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Je m'assoie dans la cour, face à l'école, de manière à être parfaitement au milieu. Mon carnet se remplit doucement, mais sûrement. J'ai hâte de revoir Sean Ghosn, j'ai tant de choses à lui demander, et à lui montrer ! Mais pour l'instant, l'heure est à l'urbex. Je vais pour rentrer dans l'école tout en sachant que personne n'y est allé avant. Et très franchement je comprends pourquoi en observant l'état du sol. Même une feuille qui viendrait à tomber ferait le tout s'écrouler. Et qui sait ce qu'il y a en dessous.
A l'intérieur, le plancher est parsemé de trous, et le toit est en voûtes, fort heureusement pour moi. Même si j'avoue que ça renforce l'idée de cimetière. C'est vraiment le genre d'endroit rempli de long couloirs à n'en plus finir, mal éclairés, dans lesquels vous voyez les ombres se balader sans aucun corps. Je ne vois pas ce qu'il y a au loin, tout est noir. Des racines ont commencé à dévorer les murs, les gros meubles, le plancher. Je vais tout doucement au bout de ce couloir, en évitant les trous et les feuilles de cours éparpillées sur le vieux bois. J'ai la drôle sensation qu'à chaque fois que j'avance, le bout du tunnel s'éloigne. Et pourtant, je commence à apercevoir dans la grande ouverture sans porte une mini cour qui rappelle étonnamment celle des monastère. A croire que s'en est un. C'est fort probable quand on y pense. Ça ne m'étonnerait pas.
Les escaliers sont à l'extérieur, couvert par les voûtes. Ils ne sont pas en bois, et heureusement, même en béton ils donnent l'impression de bientôt s'effondrer. Je me retourne, pour voir d'où je viens. Dans le sombre couloir, je dirai parfaitement à mi-chemin, une silhouette me fait face. Elle est absolument immobile. Les bras le long du corps, la tenue d'époque, la tête plâtrée, le seul mouvement que nous sommes capables de faire est cligner des yeux. Nous nous faisons face, et j'ai finalement presque l'impression que c'est moi qui lui fait peur. Un bruit progressif raisonne, comme s'il se déplaçait des murs jusque dans sa direction. Un autre enfant, plus jeune fait apparition, il ne m'a pas vu tout de suite. Il lui tire le bras, ne comprenant pas pourquoi il ne le regarde pas. Il s'arrête d'un coup. Sa tête tourne alors très lentement en ma direction, dans un silence glacial. Les deux me font maintenant face. J'hésite un moment. Faut-il repartir ? Est-ce au moins réel ? Sont-ils mal intentionnés ?
Je les vois se regarder. A chaque fois qu'il font quelque chose, ils le font dans une lenteur extrême. Chaque déplacement, chaque rotation, chaque clignement. Je ne me sens pas à ma place, mais d'un autre côté, j'ai envie de savoir. Un peu perdue, je sens mon souffle court. Je m'assoie au sol, l'air me manque, puis d'un coup rien. La tête baissée dans mes genoux, je vois le bout de leurs chaussures, quasiment collées aux miennes. Comment ont-ils fait pour aller aussi vite sans faire un bruit ? Je n'ose pas lever la tête. Je ferme les yeux, et j'attends.
Mes cheveux dansent. Le plus petit des deux joue avec, je le sens s'asseoir doucement contre moi. Il ne bouge pas. Il m'attend semble-t-il. Je relève la tête. Le plus grand est devant l'escalier, il m'attend aussi. Il lève son bras en direction des marches, puis dans un autre excès de lenteur, le replace le long de son corps. Bien. S'il m'encourage, je devrais peut-être les suivre.
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