambre grommèle des mots que je ne distingue pas puis disparais en me laissant dans ma folie joyeuse. Parce qu'en réalité, je ne sais pas non plus comment elle va réussir à descendre sans aucune cordes, ni aucune autre aide, mais je suis confiante, elle va réussir ! *-*

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