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Renata, l'amie d'Alice, leur a préparé un excellent dîner : des pâtes à la sauce tomate et basilic, accompagnées d'un filet d'escalope. Elle cuisinait divinement bien. À la fin du repas, Quentin a proposé de jouer au Monopoly. Le jeu a été trouvé par Victoire et Juliette, après la balade, dans le grenier. Tout le monde a vite été emballé par l'idée proposée. Tout le monde, sauf Adélaïde. Elle n'avait pas envie de passer la soirée avec eux. Elle voulait être tranquille, se retrouver seule, elle qui n'avait pas l'habitude d'être entourée.

Elle ne leur devait rien, c'est pourquoi elle les a laissés sans dire quoique ce soit. Allongée sur son lit, dans sa petite chambre, elle lisait un roman épistolaire qu'elle trouvait vachement intéressant. Il s'agissait de correspondances amoureuses qui avaient lier durant le 20eme siècle. C'était intéressant de voir comment étaient les relations amoureuses à l'époque de ses grand-parents. Chantal, était une rebelle, ne respectait pas du tout les codes de la société. Elle était féministe dans une société où l'homme était roi. Frédéric, lui, était tombée fou amoureux de la belle Chantal lors de ses vacances à Saint-Tropez. Les deux personnages étaient attachants, et Adélaïde adorait les imaginer prendre du plaisir à s'écrire.

- Tu lis quoi ?

Adélaïde a relevé la tête, surprise d'être interrompu. C'était Émile. Elle ne l'a même pas entendu entrer.

- Des amours et des lettres. Sympa, je connais pas, a-t-il lâché en s'asseyant brusquement sur son lit.

La jeune fille a arqué un sourcil, l'a fixé un court instant, et s'est remise à lire son livre.

- Pourquoi tu ne joues pas avec nous ? Il reste encore un pion pour toi.

La rousse a soupiré. Il ne comprenait pas qu'elle ne voulait pas traîner avec eux, qu'ils n'étaient pas ses amis, et qu'elle avait simplement envie d'être seule.

- Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans : je n'ai pas envie d'être avec vous ?

Émile s'est apprêté à lui répondre, mais ne sachant pas quoi dire, il s'est résigné. Il l'a alors regardé. Ses cheveux roux attachés lui enlevait cet air rebelle, qui ne lui allait pas. Ses yeux verts renfermaient de la rage qui ne parvenait pas totalement à sortir. Ses petites taches de rousseurs la rajeunissaient. Émile la trouvait belle.

- Tu comptes me fixer longtemps ? Non je n'ai pas envie de coucher avec toi, je n'ai pas non plus envie de t'embrasser, et encore moins de descendre en bas jouer au Monopoly avec une bande de bras cassés.

Émile n'a rien répondu, a laissé couler les phrases méchantes qu'il se prenait dans la figure. Il savait ce que c'était d'être méchant avec les autres pour se sentir un peu mieux, pour se valoriser.

- Je compte seulement rester avec toi dans la chambre jusqu'à ce que tout le monde se couche. J'ai pas envie de te laisser toute seule.

Adélaïde a froncé les sourcils. L'idée de crier au viol pour qu'il la laisse tranquille, lui ai passé par la tête. Mais elle n'avait pas la force de faire ça, de subir les questions d'Alice et de Renata. Donc elle n'a rien répondu et s'est remise à lire son livre.

Quant à Émile, content de voir qu'elle le laissait rester avec elle, s'est mis à l'aise. Il a enlevé ses baskets, et s'est allongé à côté de la rousse, sur le grand lit double.

- Éloigne-toi d'un mètre, lui a ordonné Adélaïde.

- Mais je vais tomber !

- Je m'en fous.

Le blond a alors obéis et s'est légèrement éloigné de la rousse. Il a croisé ses mains derrière sa tête et a fixé le plafond. Il y avait des petites cloques de peinture et des traces jaunâtres. Ces dernières donnait l'illusion de former un éléphant. Émile s'est souvenu du dessin animé Dumbo, qui l'avait marqué durant son enfance. Il s'était souvent identifié à l'éléphant, différent des autres mais pourtant incroyable.

Puis, il en a eu marre d'observer les taches de moisissures du plafond et s'est redressé à l'aide de ses coudes. Il a tourné la tête vers la jeune fille, concentrée dans sa lecture ou qui feignait de l'être.

- T'es en première littéraire ?

La rousse a brusquement tourné la tête et l'a méchamment regardé.

- Pas la peine de me regarder comme ça, tu sais.

Adélaïde a roulé des yeux exaspérée. Il ne la lâcherait donc jamais.

- Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Que j'ai un ou deux ans d'écart avec toi ne change pas mon vagin.

Émile surpris par les mots crus qu'employait Adélaïde, a écarquillé les yeux. Il a fuit son regard, apparemment gêné. En vérité, Adélaïde réussissait à être imposante. Ses regards, ses phrases, sa posture, son charme, faisaient qu'elle intimidaient presque tout le monde, même Émile le dur à cuire.

- Bon, je vois que tu comptes pas divulguer la moindre information qui te concerne. Donc je vais parler de moi, chose que je sais parfaitement faire.

Malgré le fait qu'Adélaide faisait tout pour montrer qu'elle ne supporter pas sa présence, elle appréciait l'entendre parler. Émile choisissait avec précision ses mots et avait une éloquence formidable.

- Je vais pas te rappeler qu'on est dans le même lycée, après le sale coup que tu m'as fait la dernière fois, je pense que tu t'en souviens. Je suis en Terminale S et j'ai très envie d'être pilote de chasse. Même si j'adore les chiffres, j'ai une passion pour la littérature et je lis quotidiennement.

Le bruit des pas des autres membres du groupe d'adolescent, a suspendu le discours informatif d'Emile. Adélaïde a alors posé son livre sur sa table de nuit, et s'est tourné vers le blond. Ce dernier la fixait intensivement, elle l'excitait et lui essayait de dissimuler ses pulsions. Il en avait marre d'être connu comme étant un harceleur sexuel.

- Les autres vont se coucher, donc tu peux dégager maintenant, je ne suis plus seule.

Émile a esquissé un sourire. Il la trouvait drôle.

- T'es sure que tu veux pas que je dorme dans ta chambre ?

- Casse-toi.

- D'accord, je vais obéir sinon tu vas vouloir hurler au viol.

Adélaïde n'a pas pu s'empêcher d'esquisser un sourire. Émile s'est alors levé, s'est approché de la porte et s'est arrêté pour souhaiter bonne nuit à la rousse. Cette dernière n'a répondu que par un regard bienveillant, le premier qu'elle lançait au jeune homme. Émile a pris cela pour une première petite victoire. Il était content de pouvoir se rapprocher de quelqu'un sans avoir à supporter ce regard de crainte que tout le monde avait dans son lycée. Cela l'usait.

Émile a refermé doucement la porte derrière lui, et n'est pas revenu. Il n'a pas proposé une fois de plus à Adélaïde de dormir avec lui, il n'ait pas venu lui tenir compagnie jusqu'à ce qu'elle s'endorme et il ne lui a pas non plus demandé son dentifrice pour se brosser les dents. Il l'a simplement laissé tranquille. Cette dernière a envoyé une petite photo à son père, avec un gentil smiley et s'est couchée. Elle était apaisée, chose qui ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Elle mettait toujours beaucoup de temps à s'endormir, elle réfléchissait à tout pleins de choses pénibles à chaque fois. Là, elle s'endormait avec les sublimes images de la balade face à la mer ainsi que des phrases agaçantes mais amusantes d'Emile. Finalement, peut-être que passer des vacances avec ce groupe de bras cassés allait juste être pénible et non horrible.

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