BONUS 9 : « J'ai deux filles parfaites et ça me va très bien »
Ça fait maintenant trois jours que Jude est à la maison, et je crois que je me suis habituée à sa présence. Bon, en même temps il n'est pas souvent avec nous puisqu'il part tôt le matin et rentre tard le soir, ce qui ne rend pas non plus sa présence trop envahissante.
Au début, ça m'a vraiment fait bizarre de le voir chez moi. Les stigmates de mes anciens sentiments pour lui étant toujours présent, mon cœur a manqué s'arrêter lorsque je l'ai vu débarquer dans l'entrée l'autre soir. Mais je crois que je ne suis plus amoureuse de lui ; de toute façon je suis avec Sam, donc ça veut bien dire que je n'ai plus de sentiments pour Jude, non ?
En plus j'ai tout fait pour ne plus être amoureuse de lui car il me faisait trop de mal. Le pire, c'est qu'il ne s'en rendait même pas compte. Car pour ça, il aurait tout simplement fallut qu'il s'aperçoive de mon existence, ce qui n'a jamais été le cas. Pour lui, je pense que j'ai toujours été la meilleure amie de son petit frère pénible.
Alors, puisque Jude détestait son frère et que moi je l'adorais, j'ai essayé de le détester de toutes mes forces. Ce n'était que ce qu'il méritait après tout, car Jude est un garçon détestable. Je ne supporte pas la façon dont il traite Oscar et à quel point il le fait se sentir mal.
C'est aussi pour ça que je savais que je n'allais jamais pouvoir sortir avec Jude : car en plus de ne pas s'apercevoir de mon existence, je le détestais d'être aussi odieux avec une personne aussi formidable qu'Oscar.
Mais depuis qu'il est tombé en larmes dans les bras de Maman l'autre soir, j'ai une toute autre vision de Jude : il n'est pas si froid et si méchant qu'il n'y paraît. Je vois bien qu'il apprécie énormément les câlins de Maman et qu'il essaye de ne pas faire de vagues. Il aide à mettre le couvert, il mange avec nous, regarde la télé avec nous, suit les règles que mes parents et les siens ont fixé à la lettre...
Je ne m'explique donc toujours pas qu'il soit aussi ignoble avec Oscar et qu'il essaye coûte que coûte de mettre Deen et Elma dans tous leurs états.
- Salut ma Puce !
Ne prenant même pas la peine de finir de lire ma ligne, je relève immédiatement les yeux de mon roman et adresse un sourire chaleureux à mon père avant de basculer légèrement la tête en arrière.
- Ça va ? me demande-t-il en déposant un baiser sur mon front.
- Ça va.
J'attrape le marque-page que j'ai posé sur l'accoudoir du canapé avant de le glisser dans mon livre :
- Et toi ? je lui demande, le menton appuyé sur mes bras croisés sur le dossier en le regardant s'alléger de ses affaires. Ça a été ton tournage ?
Depuis qu'il a arrêté de rapper, Papa écrit ou réalise. Il ne se considère pourtant ni comme un écrivain ni comme un réalisateur, plutôt comme, je cite, « un éternel indécis ». Voilà pourquoi il n'est pas rare de le voir sortir un documentaire sur la jeunesse désœuvrée une année, puis un roman mettant en scène la vie d'un gamin qui en veut au monde entier aux allures étrangement autobiographiques, pour sortir l'année d'après un film centré sur le rap. On peut aussi l'entendre çà et là en featuring avec des artistes qui lui tiennent à cœur même si sa carrière de rappeur reste derrière lui. Ce qui ne l'empêche pas pour autant de continuer à écrire des textes.
En tout cas, en ce moment il tourne le documentaire de Mounir, un rappeur qu'il défend bec et ongle depuis ses débuts. Ce dernier a aussitôt fait appel à lui lorsque l'idée a germé dans sa tête, et Papa s'enrichit tous les jours en côtoyant la vie de son protégé.
- Super, me répond-il en s'asseyant à côté de moi. Maé est là ?
Je secoue la tête négativement :
- Elle est chez Tonton Driss avec Naila, il la ramène avant manger.
- T'as pas voulu aller avec elle pour voir Lounes ?
- Il a foot aujourd'hui.
En vérité je n'arrive plus à supporter mon cousin. Je crois que Papa le sait, mais il fait semblant de ne pas être au courant ; en même temps, Idriss et lui se parlent tous les jours donc il est peu probable que l'un ou l'autre ne l'ai pas remarqué.
- Tu lisais quoi ? me demande-t-il, ne reconnaissant visiblement pas la couverture de mon livre.
Normal, je ne l'ai pas piqué dans sa bibliothèque celui-ci.
Tandis que je le lui tends et qu'il commence à lire la quatrième de couverture, Jude fait son entrée dans l'appartement :
- Le messie est rentré ! s'exclame-t-il, et Papa et moi nous regardons en levant les yeux au ciel.
C'est ce dont Jude s'est plaint le deuxième soir en voyant que personne ne l'accueillait comme sa petite sœur l'accueille tous les soirs : « Chez moi j'suis le messie pour Lou, faites au moins semblant que vous m'aimez bien ! ». Ce à quoi mon père avait répondu que s'il voulait que quelqu'un se charge d'imiter le comportement de Louise pendant tout son séjour, ce serait chose faite, les réveils compris. Jude n'avait plus rien dit.
- Le messie il va aller me ranger le bordel qu'il a laissé dans la salle de bain ce matin, l'engueule gentiment Papa.
Jude blêmit immédiatement : alors que je croyais qu'il ne respectait absolument rien et qu'il se comporterait comme l'ingrat qu'il était même chez nous, j'ai vite remarqué qu'il avait peur de déranger et de nous faire ressentir sa présence trop intensément, veillant toujours à faire ses tâches ménagères et à aider mes parents. Ne prenant même pas la peine de se déchausser ni d'enlever son blouson, il file aussitôt dans la salle de bain.
- Envahissant ce gosse j'te jure, fait mine de râler Papa.
En réalité je sais qu'il adore Jude et que ce chantier si inhabituel chez nous lui plait : lui qui a toujours considéré son neveu comme son fils, il est ravi d'avoir un garçon à la maison en ce moment. Trois filles calmes et ordonnées tous les jours sur le dos, ça peut être dur pour un sale gosse comme mon père.
- C'est vrai qu'avec nous t'es habitué au calme, je lui réponds en souriant.
- Et ça m'a jamais dérangé, dit-il il en se levant et en déposant un baiser sur mon front. Oh Jude ! hurle-t-il ensuite dans la direction du grand couloir dans lequel l'intéressé a disparu, me faisant sursauter au passage.
C'est vrai que depuis l'arrivée de mon cousin, Papa n'a jamais autant haussé le ton. Le pire, c'est que ce n'est même pas pour le réprimander, mais c'est seulement sa façon de s'adresser à lui, ça l'amuse.
- Pizza ce soir, t'es chaud ? l'entends-je lui demander.
- Grave, tu veux que j'aille les chercher ?
- Ça te dérange pas ?
Je devine que Jude répond par la négative puisque Papa revient s'installer devant l'ordinateur pour faire son choix.
- Tu crois que je commande deux pizzas pour lui ? me demande-t-il. C'est un gros sac comme son daron, si je lui en prend qu'une il va mourir de faim.
Je rigole tout en me rapprochant de lui pour regarder le choix qui s'offre à nous.
- Prends-lui un dessert sinon, je propose.
- Un seul ? Peut-être deux nan ? ricane Papa. J'ai pas envie qu'il perde du poids à cause de moi, je suis censé prendre soin de lui.
- Prends-en trois.
Nous rigolons tous les deux, puis c'est à mon tour de choisir. Posant ma tête sur l'épaule de mon père, je désigne finalement une pizza quatre fromages, ce qui me vaut un « Étonnant » ironique.
Alors qu'il cherche les pizzas préférées de Maman et de ma sœur, une question me vient, et c'est avec un sourire attendrit que je la pose à mon père :
- T'aurais bien aimé avoir un garçon hein ?
Papa ne répond pas pendant quelques secondes, semblant réfléchir.
- Non, je pense pas. J'ai deux filles parfaites et ça me va très bien.
- Oui, mais t'es tout seul avec trois filles à la maison.
Papa lâche la souris de l'ordinateur et passe un bras autour de mes épaules tout en jouant avec une de mes nombreuses tresses de sa main libre :
- Hmm, mais tu sais quand tu traînes avec tes gars depuis plus de trente ans et que tu retrouves les trois femmes de ta vie à la maison quand tu rentres, ça fait du bien. Un garçon c'est chiant. Regarde Jude ! Regarde Elyas ! Alors qu'une fille... Enfin, si c'est pas Elma je veux dire hein ! Elma c'est pas une fille. Bref. Le seul truc que j'aime pas dans le fait d'avoir deux filles, c'est que je flippe comme un malade qu'un abruti de gamin comme moi j'étais vous fasse du mal.
Un sourire attendrit se dessine automatiquement sur mon visage. J'ai toujours beaucoup aimé la facilité avec laquelle Papa arrive à exprimer ses sentiments. Même si j'ai vite compris qu'il n'y a qu'avec Maëlys, Maman et moi qu'il y parvient si aisément.
- Et puis j'ai pas besoin d'avoir un fils. J'ai Jude pour ça. C'est pas le mien mais...
Il n'arrive pas à finir sa phrase, mais j'ai compris l'essentiel :
- C'est tout comme, je complète pour lui.
Je tourne la tête pour jeter un œil à son visage, et il acquiesce en souriant.
Mais ce moment est vite brisé par l'arrivé de Jude :
- Nefkeu t'es une zoulette, c'est pas possible !
Je ne sais pas depuis combien de temps il est là, derrière le canapé à nous écouter, mais je comprends vite qu'il a tout entendu. Lorsque Papa et moi nous retournons vers lui avec surprise, je crois voir de l'émotion sur son visage, et je pourrais presque jurer que les mots de mon père l'ont touché.
- Ta gueule et va chercher les pizzas toi, l'agresse Papa en se détachant de moi pour cliquer sur l'onglet « Commander ».
Je souris d'amusement en constatant que j'avais totalement raison : si mon père est très ouvert par rapport à ses sentiments, il n'est en revanche pas à l'aise avec ça devant d'autres personnes, et il essaye de rester fier devant Jude.
Après le repas, alors que nous sommes tous installés devant la télé en train de rigoler à une bêtise que vient de dire Maëlys, le téléphone de Papa se met à sonner sur la table basse. Fronçant les sourcils, nous regardons tous l'écran pour savoir de qui il s'agit : même dans une famille où beaucoup d'événements ont lieu tous les jours, un téléphone qui sonne après 21h n'est jamais bon signe.
Je vois le visage de mes parents se tendre lorsqu'ils lisent le nom de Deen.
- Allô ? répond Papa. Y'a quelque chose qui va pas Bigo ?
Personne n'entend la réponse de mon oncle Deen, mais je me sens soulagée lorsque je vois que mon père commence à sourire d'un air aussi amusé qu'exaspéré :
- Est-ce que ton père sait que tu lui as piqué son téléphone Loulou ? demande-t-il en mettant son propre téléphone en haut-parleur.
Le visage de Jude s'éclaire aussitôt, et je me retiens de le trouver adorable. Il ne le dira probablement jamais, mais je sais pertinemment qu'il est tout aussi fan de sa sœur que l'est Oscar. Cette petite est géniale.
- Euh...
Nous éclatons tous de rire en silence face à la voix coupable de ma cousine. Jude est actuellement témoin d'un secret Samaras : à chaque fois que l'un des parents a Louise au téléphone, il la met en haut-parleur pour laisser tout le monde profiter de ses pépites.
- Pourquoi tu m'appelles ma puce ? demande finalement Papa une fois calmé.
- Faut que tu me promettes de rien dire Tonton, chuchote Louise avec véhémence.
Mes parents se regardent avec un sourire aussi attendrit qu'amusé.
- Promis juré.
- Craché ? T'as craché Tonton ?
- Oui j'ai craché, je viens même de me faire disputer par Tata.
- Bon.
Une nouvelle fois, nous tentons de nous retenir de rire : on aurait dit qu'elle était devenue l'adulte et que Papa était devenu l'enfant. Jude, sous le regard inquisiteur de Maëlys, lève les yeux au ciel d'un air amusé pour exprimer à ma sœur son ressentit face aux réponses de la sienne. On voit qu'il a l'habitude.
- Je vais avoir besoin de toi Tonton, explique Louise avec gravité. En fait, j'aimerais bien que tu forces Papa et Maman à nous acheter un chat à Oscar et moi.
Mais cette enfant...
- Et en quoi je vais pouvoir t'aider ? lui demande Papa, perplexe.
- Bah tu leurs dis d'acheter un chat quoi.
Regardant Maman d'un air amusé, il répond pourtant très sérieusement à Louise :
- Oui, ça me parait évident maintenant que tu le dis, j'y avais pas pensé. Et pourquoi tu crois que tes parents vont m'écouter plus qu'Oscar et toi ?
- Parce que Maman elle t'aime trop.
Je vois bien que mon père se retient de lui dire que si elle n'a pas cédé à ses enfants, elle ne lui cédera certainement pas à lui. Mais il n'a même pas le temps de répondre que Louise continue avec une voix dans laquelle perce un air malicieux :
- Et parce que j'ai déjà demandé à Tonton Bouhied de le faire... Et à Tonton Moingeon... Et à Tonton Ishane... Et à Tonton Ivan... Et à Tata Julia... Et à Tata Stine... Et à Tata Inès...
Dans le salon, les visages portent de l'exaspération ou de l'admiration : je pense que Louise sera la fin de tous les adultes de cette famille.
- Donc, continue-t-elle, si toi et Tata Lissou vous les embêtez aussi avec ça, ils vont en avoir marre et ils vont en acheter un.
- Ou ils vont t'envoyer au bled dans la maison des grands-parents de Tarek, tranche Papa. Toute seule. Jusqu'à ce que t'ai dix-huit ans.
Silence au bout du fil, regard noir de Maman.
- Ça veut dire que tu vas pas m'aider ? demande Louise d'un ton grognon.
Je vois que mon père se sent déjà coupable, et c'est sans grande surprise qu'il lui répond :
- Je vais voir ce que je peux faire.
- Yes ! s'exclame ma cousine tandis que son frère lève les yeux au ciel. Merci t'es trop le meilleur Tonton !
- Je sais, soupire Papa en se frottant le front, bien conscient qu'il s'est mis dans le pétrin.
- Par contre chut hein ! Tu dis rien.
- Promis...
- Trop cool ! Bonne nuit Tonton !
- Attends Loulou ! l'interpelle-t-il avant qu'elle ne raccroche. Y'a Jude à côté de moi, tu veux lui parler ?
- Nan.
Sur ce, Louise raccroche.
Je pense qu'on a tous saisi le ton sec et froid de ma cousine, mais personne ne dit rien. Tentant toutefois un regard discret vers Jude, je vois néanmoins que le refus de sa sœur le blesse. Mais il ne met que quelques secondes avant de se constituer une façade indifférente.
- Ils l'ont pas raté celle-là, souffle Papa en reposant son téléphone sur la table avant d'accueillir de nouveau Maëlys dans ses bras.
- Hmm, l'appuie Jude d'un air blasé. On s'ennuie jamais avec elle.
- En même temps il fallait bien qu'il y en ai un de vous trois qui torture Maëlle comme elle a torturé tout le monde, dit Papa.
- T'abuses, lui répond Maman, elle était pas si horrible que ça !
- Pardon ? s'exclame mon père. Tu te souviens pas le nombre de dingueries qu'on a fait juste pour ses beaux yeux ? Le saut à l'élastique ? La putain de via-ferrata dans les gorges du Verdon ? Le nombre de fois où j'ai cru mourir avec elle...
Ma mère rigole face au traumatisme de mon père. Et dire que c'est leur meilleure amie à tous les deux...
- Moi ça va, se vante ma mère, elle a toujours été sympa avec moi.
Papa a un rire jaune :
- Parce qu'un fois que vous vous êtes trouvé vous nous avez torturé ensemble, c'est tout.
S'ensuit toute une ribambelle d'histoire sur Maëlle et ses amies, et sur toutes les « galères » - les mots de Papa, pas les miens - dans lesquelles ma tante les a conduit. Le traumatisme visiblement encore très vif de mon père fait rire tout le monde, et Maman enchérit avec des histoires sur mes oncles pour tenter de nous prouver qu'ils étaient tout aussi affreux que Maëlle.
J'adore les histoires de mes parents. J'aurais tellement aimé vivre avec eux tout ce qu'ils ont vécu.
Tout ce que je peux faire, c'est les écouter attentivement parler, les yeux brillants de bonheur alors qu'ils se rappellent tous les bons moments qu'ils ont passé ensemble, et rêver qu'un jour je puisse raconter la même chose à mes enfants avec autant de passion.
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Coucou ! Bon, déjà, désolée à ceux qui ne voulaient pas lire les bonus de vous avoir plus ou moins forcé la main pour atterrir ici. Mais je vous jure que ça vaut vraiment le coup ! Enfin je crois...
Alors voilà, le truc, c'est qu'en écrivant ce bonus, j'ai enlevé énormément de paragraphes. Mais genre, énormément, il y a même des trucs qui m'ont brisé le cœur parce que je les trouvais adorables.
Mais en fait c'est parce qu'en écrivant, je me rendais compte que je parlais beaucoup plus de la vie de Lola plutôt que d'un réel bonus sur Jude de son point de vue. Ce qui m'a obligée à m'arrêter en plein milieu de mon écriture et m'a plongé dans une crise existentielle...
J'ai réfléchis pendant plusieurs minutes, et je me suis dit que Lola méritait peut-être elle aussi sa partie dans Toujours Là... C'est pour ça que je voulais avoir votre avis.
Là comme ça, je pense peut-être avoir assez de matière pour le faire (j'ai d'ailleurs consacré une page aux morceaux que j'ai coupé dans l'espoir/le doute d'en faire quelque chose un jour). Et puis d'ici à ce que les parties de Jude et Elyas soient terminées, j'aurais peut-être beaucoup plus d'inspi. Mais je voulais vraiment savoir ce que vous en pensiez.
Déjà, est-ce que ça vous intéresserait ? Ou est-ce que vous pensez que les parties de Jude et Elyas seront pleinement suffisantes ? Dans le cas où vous aimeriez une autre partie, est-ce que vous voulez plutôt le point de vue d'un autre personnage ?
Je suis totalement indécise et j'aimerais bien que vous m'éclairiez sur votre ressentis.
Voilà voilà ! Encore désolée de vous avoir ramené ici de force et d'avoir blablaté pendant mille ans.
Plein de bisous ! ❤
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