Des bruits de fracas, des fragments de verre éparpillés partout au sol sur lequel des tâches écarlates étaient visibles. Des cris et des hurlements.

Cela faisait parti du quotidien de Senjuro.

Son père était alcoolique depuis la mort de sa femme, Ruka. Il en était dévasté, elle était tout pour lui, il l'aimait tellement. Sa mort était une tragédie dont il pensait ne jamais s'en remettre. Il avait donc commencé à boire pour oublier sa tristesse immense, il s'occupait à peine de ses fils. Mais Kyojuro et Senjuro étaient toujours là pour leur père, pour tenter de lui faire remonter la pente.

Shinjuro buvait énormément de sake chaque jour. Parfois l'un de ses fils arrivait à le dissuader d'en prendre et parfois l'homme ne pouvait tout simplement pas résister à un verre.

D'abord c'était un verre, puis deux, puis trois jusqu'à ce qu'il se retrouva ivre et qu'il perdit le contrôle de ses pensées et de ses actes.

Devenant violent, Shinjuro frappait Senjuro dès qu'il se passait un petit truc qui l'agaçait. Comme quand le plus jeune le bousculait par accident en ne regardant pas où il marchait. Kyojuro avait toujours protégé son cadet et ramenait son père à la raison. Shinjuro se mettait ensuite à culpabiliser et s'enfermait dans sa chambre.

Mais ce fut un cercle vicieux...

Plus il accumulait de la culpabilité, plus il se sentait triste et minable, plus il buvait et plus il était violent. Ça ne s'arrêtait jamais. Senjuro ne lui en voulait pas d'avoir levé la main sur lui maintes fois, le jeune garçon savait à quel point ça allait mal pour lui. Son plus jeune fils ne pouvait pas forcément comprendre sa douleur car il n'avait pas connu sa mère assez longtemps pour se rappeler d'elle.

Kyojuro, assis à table, était en train de se bander la main droite. Senjuro était en face de lui, le regard triste et inquiet. Les tâches de sang étaient encore visibles sur le sol, le jeune garçon comptait s'occuper de nettoyer tout cela après s'être assuré que son aîné allait bien.

— Comment va ta main ? demanda gentiment Senjuro à voix basse.

— Ne t'en fais pas, ce n'est rien !

Le Pilier de la Flamme leva la tête vers son frère pour lui afficher un sourire réconfortant, même si le plus jeune n'était pas totalement rassuré.

— Je vais nettoyer le sang au sol... ajouta-t-il en se levant.

Kyojuro le remercia. C'était le sang de celui-ci au sol car il avait ramassé les morceaux de verres qui étaient très tranchants et difficiles à prendre en mains sans blessures.

À genoux avec une éponge mouillée et un peu de produit, Senjuro frottait les tâches silencieusement. Dans ce genre de moments, l'atmoshpère du Domaine Rengoku était toujours calme, sombre et tendue. Comme si il venait d'y avoir un décès.

En entendant quelques reniflements, le plus âgé des deux frères s'arrêta avec les bandages et se tourna vers Senjuro. Il versait des larmes en regardant le sol, ça se voyait qu'il essayait à tout prix de se contenir mais c'était un garçon au coeur sensible et fragile. Ses mains tremblaient alors qu'il continuait à frotter doucement le parquet, cette scène fit un pincement au coeur de Kyojuro.

— Senjuro, viens. dit-il en tendant ses bras.

Senjuro se leva et s'approcha de lui pour se blottir dans ses bras. Les larmes coulaient et le plus âgé tentait de le rassurer et l'appaiser. Le petit garçon était si triste pour son père mais il avait aussi peur que sa violence n'empire et qu'un jour un drame arrive. Sa famille était la chose la plus importante pour lui, jamais il ne voudrait briser ses liens si précieux.

— Je te promets que tout ira bien, d'accord ? Tout finira par s'arranger, rassura le plus grand en caressant les cheveux de l'enfant.

Le cadet ne répondait pas mais il comprenait que le seul remède que pouvait avoir leur père était le temps. Intérieurement, il priait pour que ça s'arrange le plus rapidement possible.

— Père s'en veut beaucoup d'agir ainsi, continua Kyojuro. Même si ça ne justifie pas totalement ses actes, il va mal et il se sent seul. Nous sommes là pour lui et je te protège aussi !

Senjuro restait encore quelques minutes dans les bras de son grand frère, se sentant en sécurité près de lui. Une fois un peu plus calmé, il prit la main à Kyojuro, après avoir déposé l'éponge sur la table, pour terminer lui-même les soins.

— Ne t'occupes pas de moi. Va plutôt t'occuper de ta joue, elle est bien marquée.

Senjuro secoua la tête de droite à gauche tout en serrant les bandages pour que le saignement s'arrête rapidement.

— Ça peut attendre. Ta blessure est plus importante et elle peut s'infecter, contrairement à ma joue.

De son autre main, le plus grand caressa le dos de Senjuro. Ce premier le regardait avec un sourire rempli d'amour, le trouvant si responsable et bienveillant.

— Merci. Tu ferais un très bon médecin.

— Tu le penses vraiment ?

— Oui. Tu pourrais être P
pourfendeur et en même temps médecin. Shinobu pourrait te recruter avec elle au Domaine des Papillons.

Senjuro termina les soins de la main de son frère. Il semblait réfléchir pendant quelques secondes, essayant de se souvenir de qui était la jeune femme mentionnée. Il ne connaissait pas bien les Piliers et ne les avait jamais vraiment vus en vrai.

— Shinobu... répéta-t-il. C'est aussi un Pilier, non ?

— Oui, il s'agit du Pilier de l'Insecte. Elle est très douée dans le domaine médical et scientifique.

Hochant la tête, Senjuro afficha un léger sourire mais on pouvait quand même y voir une once de tristesse pour la crise de Shinjuro. Il était heureux pour la proposition de Kyojuro mais son esprit était trop focalisé sur ce qu'il se passait en ce moment même pour s'en réjouir pleinement.

— Ça m'intéresse beaucoup. Merci de m'en avoir parlé.

— Avec plaisir. Je ferais tout pour que tu puisses trouver la voie dans laquelle tu veux t'engager.

Ils s'enlacèrent tous deux pendant plusieurs minutes avant que Kyojuro ne se leva pour prendre un sachet de glace et le déposer sur la joue de son jeune frère. Senjuro eut un léger frisson en sentant le froid des glaçons sur sa joue mais cela lui faisait aussi beaucoup de bien.

— Prends ça. Ça va te faire du bien.

Senjuro prit le sachet qu'il garda contre sa joue. Il le remercia avec un doux sourire. L'aîné le regarda quelques minutes avant de diriger son regard vers la chambre de Shinjuro dont ce dernier était encore dedans. Le grand frère se disait qu'il était temps d'engager une conversation avec son parent. Redirigeant son regard vers son jeune frère, le Pilier prit la parole.

— Je vais aller voir père. Tu restes ici, d'accord ?

— Oui.

Kyojuro embrassa le front de Senjuro et s'avança lentement vers la porte de la chambre de son père. Sa respiration était lourde, il essayait de garder son calme et son sang-froid avant de frapper à la porte.

Une seconde, deux secondes, ... Aucune réponse.

— Père ? Je peux te parler, s'il te plaît ?

Kyojuro parlait doucement afin de montrer qu'il ne voulait pas s'embrouiller avec lui. Shinjuro finit par accepter qu'il entre, ce que fit son fils sans plus tarder. Le plus âgé était assis dans son futon, ses yeux rouges à cause des larmes qu'il venait de verser. Il devait en avoir versé beaucoup pour avoir les yeux aussi rouges. Cette vue brisa le coeur de son fils aîné qui referma la porte derrière lui et s'approcha pour ensuite s'abaisser à sa hauteur.

— Père, je tiens vraiment à discuter avec toi...

Shinjuro ne le regardait pas dans les yeux. Se sentant trop honteux, ses yeux étaient rivés vers la couverture qui était posée sur lui. Le Pilier de la Flamme attendait quelques secondes pour être sûr de si il n'allait pas se mettre à parler. Après les silencieuses secondes, Kyojuro se remit à parler.

— Je ne peux peut-être pas te comprendre sur ta douleur. Je n'ai pas été aussi triste lors de la mort de mère. Je n'avais que neuf ans, Senjuro un an. J'étais vraiment triste mais j'ai fini par accepter que je devais avancer sans elle...

Le jeune homme prit une courte pause, repensant à ce qu'il va dire pour ne pas heurter la sensibilité de son géniteur.

— Je veux juste que tu saches que tu n'es pas seul. Senjuro et moi sommes là pour toi. Nous ne t'envoulons pas pour ce que tu as fait. Mais tu devrais vraiment arrêter de boire car ça ne fait que devenir un cercle vicieux auquel il faut y mettre un terme. Tout ça ne fait de bien à personne.

Après un léger soupire, son père versa silencieusement des larmes. Ses poings se resserraient sur sa couverture tandis que ses lèvres tremblaient.

— Père, je...

Il ne termina pas sa phrase que Shinjuro tourna le regard vers lui, les yeux coulant de larmes à flot. Son expression montrait une tristesse et une détresse profonde ainsi qu'une immense culpabilité.

— Je suis désolé pour tout... Je vous ai causé tellement de douleur... Je ne suis pas un bon père... Je ne montre pas le bon exemple... Je me suis mal occupé de vous...

Le Pilier se rapprocha encore un peu afin de le serrer doucement dans ses bras. Il ne voulait pas le lâcher de si tôt, Kyojuro voulait s'assurer que son père se calme complètement.

— Nous te pardonnons. N'aie pas de poids sur la conscience car nous ne t'en voulons pas.

Shinjuro le serra en retour, ses mains s'aggripaient à son fils comme si sa vie en dépendait. Il avait vraiment besoin de ce câlin. Le plus âgé avait besoin de réconfort pour pouvoir se relever et avancer.

— Merci, Kyojuro...

Le câlin dura longtemps. C'était appaisant, chaud et doux. Kyojuro tenait vraiment à son père et voulait réellement qu'il se sente bien. Son attention se dirigea vers la bouteille de sake qui était à proximité d'une commode, non loin du futon.

— Tu me promets d'arrêter de boire ? Je sais que s'arrêter tout d'un coup est dur, mais si tu le fais petit à petit, tu y arriveras ! Promis ?

Kyojuro parlait tendrement avec de la douceur et de l'amour dans sa voix. Shinjuro prit une profonde inspiration et relâcha le câlin. Ça lui faisait vraiment plaisir de recevoir de l'aide pour son alcoolisme, il se sentait soutenu.

— Je te le promets. Je veux que tout rentre dans l'ordre et pouvoir m'occuper de vous deux correctement.

Son fils sourit avec joie et fierté. C'était un nouveau pas pour aider l'ancien Pilier à guérir.

— C'est une décision flamboyante !

Ayant tout entendu depuis l'autre côté de la porte, Senjuro ouvrit lentement cette dernière. Il passa sa tête et les regardait en tenant toujours le sachet de glaçons contre son visage.

Kyojuro et Shinjuro lui sourirent et ce deuxième fit signe de la main à son jeune fils de s'approcher. Senjuro s'avança doucement vers eux en déposant les glaçons et en se blottisant dans les bras de son père qui lui rendit sans hésiter son étreinte.

— Je suis terriblement désolé, Senjuro... Je ferais très attention dorénavant.

— Ce n'est rien...

Senjuro restait dans ses bras, voulant profiter de ce moment de paix où tout était en train de rentrer dans l'ordre. Sans s'en rendre compte, il était en train de s'endormir contre son père qui le laissait se reposer dans ses bras. Ce moment le rendait ému, c'était adorable de voir son fils dormir paisiblement. Passant ses mains dans ses cheveux, Shinjuro se rendit compte, en regardant vers l'extérieur, que le soir arrivait. La journée était déjà passée et Senjuro devait se remettre de ses émotions. Kyojuro embrassa le bout du nez de son cadet avant de le laisser seul dans les bras de son parent.

Shinjuro le bercait dans ses bras en le regardant avec amour, il carressait sa joue marquée sans le réveiller et sans lui faire mal. Il comptait maintenant prendre grand soin de ses fils à partir de maintenant. Il voulait se rattraper et être un père présent. Il allait devoir tourner la page sur la mort de sa bien-aimée et ne plus vivre dans le passé.

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Coucou, j'espère que ça vous aura plus !

On se revoit bientôt pour le prochain chapitre !

Bye !

Chapitre suivant : Happy Birthday, Tanjiro !