Chapitre 8: Alicia.
Je n'arrive pas à dormir, je suis trop stressée par le départ. Je sors de la tente, la lumière de la lune éclaire ma montre; il est minuit et demi. Nous partirons à deux heures, Rebecca et moi. Je reste dehors, je sais que je ne trouverais pas le sommeil. Toute la journée, j'ai essayé de montrer à Justin que je l'aime, de me faire pardonner. Je sais qu'il va énormément m'en vouloir, mais je n'ai pas le choix. Je lui ai écris une lettre, je l'ai déposé devant sa tente.
Le temps passe vite, Rebecca sort de sa tente discrètement et se dirige vers moi. Je vois sa silhouette fine se pencher pour prendre un sac de nourriture. Le temps qu'elle réunisse nos affaires, je retourne dans la tente. Léana dort profondément, son lapin serré contre elle. Je caresse sa joue et lui chuchote que je reviendrais, que tout se passera bien. J'entends Jade remuer.
-Alors comme ça tu pars? Je pensais que je t'avais résonné, me dit-elle d'une voix pleine de colère et d'amertume.
-Je suis tellement désolée, j'aurais aimé pouvoir rester. Je te promets que tout se passera bien, je reviendrais indemne.
-D'accord, de toute façon je ne peux pas t'en empêcher. Tu m'enverra une lettre lorsque tu reviendras, pour que je t'informe de notre nouvel emplacement.
-Oui, mais surtout ne t'inquiète pas pour moi.
Je me jette dans ses bras, je n'ai pas envie de la quitter. Je lui dit une fois de plus de bien s'occuper de Léana et Lumière; puis ressort de la tente.
-Tu es prête? chuchote Rebecca.
Je hoche la tête et nous allons chercher nos chevaux. Plume hennit joyeusement lorsqu'elle me voit, le lui caresse l'encolure pour l'inciter à se faire discrète. Je la selle en vitesse, elle se laisse faire facilement. Rebecca est déjà sur sa monture, Luna. Je passe mon pied dans l'étrier et me hisse sur le dos de ma jument. Je presse légèrement les talons et elle commence à marcher. J'ai sur moi un sac qui contient un duvet, des couvertures, ainsi que des affaires de toilettes. Rebecca m'ordonne de trotter un peu, elle veut s'éloigner le plus vite possible du camp.
Une petite heure plus tard, nous nous arrêtons. J'enlève la selle et le mord de Plume, puis lui met un licol pour l'attacher. Je place ensuite mon duvet à terre et m'installe dedans. Le sol dur et froid n'aide en rien à m'endormir. De plus, l'air est glacial. Je me frictionne les bras pour me réchauffer un peu. Je finis par trouver le sommeil grâce au hululement apaisant des chouettes.
Maintenant, je me lève en même temps que le soleil; il n'y a pas de rideaux dans la nature. Mes yeux papillonnent quelques instants pour m'habituer à la lumière du jour. Rebecca est déjà debout.
-Viens m'aider, m'ordonne-t-elle.
Je ne sais pas si je vais m'habituer à son caractère pendant le voyage; cela m'étonnerait. J'infuse des feuilles de menthe dans de l'eau chaude, puis verse le contenu dans nos tasses. Elle me remercie brièvement d'un hochement de tête. Nous partageons ensuite une petite brioche en deux, puis une poignée de myrtilles; il va falloir manger moins pour faire des réserves.
-Tu penses que nous allons atteindre l'Italie dans combien de temps? la questionnai-je.
-Ne pense pas que le voyage ne va durer qu'une semaine, se moque-t-elle.
-Je sais, mais tu n'as pas une petite idée? répondis-je énervée; je ne suis plus une enfant.
-Partir des Vosges et arriver en Italie avec des chevaux, ça va durer un bon bout de temps. Deux mois au minimum je pense. Et je n'aime pas parler comme tu l'a sûrement remarqué, je préfère la solitude, m'informe-t-elle en me lançant un regard dur.
Au moins, sa façon de me le dire est très claire. Je me met en rogne et boit mon infusion d'un coup, me brûlant la gorge au passage. Cette fille n'est vraiment pas aimable, même si c'est grâce à elle que je vais revoir ma famille, je ne peux pas m'empêcher de la détester. Nous ramassons ensuite nos affaires, puis repartons. Justin me manque déjà, je n'arrête pas de penser à lui, et au mal que je lui fais. Nous sommes vers mi décembre, et je ne reviendrais peut être qu'au début de l'été. Je me demande quelle sera sa réaction lorsqu'il découvrira la lettre que je lui ai laissé. Je déglutis difficilement en pensant à ce que je lui ai dis hier, je lui ai menti. Comment ai-je pu l'abandonner de la sorte? Je sais qu'il va en souffrir et je le fais quand même. J'ai envie de rebrousser chemin pour l'embrasser une dernière fois, m'excuser d'avoir été aussi égoïste.
-Arrête de penser à ceux que tu aimais au camp, ça ne changera rien. Je sais ce que tu as fait à Justin, tu n'a même pas eu le courage de lui dire en face que tu partais, crache-t-elle d'une voix dégoutée.
Elle a un don pour me blesser, je sais qu'elle a raison. Je suis une lâche. Les larmes me montent aux yeux directement, je les essuie le plus vite possible; il est hors de question que je me montre faible devant elle. Ses mots sont plus tranchants que des couteaux, plus aiguisés que les lames. Ils me touchent en plein coeur. Je baisse les yeux sur mes mains, je n'ose pas affronter son regard dur et accusateur.
Cela fait trois jours que nous sommes partis. Nous n'avons pas mangés depuis le lendemain matin de notre départ. Mon estomac cri famine, la faim me déchire le ventre. Nous avons toujours à boire, pour l'instant, nous longeons la rivière. Je pense que je pourrais manger n'importe quoi. J'ai voulu prendre des fruits, mais Rebecca m'a informé juste à temps qu'ils étaient empoisonnés. Je suis d'une humeur extrêmement maussade, tout m'énerve. Ma jument va bien, elle passe son temps à brouter; elle mange plus que nous. Je l'attache à un arbre le temps que nous nous reposons un peu. Je m'éloigne un peu, je n'aime pas être avec Rebecca.
-Tu veux manger un peu? me hèle-t-elle, de sa bonne humeur habituelle.
Je repars dans sa direction avec précipitation; j'ai l'impression d'être un animal affamé. Son visage se fend en un sourire moqueur lorsqu'elle me voit rappliquer. Elle me tend un bout de pain, une pomme et un morceau de fruit séchée. Je dévore les mets en quelques secondes, je n'ai pas le temps de savourer tellement je suis affamée. Le pain est rassi et trop cuit, la pomme est pourrie à des endroits; pourtant, c'est un des meilleurs repas de ma petite existence. Rebecca mange plus lentement, j'ai envie de lui arracher ce qui lui reste dans les mains. Elle me nargue d'un sourire, je regarde son pain avec envie.
Je me rends compte que j'ai mangé beaucoup trop vite, je ne me sens pas bien. Je refuse de rendre mon déjeuner; je sais que je vais devoir attendre beaucoup trop longtemps avant d'avoir un nouveau repas. Nous sommes repartis depuis plusieurs heures déjà. Rebecca ne parle pas, comme toujours. Son regard est fixé droit devant elle, on dirait qu'elle réfléchie. Ses sourcils sont froncés, elle se mort la lèvre inférieur. Je me demande à quoi elle pense, elle est si secrète. Je ne sais presque rien de sa vie, elle ne me confie rien. La première fois que je l'ai vu, je pensais que l'on finirait par bien s'entendre, devenir amie. Je sais maintenant que c'est impossible, nous sommes trop différente.
Lorsque la nuit tombe, nous nous arrêtons pour dormir. Je me blottit dans mon duvet puis ferme les yeux. Je suis épuisée, même le vent glacial n'arrive pas à m'empêcher de trouver le sommeil.
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