Chapitre 9: Justin.


" Justin, 

Je t'ai mentis, tu avais raison. Je suis partis cette nuit avec Rebecca, une femme de la colonie. Je pars en Italie, j'ai besoin de voir ma famille, surtout Lucille. Ne t'inquiète pas pour moi, tout va bien se passer. Je reviendrais, je te le promet. Je suis désolée, tellement désolée. Je m'en veux terriblement de ne pas t'avertir, de t'abandonner; mais tu m'en aurais. Ne t'inquiète surtout pas. Je t'aime, ne l'oublie pas.

Alicia."

Cela fait une semaine que j'ai découvert cette lettre. Je la relie pour la centième fois, mais j'ai toujours ce trou béant dans ma poitrine quand je parcours les lignes. Je ne pleure jamais, ou presque; là, je n'ai pas pu retenir mes larmes. Ça m'a soulagé, d'une certaine façon, pas longtemps, juste le temps de digérer la nouvelle. Je n'arrive pas à croire qu'elle m'ai laissé, elle ne m'en a même pas parlé. La veille de son départ, j'ai une l'impression qu'elle retrouvait peu à peu le bonheur; je découvre maintenant que je me suis trompé, ce n'étais qu'une illusion. Je suis seul, dans les bois. Mes mains tremblent, les mots sont presque illisibles à causes des gouttes salées qui sont tombées précipitemment dessus. Je les vois rouler sur le papier, puis s'imbiber. Elle me manque tellement. Une semaine seulement qu'elle m'a quitté, je ne sais même pas si je la reverrais un jour...

Pour moi, c'est presque une trahison. J'ai l'impression qu'elle a rompu avec moi. Je me sens mal sans elle, c'est encore pire que lorsqu'elle ne me parlait plus. Au moins, je la voyais, je la savais en vie, en sécurité. Elle s'est peut-être fait tuer à l'heure qu'il est. Je refuse de penser à cela, mais c'est plus fort que moi. Je ne peux pas épargner cette hypothèse.

J'ai voulu la rejoindre à de nombreuses reprises; je sais malgré tout que c'est impossible. Elle est déjà trop loin pour que je la retrouve, et Rose m'a mis sous surveillance à la seconde où elle a su qu'Alicia était partir; pour ne pas que je parte. Je lui ai interdit de me surveiller, elle n'en fait qu'à sa tête. George, un ami à elle, me suit sans arrêt. Cela ne me dérange pas vraiment, il ne me parle pas, et reste à une certaine distance de moi.

Tout les mauvais souvenirs, les moments que j'ai passé, me reviennent de plein fouet. Je m'étais interdit de penser à ma famille, je n'ai pas réussi. Je me souviens de tout. Ma mère ne m'a jamais vraiment aimé, jamais. Elle voulait avoir une fille, et elle ne l'a pas eu. Elle s'est contentée de m'ignorer durant toute mon enfance. Quant à mon père, il essayait tout le temps de me montrer qu'il m'aimait, que je n'avais pas besoin de ma mère pour être heureux. Pourtant, j'aime mes parents, que ce soit ma mère ou mon père. Je tiens à eux, même si je ne sais pas pourquoi. Je ne me sens pas bien à chaque fois que je pense à celle qui m'a mit au monde. Elle était ignoble avec moi, je ne pourrais jamais lui pardonner. Mon enfance a été dur, ne pas être aimé par sa mère, c'est la pire chose pour un enfant. J'étais traité comme un moins que rien, et je pensais que tout était de ma faute, qu'elle avait raison. Heureusement, mon père a toujours été bon avec moi, et je l'aime, du fond du coeur. Il me manque, terriblement. 
 
J'essaie de reprendre mon souffle. J'aimerais ne plus penser à rien, même les nuits ne sont plus tranquilles. Je rêve souvent d'Alicia, puis elle se fait tuer devant moi, je ne peux rien faire. Je n'arrive plus vraiment à dormir, je suis trop inquiet. Je voudrais juste avoir de ses nouvelles, savoir si elle va bien. Ne pas savoir me rends fou, j'en deviens malade. Je lui en veut, je m'en veux aussi. Elle aurait dut me prévenir, j'aurais du l'en empêcher. Je l'aurais accompagné, nous y serions allés ensemble. De plus, je ne sais rien de cette Rebecca. Sa sœur est au camp, elle a assuré qu'elle ne savais pas ses projets; personne ne la croit. Rose m'assure qu'Alicia est en sécurité avec elle, même si ce n'est pas vraiment la personne la plus agréable qui existe. J'essaie de la croire, je n'y arrive pas. De plus, j'ai l'impression qu'elle me cache des choses. Je ne sais pas vraiment quoi, mais j'ai l'impression qu'elle s'attendait que Rebecca parte.

La nuit est en train de tomber, je rentre donc au camp. Je m'installe sur un tronc d'arbre pour manger. Lucas, Noa et Juliette sont avec moi. On n'a pas vraiment parlé de la disparition d'Alicia, mais leurs regards veulent dire beaucoup.

-Tu vas bien Justin? Tu sais que tu peux nous faire confiance, tu peux tout nous dire,me dit Juliette d'une voix douce.

-Je vais bien, ne t'inquiète pas pour moi.

J'essaie d'être aimable avec elle, c'est plutôt compliqué. Elle profite du fait qu'Alicia ne soit plus là pour tenter de se rapprocher de moi. Elle ne comprend pas que cela ne change rien pour moi.

-Détends toi mec, tu vas pas chialer pour une fille, raille Lucas.

J'aimerais tellement lui mettre mon poing dans la figure. Je me lève et pars dans notre tente, je n'ai pas envie de rester avec eux pour le moment.

Il me faut un moment pour me calmer. Alicia ce n'est pas une simple fille pour moi. Sans elle, je me sens vide, comme s'il me manquait une partie de moi. La première fois que je l'ai vu, j'ai sentis qu'elle était différente.

-Désolé pour tout à l'heure, je pensais pas que tu le prendrais comme ça, s'excuse Lucas en ouvrant la tente.

-C'est pas grave.

-T'es complètement dingue de cette fille, ça se voit à des kilomètres. Ce que je comprends pas, c'est pourquoi. Qu'est ce qu'elle a fait pour que tu sois si proche d'elle? Attends, ne t'énerve pas. Elle te rend malheureux, mais tu l'aimes. Ce n'est pas vraiment une critique, je trouve juste ça bizarre. Qu'est ce qui te plait chez elle?

-Tu ne comprendras jamais, Lucas. La première fois que j'ai vu Alicia, je me suis sentis bien; vraiment bien. J'avais un peu peur, vu que j'étais sur leurs terres, mais c'est comme si je commençais à vivre. J'ai eu une enfance assez dur, et c'est une des premières fois que je me sentais aussi heureux. Je ne lui ai jamais avoué ce que j'ai vécu avant elle. En fait je suis comme elle, je lui ment aussi...

-T'es pas comme elle, ça je peux te le confirmer, rigole-t-il.

-Recommence pas, lui dis-je en lui lançant un regard noir.

-Justin, t'es vraiment un ami pour moi. Si tu as des choses à dire, que c'est trop lourd à porter, n'hésite pas.

-J'aurais dû en parler à Alicia, je m'en veux de lui avoir caché ça.

-Donc tu veux pas m'en parler?

-C'est juste que...Que j'ai eu une mère qui se foutait complètement de mon existence, il lui arrivait d'être violente avec moi.

-Oh...Je suis désolé. Rose est au courant?

-Non, je n'ai jamais eu le courage de le lui dire. Pourtant, elle aurait put m'aider, tout le monde l'écoute dans la famille. Mais j'étais trop lâche, j'ai eu peur que ma mère me frappe encore plus pour me punir.

-Ta mère ne t'a jamais montré un peu d'affection?

-Apparemment, l'amour maternel n'était pas très présent en elle, ironisai-je avec un rire amère​.

-Je sais pas quoi dire. Moi j'étais très proche de mes parents.

-J'ai pas eu de chance, c'est tout. C'est pour ça que j'étais d'accord de quitter ma famille avant qu'on arrive en Europe. Merci de m'avoir écouté, ça faisait trop longtemps que je portais ça.

-De rien, les amis c'est fait pour ça, me dit-il, un sourire aux lèvres.

Après cette discussion révélatrice sur mon passé, nous nous endormons directement; inconfortablement enroulés dans nos duvets.

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