BONUS 5 : « Arrête de t'inquiéter et dégage de chez moi »
Vous avez voté, Tarek en premier ! Je vous avoue que j'aime beaucoup ce bonus, j'espère que vous l'aimerez autant que moi ❤
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Quand je vis mon fils pour la première fois, je fondis en larmes. Ouais, moi, Tarek Bouhied, je chialais. C'était un moment historique.
Je crois que j'avais jamais été aussi heureux de toute ma vie. Quand je l'entendis pleurer pour la première fois, je réalisai : putain, j'ai un gamin. Ce petit être humain, là, c'est mon fils.
Sanya avait été super forte, et moi je m'étais sentis grave impuissant. Mais après des mois de stress et de doute, et des heures de travail acharné pour elle, on avait un bébé.
Elyas.
Épuisée, Sanya refusa de prendre Elyas dans ses bras quand la sage femme lui tendit notre fils. Ça m'avait grave surpris, mais il fallait dire qu'elle en avait bavé, et elle avait besoin de repos. Alors échangeant un regard avec la sage-femme, je pris Elyas dans mes bras pour la première fois.
Il était tellement petit, j'avais peur de le casser.
- Salut Elyas, je suis ton papa, dis-je doucement sans quitter mon fils des yeux.
Puis, à l'attention de Sanya :
- Bébé, il est magnifique.
Sanya m'adressa un léger sourire.
- Vous voulez faire un peau à peau ? demanda la sage-femme.
J'avais pas la moindre idée de ce que c'était mais j'acquiesçai quand même. Elle me pris Elyas des bras et me dirigea hors de la salle d'accouchement, dans une petite pièce où elle et d'autres personnes en uniforme rose firent plusieurs tests sur mon fils.
Après les avoir regardé en silence pendant quelques minutes, me demandant pourquoi elles laissaient pas Elyas tranquille, on me proposa de m'asseoir et d'enlever mon t-shirt.
Ceci fait, la sage-femme déposa Elyas dans mes bras, et je pus sentir son petit corps contre mon torse.
Putain. Ça faisait à peine une heure qu'il était là, et je l'aimais déjà comme un fou, c'était incroyable. J'avais jamais ressentis ça pour un autre être humain. C'était tellement intense, je savais que je serai capable de faire des dingueries pour lui.
Alors qu'une vague d'amour indescriptible me submergeait, mes yeux devinrent un peu trop humide à mon goût une nouvelle fois, tandis que je me promettais de tout faire pour protéger ce petit morceau de moi et Sanya.
[...]
Putain.
Je me demandais comment j'allais expliquer à mon fils pourquoi il avait pas de maman.
Je savais qu'au début elle avait eu peur d'avoir un gosse, mais je pensais l'avoir fait changer d'avis. Et puis au-delà de ça, on s'aimait quand même, c'était pas rien.
Mais ça avait visiblement pas suffit puisque j'étais là, la gorge serrée, devant le message qu'elle venait de m'envoyer.
Pire qu'une série américaine le bordel.
Il était dix-neuf heures, je venais de rentrer du taff après être allé chercher Elyas chez mes parents. Normalement, Sanya devait être rentrée avant moi, et c'était justement elle qui aurait dû aller chercher notre fils. Mais elle l'avait pas fait ce soir.
Alors j'avais flippé.
Je lui avais envoyé un message, et je venais tout juste de recevoir sa réponse.
Elle écrivait simplement qu'elle était pas prête à être mère, et qu'elle préférait partir avant qu'Elyas ne la connaisse trop. Et elle finissait par un « je t'aime ».
J'y connaissais pas grand chose à l'amour parce que c'était la première femme dont j'étais tombé raide dingue, mais je savais qu'on quittait pas les gens qu'on aimait. Maëlle et Deen avaient essayé de se quitter. Hugo et Clément avaient essayé de se quitter. Même Raph et Ines à une époque. Mais ils aimaient tous trop leur moitié pour le faire réellement.
Donc fallait croire que j'étais beaucoup trop tombé amoureux de Sanya, et elle pas assez.
Je pris la première chose que j'avais à ma portée, une lampe, et la balançai sur le sol de toutes mes forces. L'ampoule éclata en mille morceaux, et je me sentis immédiatement con parce qu'il allait falloir que je ramasse ma merde avant qu'Elyas se coupe dessus.
Putain, moi qui avait toujours refusé de me poser, de construire quelque chose de sérieux, j'aurais dû m'écouter un peu plus longtemps, ça m'aurait évité toutes ces emmerdes.
Assis sur le canapé le visage dans les mains pour essayer de me contenir, me maudissant d'avoir pu éprouver des sentiments pour mieux me faire briser le cœur, des pleurs dans la chambre me ramenèrent à la réalité.
Ok, par contre lui, je l'avais jamais considéré comme une emmerde.
Comme d'habitude, parce que je flippais toujours quand mon fils chialait alors que je savais que c'était normal pour un bébé, je me ruai dans sa chambre :
- Eh, je suis là mon fils, je suis là, dis-je doucement en prenant Elyas dans mes bras. Chut...
Faisant les cent pas dans notre petit appart', tentant tant bien que mal de calmer mon fils, j'essayais de pas péter un câble en pensant qu'elle avait vraiment été capable d'abandonner son môme de huit mois.
Mais rien n'y faisait, Elyas ne se calmait pas. Pourtant je lui avais donné le biberon à peine une heure auparavant, sa couche était propre, il commençait à faire ses nuits... Et puis il avait toujours été un bébé très calme, je comprenais pas ce qu'il avait.
Je songeai quelques secondes à appeler Maëlle. Quand il y avait un problème - que ce soit avec n'importe quoi -, c'était toujours ma sœur que j'appelais. Mais je savais de Deen qu'elle galérait déjà à organiser le mariage de Raph et Ines et qu'elle était méga sensible, j'avais pas envie de lui rajouter ça en plus ; elle prenait les choses beaucoup trop à cœur, et j'avais pas envie d'en fait pâtir ma future nièce ou mon futur neveu.
- Qu'est-ce qui va pas Elyas ? Pourquoi tu t'arrêtes pas de pleurer ?
J'allais pas tarder à vriller.
Le cœur brisé par Sanya, les tympas percés par notre fils.
- Je suis désolé qu'elle soit partit, fis-je finalement tout en le berçant. Je suis désolé, j'aurais dû me douter qu'elle allait pas bien ces derniers temps.
Je détestais l'entendre pleurer, vraiment. Je me sentais tellement coupable.
Parce que c'était pas des pleurs normaux, comme quand il avait faim ou que sa couche était sale. Je sentais que c'était plus profond, qu'il allait réellement pas bien.
Je me demandais s'il avait compris que sa mère l'avait abandonné.
Je crois que c'est cette pensée qui déclencha mes larmes :
- Calme-toi mon bébé, ça va aller. Je suis encore là moi, je te lâcherai pas.
Petit à petit, à force de chuchotements et de paroles rassurantes, Elyas commença à s'apaiser, à croire qu'il comprenait ce que je disais.
Je partis donc m'allonger sur le lit, mon fils contre mon torse, une main sur sa petite tête et l'autre sur son dos :
- Ça va être dur, mais je te promets qu'on va y arriver. Je vais me battre pour toi mon fils. Moi vivant, je laisserai rien de mal t'arriver, tu m'entends ? Rien.
Putain mais comment j'allais faire pour élever un môme tout seul moi ? J'avais pas un taff de malade non plus. J'allais beaucoup trop devoir compter sur mes darons pour le garder, les pauvres...
Et comment j'étais censé lui expliquer que sa mère avait jamais voulu de lui et qu'elle avait préféré l'abandonner ? J'étais vraiment censé briser le cœur de mon gosse avec cette information un jour ?
Soudainement, les pleurs d'Elyas cessèrent, et je le sentis plus calme. En jetant un œil à son visage, je vis qu'il avait l'air moins tendu, beaucoup plus apaisé. S'il comprenait ce que je disais, mon fils était un génie.
- Je te cache pas que j'ai aucune idée de comment je vais me débrouiller p'tit gars. T'étais pas vraiment prévu au programme. Mais quand t'es né, ça a changé ma vie. En bien. Alors c'est pas une go qui va nous pourrir la vie ok ? Je vais faire en sorte qu'on manque de rien. T'auras peut-être pas ta mère, mais tu vas grandir entouré d'amour, ça je te le promets. Je t'aime plus que tout mon fils, et rien pourra jamais changer ça.
[...]
- Papaaaaaaa !
Putain, pourquoi je l'avais pas vendu lui déjà ?
Juste d'après ses pas dans le couloir, je pouvais savoir que le débarquement aurait lieu dans 3... 2... 1...
- Allez debout, debout, debout !
Tandis que mon fils sautait sur mon lit au rythme des ses mots, je remettais en question ces cinq dernières années et mon choix d'avoir voulu le garder.
- Hmm...
- Allez allez allez ! Faut aller ssez Tata Clarkson !
- Gnocchi, je lui ai dit que j'allais chercher Juju à onze heures. Alors, je sais que tu sais pas encore lire l'heure, mais pour ton information bonhomme, il est sept heures. Et Papa il aimerait bien dormir.
- Mais moi z'm'ennuie.
J'haussai simplement les épaules avant d'essayer de me rendormir. Ça, c'était pas mon problème.
Comme je ne réagissais pas, Elyas s'allongea sur l'oreiller à côté de moi, comme d'habitude, et je savais qu'il me fixait de ses grands yeux noirs auxquels je pouvais rarement résister.
À ce moment-là, il y avait deux solutions possibles : soit il restait où il était et ça voulait dire qu'il allait commencer à m'emmerder et que j'allais finalement devoir me lever ; soit il allait venir se blottir contre moi et on allait se rendormir tous les deux.
Ce jour-là, j'eus de la chance, car il opta pour la deuxième solution. Doucement, mon fils se glissa sous la couette et vint se coller contre mon torse, puis je replaçai la couverture sur lui et l'entourai de mon bras d'un geste protecteur.
Comme d'habitude, je souris d'un air niais en réalisant à quel point j'aimais ce mini être humain. Il avait beau être celui qui me faisait le plus chier au quotidien, c'était aussi celui qui l'embellissait le plus.
- Et t'es sage chez Tonton Bouhied, hein ? fit Maëlle lorsqu'elle me confia son aîné quelques heures plus tard.
Jude hocha vivement la tête avant de faire un câlin à son père.
- Et toi aussi, lança Deen dans la direction d'Elyas en le pointant du doigt.
Mon fils hocha la tête en adressant à son oncle un large sourire mutin.
Le couple Castelle-Clarkson et moi nous regardâmes d'un air dubitatif, sachant très bien que quoi qu'il arrive, j'allais en chier.
Elyas et Jude, quand ils étaient tous les deux, c'était un putain d'enfer. Et encore, normalement avec eux y'avait l'autre membre du trio de 2017, Ismaël. Mais là il était chez sa mère, donc par chance, je n'avais que ces deux-là à me coltiner.
« Par chance »... N'importe quoi. Ismaël était relativement calme par rapport à ces deux sheitans.
Deen vint me serrer la main d'un air dramatique :
- Bon courage mon kho. Et si y'a un problème, bah surtout nous appelle pas.
Je ricanai avant d'aller déposer un baiser sur la joue de mon filleul, Oscar, et je partis avec les mômes, sans oublier d'adresser un doigt d'honneur à mon beau-frère derrière mon dos.
Après avoir payé une glace à mon neveu et mon fils tout en nous baladant dans un parc, fait plusieurs tour de caroussel, et un cache-cache dans l'appartement, je laissai les petits dans la chambre d'Elyas pour essayer de gratter un peu.
Normalement, si je m'en sortais bien et si on m'emmerdait pas trop, je pourrais commencer à enregistrer mon deuxième album dans les semaines à venir.
Pour mon premier projet, comme j'étais complètement nouveau dans le monde du rap, et que je voulais pas que mes liens avec les potes rappeurs de Maëlle aient une quelconque influence sur ma carrière, j'avais fait aucun feat, et j'avais percé tout seul à force de persévérance. Puis j'avais signé chez Saboteurs, et ce coup-ci j'avais eu envie de faire quelques collab'. J'en avais déjà une de sûre avec Deen et Jehkyl, et sûrement une deuxième avec Doums. Pour la suite, fallait que j'attende les réponses.
- Papaaaaa !
Je fermai les yeux quelques secondes en me pinçant l'arrête du nez. S'il était pas si mignon, je l'aurais revendu depuis longtemps. J'en aurais peut-être tiré un bon prix en plus.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Tu viens jouer avec nous ?
- Nan, Papa il travaille là, c'est pour ça que Jude est à la maison.
Grand silence, je me remis à travailler.
Je savais que la plupart du temps Elyas se faisait chier quand il y avait pas école. L'inconvénient d'être fils unique et d'avoir que Papa pour s'occuper de lui. Mais bon, il voyait quand même très souvent Ismaël et Jude, et les gars de L'Entourage s'étaient pas mal reproduit, donc c'était pas les copains et les copines qui manquaient.
- Papaaaaaa !
Cette fois-ci, je ne répondis pas. Je savais qu'il allait lâcher l'affaire à un moment donné.
Mais c'était bien naïf de ma part de penser ça. Quelques secondes plus tard, un Razmoquet aux boucles brunes et aux yeux noirs débarqua, suivit de très près par un deuxième Razmoquet aux cheveux châtains et aux yeux bleus, le parfait sosie de son oncle Raph.
- Tonton ! Viens jouer ac nous, s'exclama ce dernier en essayant de tirer sur mon bras.
- Nan je peux pas les gars, il faut que je travaille, fis-je en me dégageant avant d'ébouriffer les cheveux de mon neveu.
Alors comme bien souvent, Jude et Elyas me firent leurs yeux de chiens battus :
- Si to plé, fit Elyas avec sa moue de bébé.
Je fermai de nouveau les yeux d'agacement.
Putain mais il était archi mignon aussi.
Alors comme d'habitude, je cédai, et les petits poussèrent un cri de joie avant de courir dans la chambre, moi sur leurs pas, voyant l'idée de sortir un album dans l'année se dématérialiser de plus en plus.
[...]
- Ça va mon grand ?
Elyas hocha simplement la tête, un sourire un peu coincé sur le visage.
Moi non plus j'arrivais pas à faire semblant. Pourtant c'était pas la première fois qu'on faisait ça, on devrait s'y être habitué à force. Mais fallait croire que non.
Le trajet en voiture se fit en silence, puis je remerciai notre chauffeur Uber, les sacs de voyage de mon fils de douze ans dans les mains.
Elyas salua à peine Deen, avant de s'éclipser avec Jude dans la chambre de ce dernier, et j'offris un sourire crispé à mon beau-frère avant de le checker :
- Ça va lui passer, comme d'habitude, me dit-il.
- Ouais je sais. Mais je déteste l'abandonner pendant autant de temps.
- Tu l'abandonnes pas gros. Et il le sait.
J'acquiesçai, pas très convaincu, puis on s'installa dans les canapés, et Oscar nous rejoignit pour me sauter dans les bras :
- Tonton Bouhied !
- Salut bonhomme, lui lançai-je avec un grand sourire. Ça va ? lui demandai-je en langage des signes.
Je savais qu'il entendait ce que je disais et qu'il lisait bien sur les lèvres, mais j'aimais bien lui parler comme ça, j'avais l'impression d'avoir une relation un peu plus privilégiée avec mon filleul.
Mon neveu de dix ans acquiesça avant de me raconter sa vie, puis après une bonne heure de discussion et de déconnade avec son daron - tentant d'oublier un peu pourquoi j'étais venu avec mon fils et ses sacs de voyages -, les deux nanas Castelle débarquèrent.
- Tonton Bouhieeeeeed !
Louise me sauta littéralement dessus et m'assomma de sa joie de vivre et de son hyperactivité. Maëlle, elle, avait l'air épuisée. Pas étonnant si elle avait passé la journée avec la petite. D'après Tyler, c'était exactement la même que Maëlle au même âge.
- Comment elle va ma nièce préférée ?
- Trop bien ! On a fait plein de trucs aujourd'hui vec Maman !
Alors qu'elle allait commencer son récit, Deen l'interrompit :
- C'était si trop bien que ça que tu viens même pas faire un câlin à ton père ?
La petite lui adressa un énorme sourire et se jeta sur lui pour lui faire un énorme câlin.
J'étais un peu jaloux de leur relation, ça se voyait que c'était sa petite protégée. Elle avait que cinq ans mais elle le rendait déjà fou. J'aurais kiffé avoir une fille moi aussi.
Maëlle, après avoir salué son deuxième et après m'avoir checké, s'installa à côté de moi, la tête sur mon épaule.
- Bouge ta sale tête de fragile là, lui fis-je en m'écartant.
Pour seule réponse, ma sœur me mit une patate dans l'épaule.
Assise sur les genoux de son père, les bras de Deen autour d'elle, Louise me raconta sa journée avec passion, dans les moindres détails, tandis que son père levait les yeux au ciel à chaque fois qu'elle recommençait une phrase alors qu'il croyait qu'elle avait fini.
Le seul qui a l'air de l'écouter réellement, c'est Oscar. Il kiffait entendre les histoires de sa sœur, il la trouvait drôle.
Puis vint le moment bénis des dieux ou la petite eut finis son récit, et où on pu de nouveau discuter entre adultes, tandis que les deux plus jeunes allèrent jouer ailleurs.
- Il t'a dit bonjour Jude au fait ? me demanda Deen en me servant une bière.
- Nan, mais t'inquiètes, je préfère qu'il s'occupe d'Ely.
- Comment il va ? me demanda Maëlle avec douceur.
- Bah... Ça le fait chier. Mais ça me fait autant chier que lui. Pourtant je kiffe les tournées, vraiment. Mais je déteste le laisser tomber.
- Tu le laisses pas tomber, me contredit-elle. Tu l'as jamais laissé tomber et tu le feras jamais.
- Et il le sait, t'inquiètes, compléta Deen. Ça fait chier les petits quand elle a des compets ou que je suis en tournée, mais ils sont super heureux de nous retrouver après.
- Ouais, mais vous, vous êtes deux. Alors que nous c'est que lui et moi depuis le début.
- Je sais, me dit Maëlle doucement en passant une main dans mes cheveux.
Depuis qu'elle était daronne elle, c'était devenu une grosse fragile, truc de malade.
- Mais tu sais, il a douze ans maintenant, continua-t-elle. Il va falloir que tu lui lâches du leste.
- Il en a du leste, fit Deen en me regardant d'un air compréhensif, t'inquiètes pas pour ça. Mais je comprends que vous ayez du mal à vous séparer. Je trouve ça beau votre relation.
Je lui adressai une moue reconnaissante, et ils essayèrent de changer de sujet.
Putain. Mon fils c'était vraiment mon point faible.
Au final, comme d'hab', on rigola de ouf, avec Deen on tenta quelques petites freestyles, Louise essaya de rapper avec nous et Deen se moqua, puis immanquablement, Maëlle se mit à gueuler :
- Jude, Elyas, venez un peu !
Puis, marmonnant juste pour nous :
- Ils m'énervent quand ils font ça, à croire qu'ils passent des mauvais moments avec nous.
Pas du tout, ils kiffaient être avec tout le monde, mais ils aimaient encore plus faire leurs conneries tous les deux.
Les deux grands débarquèrent finalement, et je fus content de voir que mon fils avait l'air moins morose. J'adressai un clin d'œil à mon neveu, sachant très bien qu'il y était pas pour rien.
On prit l'apéro tous ensemble, puis on fit des jeux à la con, et on se tapa plein de fous rires. Franchement cette mif, on l'avait bien réussie.
Mais je remarquai tout de suite qu'Elyas s'amusait moins que les autres fois, même s'il arrivait bien à le cacher. Sauf que c'était mon môme, et je le connaissais par cœur.
- Va parler avec lui, me chuchota Maëlle tandis que Deen était en train d'essayer de mimer une casserole à Oscar.
D'ailleurs, je savais qu'il allait pas tarder à tricher en lui disant le mot en langue des signes.
J'obéis à ma sœur, et me levai pour aller en direction d'Elyas. Mais j'eus même pas eu le temps de faire deux pas que ses grands yeux noirs s'agrandirent de panique :
- Tu t'en vas déjà ?
Mon bide se serra immédiatement face à l'émotion dans ses yeux :
- Nan nan, t'inquiètes mon grand. Je vais rechercher des gâteaux apéro dans la cuisine, tu viens m'aider ?
Il parut plus serein et j'ébouriffai ses cheveux avant de poser ma paume sur sa nuque pour le laisser me précéder.
- Ça va Gnocchis ? demandai-je tandis qu'il versait un paquet de cacahuètes dans un bol.
Il haussa les épaules, très concentré sur sa tâche.
- Elyas, parle-moi s'il te plaît, on se dit tout d'habitude.
- Je veux pas que tu partes, lâcha-t-il subitement. Je sais pas pourquoi, cette année je veux pas que tu partes.
Je m'en étais douté, mais ça me faisait quand même du mal de l'entendre. Parce que je sentais qu'il en souffrait. Et je savais pas pourquoi.
- Tu sais, je pars qu'un mois et demi au début, et puis on se revoit après.
- Arrête de faire le père rassurant, je sais que t'as aussi peu envie que moi qu'on soit séparé aussi longtemps.
Aïe. L'inconvénient d'avoir un môme aussi intelligent.
- Ouais, c'est vrai, lâchai-je finalement...
Y'a vraiment qu'à lui que je peux rien cacher. Quand ça va pas, il le sait. Je sais pas comment, mais il le sait. Et il est toujours là pour moi quoi qu'il arrive, alors que c'est moi son père.
Le fait de nous être retrouvé que tous les deux très tôt, ça l'a poussé à vouloir prendre soin de moi autant que je prenais soin de lui, peut-être par peur de se retrouver tout seul un jour. Alors c'était pas juste parce que c'était le mien que je disais qu'il était exceptionnel, ce gosse était réellement exceptionnel.
- Viens là, fis-je en tendant mon bras pour qu'il vienne contre moi.
Elyas s'exécuta automatiquement et m'entoura de ses petits bras, tandis que je tenais sa tête contre mon torse d'une main et que l'autre entourait son dos.
- On va y arriver. On l'a déjà fait plein de fois, on a l'habitude, fis-je en bougeant mes doigts dans ses boucles brunes.
- Hmm. Je sais...
- Tu sais que je t'abandonnes pas hein ? C'est pas ça qui t'inquiètes quand même ?
Depuis que je lui avais dit pourquoi ses cousins avaient une mère et pas lui, y'avait environ cinq ans, je vivais dans la peur constante qu'un jour il croit que je l'aimais plus ou que je voulais me débarrasser de lui.
- Nan, s'exclama-t-il aussitôt. C'est pas ça, je sais que c'est ton boulot, et j'aime trop ton boulot. Mais j'aime pas quand t'es loin et que je sais pas si ça va ou pas.
Si mature mon p'tit.
- On s'appellera tous les jours, comme d'hab', le rassurai-je. Et puis je sais que Castelle et Clarkson s'occupent bien de toi, je me fais aucun souci pour toi.
- Mais toi ? Ça va aller sans moi ?
J'eus un petit rire jaune. Douze ans et extralucide putain.
- T'inquiètes pas pour moi va, tu sais que je me démerde toujours.
- Hmm... Tu feras attention sur scène hein ? T'évites de trop donner, t'as plus vingt ans.
- Sale gosse, dis-je en ricanant, et Elyas me suivit.
Mais je savais que c'était même pas pour être méchant qu'il disait ça, il s'inquiétait vraiment pour moi quand j'étais pas là, presque autant que je m'inquiétais pour lui.
- Ḥamlaghk Baba, fait-il toujours contre moi.
- Je t'aime aussi mon fils.
On se détacha finalement, et on retourna tous les deux dans le salon le cœur un peu plus léger, mon bras pendant d'une de ses épaules.
Maëlle nous regarda d'un air attendris, puis Louise réquisitionna énergiquement Elyas pour qu'il aille jouer avec elle dans sa chambre.
Quelques heures plus tard, je me décidai enfin à partir.
- Je vous ai tout donné ? demandai-je un peu fébrilement à ma sœur et son mari. Carte d'identité ? Photocopie de la carte vitale ? Les médocs pour son genou ?
- Oui, oui, et oui, soupira Maëlle.
- C'est que s'il a mal qu'il faut qu'il en prenne. Et il faut pas qu'il reprenne le basket avant au moins deux semaines. Mais tout ça il le sait, fis-je en souriant timidement à mon fils.
- T'inquiètes on gère, me fit Deen avec un regard rassurant. On a l'habitude.
- Ouais ok... Euh... Ah oui Clarkson ! J'avais rendez-vous avec sa prof principale jeudi prochain, faudra que t'y ailles à ma place.
- Je sais Bouhied, fit ma sœur en levant les yeux au ciel, passant ses doigts dans les cheveux de mon fils. Ely m'a déjà tout dit. Maintenant arrête de t'inquiéter et dégage de chez moi.
J'oubliais forcément un truc...
- Ça va aller Papa, je te jure, fit finalement Elyas en voyant que je n'avais aucune intention de dégager le plancher. C'est ma deuxième maison ici, tout se passera bien.
C'est vrai que Maëlle était un peu sa mère et Deen son deuxième père.
- Ok... Bon, vous êtes sûrs que vous avez tout ? demandai-je une dernière fois.
- OUI ! s'exclamèrent-ils tous à l'unisson, même Louise qui était censée être couchée.
Je sursautai rapidement avant de ricaner devant cette scène, puis je me tournai vers mon fils.
Malgré ses paroles rassurantes, je voyais qu'il était triste, et ça me fendait le cœur.
- Viens-là, fis-je en l'attirant contre moi.
Je serrai Elyas de toutes mes forces contre moi en fermant les yeux :
- Bon, t'oublies pas que je t'aime hein ?
Je le sentis acquiescer contre mon torse.
- Tu vas me manquer, lui dis-je.
J'avais vraiment aucune envie de partir en le tenant comme ça dans mes bras. C'était peut-être plus un bébé, mais pour moi il le serait toujours.
- Toi aussi, me répondit-il tristement. Fais attention à toi.
- T'inquiètes pas pour moi. Bon allez, fis-je en l'écartant doucement de moi. Essaye de rendre la vie de Maëlle un minimum infernale s'il te plaît.
Elyas rigola et Maëlle leva les yeux au ciel avant de me tirer la langue, mais je voyais bien qu'elle avait même pas la force de protester, se contentant de me regarder d'un air attendrit.
Je saluai mes neveux et ma nièce, puis dit au revoir aux parents :
- On te l'a toujours rendu en un seul morceau, me dit Deen en me donnant une accolade. C'est pas la première fois qu'on s'en occupe.
- Ouais, je sais, dis-je en lui adressant un sourire reconnaissant.
Maëlle me prit dans ses bras sans rien dire, m'adressant seulement un regard réconfortant et confiant puis j'ébouriffai les cheveux d'Elyas avant de le prendre une nouvelle fois brièvement dans mes bras, et de quitter l'appartement.
Putain de merde, qu'est-ce qu'il allait me manquer !
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