Chapitre 7.2 - Adélaïde et les injections
Dans le chapitre précédent :
J'avais plus appris avec ces potentiels monstres qu'avec Zircon. Agathe n'avait pas réussi à récolter des preuves concrètes de la bouche de Zircon alors qu'il était de notre temps. On pouvait s'entraider non ? Deux groupes de voyageurs étaient présents dans ce même monde, alors pourquoi gardait-il tout pour lui ?
Il savait peut-être plus de choses qu'il ne voulait le dire... Je devais lui parler seule à seule ou faire en sorte qu'Agathe lui parle sinon nous n'avancerions pas dans cette enquête.
***
Une journée sans encombre passa avant que je ne force le destin.
« Lauren, je vais au poste de police, » envoyai-je pendant que je m'habillais dans ma chambre.
J'entendis des bruits de pas, puis la porte s'ouvrit à la volée. Les yeux agrandis par la surprise, elle s'excusa quand elle me vit à moitié nue. Mais moi, j'éclatai de rire devant sa mine de dingue. Ses cheveux partaient dans tous les sens alors que ses lunettes reposaient de travers sur son nez. Elle rougit, puis s'assit sur la chaise devant mon bureau. Elle se recoiffa comme elle put.
« Pourquoi vas-tu là-bas ? Le commissaire Zircon t'a bien dit de ne pas te mêler de ces meurtres, Ambre.
– Alors pourquoi m'as-tu demandé de venir ici, ma chère Lauren ? demandai-je en haussant un sourcil.
– J-je... bégaya-t-elle. J'avais peur ! Et j'ai toujours aussi peur qu'il ne t'arrive malheur.
– Je suis contente que tu m'aies demandé de venir. Et même si tu ne me l'avais pas dit, je serais venue ici un jour ou l'autre en entendant les rumeurs des morts suspectes. Mon envie de résoudre ce qui sort de l'ordinaire m'aurait obligée à venir dans cette ville pleine de mystères, affirmai-je pour éviter qu'elle ne se sente encore plus coupable. Allons, je vais seulement parler au Commissaire, je serais de retour pour le déjeuner. »
Lauren soupira puis descendit dans la cuisine. Je secouai la tête et repris mon habillage sophistiqué. Même si les vêtements de ce temps étaient très beaux, les t-shirts et pantalons me manquaient. J'espérai que le prochain monde où je tomberais sera un peu plus moderne, plus proche de mon temps.
J'enfilai un chapeau avant de sortir de la maison. Je marchai dans la ville encore endormie. Il n'était pas si tôt que cela, les commerces commençaient à déblayer le devant de leurs boutiques pour mieux accueillir les acheteurs potentiels. Je regardai les vitrines distraitement jusqu'à repérer un fiacre. Je l'appelai d'un signe de main. Le conducteur me vit de suite et s'approcha de ma position. Je montai dans le transport et lui demandai de m'emmener au poste de police. L'homme leva un sourcil, mais ne dit rien de plus. Après quelques petites turbulences dues à la route pavée de pierres, nous arrivâmes devant la bâtisse. Je payai le conducteur puis entrai dans le bâtiment officiel de la ville.
Certains hommes s'arrêtèrent de travailler en me fixant. Je gardai le menton levé et avançai vers le bureau du Commissaire sans demander l'autorisation. Je toquai puis entrai. Je fus surprise de voir Agathe présente ici aussi. Je souris et refermai la porte.
« Ambre, s'écria Agathe en me prenant dans ses bras.
– Vous faites une petite réunion de crise sans moi ? demandai-je en m'installant après avoir relâché Agathe.
– Tu vis chez Lauren, c'était compliqué de te demander de venir ici, sans Lauren... Au fait, tu l'as laissée seule ? questionna Agathe avec de l'inquiétude dans les yeux.
– Oui, mais elle est chez elle, en sécurité. Elle ne risquera pas de sortir avec ce qui se passe dans les rues. Sinon, vous avez de nouvelles infos ?
– Pas depuis hier, dit Zircon. Tu sais, tu ne devrais pas être ici, si le Commandant te voit... Merde ! »
Je fronçai des sourcils quand Zircon se leva d'un coup en fixant derrière moi. Bordel, Adonis avait ouvert la porte sans toquer. Je ne me retournai pas pour voir son air colérique. Mais je ne pouvais pas me laisser démonter maintenant. Je serrai les dents.
« Même si vous n'avez rien de probant, j'ai fait une découverte intéressante avant-hier.
– Doucement, Sherlock. Tu viens à peine d'arriver dans la ville et tu as trouvé une chose intéressante ? questionna Zircon, sceptique.
– Très intéressante même, soufflai-je avec un sourire. Les femmes reçoivent l'injection d'une substance. Sur l'un des corps, le trou qu'a fait la seringue est dans le dos et donc visible et trouvable.
– Sur l'un des corps ? Et les autres alors ? me coupa Agathe en fronçant les sourcils d'incompréhension.
– Les femmes n'ont rien trouvé sur les autres corps, donc je pense que l'injection se fait sur une autre partie du corps comme le cou ou l'abdomen.
– Les femmes ? Tu veux dire que les prostituées qui restent devant ont trouvé cette info ? »
La surprise de Zircon fut suivie d'injures à voix basse. Il se passa la main dans les cheveux puis marcha dans le bureau.
« Ça voudrait dire que la plupart savent que les autres savent qu'elles reçoivent des injections, murmura le Commissaire.
– Euh, j'ai pas tout compris, mais on va dire que oui, dis-je en fronçant des sourcils. Quelqu'un injecte quelque chose à ces femmes, ce qui les transforme en monstre. Je pense que le temps de réaction du corps à la substance est assez rapide, dans les heures qui suivent.
– Droguer dans la journée pour se transformer dans la soirée, souffla Agathe qui prenait conscience de l'information cruciale.
– Ok, ok, Sherlock. Si ça, c'est vrai, il faudrait fouiller les piaules de ces prostituées. Ça prendrait des mois !
– Non, pas si c'est moi qui le fais, affirmai-je.
– Hors de question, gronda la voix d'Adonis qui était resté muet jusqu'à maintenant. Vous êtes une civile, vous n'avez pas à vous mettre en danger de la sorte. »
Je me tournai vers mon amant et le fixai dans les yeux. J'étais toujours en colère par ce qu'il m'avait dit l'autre jour. La jalousie m'avait atteint. Je comprenais ce que voulait dire les Moires quand elles parlaient de nos amants. C'étaient comme des âme-soeurs. Un aimant humain qui nous attirait encore plus à chaque rencontre.
« Oui, je suppose qu'étant donné que je ne suis qu'une femme, je ne vous suis d'aucune utilité, n'est-ce pas ? déclarai-je en croisant les bras. Sachez que comme Zircon l'a dit, je viens à peine d'arriver et j'ai réussi à faire avancer cette enquête. Je sais que vous avez sûrement dû arrêter les recherches sur la cause de ces transformations. Mais je ne m'arrêterai pas tant que je n'aurais pas trouvé celui ou celle qui a fait cela. »
Sa mâchoire se serra sous la colère.
« Vous savez, jusqu'à présent, je pensais que les jeunes Anglaises étaient des créatures victoriennes, douces et démodées, incapables de faire trois pas sans un valet de pied ou un chaperon. Je crois que mes renseignements n'étaient pas à jour ! déclara Zircon, ce qui valut un coup d'Agathe derrière la tête.
– Désolée, s'excusa sa meilleure amie en rougissant. Agatha Christie. »
Je souris à la référence. Zircon avait la moustache d'Hercule Poirot et envoyait des citations d'Agatha Christie. Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas lu ses histoires.
« Vous pourrez participer à cette affaire, mais vous serez accompagné par moi ou Zircon pour toute excursion en lien avec l'enquête. »
L'ordre d'Adonis ne me plaisait pas, mais s'il m'autorisait à participer plus activement à la résolution de ces meurtres mystérieux, alors c'était déjà un grand pas que j'avais réussi à faire.
« Un petit pas pour l'homme, un grand pas pour l'humanité. »
J'entendis une autre claque d'Agathe. Une blague était amusante, mais plusieurs dans la même heure étaient assez lourdes. Je ne savais pas comment Agathe faisait pour supporter ça pendant autant d'années. Je secouai la tête avant de me diriger vers la porte.
« Je vais rentrer déjeuner, ensuite je reviendrai ici. Il me faudrait une liste des plus riches du quartier. »
Sans attendre de réponse, je sortis presque en trottinant pour apprécier l'air frais du jour. Le soleil était bien levé dans le ciel, il était temps de rentrer voir Lauren. Peut-être aurait-elle des informations utiles sur les familles bourgeoises du coin.
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