Aujourd'hui, rien a changé.
La gorge battante et le cœur noué.
Anna attend. Immobile, elle attend. Silencieuse, elle attend.
Elle attend, indéfiniment.
Ses yeux apeurés fixe le seuil de sa nouvelle maison. Elle avance à reculons vers l'étrange bâtisse. L'immense porte noir en face d'elle l'oppresse. Elle a peur, elle tremble à l'idée que celle-ci s'ouvre. Elle aimerait arrêter le temps, pour que cette porte ne s'ouvre jamais, pour pouvoir fuir loin d'ici, aller voir la mer...
Mais elle serait seule. Triste et seule.
Anna ne veut plus arrêter le temps. Non, elle veux le remonter plutôt, retourner à l'époque où ils n'étaient que tout les trois : Son père, elle, et le bonheur.
De légers picotement viennent chatouiller le nez d'Anna. Elle sait alors que des larmes ne vont pas tarder à ruisseler le long de ses joues rougit par le froid. Elle lève immédiatement les yeux au ciel, pour retenir les gouttes d'eau salée dans ses yeux humides.
Non, elle ne pleurera pas. Pas cette fois. Que dirait son père s'il la voyait comme ça ? Il ne dirait rien bien sûr, il la prendrait simplement par la main, caresserait doucement sa joue mouillée, et l'emmènerait loin, loin de ce qui l'a fait pleurer.
Mais son père n'est pas là, et le bonheur aussi est parti. Il ne lui reste que la mélancolie.
" Alors, tu te décides ? Tu sonnes ? "
Encore des ordres déguisés en question. Anna ne répond pas, elle ne veux pas obéir à cette femme trop sévère. C'est une traîtresse, une menteuse, une hypocrite. Elle est tout ce que son père n'aimait pas, tout ce qu'Anna n'aime pas. Elle l'avait attiré avec des jolis mots, de belles promesses, mais ce n'étaient que des mensonges. Maintenant, elle est ici à cause d'elle.
Alors, Anna ne répond pas, elle n'obéit pas. Elle n'obéit qu'à son père de toute façon.
" Très bien, je vais le faire alors. "
La méchante femme pousse un long soupir, sûrement pour qu'Anna soit au courant de son exaspération, puis elle tend son bras vers la sonnette. Les yeux horrifiés de notre petite héroïne suivent sa main gantée. Elle veux crier, lui ordonner de ne pas faire cela, mais elle ne fait rien. La bouche d'Anna demeure silencieuse.
Dring.
Le bruit strident de la sonnette résonne dans la pauvre tête d'Anna. Elle a l'impression qu'il rebondit sur les parois de son crâne d'enfant, ricochant infiniment dans son cerveau apeuré. Ces yeux rond se décrochent de la sonnette pour venir se fixer de nouveau sur la grande porte noir. La porte de ses enfers, de ses cauchemars.
Le bruit de la sonnette s'est brusquement arrêté de rebondir dans sa tête. Maintenant, ce sont des bruits de pas qu'elle entend. Des petits bruits secs, étouffés par la distance et l'isolation des murs, mais elle les entend clairement. Et elle les entend se rapprocher.
La gorge battante et le cœur noué.
Son esprit s'affole, il se met à rechercher un vague souvenir du visage de sa mère. Elle se souvient de ses cheveux châtains clairs et raides, de ses yeux furieux, de sa peau orangée, de sa bouche vulgaire, de ses ongles noirs. Son imagination enfantine combiné à sa peur lui renvoient un être inhumain. Une femme avec de la paille à la place des cheveux, qui possède des yeux rouges dégoulinant de lave, avec une langue de serpent qui siffle si fort qu'elle tranche les oreilles, et des doigts crochu de sorcière, des dents de requin, des oreilles de lutins, un nez...
Clac.
Un coup sec de talon arrête brusquement son imagination. Un dernier coup de talon juste derrière le porte.
La gorge battante et le cœur noué.
Clic.
La serrure qui se déverrouille. La poignée qui tourne. La porte qui grince. Anna qui recule.
" Bonjour ! "
Et... Une voix fluette ?
" Madame Lorgrid ? "
Une voix fluette, enjouée, qui appartient à une belle dame. Une dame avec des cheveux dorés, des yeux couleur noisette, une bouche rose en forme de cœur et des pommettes remontées. Une dame qui porte une robe à fleurs, bien qu'il fait froid. Une dame qui sourit, qui à l'air gentille. Une dame chaleureuse. Une dame qui est la mère d'Anna.
" Oui c'est moi. Qu'est-ce qui vous amène ? "
" Je vous ai eu au téléphone. C'est pour votre fille... "
La méchante femme fait un pas de côté pour montrer Anna, qui s'était entre-temps cachée derrière ses longues jambes à collant noir.
Anna lève doucement son regard. Sa mère baisse le sien.
Quelque chose se brise.
Dans le visage de sa mère, quelque chose se brise.
En posant les yeux sur la petite, son visage n'a pas changé, mais Anna l'a vu. Quelque chose s'est brisée.
Sa mère garde son sourire, son visage détendu, mais dans ses yeux, il y a quelque chose de froid, de distant. Anna lit de la haine dans son regard. La même haine qu'elle lisait avant. Rien a changé.
" Oui c'est vrai, elle est sous ma garde maintenant... Et bien, bonjour Alice. "
Ses yeux méprisant fixent le visage d'Anna en attendant une réponse qui ne vient pas. En entendant la voix de l'autre femme, la haine dans son regard disparait, laissant place à une douceur écœurante.
" Euh... Elle s'appelle Anna. "
Silence.
Sourire radieux.
Voix enjouée
" Oh oui excusez-moi ! Je voulais l'appeler Alice, mais c'est son père qui a finalement choisi son prénom. "
Elle prononça le mon "père" avec un certain dégoût. Cela fit frissonner Anna.
" Et je suppose que c'est aussi son père qu'il lui a appris à ne pas répondre ? Quelle éducation ! "
Elle se met alors à rire. Un rire agaçant. Un rire qui n'est pas un rire de joie. Non, c'est un rire de moquerie. La méchante femme sourit. Peut-être par politesse, peut-être parce qu'elle est d'accord.
Anna ne sait pas. Anna s'en fout. Anna est colère, en colère contre cette mère qui dit des choses méchantes sur son père. Alors Anna prend des yeux méchants, des yeux tempêtes qui lancent des éclairs. Et elle prend une voix fâchée, une voix froide qui glace le sang.
" Mon père m'a seulement appris à ne pas parler aux inconnus. "
Silence.
Sourire disparu.
Voix cassante.
" Très bien ma chère, si tu ne veux pas me parler, soit. Mais maintenant entre. Et dépêche-toi ! Je n'ai pas toute la journée. "
Elle se décale alors, pour laisser Anna franchir le seuil. Anna n'a pas envie. Elle ne bouge pas. Mais une main derrière elle la pousse. Alors elle avance à petit pas, le cœur battant et la gorge nouée.
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