5.0 : Uriel

Michael regarda encore une fois dans le bouquin, qu'il feuilletait depuis plus d'une heure. Il grogna quand il se rendit compte qu'il n'en était même pas à la moitié.

Foutus démons !

Ils étaient rentrés depuis deux jours, mais il n'avait pas pris une minute de repos. Il avait réuni la meilleure équipe qui soit : des linguistes, des professeurs d'université spécialisés dans les langues anciennes, et même des historiens. Tous avaient signé une clause exclusive de confidentialité, sans rechigner, impatients de mettre le nez dans ces livres.

N'étant pas très calé en latin, on lui avait conseillé de chercher principalement l'expression « in fine mundi », à savoir « à la fin du monde ». Bien sûr, malgré les trois cent quatre-vingts pages qu'il avait fouillées, il n'avait encore rien trouvé.

Il frotta ses yeux fatigués, et pinça l'arrête de son nez pendant quelques secondes. Il n'avait jamais été aussi épuisé de toute sa vie. Sa tête bourdonnait comme si un essaim d'abeilles y avait élu domicile et il avait des sueurs froides.

Il prit sa tête entre ses mains, ébouriffant un peu plus ses cheveux châtains et poussa un soupir.

— Alors, on craque ?

Il leva des yeux injectés de sang vers Clover, mais ne répondit rien. Il n'avait même plus la force de la rembarrer.

La jeune femme s'assit à côté de lui et fronça les sourcils.

— Eh, G.I. Joe, tu vas pas nous lâcher maintenant, quand même ?

Elle eut presque un pincement au cœur quand elle vit les cernes sous ses yeux. Il se pencha en arrière, et la fixa, le regard flou. Clover secoua une main devant son visage, pour s'assurer qu'il était toujours avec elle.

— Ok, chéri, je crois que t'es bon pour une pause...

Elle attrapa le livre, le glissa vers elle et le suivit du regard alors qu'il se levait et traînait les pieds pour sortir de la pièce.


***


Le militaire tourna plusieurs fois dans les couloirs de la base, avant de se dire que, finalement, l'infirmerie ferait un très bon hôtel. Il s'effondra sur le lit même où Clover avait séjourné à son arrivée.

Incapable de résister, il s'endormit immédiatement... lorsqu'un grand fracas le réveilla en sursaut.

Bondissant du lit, tous les sens en alerte, il regarda autour de lui, et constata qu'il n'était plus dans l'infirmerie.

Ok, il avait dû louper un wagon, là...

Avec prudence, il avança de quelques pas. Il était dans une sorte de désert, quoique ça ressemblait plutôt à un enfer. Il n'y avait pas de ciel, juste une vaste étendue grisâtre, et de la terre s'échappaient des nuages de soufre. Il aurait dû s'étouffer, pourtant il respirait sans peine. À perte de vue, des zones arides, caillouteuses. Aucune vie à l'horizon.

Il aurait aimé avoir Ash dans sa tête, sur ce coup-là, car il ne savait absolument pas où il se trouvait, ni pourquoi il avait atterri là.

Il hésita à se déplacer. S'il était toujours à l'infirmerie et que tout ceci n'était qu'un rêve, Dieu seul savait où ses pas pourraient le conduire.

Comme pour répondre à ses questions, une forme se matérialisa à ses côtés. Le militaire fit un bond en arrière.

— Michael, prononça la forme éthérée.

Il garda le silence, un instant, méfiant.

— Mouais...

— Tu dois l'arrêter.

Michael plongea une main hésitante dans l...

Merde, mais c'est un fantôme !!

Il retira sa main.

— Ce serait avec plaisir, rétorqua-t-il narquois... mais qui ? Et puis, où je suis, là ? Et vous, vous êtes... qui ?

La forme se matérialisa un peu plus et Michael fut subjugué par sa beauté. C'était un ange.

Un putain d'ange ! Jésus, Marie, Joseph...

— Je suis Uriel, et je suis là pour te guider.

Rien que ça...

— Et... ?

Michael montra le paysage autour de lui.

— Qu'est-ce que je fais, ici ? Parce qu'à la base, je voulais juste piquer un petit somme.

« Ces humains... toujours aussi irrespectueux... »

Il haussa les sourcils, surpris. La voix avait résonné dans sa tête.

D'un doigt vaporeux, l'ange montra un point derrière Michael. Il se retourna. Quelque chose était apparu, qui n'était pas là une seconde auparavant. Et ce quelque chose foutait sacrément les jetons.

Oh, bordel...

— Euh... c'est quoi ? demanda-t-il d'une voix mal assurée.

— C'est un Titan. Ménétios.

Ah...

— Vous devez l'arrêter avant qu'il ne crève la surface de la Terre et qu'il ne décime les hommes.

Tout un programme... on va s'éclater...

— Et comment peut-on l'arrêter ?... Parce qu'au cas où vous ne l'auriez pas bien remarqué, il est... grand.

Michael observait le Titan avec l'œil d'un militaire prêt à faire feu sur sa cible. Et il était sûr de se faire botter le cul avant d'atteindre son but.

Devant lui, légèrement flou à cause des nuages de chaleur qui s'échappaient de la terre, se tenait un être gigantesque, à l'allure d'homme. Il ne portait qu'un pagne à la ceinture, et sa musculature était... hors-norme.

— Est-ce que c'est un Titan, genre Zeus et compagnie ? demanda-t-il.

— Zeus n'est pas un Titan, contredit l'ange. Son père l'était, par contre. Zeus a puni Ménétios et l'a plongé dans le Tartare. Mais il s'est échappé...

Michael soupira, et regretta d'avoir séché les cours d'histoire à l'école. Puis il sursauta, comprenant soudain ce que l'ange était en train de lui dire.

— L'apocalypse... murmura-t-il.

Il se tourna vers Uriel.

— C'est lui, la fin du monde, n'est-ce pas ?

Il observa l'ange qui hocha la tête. Il n'aurait su dire s'il s'agissait d'une femme ou d'un homme. La beauté incroyable qui s'en dégageait donnait à ses traits une finesse androgyne. Ses longs cheveux d'un blond doré caressaient ses épaules. Subjugué, son cœur manqua un coup quand ses yeux aussi brillants que du diamant se plantèrent dans son âme.

— Réveille-toi. Arrête-le !


***


Michael se réveilla en criant.

— Oh, du calme, mec.

Ash le fixait, perplexe. Le militaire jeta un coup d'œil autour de lui, et avala douloureusement sa salive. Il était revenu dans l'infirmerie, mais, dans sa tête, résonnait encore la voix de l'ange.

— Qu'est-ce qui se passe ?

Ash avait posé une main sur son épaule, et le fixait, le regard bienveillant.

Michael repoussa sa main.

— C'est Ménétios, déclara-t-il d'une voix rauque.

Ash haussa les sourcils.

— Ménétios ?

Michael se dirigeait déjà vers la porte.

— Ouais, Ménétios. La fin du monde. L'Apocalypse.

Il jeta un œil par-dessus son épaule et fixa le démon d'un air sombre.

— C'est lui qu'on doit arrêter.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top