OS PLK
Texte complètement indépendant de tous les autres, petite histoire pour elle même. Inspiration soudaine. Bonne lecture ❤️
Pourquoi j'ai fait ça ? Pourquoi j'ai écouté mes doutes ? J'ai dit ces paroles complètement idiotes dans le téléphone.
"on va s'arrêter là toi et moi, je sais plus où j'en suis."
Plus je réalise que je l'ai quitté, plus mon cœur est douloureux. Lola se tient devant moi, souriante, réconfortante. Elle est fière de moi.
— C'est bien ce que tu as fait Ava, il fallait le faire, on devait faire ça ensemble.
Elle aussi a mis fin à sa relation avec son copain, juste avant moi. Pour me prouver qu'elle était prête à le faire. Pour me montrer jusqu'où elle pouvait aller pour moi, jusqu'où je devais aller pour elle.
Lola doit voir que je regrette, que ça me fait mal. Que les mots de Mathieu résonnent encore dans ma tête. Il ne s'est pas mis en colère, je pense qu'il n'a pas vraiment compris. Il m'a laissée raccrocher en me répondant sur un ton un peu blasé. Après tout, ça ne faisait que quelques semaines. Nous n'étions pas encore amoureux, pourquoi j'ai si mal ?
Pourquoi j'ai si mal alors qu'on commençait à peine à définir le cadre de notre relation ? Pourquoi j'ai à ce point besoin de ses bras alors que quelques minutes plus tôt je n'y pensais même pas ?
Lola me félicite encore, on va pouvoir compter à fond l'une sur l'autre, cette relation me changeait trop, j'oubliais mon amie, je mettais trop de distance avec elle. Par deux fois j'ai annulé nos traditionnels dîners des mardi et vendredi pour passer la soirée avec Mathieu. Parce qu'il était très pris et que c'étaient les seuls qu'il avait pu m'accorder. Mais comment ai-je pu le faire passer avant ma meilleure amie ?
Depuis que je suis avec lui, comme il n'aime pas particulièrement que je sorte en boite de nuit sans lui, j'ai refusé d'y aller plusieurs fois seule avec Lola. Ça l'a mise en colère, il ne doit pas contrôler ma vie, il ne doit pas décider pour moi. Personne ne doit nuire à mon amitié avec Lola.
Mais en réalité, je n'ai jamais aimé les boîtes, et ça me dérangeait pas vraiment, de ne pas y aller. Et puis moi non plus, je ne voulais pas qu'il y aille sans moi. Mais Lola dit que je ne pouvais pas faire confiance à Mathieu, il y allait quand même, c'est certain. J'ai bien fait de le quitter. Maintenant c'est elle que je ne vais plus quitter.
Elle va être là pour me consoler, on va faire plein de choses ensemble. Mathieu sera bientôt un lointain souvenir.
Surtout je ne dois pas reprendre contact avec lui, et si ça arrive, je dois vite le dire à Lola pour qu'elle rattrape ma bêtise. Je devrais le bloquer un peu partout. Elle me dit que si je ne le fais pas, elle pourra le faire à ma place.
De toutes façons maintenant il doit déjà avoir oublié mon existence, il est tellement occupé, peut-être qu'une autre m'a déjà remplacée.
Pourquoi j'ai si mal ?
C'est Lola qui a lancé l'appel, c'est Lola qui a dit à Mathieu "Ava veut te parler." Avant de me tendre le téléphone en me fixant jusqu'à ce que je prononce les paroles que j'aie eu l'impression de m'entendre dire derrière une vitre blindée.
"on va s'arrêter là toi et moi, je sais plus où j'en suis."
Et maintenant ça fait plusieurs jours, et j'ai de plus en plus mal.
J'essaie d'en parler à Lola, parce que j'ai qu'elle. Mais elle dit que ça va passer, que Mathieu ne vaut pas la peine que je déprime ainsi depuis une semaine. Que ce n'était qu'une relation temporaire et légère. On n'allait pas se marier. Franchement, c'était pas un mec pour moi.
Et puis maintenant je suis là pour diner avec elle. Tous les soirs.
Lola dit que plus je fais des choses, plus vite j'oublierai Mathieu. On pourra redevenir comme avant. Inséparables, sans hommes pour intervenir dans notre amitié.
Il n'aimait pas beaucoup Lola, il disait que c'était une fille à problèmes, qu'elle voulait trop contrôler ma vie. Lola disait la même chose de lui.
Au début quand j'ai rencontré Mathieu, elle pensait que ça durerait pas, qu'on se reverrait quelques fois, sans s'attacher. Lola répétait toujours que je ne devais pas m'attacher à lui. Mais on s'entendait si bien, je n'avais pas peur de m'ouvrir à lui. Parfois je n'avais pas envie de raconter à ma meilleure amie tout ce qui se passait entre nous, j'avais envie d'en garder un peu pour moi. Elle détestait ça. Je m'en veux d'avoir été aussi égoïste.
Lola aime bien tout faire comme moi, elle achète souvent les mêmes vêtements, même si elle dit toujours qu'ils vont mieux sur elle, parce qu'elle est très mince. Moi j'ai une grosse poitrine et mes hanches sont larges. Et puis il y a ces petits bourrelets au niveau de mes aisselles. Lola dit toujours que c'est vraiment dommage que je ne puisse pas porter de débardeur à cause de ça.
Il y a un mois je me suis fait couper les cheveux, j'ai une frange, Mathieu a trouvé ça sexy, Lola a dit que ça ne m'allait pas très bien, ça faisait vulgaire. Maintenant j'ai hâte que mes cheveux repoussent pour ne plus avoir cette frange. En plus elle s'en est fait faire une. C'est clair que sur elle, c'est plus élégant.
Je la connais depuis deux ans, mais je me souviens pas à quel moment elle a pris autant de place dans ma vie. À quel moment elle a pris toute la place.
Mathieu me manque et je ne comprends pas pourquoi ça me fait aussi mal.
Lola m'avait pourtant promis que ce vide disparaîtrait, qu'elle comblerait l'espace libre. Dans ma vie oui, elle l'a remplacé. Mais dans mon cœur, le néant s'agrandit de jour en jour.
On est retournées en boîte. C'était horrible. J'ai passé ma soirée à chercher un visage qui n'était nulle part. Elle trouve que je ne fais pas d'effort, mais je suis si fatiguée.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi, mais je n'ai plus aucune envie de faire quoi que ce soit. C'est comme si j'avais une forte fièvre continue. Aucune force pour quitter mon lit. Aucune force pour sortir, vivre chaque matin. Je m'éveille avec l'envie de me rendormir.
Je ne me souviens plus de la dernière fois où je suis sortie de chez moi. Ni même ce que j'ai fait. Lola vient me voir moins souvent ces derniers temps. Pourtant j'ai tout fait pour qu'on soit toutes les deux.
Et j'ai quitté Mathieu.
Je crois qu'à force de rêver de lui toutes les nuits, j'oublie un peu que j'ai mis fin à notre relation. Mes pensées s'embrouillent entre inconscience et conscience, les somnifères n'aident pas. J'ai revécu notre première rencontre. Quand j'aidais la vieille gérante du bureau de tabac, le sourire crâneur qu'il m'a lancé en payant ses clopes et ses feuilles longues.
Pourquoi c'est maintenant que je l'ai quitté que je me rends compte de l'importance qu'il avait ?
Cette nuit, dans un de mes rêves, je lui ai envoyé une dizaine de messages. En lui expliquant que je ne voulais pas mettre fin à cette relation. Que j'avais fait une erreur, que j'avais eu peur.
Lola serait furieuse si je faisais ça pour de vrai, et moi je serais bien honteuse. Une pauvre fille qui largue son copain pour lui envoyer un mois plus tard des regrets et des plaintes, comme c'est pathétique. Comme il se moquerait de moi si tout était vrai.
Mathieu aimait bien se moquer de moi. Pas méchamment, simplement parce que je ressens un plaisir coupable en suivant la télé-réalité et que j'aime bien écouter les One Direction pour me rappeler mon adolescence de fangirl.
En me souvenant de ça, j'ai voulu me rendormir aussitôt, pour passer encore un peu de temps avec son rire et ses boutades.
Mon téléphone a sonné à trois heures du matin en affichant son prénom, j'étais toujours persuadée d'être en plein rêve. J'ai décroché en pleurs et répété les mêmes mots.
"Je voulais pas."
"Je suis désolée."
"Je voulais pas."
Quand il a répondu "Je suis chez toi dans une demi-heure", sa voix ne m'avait jamais parue aussi réelle. Ça m'a fait très mal.
Que dirait Lola si elle savait comme je rêve de Mathieu. Elle serait furieuse sans doute. Au lieu de dormir toute la journée et de rêver, de m'imaginer ses bras autour de moi et son souffle contre mon oreille, je devrais passer du temps avec elle. Je devrais m'occuper d'elle. Mais elle me l'a dit, je suis trop égoïste, je ne vois que mes problèmes, elle souffre bien plus que moi et depuis que j'ai rencontré Mathieu, je la laisse complètement tomber. Quelle mauvaise amie.
Mon Dieu j'ai tellement honte.
Est-ce que je mérite seulement de vivre ? J'ai abandonné ma meilleure amie avec tous ses problèmes. J'ai quitté mon copain alors que je ne voulais pas, j'ai mal.
Sa voix était si réelle.
Est-ce qu'on rêve quand on est mort ?
Est-ce que je pourrai entendre cette voix, sentir ces bras, ce souffle, quand je me serais endormie pour toujours ?
J'aimerais bien.
Quand je dors j'ai moins mal, alors dormir pour toujours, c'est se débarrasser de la douleur.
Hier j'ai essayé d'appeler Lola, elle n'a pas répondu, je la comprends, je passe mon temps à m'apitoyer sur mon sort. Je l'ai laissée tomber.
En ouvrant les volets je prends conscience qu'il fait nuit. C'est normal à presque quatre heures du matin. L'air frais contre mon visage, je ne l'avais pas senti depuis longtemps. Ça fait du bien. Mon quartier est tranquille, il n'y a pas un chat dans la rue. Les réverbères éclairent les trottoirs nus, je cherche un signe, une présence.
Je ne sais plus si je rêve.
Je me souviens du sourire de Mathieu, l'ai-je seulement déjà vu ? Ou était-ce là aussi un rêve, un rêve depuis le début ? Le fantasme d'une jeune femme seule dans un appartement qui aurait tout donné pour qu'un homme comme lui la prenne dans ses bras, l'éloigne un peu de Lola...
Mais sa voix... sa voix semblait si réelle.
Je crois bien que j'étais amoureuse de lui.
Et je le suis encore, peut-être. Surement. Ou de son souvenir. De son image.
Une silhouette se détache au bout de la rue, quelqu'un marche. Je la fixe, elle se rapproche de mon immeuble. C'est un homme. Je m'accroche à cette vision comme à un mirage en plein désert.
Les larmes coulent sur mes joues et le vent semble les glacer instantanément contre ma peau. On dirait Mathieu en bas. Peut-être finalement ne me suis-je pas réveillée. Il ne me voit pas, je peux l'appeler.
Ou alors je peux le rejoindre directement en sautant. On peut tout faire dans un rêve. Peut-être même qu'il me rattrapera.
Mais si je tombe, si je meurs, je vais me réveiller. Il ne faut surtout pas se réveiller. Pas tout de suite. Pas avant d'avoir croisé le regard de Mathieu.
Mais alors que je m'apprête à crier son nom dans la rue, il n'est plus là. Disparu. Où ?
Ce rêve est décevant.
Il fait froid.
Où est Lola ? Quand viendra-t-elle ?
Est-ce qu'on rêve quand on est mort ?
Finalement peut-être que je le suis déjà, morte.
Peut-être même que Lola, Mathieu et toute cette histoire n'ont jamais existé. Ni même moi.
Alors ça vaut le coup de savoir ce qu'il se passera si je saute ?
— Putain Ava ! Ta porte ouverte, c'est archi dangereux ! T'es où ?
Des pas dans l'appartement.
Sa voix est si réelle.
Quand la porte s'ouvre, mes yeux quittent le trottoir.
Un chapelet de jurons résonne dans la pièce.
Tout mon corps est parcouru de frissons, je baisse les yeux sur ma presque nudité.
— Je voulais pas...
Il est là, mais j'ai mal. Normalement quand je rêve je n'ai pas mal. C'est insoutenable soudainement. J'ai besoin que ça s'arrête.
Mourir c'est bien, mourir c'est mieux.
— Arrête tes conneries.
Il tient mes deux bras et je le dévisage. C'est si douloureux. Il est tellement beau dans ce rêve que sa non-réalité me perfore le cœur. J'ai besoin que ça s'arrête. La sensation de ses doigts contre ma peau, lorsque j'en prends conscience, m'arrache un cri de douleur. Je lis alors une véritable terreur dans ses yeux. Il me lâche, ferme la fenêtre.
C'est une véritable torture, comme si tout mon corps voulait rejeter cette souffrance mais qu'il ne savait comment l'expulser. Vomir, saigner, mourir.
— J'vais appeler les pompiers.
Mes oreilles sifflent et la voix parfaite continue de parler, mais je ne parviens plus à détailler les mots, je ne veux plus l'entendre, elle me fait trop mal.
Je crois qu'il dépose une couverture sur mes épaules. Je sens ses mains sur moi, sur mon visage, elles sont glacées mais me brulent. Je voudrais lui hurler de disparaître, plus aucun son n'émane de ma gorge. Il faut que je meure pour me réveiller.
Tout se brouille jusqu'à ce que d'autres voix se mêlent à la sienne. Inconnues. Une violente douleur me transperce le bras. Je sens rapidement des lèvres contre mon oreille, cette fois je distingue des mots.
— Ça va aller je reste avec toi.
Puis plus rien. Cette fois le vrai sommeil. Sans rêves.
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